Chapitre 1 :: Le jouet Publiée: 01-02-11 - Mise à jour: 01-02-11 Commentaires: Coucou! Voici une nouvelle fic en un loooooong chapitre ( ^^ ) commencée il y a quelques temps et finie grâce aux bonnes idées de ma super béta City que je remercie pour tout son travail! Bonne lecture! Bisous
Chapitre: 1
Installée derrière son comptoir, comme à l'accoutumée, Miki était occupée à essuyer des assiettes. Elle était seule dans le café : Kasumi avait pris une semaine de congé, et Umi était parti à un rendez-vous chez l'ophtalmo. Toujours aucun client en vue, comme d'habitude. Certes, Miki avait ouvert ce café pour avoir une vie normale et non pas pour l'argent, mais c'était désespérant de ne voir personne d'autre que les habitués dans cet endroit. Et quels habitués ! Deux pervers qui ne manquaient pas de la saluer de la manière la plus odieuse qui soit ! Heureusement qu'en tant qu'ancienne mercenaire elle en avait vu d'autre, sinon il y aurait de quoi craquer. Puis elle n'était pas toute seule, son Nounours était là pour la protéger et ses deux amies aussi. Les deux femmes étaient bien courageuses de supporter deux idiots comme eux, elles devaient être vraiment amoureuses et attachées, il fallait bien au moins ça pour endurer cette situation.
Justement, en parlant du loup, le voilà qui arrivait. Miki regarda avec inquiétude la porte qu'il s'apprêtait à franchir, se préparant à riposter. Pourtant, elle sentit que quelque chose n'était pas normal, pas comme d'habitude aujourd'hui. Était-ce la démarche, ou les ondes négatives qu'elle percevait dans son aura qui lui faisaient penser ça, elle n'aurait su le dire, mais Ryo n'était pas au mieux de sa forme, c'était assez évident pour quiconque connaissait le nettoyeur.
Il franchit enfin la porte vitrée et, effectivement, les choses ne se passèrent pas comme prévu : au lieu de sauter comme un malade sur Miki, comme il le faisait toujours, il se traina comme une loque jusqu'au premier tabouret. Passé un moment de surprise, elle décida de se comporter comme une serveuse et lui prépara un café.
« Bonjour Saeba, tu as vraiment une mine affreuse aujourd'hui, dit-elle avec un léger sourire en coin, tu as encore passé une nuit blanche à faire les cabarets j'imagine...
_ Non mais franchement, pour qui tu me prends ? Quand on a vingt ans, ce n'est pas une nuit entière passée à s'amuser qui vous met K.O. …
_ Ah ? Une dispute avec Kaori alors ?
_ Pff... quand quelque chose concernant cette patate m'affectera à ce point, je te préviendrai ! En attendant, essaye de ne pas rouiller, car tu risques d'attendre longtemps...
_ Mais oui, mais oui.. Bon alors, si ce n'est pas Kaori, qu'est-ce qu'il y a ?
_ Il y a que ...Inoue ne m'a pas appelééééééééééé! » dit-il en s'effondrant sur le comptoir, comme si le monde venait de s'écraser sur ses épaules, les larmes coulant sur ses joues comme des torrents déchainés.
Miki assistait à la scène sans mot dire, tandis qu'une libellule passait par là au même moment. C'était qui encore cette Inoue ? Ah oui !! La dernière cliente, une sacrée pimbêche...
« Ça va, j'ai compris, ne me dis pas pourquoi t'es comme ça, de toute façon si tu t'es disputé avec Kaori, je le saurai, elle me dit toujours tout...
_ Ah oui, j'oubliais, toujours fourrées ensemble pour les mauvais coups...
_ Les mauvais coups ?
_ Ouais, tes conseils à deux yens pour qu'elle soit heureuse...
_ …
_ Et cette patate qui t'écoute toujours....
_ De quoi tu parles ?
_ C'est ça, fais l'innocente, je sais que c'est toi qui l'a forcée à faire cette chose bizarre...
_ Là tu commences à m'énerver, de quoi parles-tu à la fin ? Et arrête de dire que c'est moi, je ne sais pas ce que tu reproches à Kaori, mais accuser sans savoir, c'est vraiment laid ! »
Il leva gravement la tête, le regard dur et froid, comme quand il était face à un tueur. Le visage impassible, il se rapprocha dangereusement de celui de la jeune femme pour planter son regard dans le sien. Il n'y avait rien de séducteur dans sa démarche, Ryo voulait impressionner Miki, il voulait lui faire peur, et c'était assez bien réussi. Elle ne comprenait rien au comportement de son ami aujourd'hui, elle n'avait pourtant rien à se reprocher. Quant à Kaori, même si souvent elle essayait de l'aider à se déclarer auprès de son partenaire, cela faisait quelques temps déjà qu'elle n'avait plus abordé le sujet avec elle. Pourtant, si Ryo n'avait pas été un proche, elle aurait juré qu'il était sur le point de lui coller une balle entre les deux yeux. C'était donc ça, de se retrouver devant le terrifiant City Hunter ?
Une voix sourde se fit entendre. Sûr de lui, il déclara :
« Je sais tout, Miki, avoue, cela ne sert à rien de nier... »
Elle en serait tombée à la renverse tellement le visage sévère de Ryo contrastait avec l'énormité de ce qu'il venait de dire. Cependant, elle avait suffisamment d'aplomb pour répondre du tac au tac :
« Eh bien moi je ne sais pas ! Je ne comprends pas de quoi tu parles ! Saeba, lâche-moi, cela ne sert à rien d'insister... »
La tension était à son comble, lequel des deux allait céder le premier ? Les regards et les visages étaient tendus à l'extrême... Contre toute attente, ce fut finalement Ryo qui lâcha prise et se mit à éclater de rire.
«Bon, ok, ok, tu ne sais rien... »
Puis, reprenant sa respiration, il regarda la jeune femme en coin avant d'ajouter d'un air quelque peu triomphant :
« Mais en tout cas, tu ne peux plus dire que Kaori te dise tout! Je sais qu'il y a au moins une chose qu'elle te cache... »
Devant la surprise de son interlocutrice, Ryo jubila. Il savait que, pour le moment, elle n'avait rien à répondre, mais que la curiosité aidant, elle ferait son enquête. Miki détestait ne pas savoir, surtout quand il s'agissait de Kaori. Alors elle allait sûrement l'interroger, découvrirait de quoi il retournait, et il ne lui resterait plus qu'à cuisiner Miki à son tour. C'était vraiment malin de sa part, un peu tordu, mais à la guerre comme à la guerre. Il fallait qu'il sache ce que Kaori faisait avec un tel objet... Enfin, pour être honnête, il n'était pas tombé de la dernière pluie, il savait parfaitement à quoi servait ce genre de truc, mais il ne voulait pas, ne pouvait pas croire que Kaori, sa Kaori, la si innocente et si pure Kaori puisse avoir recours à ce... cette... chose. Cela l'intriguait, depuis qu'il l'avait vu, il n'arrêtait pas d'y penser, cela le perturbait. C'était bête pourtant, après tout, pourquoi pas ? Mais cette idée le révulsait. Il se sentait comme trahi.
La jeune femme, vexée par les révélations de l'homme, fit la moue.
« C'est qu'elle n'a pas encore eu l'occasion de m'en parler, voilà tout! » marmonna-t-elle.
Elle reprit son essuyage d'assiette, pendant que Ryo vidait d'une traite sa tasse de café.
« Bon, c'est pas le tout, des Miss Mokkori m'attendent au parc ! Sois pas trop jalouse ma Miki d'amour, un seul mot de ta part et je consacre mon après-midi à te satisfaire.
_ Dégage !
_ Oh, que de cruauté ! Bon, sur ce, je vais me faire consoler par une femme qui saura reconnaître ma vraie valeur ... »
Il se leva et se dirigea vers la sortie, un sourire un tantinet sadique sur le visage. Le soleil brillait dans le ciel, il faisait doux, sans aucun doute les jeunes filles seraient habillées en jupe aujourd'hui. Il amorça le chemin vers le parc d'un pas léger.
A plusieurs kilomètres de là, une Honda se garait devant un immeuble. Dans l'habitacle, Kaori regardait l'édifice avec une certaine anxiété, et ses joues prirent une teinte rosée.
Courage, il ne fallait pas se laisser impressionner par une chose aussi insignifiante. C'était certes un peu embarrassant, mais ce n'était pas grand chose, elle avait vu pire, tous les jours de sa vie depuis qu'elle vivait avec le plus grand pervers du monde.
Elle prit une profonde inspiration et se décida à sortir du véhicule. Elle se sentait mal à l'aise, elle avait l'impression que tout le monde la regardait, comme si elle était une créature étrange, un monstre !
« Arrête de te faire des films! »
Elle continua sur sa lancée et se retrouva assez rapidement devant la porte de l'immeuble. Elle appuya sur le bouton de l'interphone et attendit assez nerveusement une réponse. Il ne faisait aucun doute que cette personne aurait une surprise en la voyant au pied de son immeuble et lui demanderait sûrement la raison de sa visite.
Le fait était que cette personne, cette Inoue Kazami, leur dernière cliente, avait oublié un objet dans sa chambre à elle, et qu'elle voulait s'en débarrasser au plus vite.
Et si elle lui demandait par l'interphone la raison de sa venue ? Que pourrait-elle bien lui répondre ? Elle ne pouvait quand même pas parler de ça devant tout le monde, dans la rue, devant ses voisins, c'était bien trop gênant. Elle eut soudain une idée.
« Vous avez oublié quelque chose, je viens vous le rapporter. »
Oui, comme cela, c'était parfait. Elle justifierait sa venue de façon tout à fait honorable de cette manière-là. Elle se répéta la phrase mentalement à plusieurs reprises, pour pouvoir la ressortir telle quelle au moment opportun, sans bafouiller ni paraître mal à l'aise. C'est alors qu'elle se rendit compte que le moment opportun tardait à venir... l'interphone restait muet.
La porte s'ouvrit alors et une vieille grand-mère sortit de l'immeuble, accompagnée de son chien tenu en laisse. Machinalement, Kaori retint la porte pour la laisser passer.
« Merci jeune fille, c'est bien aimable de votre part. »
Elle regarda la dame s'éloigner, puis, sûre que personne ne la surprendrait, s'engouffra dans la cage d'escalier. Elle était déjà venue ici et se souvenait parfaitement de l'endroit où elle devait se rendre...
De son côté, Ryo n'était pas à la fête. Il avait fait chou blanc dans le parc et était finalement rentré, tenaillé par la faim. Il eut donc la très désagréable surprise de constater que sa partenaire n'était pas encore là et, surtout, que le repas n'était pas prêt.
« Encore partie trainer, pff, elle prend vraiment pas soin de moi ! »
Il y avait bien sûr une grosse part de mauvaise foi dans ce qu'il venait de penser, mais pourtant c'était le sentiment dont il n'arrivait pas à se départir depuis la veille, jour de la découverte. Il avait l'impression que Kaori s'éloignait de lui, qu'il n'était plus le centre de son monde. Il en avait encore une preuve flagrante à cet instant.
Pourquoi est-ce que les choses prenaient cette tournure bizarre ? Après tout, elle avait bien le droit de faire ce qu'elle voulait, pourquoi cela le tourmentait-il autant ? Parce que cela brisait l'image qu'il avait eue de Kaori jusqu'à présent ? Non, c'est sûr, il ne la voyait pas du tout comme cela, pas comme une femme qui utilise « ça ». S'il ne l'avait pas vu de ses propres yeux il n'aurait jamais voulu y croire. Il ne la connaissait pas si bien que ça finalement.
Plus que cette impression d'habiter avec une inconnue, c'était la déception qui lui pesait le plus, cette déception qui l'avait assailli quand il avait repris ses esprits et qu'il s'était rendu compte de ce qu'il tenait dans ses mains et des implications que cela entrainait. Elle n'avait pas le droit de faire ça, pas le droit de LUI faire ça. Bien sûr, c'était en partie de sa faute : s'il s'était déclaré, s'il avait assumé ses sentiments vis à vis d'elle, cela ne serait jamais arrivé.
N'empêche, s'il ne l'avait pas remis dans son sac comme si de rien n'était, que se serait-il passé ? S'il l'avait pris et balancé à la poubelle, elle n'aurait certainement jamais osé dire quoi que ce soit. Même si elle s'était douté qu'il était responsable d'un tour aussi pendable, elle aurait eu trop honte pour dire quoi que ce soit à ce sujet.
Il avait été bête. La panique lui avait fait faire n'importe quoi. Il aurait dû confisquer cet objet, comme on confisque un briquet à un enfant. Elle n'avait pas besoin de ce truc !
Elle n'était pas là, alors c'était l'occasion rêvée d'aller prendre ce machin et de le faire disparaître à tout jamais de la vie de Kaori !
Il entra dans la chambre de sa partenaire et réfléchit un instant à l'endroit où elle aurait pu le cacher. Dans la table de chevet peut être ? Il ouvrit les tiroirs, rien. Il entreprit alors d'ouvrir tous les meubles, fouilla méthodiquement le moindre centimètre carré. Il connaissait bien toutes les techniques pour cacher des objets. Seulement, il lui fallut se rendre à l'évidence, elle ne l'avait pas mis là.
Intéressant, pensa-t-il, tu le caches donc si bien que ça ? Je ne rentre jamais dans ta chambre quand tu n'y es pas et, pourtant, c'est comme si tu avais eu peur que je ne le trouve... à raison, j'avoue, mais là...
Rendu perplexe par son échec, il resta immobile au milieu de la pièce, essayant de deviner où elle pouvait bien avoir caché cette chose.
« C'est encore pire qu'un trésor. Tu y tiens tellement que ça à ce machin ? »
Tout à coup, ses sens se mirent en alerte. Cette aura, il la reconnaitrait entre mille, Kaori rentrait. Il quitta rapidement la pièce sans aucune inquiétude, il savait comment s'y prendre pour fouiller un endroit sans que le propriétaire des lieux ne s'en rende compte. Il était cependant un peu agacé de penser qu'il n'avait pas réussi à mettre la main sur ce truc.
Il s'installa nonchalamment sur le canapé, un magazine porno en main et, alors que sa partenaire venait à peine de franchir la porte d'entrée, s'exclama:
« C'est à cette heure-ci que tu rentres ? J'ai faim, moi ! »
Kaori apparut, un peu gênée, dans l'embrasure de la porte du salon.
« Désolée, j'étais partie faire du shopping avec Eriko, je n'ai pas vu l'heure passer. Je m'y mets tout de suite. »
Il était resté les yeux scotchés sur sa revue... en apparence. En réalité, il n'avait pas perdu une miette de la réaction de Kaori. Elle semblait tellement mal à l'aise, tout la trahissait, sa voix, sa façon d'être, sa respiration.
« Du shopping avec Eriko, hein ? Foutaises ! Depuis quand me mens-tu ? »
Il se leva doucement et, à pas de loup, se dirigea vers la cuisine, dont la porte était fermée. Il colla son oreille contre la paroi de bois et entendit sa partenaire chantonner pendant qu'elle maltraitait un légume. Le couteau tapait fort contre la planche à découper.
Aucune idée de ce qu'elle était en train de préparer, mais cela lui prendrait quand même quelques instants. Largement le temps pour aller vérifier une hypothèse. Il s'éloigna et se dirigea, toujours le plus discrètement possible vers le placard de l'entrée où Kaori, en maniaque de l'ordre qu'elle était, avait rangé ses affaires. Bingo, son sac à main était là ! Il s'en saisit, l'ouvrit et regarda dedans.
« J'y crois carrément pas, tu es tellement accro à ce machin que tu ne peux plus t'en passer ? Tu l'emmènes partout avec toi ? Ben compte sur moi pour te désintoxiquer... »
Sans aucun état d'âme, il le prit et le fourra dans son pantalon, car cela ne tiendrait jamais dans sa poche, cela dépasserait et elle le verrait tout de suite. Cela lui fit une drôle de sensation, une sensation désagréable. Il ne pouvait pas supporter d'être en contact avec ça, il fallait qu'il s'en débarrasse. Il monta dans sa chambre, ouvrit un tiroir, le jeta à l'intérieur et ferma le tiroir à clé, clé qu'il enfonça dans sa poche.
« Tu vas faire quoi maintenant ? En racheter un autre ? Alors ça, hors de question ! Maintenant, je ne te laisse plus toute seule! »
« Ben, ça alors! J'étais sûre qu'il était dans mon sac, c'est vraiment bizarre! » marmonnait Kaori, un peu plus tard dans la soirée, pendant qu'elle retournait frénétiquement son sac à main dans tous les sens.
Elle ne se rendait pas compte que, ce faisant, Ryo, qui était planqué une fois encore derrière son magazine favori, restait très attentif à ce qui se passait. Si Kaori avait baissé le magazine à ce moment-là, elle l'aurait vu en train d'arborer un large sourire victorieux sur le visage.
« Tu disais ? » s'amusa-t-il à dire, sachant que sa réplique mettrait la jeune femme mal à l'aise. Et c'est effectivement ce qu'il se passa. Elle devint rouge pivoine et balbutia avec beaucoup de peine :
« Non, non, rien... c'est juste que, euh, je cherche mes clés, haha, fit-elle pour cacher sa gêne. Je les ai remises dans mon sac après avoir ouvert la porte et, pourtant, je les trouve pas !
_ Pourquoi tu as besoin de tes clés ? Tu sors ?
_ Mais non, mais … c'est juste comme ça, pour vérifier que je ne les ai pas perdues... hahaha
_ Patate !
_ Dis donc, ça t'arrive jamais à toi ?
_ De chercher mes clés alors qu'elles sont à mes pieds ? Non, jamais, j'avoue ... »
Agacée par l'attitude de son colocataire, elle ramassa les clés, en profita pour récupérer tout ce qu'elle avait mis par terre, remit tout dans le sac, qu'elle jeta dans le placard, avant de retourner dans sa chambre, dont elle fit claquer violemment la porte.
« Ça te fout tellement en boule que ça d'avoir perdu ton précieux trésor, hein ? »
Il sourit de satisfaction. Il l'avait bien eue sur ce coup là. Pourtant, à voir sa réaction, il doutait que la partie soit si aisément gagnée.
Dans sa chambre, Kaori s'interrogeait.
Elle se repassait les événements des deux derniers jours, histoire de comprendre où et quand elle avait pu perdre l'objet : la veille au soir, après avoir trouvé ce qu'Inoue avait oublié dans sa chambre, elle avait décidé de se rendre chez elle pour le lui rendre au plus vite et l'avait mis dans son sac. Ça, elle en était sure et certaine ! Malheureusement, Ryo était rentré à l'appartement au moment où elle mettait ses chaussures et il avait déclaré, avec sa classe habituelle, qu'il avait faim. Cette sensation étrange d'avoir été prise en flagrant délit avait été tellement puissante qu'elle en avait jeté précipitamment son sac dans le placard. Pourquoi avait-elle fait une chose aussi étrange ? Sûr qu'avec un tel comportement, elle avait dû de suite avoir l'air suspect. C'était comme si Ryo avait été capable de voir à travers la paroi du sac, comme s'il était doté d'un regard à rayon laser et qu'il lui fallait absolument cacher l'objet du délit à son regard inquisiteur. Ridicule ! Enfin, l'essentiel était que Ryo semblait n'avoir rien remarqué ! Il n'avait rien vu et n'avait fait aucune remarque quant à son attitude. Mais du coup, elle n'avait plus eu la force d'inventer un mensonge pour justifier sa sortie et était donc restée à l'appartement. Le lendemain, elle avait enfin trouvé un moment pour s'éclipser et se rendre chez la cliente, mais celle-ci étant malheureusement absente, elle était rentré à la maison et avait, de nouveau, rangé son sac dans le placard... Elle n'y avait plus retouché depuis lors, jusqu'à tout à l'heure... Ryo ne pouvait pas l'avoir découvert, c'était impossible, surtout vue la façon dont il lui avait demandé ce qu'elle cherchait...
Kaori était vraiment perplexe, car elle avait beau chercher, elle ne comprenait pas quand et comment elle avait pu le perdre. Mais comment aurait-elle pu deviner que, le soir-même où elle était persuadée que son partenaire n'avait rien remarqué, Ryo, alerté par l'air coupable de sa partenaire, avait profité de ce qu'elle s'affairait en cuisine pour aller voir dans son sac ce qu'elle avait à cacher ?
Elle réfléchissait donc et tournait ce problème dans tous les sens : où était-il passé ? Il ne pouvait pas avoir disparu, elle n'ouvrait son sac qu'au moment de prendre ou de laisser ses clés. Il était donc forcément dans l'appartement ou, tout du moins, dans l'immeuble.
Et s'il était tombé dans le placard hier soir, quand elle avait jeté son sac dedans ? Après tout, elle n'avait pas vérifié qu'il était toujours là ce matin au moment de partir. Elle n'avait pas remarqué que son sac était ouvert.
Un frisson s'empara soudainement d'elle. S'il était tombé dans le placard de l'entrée, c'est qu'il était exposé à la vue de tous, aussi bien de Ryo que d'un invité qui y déposerait ses affaires. Si Ryo le trouvait, elle était fichue. Elle aurait droit à des remarques acerbes jusqu'à la fin de sa vie. Il en était hors de question ! Il fallait qu'elle le retrouve avant que son débile de partenaire ne mette la main dessus. Elle retournerait l'appartement s'il le fallait. Il en allait de son honneur !
Le lendemain matin, Kaori était de mauvaise humeur.. La matinée avait été incroyablement et horriblement longue. Bien sûr, Môssieu Saeba s'était levé après une heure de hurlements et de coups de massue, bien sûr Môssieu Saeba avait trainé la patte pendant qu'il était dans l'appartement, errant comme une âme en peine entre sa chambre, la salle de bain et la cuisine. Mais quand, enfin, il avait daigné jeter un œil dehors et qu'il avait vu ce superbe soleil dont les rayons éclairaient la pièce, il avait alors pris son rictus de mokkori man, et Kaori avait su que c'était gagné. Elle ne savait pas à quoi il avait exactement pensé à ce moment là et, franchement, c'était le cadet de ses soucis. L'essentiel, c'était qu'il était EEEEEEEEEEEEEEEENFIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIN sorti ! Elle avait donc le champs libre pour recommencer ses recherches.
Elle était à quatre pattes dans le placard de l'entrée, qu'elle fouillait de fond en comble, quand elle sentit une présence derrière elle.
« Bonjour Kaori! Tu cherches quelque chose ? Je peux t'aider peut-être ? »
L'air pervers qu'elle découvrit sur le visage du nouveau venu, ainsi que le mouvement de ses mains, qui semblaient palper une forme arrondie invisible, ne lui plurent pas du tout. Elle sortit une massue qu'elle plaça entre elle et l'importun.
« Bonjour Mick ! Je cherche mes clés, et toi, chercherais-tu ma massue par hasard ?
_ Euh, non, non, c'est bon... »
L'américain prit quand même la précaution de reculer de plusieurs pas.
«Euh, en fait, je suis ici car j'ai oublié quelque chose l'autre soir, donc je viens pour le récupérer... Mais je vois que tu es très occupée, alors ne te dérange pas, je vais aller le chercher moi même. »
Il s'éloigna si rapidement de l'entrée que Kaori n'eut pas le temps de répondre. Elle avait envie de reprendre ses recherches, mais jugea qu'il était moins dangereux pour sa vertu d'attendre que Mick s'en aille.
L'ancien nettoyeur, quant à lui, montait les escaliers quatre à quatre, trop heureux du trésor qu'il ne tarderait pas à tenir dans ses mains.
Un peu plus tôt dans la matinée, alors qu'il était en train de prendre un café, tout en regardant par la fenêtre, il avait aperçu Ryo qui, au vu de son faciès, partait sans aucun doute à la chasse à la Mokkori-Chan. Cela signifiait donc que le numéro spécial été de « Lapines en chaleur » , avec en page centrale la fameuse actrice Yuko Samano entièrement nue, était laissé seul sans surveillance ! En sa qualité de cinéphile averti, il ne pouvait pas ne pas voir cette photo. Mais Ryo avait refusé de lui prêter son magazine, il pouvait vraiment être un gros radin par moment !!! Mais, par chance, il venait de commettre une grossière erreur !
Une fois dans la chambre de Ryo, Mick commença par inspecter les endroits les plus sûrs, le top du top de la cachette, là où Ryo pouvait vraiment être sûr que Kaori ne trouverait jamais de preuves compromettantes.
Cela faisait un bon quart d'heure qu'il se trouvait là et il commençait à désespérer. Pourtant, il ne pouvait pas s'avouer vaincu, sortir de cette chambre sans cette œuvre d'art, c'était comme avouer qu'il était moins malin que Ryo, et ça, il préférait plutôt mourir que d'admettre une telle énormité. Puisque aucune des super cachettes ne contenait le Saint Graal, il inspecta des cachettes plus évidentes. Soudain, il tomba sur un tiroir de la table de chevet qui était fermé à clé. Mick était aux anges, il voyait des Yuko Samano légèrement vêtues danser sensuellement devant ses yeux. Il se reprit juste avant que le filet de bave n'atteigne le sol, il restait à ouvrir ce coffre fort sans en avoir la clé. Mais rien de plus facile pour un type de la trempe de Mick Angel.
En un tour de main, la serrure fut crochetée, et Mick tira à lui le tiroir. La première chose qu'il vit fut le trésor des trésors, le « Lapines en chaleur » spécial été. Il se jeta dessus, tel un animal en rut. Il tournait frénétiquement les pages pour trouver au plus vite la double page centrale quand il s'arrêta brusquement. Cet objet posé sur la revue …
Il posa à nouveau son regard sur le contenu du tiroir et là, il ne put s'empêcher d'ouvrir les yeux en grand comme pour mieux voir ce qu'il voyait pourtant parfaitement bien...
« Mais c'est un ... »
Il laissa sa phrase en suspens, car immédiatement une question lui vint en tête : que faisait Ryo Saeba avec un tel objet ?
Il réfléchit pendant quelques secondes avant d'éclater de rire. Le grand Ryo Saeba, celui qui s'était auto-proclamé étalon de Shinjuku, avait donc recours à de tels subterfuges ! Mick riait à gorge déployée. Avec une telle preuve de son incompétence - pour ne pas dire impuissance - la réputation de Ryo était finie !
« Mais qu'est-ce que tu fabriques ? »
Il sursauta en entendant la voix derrière lui, et son premier réflexe fut de vite cacher sa précieuse preuve.
« Ben je cherchais ce que j'ai perdu ici l'autre soir, tu ne te souviens déjà plus ? Bon, bah maintenant que je l'ai trouvé, je vais rentrer chez moi. »
Il sortit en passant près de Kaori. Il tentait d'avoir l'air le plus naturel possible, mais c'était peine perdue face au regard inquisiteur de la nettoyeuse, qui repéra immédiatement qu'il y avait quelque chose de louche. Cependant, elle n'émit aucune objection, et Mick put vite atteindre la sortie. Une fois hors de l'immeuble, il laissa éclater sa joie mais, alors qu'il passait sa main sur l'objet qui ferait sa gloire et causerait la perte du poney de Shinjuku, il se figea.
« Oh non, Yukoooooooooooooooooooooooo!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! »
Dans la chambre de Ryo, Kaori était restée debout au milieu de la pièce, se demandant quelle était la véritable raison de la venue de l'américain. Elle sentait l'entourloupe à plein nez, mais n'arrivait pas à voir de quoi il pouvait s'agir, quand tout à coup, elle se figea.
« Mais qu'est-ce que c'est que cette horreur ? »
Devant ses yeux dégoûtés, une femme nue prenait une pose lascive sur une double page de papier glacé. Kaori prit le magazine du bout des doigts d'un air révulsé et marmonna :
« Grrr, pervers, je vais vous apprendre moi ! »
Et c'est ainsi que la pauvre Yuko Samano fut réduite à l'état de confettis.
Mick, malgré l'échec de sa mission, rentra chez lui d'humeur guillerette. A peine avait-il franchi la porte de son appartement qu'une douce odeur vint lui titiller les narines. Il se dirigea alors vers la cuisine, où il trouva sa douce moitié en train de mitonner un bon petit plat. La jeune femme accueillit son homme d'un sourire chaleureux avant de l'embrasser.
Après le déjeuner, Mick décida d'aller faire une sieste. Cela lui prendrait une partie de la nuit de faire le tour de Kabukicho pour montrer sa trouvaille à tout le monde.
Kazue, restée seule au salon, entreprit de faire un peu de ménage. C'est alors qu'elle remarqua la veste de Mick posée négligemment sur le dossier d'un fauteuil. Elle la ramassa et, alors qu'elle s'apprêtait à la ranger dans le placard, elle sentit qu'il y avait quelque chose dans la poche intérieure.
Quelle ne fut pas sa surprise quand elle découvrit le « quelque chose » en question !
La jeune femme resta tout d'abord perplexe devant sa découverte. Elle fixait cet ustensile quand, tout à coup, son visage s'éclaira d'un large sourire. A coup sûr Mick voulait pimenter leurs jeux amoureux !
Mick était un homme vraiment exceptionnel, malgré toutes ces années passées ensemble, il prouvait encore et toujours son amour en inventant chaque jour une nouvelle façon de s'aimer ! Elle avait énormément de chance d'avoir un petit ami tel que lui !
Transie de bonheur, elle se prépara à la divine soirée que Mick lui avait préparée.
Le soir venu, Mick resta bouche bée devant la table du salon : Kazue avait préparé un repas de fête. Pourtant, il n'y avait rien à fêter aujourd'hui... Dans sa tête, Mick fit la liste de toutes les dates importantes, avant de revenir une fois encore à la conclusion qu'il n'y avait rien de spécial à célébrer. Il leva les yeux sur sa compagne, qui portait une petite robe très au goût de l'américain. Elle lui adressa un sourire ravageur.
Il avait beaucoup de chance d'avoir une petite amie comme elle. Elle était belle, intelligente et très sexy. Et qui plus est, elle organisait de somptueuses soirées juste pour pouvoir entretenir la flamme du début. Au diable la tournée des bars à Kabukicho, il remplirait le reste de sa mission demain soir. Pour le moment, il avait un incendie à éteindre...
Il l'avait tant et si bien éteint, cet incendie, que le lendemain lui fit l'effet dune douche froide. Pour une raison qu'il ignorait complètement, Kazue lui faisait la tête. Il chercha désespérément à faire parler sa maitresse sur le pourquoi d'un tel changement d'humeur, mais elle resta complètement fermée.
Il se rendit vite compte que cela ne servirait à rien d'insister et il sortit, espérant que la situation se débloquerait d'elle-même d'ici la fin de la journée.
Kazue, profondément blessée, sentit qu'elle devait parler à quelqu'un de ce qui s'était passé la veille au soir. Elle alla donc au Cat's Eye, où elle retrouva Miki.
Quelques instants plus tard, Kazue était en train de pleurer à chaudes larmes, pendant que Miki faisait fonctionner le jouet que la jeune femme avait subtilisé à son amant. Elle soupira puis, peinée par la tristesse de son amie, elle essaya de la consoler :
« Tu sais, ce n'est pas parce que Mick n'a pas utilisé ce truc avec toi que ça veut forcément dire qu'il l'utilise avec d'autres femmes...
_ Alors pourquoi il a ça s'il ne l'utilise ni avec moi ni avec d'autres ?? »
Kazue se remit à pleurer de plus belle, sous le regard désolé de la barmaid.
C'est ce moment que choisit Mick pour venir au café. Il était venu dans l'espoir de draguer une fois encore la jolie serveuse, mais se ravisa en voyant sa tendre moitié installée au comptoir. Il évita donc de sauter sur la propriétaire et salua d'une voix enjouée sa compagne. Son engouement fut de courte durée, le regard dur et froid qu'elle lui adressa à ce moment là lui signifiant clairement qu'elle n'avait pas fini de faire la tête.
« Mais elle a ses ragnagnas ou quoi ?» pensa l'ancien nettoyeur.
Miki cacha précieusement l'objet que lui avait montré son amie sous le comptoir, tout en présentant un sourire poli au nouveau venu.
Pendant ce temps-là, à l'appartement, Ryo devenait fou de rage. Kaori avait repris son joujou et déchiré en mille morceaux son magazine fétiche ! Elle avait ni plus ni moins forcé la serrure du tiroir. Cela mettait sérieusement à mal tout ce qu'il pensait d'elle. Il pensait la connaître vraiment, mais il se rendait compte que, finalement, en ce qui la concernait ce n'était que des idées toutes faites. Il avait du mal à l'admettre, lui qui pendant tant d'années l'avait idéalisée, la considérant comme un être pur et dépourvu de désirs charnels. Qu'il avait été bête ! C'était valable pour un enfant de cinq ans, et encore, mais une personne adulte... Pure et dépourvue de désirs charnels! Elle jouait bien son jeu, et il avait tellement voulu y croire qu'il s'était laissé avoir.
Pourtant, l'idée que Kaori puisse jouer toute seule avec ce … ce truc dégoutant en plastoc l'écœurait. Elle préférait quand même pas ça au naturel ? Non, vraiment, il fallait qu'il la débarrasse de son riv... euh, de sa mauvaise habitude.
Au cat's Eyes, Mick prenait congé des jeunes femmes. Entre le regard de sa « douce » Kazue, qui l'aurait tué si elle avait eu des pistolets à la place des yeux, et le sourire figé de la patronne, il se sentait mal à l'aise. Il ne comprenait pas, mais avec les bonnes femmes, il ne fallait pas toujours chercher à comprendre. A peine eut-il franchi le seuil de l'établissement que la jeune scientifique arbora un visage à la fois fourbe et victorieux.
« Je vais le suivre ! annonça-t-elle, ainsi je saurai et j'aurai des preuves supplémentaires ! Il ne s'en tirera pas comme ça, crois-moi !»
Miki n'eut pas le temps de répondre que déjà son interlocutrice était partie jouer aux espionnes amateur. Avec un ancien nettoyeur, il fallait oser. Enfin, si Kazue doutait de la fidélité de Mick pour si peu, l'homme n'avait qu'à s'en prendre à lui-même et revoir son comportement.
La nuit fut douce pour les Ijuin. Malheureusement, ce ne fut pas le cas de tout le monde. Alors qu'un américain et sa compagne se disputaient à cause d'accusations d'infidélités infondées – selon l'homme – le pseudo-couple qui habitait en face ne faisait guère mieux avec les non-dits qui rendaient l'atmosphère pesante.
Le lendemain matin, Umibozu ouvrait le café, comme il le faisait tous les matins depuis qu'il avait décidé de « dépanner » sa partenaire, il y avait quelques temps déjà. C'est qu'il avait gardé, de son ancienne vie de mercenaire, l'habitude de toujours se lever aux aurores. Cela laissait le temps à Miki de déjeuner et de prendre sa douche tranquillement, alors tout le monde y trouvait son compte.
Les clients étant rares généralement, et encore plus le matin à l'ouverture, il en profitait pour faire un brin de rangement et de ménage. Miki aussi avait été une mercenaire, mais curieusement, elle n'avait pas gardé la même habitude quasi militaire de l'ordre. Il s'affairait donc derrière le comptoir, quand sa main se posa sur un objet qu'il ne reconnut pas.
Qu'est-ce que cela pouvait bien être ? De toute évidence, ce n'était pas de la vaisselle, ni un ustensile dont ils avaient l'habitude de se servir ici. Peut-être un objet oublié par un client. Peuh! Les seuls clients ici, c'étaient ces deux dégénérés du mokkori et leurs compagnes.
Tout à coup, le jour se fit en lui. Mokkori... Cette chose avait la forme de … Non, ces deux détritus n'auraient pas osé amener CA ici !!
Le teint de son visage tourna rapidement au rouge tomate, et on pouvait voir des gouttes de sueur perler le long de sa tempe. Mais quand, tout à son inspection, il actionna le bouton et reconnut distinctement ce bruit caractéristique - sans parler de la sensation dans ses mains - de la fumée sortit de ses oreilles, et il s'évanouit sur le sol.
Kaori arrivait au même moment. Elle était désespérée au plus haut point, cela faisait maintenant trois jours qu'elle cherchait partout l'objet appartenant à sa cliente et qu'elle ne le trouvait nulle part ! Comme s'il s'était volatilisé !
Elle fut tirée de ses pensées par la vue du géant en train de tomber. Elle se précipita à l'intérieur du café et se rua derrière le comptoir. Elle s'agenouillait pour tenter de lui porter secours quand ses yeux se posèrent sur ce qu'il avait dans les mains.
« Mais comment il a atterri là lui ? » s'exclama-t-elle avant de le reprendre.
« Ah bon, parce qu'il est à toi ? »
Kaori se retourna vivement avec un air de coupable. Elle cacha maladroitement sa trouvaille derrière son dos tandis que le regard de Miki se faisait suspicieux.
« De quoi parles-tu ? » tenta-t-elle maladroitement d'éluder.
Mais Miki avait tout vu et tout entendu. Elle était encore à l'étage quand elle avait entendu un bruit sourd provenir d'en bas. Elle s'était précipitée vers le café, où elle avait trouvé Kaori qui, visiblement, était familière avec l'objet se trouvant actuellement derrière son dos. Cela la surprit tout d'abord, puis vint le doute.
Si Mick était en possession de ce machin, et que ce machin était à Kaori alors... c'est que Kazue était dans le vrai ! Mick la trompait bel et bien ! Avec Kaori qui plus est ! Voilà l'explication de la scène on ne peut plus étrange jouée par Saeba ici-même il y avait quelques jours. Il devait suspecter quelque chose et était venu dans l'espoir de lui tirer les vers du nez. Mais elle ne savait rien, et c'était normal : même si elle adorait Kaori et voulait son bonheur, jamais elle n'aurait cautionné ce genre de comportement.
Soudainement, Miki se sentit envahie par la tristesse et la déception. Elle n'aurait jamais cru ça de Kaori. Qu'elle se détourne de Saeba, cela n'avait rien d'étonnant, ce qui l'était c'était son attachement à cet homme qui persistait à tout nier en bloc entre eux. Mais qu'elle jette son dévolu sur un homme libre, bon sang, et surtout pas sur le fiancé de son amie !
Le mensonge de Kaori l'achevait. Prise la main dans le sac et rouge de honte, elle avait le culot d'essayer de jouer les innocentes. Mais, après tout, même si cela la chagrinait beaucoup, ce n'était pas vraiment ses affaires. Elle l'avait vue, et cela lui suffisait amplement.
« Non, de rien », finit-elle pas répondre avec lassitude.
Kaori donna alors la première excuse bidon qui lui passa par la tête pour s'éclipser, et Miki ne fit pas le moindre geste pour essayer de la retenir. Alors qu'Umi se remettait de ses émotions fortes, son épouse s'enquit de sa santé, avant de foncer dans la remise où elle se saisit du téléphone.
Et c'est ainsi, un peu plus tard, que le couple qui avait passé la soirée et la majeure partie de la nuit à se déchirer reprit les hostilités de plus belle.
« Tu n'es qu'un porc Mick ! Comment peux-tu me faire ça ? Avec Kaori en plus! »
L'américain en avait ras la casquette. D'abord il ne comprenait pas d'où lui venait l'idée bizarre qu'il la trompait, car même s'il draguait ouvertement toutes les jolies femmes à sa portée - et au delà - il avait toujours été, malgré tout, d'une fidélité exemplaire.
Mais Kazue n'en démordait pas. Elle l'accusait de tous les vices. Et depuis ce coup de fil mystère, c'était encore pire ! Sa maitresse imaginaire n'était autre que Kaori. Il savait que Kazue continuait à porter une légère rancune à Kaori d'avoir été son premier amour – même si elle refusait de se l'avouer – mais cette crise de jalousie en règle était purement et simplement pathétique.
« Mais arrête ! Tu deviens complètement hystérique ma parole ! Kaori c'est de l'histoire ancienne, tu sais très bien que je ne ressens plus pour elle que de l'amitié !
_ Arrête de te foutre de ma gueule, Angel ! » lui hurla-t-elle.
Dans l'immeuble d'en face, Ryo venait de s'installer au balcon pour fumer sa cigarette du matin. Un éclair passa dans le regard déterminé de Kazue.
« Tu t'obstines à nier, alors que je sais tout, ben pas grave, nous serons bientôt quittes, et peut-être que ceci te servira de leçon. »
Elle sortit sans plus attendre.
Elle se dirigea d'un pas décidé vers l'immeuble des City Hunter. Elle n'avait pas réussi à faire avouer à Mick son crime, mais elle tenait sa vengeance !
D'un geste impatient, elle actionna la sonnette d'entrée. Quand la porte s'ouvrit, elle ne perdit pas de temps avec les salutations et entra directement dans le vif du sujet.
« Mick et Kaori sont amants ! »
Ryo frôla la crise cardiaque à l'annonce de cette nouvelle pour le moins surprenante.
« Co … comment tu sais ça ?
_ Trop long à t'expliquer ! Mais crois-moi sur parole ! Pourquoi je te mentirais sur ça ? »
Elle marcha vers le salon, suivie d'un Ryo hagard qui avait du mal à digérer la nouvelle. Triomphante, elle se tourna vers lui et déclara d'un ton neutre:
« Vengeons-nous ! »
Elle fondit sans plus de cérémonie sur les lèvres de Ryo, qui aperçut à travers la fenêtre son « ami » américain adossé à la fenêtre. Il ne pouvait que les voir ! Le nettoyeur était dubitatif quant à la méthode employée pour « se venger » et resta donc passif sous les assauts de sa voisine.
Mick, de son côté, n'en croyait pas ses yeux : elle avait osé, et avec cet obsédé ! Et soudainement, tout devint clair dans son esprit : c'était forcément lui qui avait manipulé Kazue de la sorte pour se venger, à cause du magazine! A moins que ce ne soit à cause de son petit secret ! Il avait été jusqu'à faire croire à sa petite amie qu'il se faisait Kaori ! Mais ce type n'avait vraiment ni foi ni loi !
Il n'allait pas se laisser faire. Il allait lui reprendre Kazue et lui infliger la correction de sa vie.
Mick déboula donc sans crier gare dans l'appartement de son ancien partenaire, au grand soulagement de Ryo qui ne savait toujours pas comment réagir face à la jeune femme. Celle-ci était en train d'essayer de le déshabiller, mais il se montrait moins conciliant que pour le baiser.
Mick intervint de façon musclée pour les séparer et quand, finalement – avec beaucoup de peine – il y parvint, il asséna un violent coup de poing sur le nez de Ryo qui, une fois n'est pas coutume, n'avait rien vu venir et se le prit en pleine poire.
« Mais t'es malade, c'est ta copine qui m'a sauté dessus, j'ai rien fait je te signale !
_ Rien fait, sauf essayer de me piquer ma fiancée dans le seul but de te venger d'avoir découvert ton secret !
_ Mon secret !
_ Oui ! Oui ton secret oui ! » Il éclata d'un rire malsain, comme pris d'une folie passagère. « Je sais qui tu es, Poney de Shinjuku, mouhahahahahaha ! »
Malgré la colère qu'elle éprouvait envers lui, Kazue ne put s'empêcher de s'inquiéter du comportement de son fiancé.
Ryo tenait à peu près le même raisonnement, quand quelque chose tilta. Ce microbe l'avait traité de... poney ?!?! Lui, le grand, l'immense, le seul et l'unique Etalon de Shinjuku, celui qui faisait chavirer le cœur de toutes les belles jeunes femmes, qui les emmenait au 7ème ciel pour un voyage inoubliable, un... poney ?
« Un poney ? » demanda-t-il d'une voix incrédule.
Le sourire en coin, ravi d'avoir fait mouche, le blond répondit du tac au tac :
« Oui, un poney ! »
Un blanc de plusieurs secondes résonna dans la pièce. La tension devenait de plus en plus palpable.
« Un poney ? » demanda de nouveau le japonais, d'une voix bien plus sourde que celle employée auparavant.
« Oui, parfaitement, un poney ! » affirma l'autre homme d'un air jubilatoire. Et il crut bon de rajouter : « Tu sais, ce cheval qui rêverait d'être un étalon, mais qui, en fait, est tellement minuscule... ». A ceci il joignit le geste à la parole, en rapprochant son pouce et son index de façon à ne laisser qu'un espace de quelques millimètres à peine entre ses deux doigts. « ...tellement minuscule que, par peur du ridicule, il essaie de se faire passer pour ce qu'il n'est pas. »
Un long silence se fit de nouveau entendre, et Kazue se rendit compte que l'ambiance se chargeait d'électricité. Cet idiot de Mick ! Bien sûr qu'elle avait fait exprès de le rendre jaloux, mais là, à force de chercher Ryo de la sorte, il allait mourir !
Il fallait qu'elle intervienne pour le sortir de là.
« Mais enfin mon chéri, qu'est-ce que tu racontes, tu sais très bien qu'un poney n'est pas un cheval...
_ Oui, c'est exactement ce que je suis en train de dire. Un poney n'est pas et n'a jamais été un cheval, et encore moins un étalon » enchaina-t-il un large sourire moqueur aux lèvres.
Il allait le tuer. Après des heures, des journées, des semaines de longues et atroces souffrances, juste pour lui faire ravaler toutes les insultes proférées à son égard ce soir, chez lui, et sous les yeux d'une mokkori-chan.
Kazue avait l'impression d'avoir fait plus de mal que de bien en venant ici et ne voyait plus très bien comment s'en sortir. Si elle avait été un homme, elle aurait porté Mick dans ses bras et se serait enfuie à grandes enjambées d'ici.
« UN PONEY??????? »
N'importe qui se serait mis à trembler comme une feuille morte devant le ton employé par le nettoyeur, mais pas Mick Angel, qui lui, décida de répondre sur le même ton.
« OUI, UN PONEY, UN P.O.N.E.Y!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! qu'est-ce que tu ne comprends pas dans le mot, espèce de, de , de ... »
Il était à court de mots, alors histoire de ne pas laisser le dernier mot à son pire ennemi du jour, il sortit la première chose qui lui vint en tête :
« Espèce de poney!!!!!!!!!!!!!!!!!! »
Ryo se jeta sur Mick avec une force et une violence inouïe, laissant Kazue tétanisée. Un des deux allait finir par mourir, c'était sûr. Elle hurla pour essayer de les arrêter, mais cela ne servit à rien. Rien ne semblait pouvoir les stopper.
Kaori rentrait, penaude. Elle avait encore échoué à rendre ce si encombrant objet à sa propriétaire. Après qu'elle l'ait récupéré des mains d'Umi, elle s'était rendue directement chez Inoue, qui était encore absente. Où était-elle passée bon sang ?
Elle montait doucement les escaliers quand elle entendit des bruits provenant de son appartement. Elle pressa le pas, et ce qu'elle vit la laissa pantoise. Mais avant de pouvoir avoir le temps d'intervenir, elle trouva Kazue sur son chemin, l'air extrêmement en colère.
« Tout ça, c'est de TA faute », lui déclara celle-ci, sans se rendre compte de la mauvaise foi contenue dans ses paroles, « Comment as-tu osé, comment avez-vous osé me faire ça, comment Mick et toi avez-vous pu me tromper ? »
La jeune nettoyeuse resta incrédule.
« Hein ? Mais on n'a jamais fait ça !
_ Menteuse ! »
Elle essaya alors de lui donner une gifle. Kaori se recula instinctivement, mais elle n'avait pas prévu qu'elle trébucherait et tomberait les quatre fers en l'air. Son sac tomba également et s'ouvrit sous le choc, répandant son contenu sur le sol. Kazue vit immédiatement l'objet du scandale. Elle s'en saisit et le brandit sous le nez de Kaori :
« Et ça, c'est pas une preuve peut-être? Je sais que tu l'utilises avec Mick ! Je n'aurais jamais cru ça de toi ! Heureusement que Miki a tout compris et m'a prévenue !
_ Hein ? »
Les hommes, qui étaient en train de se battre à mort, s'arrêtèrent brusquement. Mick bondit littéralement de joie !
« Mais non Kazue, ce n'est pas une preuve de mon infidélité, au contraire, c'est la preuve que Ryo n'est rien d'autre qu'un po...
_ Mick, non, ne recommence pas! » intervint fermement Kazue
Ryo, lui, était resté à terre. Il n'avait pas été battu par son ennemi, mais par la nouvelle. Si Kaori avait ce bidule c'était pour l'utiliser avec cet américain de pacotille ! Il pensait que sa colère avait atteint son paroxysme quand il l'avait traité de poney, mais là... Il fallait qu'il le tue. Il avait dépassé toutes les limites de la décence, il allait le tuer, ici et maintenant.
Il se jeta de nouveau sans sommation sur lui, et le pugilat reprit là où il s'était arrêté.
Les deux femmes étaient en panique à la vue du spectacle que leur offraient les deux hommes.
« Tu vois, c'est de ta faute, ils vont mourir tous les deux, tout ça à cause de toi et de ce stupide machin, ce truc, cette horreur, ce... CE... VIBRO !! »
Les deux anciens nettoyeurs se battaient avec tant de rage que les meubles se brisaient, tandis que Kaori tentait désespérément de ramener son amie à la raison... Personne n'entendit donc la porte de l'entrée s'ouvrir discrètement et une personne entrer timidement en ces lieux qu'elle connaissait déjà un peu pourtant.
Malgré le spectacle déplorable qui s'offrait à elle, elle n'était guère surprise. Ce garde du corps et sa partenaire étaient fous à lier, ils passaient leur temps à se disputer à coups de massue, alors une fois de plus une fois ou de moins...
Elle dressa l'oreille quand elle entendit LE mot. Ah, enfin, cela faisait des jours qu'elle le cherchait partout. Elle l'avait laissé ici, et était bien heureuse de pouvoir enfin récupérer son bien. Elle s'avança alors, et d'une voix parfaitement calme et posée, contrastant avec l'ambiance survoltée, elle demanda en toute simplicité:
« Dites-moi, est-ce que je pourrais le récupérer maintenant s'il vous plait ? … Oui, le vibromasseur ! »
Kazue tendit l'objet à sa propriétaire avec défiance.
« Alors c'est vous la maitresse de Mick ? »
Les hommes avaient cessé leur explication musclée, et l'ancienne cliente posa ses yeux sur l'américain édenté, couvert de bosses et d'ecchymoses. Elle répondit méprisante :
« Certainement pas, plutôt me faire nonne ! Enfin, heureusement qu'il existe ce genre de jouet, pas vrai ? »
La jeune femme ne comprenait pas les regards chargés d'incompréhension qui la fixaient. Peu lui importait, elle était venue pour son jouet, et maintenant qu'elle l'avait retrouvé, elle n'avait aucune raison de rester davantage. Avec la même légèreté que celle dont elle avait usé pour récupérer son bien, elle prit congé de ses anciens gardes du corps et de leurs amis. Toutes les personnes présentes, surprises par le côté irréel de cette personne et de son passage, eurent quelques difficultés à la saluer en retour de manière intelligible. Alors qu'elle entamait le chemin inverse, elle se demanda pourquoi ils l'avaient regardée aussi bizarrement, mais ne s'attarda pas plus sur la question et rentra chez mettre son joujou fétiche à l'abri.
Après un long silence, qui suivit le départ de la cliente, Kazue, honteuse, présenta de plates excuses à Kaori qui les accepta sans hésiter. Et, alors que Mick pensait s'en sortir à aussi bon compte que sa compagne, il fut stoppé dans son élan par Ryo.
« Toi, mon mulet, notre conversation n'est que partie remise », déclara-t-il l'air méchant.
Mick rit jaune, avant d'être mis à la porte par son accolyte, suivi de près par Kazue qui avait beaucoup à se faire pardonner auprès de lui aussi.
Kaori était restée dans le salon dévasté par la « dispute » des hommes. En guise de conclusion, Ryo se mit à rire.
« Hahaha, cette Kazue alors, t'imaginer, toi, te servir d'un vibromasseur ! Je suis sûr que quand tu l'as trouvé tu ne savais même pas ce que c'était, et encore moins à quoi ça servait! »
Pas qu'elle soit non plus fière de dire qu'elle savait parfaitement tout cela, mais elle se sentait très vexée que Ryo la prenne pour une cruche pareille !
« Je suis pas naïve à ce point !
_ Oh, et alors, tu l'as essayé ? »
Ryo éclata d'un rire sonore tandis que sa partenaire virait au rouge pivoine. Finalement, il était rassuré, il la connaissait bien, on pouvait presque dire : par cœur. Il savait qu'en posant une question aussi indécente elle se mettrait en colère. Il était vrai qu'il adorait la mettre en rogne, mais l'avantage, surtout, c'était que généralement cela suffisait à mettre fin aux situations un peu gênantes.
Et, comme il s'y attendait, elle lui asséna un violent coup de massue en guise de toute réponse.
Elle fila dans sa chambre pour défouler le reste de sa colère sur la poupée Ryo, pendant que l'original se relevait et déclarait, avec une mauvaise foi déconcertante pour quiconque aurait eu vent de ses émois intérieurs :
« Mais, quand même, je le savais bien qu'elle s'en était jamais servie, je le savais bien ... »
Il se dirigea vers la fenêtre – miraculeusement restée indemne – et repensa à ces derniers jours, de la découverte du jouet dans le sac de Kaori jusqu'au dénouement de l'histoire il y avait quelques instants à peine. Il avait été idiot de douter comme ça d'elle. Mais, au moins, l'espoir était toujours permis: qui sait, peut-être qu'un jour il aurait la joie de faire expérimenter de nouvelles expériences à Kaori... au naturel !
Chapitre: 1
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