Chapitre 23 :: Chap. 17 Part. 2 : Ne m'abandonne pas Publiée: 16-06-05 - Mise à jour: 16-06-05 Commentaires: Suite rapide... et réponse à chacun ce week-end: Morphée est à la porte et je m'en voudrais de me faire attendre. Merci en tous cas à tous ceux qui s'interrogent, qui cherchent, qui titillent: ça me permet de remettre l'ouvrage sur le métier et compléter, retravailler, encore et encore. Continuez!
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Ryô avança mains en l’air en mimant la rédition, un sourire contrit aux lèvres, et attendit, immobile, son bon vouloir. Elle le défia pendant de longues secondes avant de se tourner vers la machine à café avec un soupir.
- « Assieds-toi au lieu de jouer les épouvantails au milieu de mon café. »
- « Madame est bien bonne. Excuse-moi pour tout à l’heure… »
- « Non. »
- « Mais… »
- « La formule est « je te prie de bien vouloir m’excuser ».
- « Tu fais dans la sémantique, maintenant ? »
- « Non, je t’éduque. Nuance. Il semble que tu en aies bien besoin, et je ne parle pas de tes compétences grammaticales. Que fais-tu ici, je croyais que le rendez-vous était fixé à 16 heures ? Tu voulais juste faire ton mea culpa ? »
- « A vrai dire, j’ai fixé rendez-vous à un client. »
- « Ah, ce Aki Gunda… »
- « Les nouvelles vont vite à ce que je vois ! C’est vrai que vous étiez ensemble… A propos, tu as surveillé Kaori toute la matinée. Tu n’as pas vu un type louche ou senti une présence anormale ? »
- « Non, pourquoi ? »
- « Quelqu’un a déposé une lettre dans son cabas. Il a donc pu l’approcher de très près, sans que ni toi ni elle ne s’en rende compte. »
- « Ça me paraît inconcevable, même si après tout j’étais focalisée sur Kaori. »
- « Pas si inconcevable que ça. J’ai déjà croisé ce type à plusieurs reprises, et je n’ai rien ressenti. J’ai cru un moment que c’était un véritable génie du combat qui parvenait à masquer son animosité, mais même ça, je ne le ressens pas. C’est comme s’il ne ressentait rien. Il a une âme de glace. Bref, ce n’est guère étonnant que tu n’aies rien remarqué. Correction : que vous n’ayiez rien remarqué, puisque je suppose que tu lui as aussi enseigné ça. Ça dure depuis combien de temps, au fait ? »
Miki savait pertinemment de quoi il voulait parler. Il fallait bien qu’ils abordent le sujet, un jour ou l’autre !
- « Deux mois. Ecoute, ne nous en veux pas. Je sais bien que tu préfèrerais la tenir loin de tout ça, mais c’est utopique. Et puis ce n’est pas du tout ce qu’elle désire. Elle est adulte, elle a le droit de choisir sa vie. »
- « Ou sa mort. Tu sais bien qu’elle n’a pas été élevée avec ça. Pas comme nous. »
- « Toi et moi, on est tombés dedans tous jeunes, d’accord. Mais ce n’est pas le cas de tout le monde ! Regarde Falcon ! »
Ryô la regarda avec des yeux ronds : il ne s’était jamais demandé comment Falcon avait commencé sa « carrière » : pour lui il était acquis qu’il n’avait fait que ça toute sa vie. Avec une telle carrure, il ne pouvait en être autrement !
- « Que crois-tu, Ryô ? Que notre monde n’est fait que de créations de la guerre ? Sans rentrer dans les détails, Falcon a eu une enfance tout à fait normale, et ce n’est qu’à 19 ans qu’il n’a connu le monde de la guerre. Kaori s’est retrouvée du jour au lendemain à affronter Union Teope à vingt ans, et pourtant elle est toujours en vie. C’est plus que beaucoup de gens du milieu. C’est grâce à toi, c’est vrai, mais si ta chance tournait ? Je te promets de faire attention à elle mais il faut te faire à l’idée qu’elle est des nôtres. Je ne peux pas lui refuser mon aide. »
Il se plongea dans la contemplation du liquide brun qui refroidissait dans sa tasse. Il se souvint de ses compagnons d’armes : Randall le footballeur ; Miguel le cireur de chaussures. Oui, ils avaient eu une vie normale avant… Et c’est sans doute ce qui les avait tués : ils espéraient pouvoir s’en sortir, un jour.
Il partagea ses pensées avec Miki, qui tenta encore une fois de lui faire comprendre qu’il n’avait pas le droit de décider pour Kaori. Ils furent interrompus par l’arrivée de Aki Gunda, entouré de deux gardes du corps.
Ryô les observa un moment du coin de l’œil : ils ne faisaient pas partie de l’équipée de la veille, mais leur costume laissait peu de place au doute. Il se leva et fit face à son « nouveau client ». De grande taille, mince, des cheveux gominés plaqués en arrière, des mains manucurées aux ongles vernis, il avait un regard fuyant qui déplut d’emblée au nettoyeur. Miki avait manifestement la même opinion que lui : ce type avait tout d’une fouine gluante. En le détaillant plus précisément Ryô aperçut une cicatrice ancienne d’aspect grumeleux qui couvrait tout le côté gauche du cou et disparaissait sous le col de la chemise, correspondant sans aucun doute à une très grave brûlure. La même marque se retrouvait sur la main et le poignet gauche. Après s’être présenté, il décida d’attaquer d’emblée.
- « Quels jolis costumes. Vous jouez à quoi ? On dirait des caricatures hollywoodiennes d'agents du F.B.I.! Cher Monsieur, si vous souhaitez qu’on discute, ce sera sans les toutous. Ici on est en terrain neutre, pas besoin de portes-flingue. A prendre ou à laisser. »
- « Attendez-moi dehors. » fit claquer Aki Gunda. « Monsieur Saeba, j’ai appris que vous étiez sur les traces de mon père, le directeur de la firme internationale Gunda Corporation et… »
- « Je peux savoir pourquoi vos hommes nous ont attaqués, hier ? »
- « Pas mes hommes, Monsieur Saeba ! Les siens ! C’est lui qui en a décidé ainsi, je n’ai appris l’incident que par hasard hier soir ! Mon père est devenu fou depuis quelque temps, il devient violent, il est temps que quelqu’un l’arrête. »
- « Et vous avez tout de suite pensé à nous… comment avez-vous su qui j’étais et comment nous contacter ? »
- « Votre réputation vous précède, voyons. Il y a peu de tueurs à gages qui circulent en Austin mini rouge à Tokyo, qui plus est. »
Ryô résista avec difficulté à l’envie de lui balancer son poing par la figure. Non seulement il ne supportait pas ses façons mielleuses, mais en plus il le traitait de tueur à gages…
- « Que voulez-vous de moi ? Et qu’avez vous à offrir ? »
- « Je vois qu’on rentre dans le vif du sujet… Voyez-vous, la corruption est en train de gangrener notre société. Je souhaiterais changer tout ça et recommencer sur de meilleures bases. Je sais que les services fiscaux ont déjà des soupçons. Si cela continue, Gunda Corporation ne sera bientôt plus qu’un souvenir, avec son lot de licenciements et de drames humains. Je veux apporter du sang neuf. Le marché que je vous propose est le suivant : je vous offre tous les renseignements sur mon père et ses malversations, et vous vous occupez de lui. »
- « Vous voulez que je le tue ? »
- « Je n’ai rien dit de tel ! Voyez-vous, je détiens pas mal de preuves, mais je ne peux pas aller tout simplement au commissariat avec mes dossiers sous le bras. Quelle image donnerais-je si je livrais mon père aux autorités ? Sans compter les hommes de main de mon père, qui pourraient se retourner contre moi. Alors que si c’est vous qui agissez, je ne serai pas inquiété. Ainsi nous aurons tous les deux ce que nous cherchons. »
Devant le silence de son interlocuteur, Aki Gunda crut qu’il avait gagné et ne put réprimer un sourire satisfait. Il l’aurait ravalé rapidement s’il avait su que Ryô était en train de s’imaginer lui refaire un visage plus en conformité avec l’intérieur : repoussant.
Néanmoins, il lui fallait admettre que ce marché avait ses avantages : ça lui évitait d’avoir à courir les informateurs et leur faisait gagner pas mal de temps.
- « C’est d’accord. Moyennant un paiement complémentaire de vingt millions de yens. »
- « Vous êtes dur en affaires ! » parvint à répondre Gunda après avoir manqué s’étouffer.
- « Un tueur à gages ne vit pas que de l’air du temps. Vous me demandez un service qui, je crois, vaut largement cette somme. »
- « Marché conclu. » fit-il en tendant la main.
Ils scellèrent cet accord, et après avoir convenu qu’un homme de confiance déposerait les documents et la moitié de l’argent l’après-midi même, avant 16 heures, au Cat’s Eye, l’homme d’affaires et ses deux ombres montèrent dans une voiture étrangère dernier cri.
A peine eurent-il tourné le coin de rue que Ryô, visiblement paniqué, bondit par-dessus le bar. Miki, surprise, s’accroupit par réflexe.
- « Qu’est ce qui se passe ? »
- « Pousse-toi ! Vite ! Où est l’eau de Javel ? »
- « Placard de droite ! Mais que… »
- « Berk berk berk. J’ai eu l’impression de serrer la main d’une méduse. ».
La jeune femme se releva et essaya de se maîtriser, trahie cependant par le cliquetis de ses ongles sur le comptoir. A côté d’elle, Ryô se lavait les mains à grande eau en frottant jusqu’au coude.
- « Tu étais obligé de faire cette comédie ? »
- « Quelle comédie ? Tu crois que ça a été simple de rester calme devant cette chose répugnante ? Brrrrr c’était comme glisser le bras dans un baril de Jello ! Quelle enflure ce type... Il est persuadé de m'avoir acheté. Tu parles! Il va avoir la surprise de sa vie, cette tête d'ampoule, il va finir au frais. »
Il passa à l’essuyage et, redevenu calme, se dirigea vers la sortie. Soudain, frappé par une association d'idées, il réalisa quelque chose et s'arrêta net.
- « Attends un peu… Cet inconnu, l’homme de glace… Tu ne le sens pas, je ne le sens pas… Et cependant Kaori l’a repéré une fois, dans la rue, alors qu’il les suivait elle et Sayuri. Comment a-t-elle fait ? »
- « Elle a réussi à… ? Ecoute, je lui apprends les bases, et elle est plutôt douée, mais rien d’extraordinaire ! Donc ce n’est pas fonction de ses capacités… Je dirais plutôt que ton inconnu a perdu un instant son sang-froid. »
- « Possible… »
Pensif, il ouvrit la porte, puis fit un dernier salut à Miki et lui glissa « s’il te plait… Si jamais elle passe ici pour parler, fais attention à elle. »
La porte se referma dans un tintement et Miki soupira. « Comme si tu avais besoin de le demander ! »
********************
A l’appartement, Sayuri priait pour que Ryô rentre le plus vite possible. Depuis qu’elle s’était remise de son émotion, Kaori ne cessait de la harceler de questions concernant la journée de la veille, sur ce qu’ils avaient découvert, sur l’identité du tireur, ou sur n’importe quel détail dont elle aurait pu se souvenir. La journaliste avait beau avoir l’habitude des interviews et des interrogatoires de tout type, elle avait du mal à s’en débarrasser ou même à changer de sujet. Le seul moment où elle avait pu reprendre son souffle fut lors d’un monologue rageur contre ce partenaire qui ne cessait de la prendre pour une idiote en lui faisant des cachotteries, et contre les mensonges qui ne sont qu’une marque d’irrespect, ce qui avait mis Sayuri particulièrement mal à l’aise.
De guerre lasse, cette dernière avait pris sur elle de raconter l’altercation du garde-meubles, avec forces détails inventés afin de gagner le maximum de temps et de permettre à Ryô de la sauver de ce mauvais pas avant qu’elle ne soit contrainte de parler de l’attaque : elle multipliait les digressions, inventa un gardien revêche qui leur avait refusé l’entrée, mentionna le lavomatic en brodant autour d’une pin-up particulièrement aguicheuse… Mais elle se heurtait à un entêtement quasi-surhumain, et peu à peu elle raconta toute l’histoire, hormis bien sûr ce qui concernait sa petite sœur.
Lorsqu’elle en vint à la découverte de l’animal sacrifié sur le pare-brise, Sayuri ne put retenir ses larmes. Kaori culpabilisa de l’avoir ainsi poussée à bout. Elle la prit dans ses bras et la berça doucement en lui demandant de lui pardonner. La jeune femme se reprit rapidement et sécha ses larmes.
- « Sayuri… ne m’en veux pas mais j’ai encore une question à te poser. Hier soir j’ai surpris une conversation. J’ai cru comprendre que mon père et le tien avaient des choses en commun. Est-ce que tu sais ce que c’est ? »
L’interrogée resta immobile, suffoquée : elle ne pouvait pas se défiler. Elle chercha ses mots… et ses prières trouvèrent soudain écho.
- « Les filles, je suis là et j’ai faim ! »
- « Flûte ! Sayuri s’il te plaît, réponds ! »
- « Je… Je… Ton père a arrêté le mien. » lâcha Sayuri en espérant que cette demi-vérité lui suffise.
Kaori encaissa et se composa du mieux qu’elle le pouvait un visage insouciant pour accueillir Ryô.
- « Le déjeuner est prêt. Viens Sayuri ! »
- « J’arrive. »
Sayuri resta en arrière, juste le temps d’annoncer à Ryô ce qu’elle avait dû avouer à sa sœur. Elle appréhendait sa réaction, mais avec un sourire il balaya ses doutes. Lui en revanche s’inquiétait franchement : il avait la désagréable impression de ne plus rien contrôler et d’être mené en bateau par sa partenaire. Le monde à l’envers…
Resté seul, il décida d’informer Saeko des derniers rebondissements… Et puis avec un peu de chance il allait pouvoir monnayer la chute de Gunda contre quelques coups supplémentaires ! C’est sur cette pensée et la bave aux lèvres qu’il composa le numéro. Il perdit instantanément son masque de lubricité lorsqu’une voix masculine répondit :
- « Bureau de l’inspecteur Saeko Nogami ? »
- « Saeba. A qui ai-je l’honneur ? »
- « Inspecteur Kanichi. Vous désirez ? »
- « L’inspecteur Nogami ? »
- « Comme tant d’autres… Attendez. »
Ryô resta éberlué de la réponse de son interlocuteur et se demanda s’il devait la prendre au premier ou au second degré. Avant qu’il ait pu se décider, la voix ensommeillée de Saeko lui répondit.
- « Oui ? »
- « Saeko, je rêve ? Je te réveille à cette heure ? »
- « J’ai eu une très mauvaise nuit et je me suis endormie pour ainsi dire en sursaut ! Pourquoi m’as-tu tirée des bras de Morphée ? »
- « Qui est ce Kanichi ? »
- « Un collègue. Alors ? Je te préviens, je ne suis pas d’humeur à supplier. »
- « Je voulais juste te prévenir que j’ai reçu la visite de Aki Gunda… Il semblerait que le fils veuille déboulonner le père. Tu as quelque chose sur lui ? »
- « Moi non mais les stups oui ! » répondit une voix soudainement très réveillée et très intéressée. « Raconte ? »
- « En deux mots, il nous donne Gunda Senior et on lui savonne un peu la pente qui mène aux oubliettes, voire mieux au cimetière. Je ne l’ai pas senti particulièrement franc du collier, surtout dans sa grande scène de la vertu outragée. »
- « Et tu as eu raison. On le soupçonne de se servir de l’entreprise paternelle pour faire passer de la drogue, sans avoir rien pu prouver. Il est malin. Méfie-t-en comme de la peste ! »
Du coin de l’œil, Ryô aperçut Sayuri entrer dans la pièce, et décida d’écourter la conversation.
- « Compris. On en reparlera plus tard. Et un conseil en valant un autre : ne te rendors pas tant que ton « collègue » est dans les parages, j’ai l’impression que ce Kanichi a plus que des vues sur toi. »
Un petit rire mi-amusé mi-désabusé lui répondit.
- « Réunion toujours prévue à 16 heures ? »
- « Affirmatif. A plus tard. »
Ryô raccrocha en se promettant de lui tirer les vers du nez. Il sentit la main de Sayuri sur son épaule :
- « Monsieur Saeba… Ryô… C’était ce nom là. »
- « Pardon ? »
- « Kanichi. Makoto Kanichi. C’était le nom de l’inspecteur qui m’a aidée dans mes recherches. »
- « Merde ! »
Il appuya sur la touche « bis ». Saeko décrocha dès la première sonnerie.
- « Ryô, j’ai vraiment besoin de dormir, maintenant ! »
- « Ton copain, il est toujours dans les parages ? Il peut nous entendre ? »
- « Réponses : oui et non. Pourquoi ? »
- « Sayuri vient de se souvenir du nom de son interlocuteur chez toi : Makoto Kanichi. C’est lui ? »
- « Oui… mais ne t’en fais pas. Tu ne fais que confirmer ce que je redoutais. On en reparlera plus tard. »
- « Attends ! »
Un déclic lui répondit. Il raccrocha en rageant contre le caractère excessivement indépendant de l’inspecteur Nogami. « Quand elle a décidé de faire cavalier seul, celle-là ! Pffffffff ».
Il hésita à se rendre directement au commissariat, mais y renonça rapidement : d’une part il risquait sa peau si Saeko prenait mal son intervention, d’autre part il avait déjà pas mal de problèmes à gérer de son côté et le premier de ceux-ci était la cuisine de sa partenaire !
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- « Ryô, tu ne veux pas jouer avec nous ? »
- « Nan ! Laisse moi mourir en paix. » grogna Ryô, allongé sur le canapé, une main sur l’estomac.
- « Tu ne te serais pas resservi trois fois, tu ne serais pas dans cet état ! »
- « Mais je voulais en profiter ! Pour une fois que c’est délicieux ! Sayuri par pitié, reste ! Je voudrais manger comme ça tous les jours ! »
Les yeux fermés, il ne vit pas les deux jeunes femmes, plongées dans une partie de go, rougir intensément : l’une sous l’effet de son compliment, et l’autre de colère. Une massue voleta, légère et bien équilibrée, pour s’abattre au beau milieu du canapé.
- « A toi. » fit Kaori, redevenue calme, en désignant le jeu.
Sayuri obtempéra sans prendre garde à la dispute. Elle appréciait ce temps de repos. Paradoxalement, elle craignait de se retrouver seule avec sa sœur : manifestement, celle-ci était bien décidée à mener son enquête sans en parler à Ryô et profitait de la moindre occasion pour lui poser des questions. Il avait dû comprendre son manège puisque depuis la fin du repas, il ne les quittait plus. C’était lui qui était l’instigateur de la partie, qui se tenait sur la table basse, à deux pas du canapé.
Rapidement, le jeu devint suffisamment passionnant pour qu’elle s’y plonge et s’amuse comme une enfant.
Alors que les filles étaient absorbées par leur lutte, et Ryô par sa sieste, la sonnerie du téléphone les fit sursauter. Kaori se précipita.
- « Makimura, j’écoute ? »
- « Kaori ? »
- « Kazue, c’est toi ? Tu as une toute petite voix ! »
- « Je suis malade. Je suis désolée de te déranger, mais Mick est sorti, et je ne me sens vraiment pas bien. Est-ce que tu veux bien aller chercher une ordonnance pour moi ? »
- « Bien sûr ! J’arrive tout de suite. »
Elle rejoignit le salon et relata l’appel avec une petite grimace d’excuse à l’intention de Sayuri : elle n’avait pas envie de la laisser seule avec Ryô, surtout après ce qu’elles avaient partagé… Mais Sayuri lui assura qu’elle comprenait et qu’elle ne lui en voudrait certainement pas, les amis étant plus important que tout le reste. Touchée, Kaori l’entraîna dans une accolade affectueuse, avant de donner pour ordre à Ryô de prendre soin de leur invitée. Dans un bâillement, il acquiesca et lui fit signe d’y aller en marmonnant « prends ton temps ».
Sans plus attendre, Kaori attrapa son sac et courut vers l’immeuble d’en face, résidence de Mick Angel et Kazue.
A la surprise de Sayuri, Ryô se releva d’un bond, parfaitement éveillé :
- « On y va. C’était convenu avec Kazue. Elle se débrouille pour la garder chez elle pendant deux heures ; ça devra être suffisant. »
Sans bien comprendre, elle le suivit jusqu’en bas. Caché dans l’entrée, il observa jusqu’à ce que Kaori sorte en courant, un papier à la main, en direction de la pharmacie qui était plusieurs rues plus loin, à l’opposé de la route du Cat’s Eye.
Cinq secondes plus tard, la mini démarrait en trombe et Sayuri exigeait des explications que Ryô éluda avec un malicieux « Surprise ! ».
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