Chapitre 24 :: Chapitre 24 Publiée: 24-06-21 - Mise à jour: 24-06-21 Commentaires: Bonjour, voici la suite de l'histoire. Bonne lecture et merci pour vos commentaires^^
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Chapitre 24
Je m’arrête devant l’immeuble de ma nouvelle partenaire un instant et observe l’enseigne pensivement. Est-ce encore nécessaire de faire tout cela ? Est-ce que je ne pourrais pas simplement rester à tes côtés en tout temps et m’occuper de toi, uniquement de toi pour une fois ? Je mets en stand-by City Hunter, les missions pour Reika et je ne gère que l’équilibre de ta ville. Ce serait possible après tout.
Je repense à ce que m’a dit le Professeur il y a quelques jours sur les risques de nous détruire en te prenant en charge. Ca ne me fait pas vraiment peur mais, toi, que me diras-tu le jour où tu te réveilleras et apprendras que je suis resté à tes côtés tout le temps ? Tu ne seras pas forcément heureuse. Tu t’en voudras certainement d’avoir monopolisé mon attention, d’avoir privé les personnes en détresse de mon aide, de m’avoir enfermé dans une de ces chambres de clinique dont j’ai horreur. J’aurais beau te dire que ce n’est pas le cas, tu ne voudras pas l’entendre.
- Tu tiendrais combien de temps sans action ?
Je souris en me souvenant de cette question, posée innocemment une après-midi d’oisiveté. Cela faisait deux semaines que nous n’avions pas de travail, pas grand-chose pour nous mais ça t’inquiétait déjà. Malgré tout, tu as accepté de rester là, allongée sur le divan, la tête sur mes cuisses, simplement parce que je te l’ai demandé. Tu m’as accordé ce petit plaisir.
- Je sais que c’est trois minutes de sérieux, quoique c’est en amélioration, maximum huit heures sans relation sexuelle, quoiqu’il faudra que je revois cette donnée parce qu’elle me semble surestimée…, me dis-tu, le regard malicieux.
- Je pense aussi… On n’a pas idée d’être aussi sexy.
- Flatteur…, me tances-tu, écartant mes doigts des boutons de ton chemisier.
- Alors combien de temps sans action ?
- Ca dépend ? Je peux compenser par une partie de jambes en l’air… ou plutôt par une journée de sexe débridé ?
- Non., m’opposes-tu, rosissant sous mon regard coquin.
- Avec une petite course aux dessous, une semaine peut-être. Sans… beaucoup moins… sauf si ma compagne a pitié de moi et m’accorde une journée de…
- Mais tu as fini ! Il n’y a pas que le sexe dans la vie !, objectes-tu, riant malgré tout.
Effectivement, il n’y a pas que le sexe dans la vie. Je l’ai appris avec toi. Je n’ai pas répondu à ta question mais je ne tiendrais effectivement pas très longtemps malgré la paresse que j’ai souvent affichée. Je prends une profonde inspiration et rentre dans l’immeuble. Je ne peux pas arrêter, pour toi comme pour moi. Ca me fera certainement du bien aussi de pouvoir couper de temps à autre et ça me donnera des histoires à te raconter.
- Tu as un peu de temps ?, dis-je en frappant à la porte du bureau de Reika.
- Bien sûr. D’habitude, c’est plutôt moi qui viens te trouver., me taquine-t-elle.
- Les choses changent. J’étais en ville. Je suis venu voir si tu avais été à la gare ou si tu avais du travail pour moi.
- Il n’y avait rien à la gare mais tu comptes vraiment bosser alors que Kaori est à la clinique et que tu peux être avec elle comme tu le veux ?, me demande-t-elle, étonnée.
- Oui. Avec Saeko, on a décidé de la faire passer pour morte le temps qu’elle soit de retour parmi nous et capable de se défendre.
- C’est un peu… radical, non ?, pipe-t-elle.
- Je pense que c’est le mieux pour elle. Et puis j’ai tellement l’habitude de traîner à la clinique que ça ne devrait pas attirer trop l’attention.
Elle m’observe et acquiesce, comprenant le principe. Elle se lève et sort de son armoire deux dossiers qu’elle me tend.
- Voilà, il n’y avait pas de message au tableau mais j’ai ces deux dossiers qui mériteraient ton attention., m’informe-t-elle.
- Ca marche. Je regarde ça. Je te tiendrai au courant de mon avancée., lui dis-je en me levant.
- J’apprécie beaucoup notre collaboration, Ryo. J’aimerais beaucoup qu’elle dure., me dit-elle, posant un regard expectatif sur moi.
Je préfère éviter de trop projeter sur ses mots, ne pas y voir plus que nécessaire.
- J’apprécie de travailler avec toi, Reika, mais je ne veux pas te vexer en te disant que ce n’est pas mon cas parce que ça voudrait dire que Kaori serait toujours dans le coma ou en rééducation., lui réponds-je d’une voix posée.
- Je… pardon… J’ai été maladroite. Bien sûr, je ne veux pas qu’elle reste comme ça., m’oppose-t-elle, gênée.
Je pense que les choses sont recadrées entre nous. Nous avons pris quelques habitudes ensemble mais ça n’ira pas beaucoup plus loin. Tu es et resteras ma partenaire attitrée.
- Je vais te laisser. Ton rendez-vous arrive., lui dis-je, entendant le bruit de l’ascenseur malgré deux portes fermées.
- Comment le sais-tu ?, s’étonne-t-elle.
- J’ai l’ouïe fine.
Je lui fais un signe nonchalant de la main avant de sortir, ouvrant la porte à la nouvelle venue, une jeune femme ravissante qui me sourit tout en me dévisageant. Je lui fais un signe de tête et poursuis mon chemin, rentrant chez moi. Alors que je m’apprête à monter les escaliers, je sens une présence juste à l’extérieur. J’hésite, me disant que l’importun s’en ira ou insistera si nécessaire, mais finalement je décide d’aller voir, ressentant une certaine familiarité.
- Mademoiselle Yoshi ? Quelle surprise…
Elle me regarde un instant, surprise de me trouver là, avant de baisser les yeux en rougissant.
- Bonjour, Monsieur Saeba. J’espère ne pas vous déranger., s’excuse-t-elle.
- Je… Non… Il y a un problème avec l’hôpital ?
Je me rappelle soudain que, pour elle, tu es morte. Je ne sais pas vraiment comment me comporter comme un veuf. Dois-je me mettre à pleurer ? Non, ce n’est pas mon truc. Je vais juste essayer de me montrer sombre… Ca, ça devrait aller. Je l’invite à rentrer dans le hall.
- Non, du tout. Je… Je viens de finir mon service et j’ai appris pour Kaori., murmure-t-elle, ses yeux s’emplissant de larmes.
- Je suis désolée. Ce n’est pas juste ce qui lui est arrivé.
- Non, c’est vrai.
J’évite de faire des phrases trop élaborées et je prends doucement un air impassible. Je la vois me regarder, hésiter et soupirer. Je ne sais pas ce qui lui trotte dans la tête mais je n’ai pas vraiment envie de perdre mon temps non plus. D’un autre côté, elle a été si prévenante avec moi que je me sens un peu gêné à l’idée de la renvoyer.
- Je vous remercie d’être passée, Mademoiselle Yoshi, mais, vous comprenez, j’ai à faire., finis-je par dire alors qu’elle n’a toujours pas pipé mot.
- Je comprends mais je… je voulais vous dire autre chose en fait., m’avoue-t-elle, rougissant un peu plus.
- Je vous écoute.
- Je voulais m’excuser pour l’autre soir lorsque je vous ai embrassé. Je ne sais pas ce qui m’a pris. C’était complètement en dehors des clous., m’explique-t-elle, contrite.
- J’ai un faible pour vous, je l’avoue. Vous m’avez troublée depuis le premier jour. Néanmoins, je n’avais pas le droit de me comporter ainsi, d’autant que vous êtes… étiez mariés. J’espère que vous accepterez de m’excuser et aussi de ne pas en parler à l’hôpital. Ca ne se reproduira plus., me promet-elle, la voix tremblante.
Je la regarde se pencher légèrement en avant et attendre mon jugement anxieusement. J’ose un geste vers elle en espérant qu’elle ne l’interprétera pas de travers et pose la main sur son épaule, la poussant à se redresser.
- Vous êtes humaine, Mademoiselle Yoshi. Moi aussi et, des erreurs, j’en ai faites quelques-unes dans ma vie, parfois réfléchies, parfois irréfléchies.
Ca, c’est certainement bien en dessous de la vérité mais je m’en fiche, le propos n’est pas là, me dis-je.
- J’ai eu la chance de rencontrer quelqu’un qui m’a appris ce qu’était le pardon, celui qu’on recevait et celui qu’on devait s’accorder également. J’accepte vos excuses et je vous pardonne ce moment d’égarement mais pardonnez-vous également. Il n’y a pas de drame… Et je préfère nettement avoir reçu un baiser qu’un coup de poing de votre part., lui fais-je savoir, malicieux.
Ca a le don de la détendre et de lui arracher un sourire soulagé avant de me regarder avec de grands yeux tristes.
- C’est bien que vous arriviez à plaisanter malgré son départ., me dit-elle.
- J’avais peur que vous sombriez vu la profondeur de vos sentiments.
- Ce n’est pas toujours facile mais Kaori n’aurait pas aimé me voir me morfondre.
Je me force à utiliser le passé alors que tu es bien présente. Ca me fait bizarre mais je n’ai pas le choix.
- Je ne l’ai pas connue, je le regrette. Je vais vous laisser maintenant, Monsieur Saeba., m’annonce-t-elle.
- Au revoir, Mademoiselle Yoshi.
- J’ai bien aimé lorsque vous m’avez appelé Tami… mais ce n’était pas notre moment. J’espère que vous surmonterez votre deuil, Monsieur Saeba., me souhaite-t-elle.
- Au revoir et merci à vous.
Elle se dirige vers la porte et je lui ouvre la porte, l’accompagnant jusqu’au seuil. Elle se tourne vers moi avant de passer ses bras autour de moi.
- Mademoiselle Yoshi…
- Juste une dernière fois. Je ne reviendrai pas vous importuner., me promet-elle.
Je pense qu’elle le fera alors je la serre brièvement pour la remercier une nouvelle fois de ce qu’elle a fait pendant toutes ces semaines et la relâche dès qu’elle s’écarte. Le tout n’a duré qu’un bref instant mais ça a été suffisant pour que je sente une aura monter et mon regard se porte de l’autre côté de la rue et croise celui de Mick. Je vois vaguement l’infirmière partir alors que mon ami ne se fait pas attendre et me rejoint.
- C’était quoi ça ?, me demande-t-il sans préambule.
Son regard a viré au bleu acier, froid et dur. J’imagine le genre de pensées qu’il peut avoir à me voir aussi familier avec une femme qu’il ne connaît pas.
- Tu as couché avec la jolie infirmière ?, poursuit-il.
Bon d’accord, il se souvient de qui elle est. Je lui fais signe de me suivre à l’intérieur, en lui lançant un « A ton avis ? » complice au cas où des oreilles traîneraient. Je l’emmène jusqu’à l’appartement et me tourne vers lui.
- Avant que tu me balances un poing dans la tronche, non, je n’ai pas couché avec elle. Elle n’aurait peut-être pas dit non mais moi, je suis avec Kaori et je lui reste fidèle… même si tu risques d’entendre des bruits contraires.
- Pourtant, vous aviez l’air proches…, me fait-il remarquer, se détendant.
- Elle s’est bien occupée de nous à l’hôpital mais ma reconnaissance ne va pas jusque là. En revanche, elle m’a embrassé et c’est pour cela qu’elle est venue.
- Elle voulait remettre ça, te persuader qu’elle en valait la peine ?, me questionne-t-il, soupçonneux.
- Depuis quand es-tu devenu si cynique ?
- Parce que tu n’as aucun doute sur ses intentions ?, me retourne-t-il.
- J’ai envie de lui faire confiance. De toute façon, si elle réapparaît, je l’éconduirai gentiment… comme je l’ai déjà fait.
Je suis sûr de moi, je ne céderai pas à l’appel des sirènes. Mick me jauge un moment et se détend.
- Que voulait-elle alors ?, m’interroge-t-il, curieux.
- S’excuser et que je ne la dénonce pas à l’hôpital. Elle a cédé à une pulsion. Je ne peux pas lui en vouloir avec mon charisme magnétique.
Il lève un sourcil à ma plaisanterie et secoue la tête, amusé.
- Je te laisse y croire. Ce que je constate, c’est que tu es un pépère pantouflard depuis que tu es en couple., me lance-t-il, cherchant à aiguillonner ma fierté.
- Vraiment ? Et ça, c’est quoi tu crois ?, lui dis-je, sortant quelques sous-vêtements de ma poche.
- Tu as de la chance que ce soit d’une taille différente de Kaori., me taquine-t-il.
- Parce que tu connais la taille de ma femme toi maintenant ?
Même si c’est mon ami, je sens la jalousie poindre et ce ne sera pas la première fois. Lui me regarde goguenard.
- C’est que j’ai eu l’occasion de prendre mes mesures… Tu crois vraiment que j’ai les yeux et les mains dans mes poches avant que tu nous annonces votre relation ?, me demande-t-il.
- Non, j’ai vu, Mick. J’ai très bien vu mais, à partir de maintenant, pas touche et ça vaut à double sens., lui proposé-je.
- Ok, man. Ca me va., me concède-t-il, me tendant la main.
- Tu retournes à la clinique ?, me questionne-t-il.
- Dans une heure ou deux. J’ai des choses à faire ici et, si je me souviens bien, le Professeur est occupé avec Kaori. Ca ne sert à rien que je le gêne., réponds-je.
D’autant que mon vieil ami m’a bien fait comprendre qu’il ne voulait pas de moi pendant ce moment. Il veut se concentrer sur toi et ne pas avoir à répondre à mes questions entre temps.
- Oui, je suis parti quand il est arrivé. Kaori a bonne mine. C’est étrange, à chaque fois que je la vois, je me dis qu’elle dort et qu’elle va ouvrir les yeux, qu’il suffit d’attendre quelques minutes. Je trépigne d’impatience de la voir revenir parmi nous. Je ne sais pas comment tu tiens., m’avoue-t-il, passant une main nerveuse dans ses cheveux.
- Ca fait déjà deux mois. J’avoue que c’est dur mais nos souvenirs me portent. C’est comme si elle me parlait et me soutenait. Ca doit te sembler idiot.
Je détourne le regard, un peu gêné et surpris de la confession que je viens de lui faire. C’est encore un peu plus que ce que j’ai dit à Saeko plus tôt dans la journée.
- Non, pas vraiment. Elle t’a marqué, je l’avais déjà vu quand j’étais arrivé au Japon. Je reconnaissais l’enveloppe physique mais pas l’homme qui l’habitait. Tu as changé, Ryo, en bien., me dit-il.
- Elle m’a apprivoisé progressivement. Elle a enclenché quelque chose en moi qu’aucun de nous ne peut vraiment contrôler.
Il ne répond pas, méditant mes paroles. Je sais ce que j’avance parce que je le sens en moi. J’ai déjà découvert de nouvelles facettes de moi depuis notre accident, des facettes que je suis prêt à accepter aujourd’hui, chose que je n’aurais peut-être pas pu faire auparavant, et j’ai comme l’impression que je n’ai pas fini. Si tu survis à tout cela, si notre relation survit à cette épreuve, nous serons encore plus forts qu’avant.
- Je comprends. Elle n’avait qu’ouvert la porte pour moi mais c’était suffisant pour que Kazue puisse s’y engouffrer. Garde-la précieusement, Ryo, et, si ça devient trop dur, viens me voir avant de faire une connerie. Ca serait dommage de gâcher ce que vous avez., me confie-t-il.
- Ne t’inquiète pas, ça ira mais je le garde en tête quand même. Merci Mick.
Je suis touché par ses mots et son soutien et ça doit se voir sur mon visage parce qu’il me regarde bizarrement.
- T’avise pas de me rouler une pelle par reconnaissance. Je n’apprécierais pas vraiment., me lance-t-il, taquin.
- Jamais de la vie ! J’irai remercier Kazue à la place.
- Tu oublies ce que tu as dit…, me prévient-il.
- Bon, allez, je vais te laisser vaquer à tes occupations. Je ne dois pas de nouveau changer ton téléphone ?, me demande-t-il, malicieux.
- Non, il va très bien, merci. Bonne journée, Mick.
Il me salue et s’en va. Je vais mettre la machine à laver en route avant de me préparer un en-cas. Je bricole pendant deux heures à l’appartement, rangeant et nettoyant pour garder l’appartement comme tu l’aimes avant d’étendre le linge et de m’en aller. Il est temps d’affronter le diagnostic du Professeur.
Je fais la route dans le silence. Je n’ai pas envie d’écouter la radio et aucun souvenir ne remonte à la surface pour venir me tenir compagnie. Pourquoi te tais-tu soudain, Kaori ? Est-ce pour m’habituer ou pour me surprendre ? Je ne peux qu’attendre.
Je traverse Tokyo et m’engage une demi-heure plus tard dans l’enceinte de la clinique. Tout est calme et silencieux ici aussi et, sortant de la voiture, mes pas me portent vers l’étang. Même si j’ai confiance en toi, je crains un moment le diagnostic et ma réaction : c’est en moi que je n’ai pas confiance. Je m’arrête un moment près de l’étang et regarde la surface placide de l’eau. Je vois les carpes koï nager sans relâche, nullement troublées par ma présence. Je les observe évoluer et mon esprit s’apaise. Rasséréné, je me dirige vers le bâtiment et rejoins ta chambre.
Tu es seule, toujours endormie. Ton visage a repris un peu de couleur, ce qui n’est pas négligeable. J’approche et pose mes lèvres sur les tiennes, appréciant ce petit filet d’air chaud qui vient me taquiner.
- Je suis de retour, Kaori. Alors le vieux s’est bien comporté avec toi ?
Je continue et te narre ma journée, m’attarde longuement sur mon exploit de la journée à savoir d’avoir réussi à mettre une lessive en route en moins de deux minutes.
- C’est vrai. T’imagines, entre les produits à choisir, la température, le programme, le tri des vêtements… C’est un casse-tête mais, aujourd’hui, ça a roulé. Bon d’accord, j’ai un peu tout jeté dans le bac et lavé à trente degrés pour éviter les décolorations mais, quand même, c’est un exploit à souligner, non ?
Je t’observe, guettant le moindre signe. Un exploit… avant toi, je faisais mes lessives tout seul. C’est la flemmardise qui m’a fait arrêter. Tu étais là et gérais toutes ces choses alors je t’ai laissée faire, mais, après sept ans à ne rien faire sur ce plan-là, ça a été le saut du grand plongeoir.
- Je t’entends déjà me dire que ça ferait bien de continuer. Il ne tient qu’à toi de te réveiller pour le constater, Sugar.
J’entends soudain toquer à la porte et invite l’arrivant à entrer. C’est le Professeur accompagné de Kazue. Inconsciemment, je prends ta main. C’est le moment et j’ai besoin de toi et d’être avec toi.
- Je me disais bien que je t’avais vu arriver., commence-t-il, se plaçant face à moi de l’autre côté du lit.
- Je suppose que tu préfères que j’aille droit au but plutôt que de te tenir une conversation mondaine ?, lâche-t-il, me scrutant du regard.
- Oui.
Ma voix n’est qu’un souffle anxieux. Je suis suspendu à ses lèvres, attendant son verdict avec impatience et appréhension.
- J’ai fait une batterie de tests à Kaori ce matin. Après deux jours de sevrage des produits qui ont été utilisés pour la mettre en coma artificiel, on a pu avoir un meilleur état des lieux. Kaori est plongée dans un coma profond Ryo, un stade trois. Elle ne réagit à aucun stimuli. La bonne nouvelle, c’est que certaines de ses fonctions se sont rétablies. Elle respire par elle-même, ce qui est déjà un bon signe en soi., me dit-il, rassurant.
- Combien de temps ça peut durer ?
J’ai besoin de poser la question même si je connais déjà la réponse. J’ai besoin de l’entendre dire une fois pour accepter que ceci est bien réel.
- On ne sait pas. Quelques heures, jours, semaines, mois, ans… On n’en a aucune idée., intervient Kazue.
- Il faut que tu comprennes que ça peut évoluer dans les deux sens, Ryo. On la surveille étroitement. On va tout faire pour maintenir sa condition physique et la stimuler pour son réveil mais on ne sait pas ce que le sort peut lui réserver., ajoute le Professeur.
- Il faut juste continuer à s’accrocher et attendre alors, c’est cela ?, réponds-je à mi-voix.
- Oui. Tu as bien compris., me dit mon ami.
- Très bien. Alors on patientera pour la voir se réveiller.
Je sens la tension le gagner et je le vois contourner le lit pour venir près de moi, posant une main sur mon épaule.
- Ryo…, commence-t-il.
Je le sais prêt à me rappeler que ça peut aussi empirer. J’ai bien entendu et, si l’éventualité existe, ce n’est pas ce qui arrivera.
- Je sais. J’ai bien entendu, Professeur, mais je sais qu’elle se réveillera. Elle entendra nos appels et finira par revenir.
Il reste là un moment à mes côtés avant de presser mon épaule.
- Tu as raison. C’est une forte tête. Ils en auront bien marre un jour de l’entendre hurler là où elle est., plaisante-t-il.
Je relève le visage vers lui, un léger sourire aux lèvres, et acquiesce, reconnaissant de se mettre au diapason avant de croiser le regard de Kazue devenu lui aussi serein.
- Tu as entendu, Kaori ? On est prêts. On t’attend., te dis-je, pressant tes doigts.
Quelque part en moi, je suis sûr que tu nous as bien entendus et, si ce n’est pas le cas, tu le sais malgré tout parce que nous sommes une famille et que nous comptons sur toi pour revenir rire avec nous.
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