Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated G - Prose

 

Author: nodino

Status: Completed

Series: City Hunter

 

Total: 1 chapter

Published: 24-12-12

Last update: 24-12-12

 

Comments: 5 reviews

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General

 

Summary: Un Noël à Tokyo, une soeur qui attend le retour de son frère et des "Il était une fois".

 

Disclaimer: Les personnages de "Il était une fois... " sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo.

 

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   Fanfiction :: Il était une fois... Un conte de Noël à Tokyo

 

Chapter 1 :: Il était une fois...

Published: 24-12-12 - Last update: 09-03-14

Comments: Rebonjour les gens de HFC. Certains la connaissent déjà, mais j'avais très envie de vous faire partager cette fic de Noël, écrite il y a déjà longtemps (deux ans, ça passe vite). J'espère qu'elle vous plaira et je vais vous souhaiter à tous de passer de très très bonnes et excellentes fêtes de fin d'année. Bise et à bientôt ^^

 


Chapter: 1


 

Il était une fois, un soir de Noël, dans une grande ville que l'on pourrait baptiser Tokyo, une jeune fille qui attendait, seule dans son petit appartement, le retour de son frère. Attablée devant le repas de fête qu’elle avait cuisiné pour l’occasion, elle attendait, les yeux rivés sur la porte d’entrée. Chacun de ses souffles était une prière pour qu’elle s’ouvre sur celui qui était sa seule famille, chaque bruit feutré lui parvenant du couloir la voyait frémir d’espoir, puis soupirer lorsque les pas glissaient devant la porte sans s’arrêter. Elle attendait, tandis que résonnaient dans la pièce les minutes égrenées par le temps qui passe, implacable, chantant de ses tic-tac l’inquiétude lancinante qui grandissait en elle. Elle attendait, dévorant la porte de ses yeux à force de la regarder, comme si la seule force de sa volonté pouvait rendre réel son souhait le plus cher en cet instant : le voir paraître devant elle, un sourire relevant légèrement le bord de ses grosses lunettes d'écailles, sa chevelure en bataille dégoulinant de neige fondue et les yeux pétillants de joie retenue. Elle, Kaori Makimura, attendait Hideyuki..  

 

 

Oh elle lui crierait dessus, elle le blâmerait pour ces victuailles qui finissaient de refroidir sur la belle table décorée. Elle lui reprocherait peut-être même d’être allé travailler un soir de Noël… « Oui c’est vrai ça, on n’a pas idée de bosser ce jour-là ! » pensa-t-elle. Mais elle savait qu’elle ne pourrait lui en vouloir bien longtemps. Il la regarderait de cet air de chien battu qu'il arborait parfois, aurait un petit sourire désolé et lui dirait qu’il s’en voulait, mais que le crime ne connaissait pas la trêve de Noël. Il lâcherait alors son vieux pardessus élimé sur une chaise et ferait le tour de la table pour venir lui ébouriffer les cheveux et – ça, elle en mettrait sa main à couper - ce geste de tendresse maladroite la ferait craquer. Elle l’attraperait certainement pour se blottir quelques secondes contre lui, avant de bougonner que tout était froid maintenant et que c’était tant pis pour lui.  

 

 

Voila comment la scène allait se dérouler, elle en était sûre, dès que son frangin apparaîtrait dans l'encadrure de la porte. Mais encore fallait-il qu'il rentre ! Il se passait quelque chose de pas normal dehors, elle le sentait, et ses yeux noisette se voilaient de ce sentiment qui se transformait tout doucement, malgré elle, en panique sourde.  

 

 

 

La main sur sa poitrine serrée d'angoisse, elle se leva et délaissa la table de fête pour venir se poster à la fenêtre. Dehors, la neige tombait sur un rythme calme et régulier, venant caresser les toits de la ville pour s'y déposer en un doux et chaud cocon de ouate. Mais tout ceci n'était qu'illusion, car cette nuit de Noël était glaciale, et les rares badauds qu'elle apercevait pressaient le pas afin de se retrouver plus vite au chaud. Mais où était-il ? Avec qui, ça elle le savait. Il devait être avec ce Ryo, cet homme qu'elle avait rencontré il y avait quelques mois de ça et avec lequel il avait formé ce duo, City Hunter. Quand elle avait découvert la réalité de son travail, elle avait d'abord été très inquiète et en colère, elle avait cru qu'il était devenu un tueur à gages à la solde d'un criminel. Mais elle avait ensuite découvert la vérité sur ce Ryo et, derrière le masque et les apparences, elle avait découvert un homme merveilleux. Elle avait alors été très fière que son frangin en soit devenu le partenaire. Mais, ce soir, la réalité de son travail plus que dangereux la rattrapait. Elle prenait conscience que, bien plus qu'à l'époque où il était policier, il pouvait mourir à tout instant, que ce contact qu'il entretenait avec le mal pouvait le détruire... qu'elle pouvait le perdre à jamais...  

 

 

Mais à quoi pensait-elle donc ! Elle était stupide, bien sûr que tout irait bien ! Après tout, c'était un grand policier et il était avec Ryo, qui par son simple souvenir la rassurait déjà... Son frère allait arriver bientôt, c'était sûr et certain ! Elle réussit à sourire et plongea son regard dans le lointain, par-delà les toits enneigés, pour porter loin son espoir et sa foi en son destin... Hideyuki allait rentrer.  

 

 

Les flocons continuaient de danser tranquillement devant ses yeux qui ne les voyaient plus, et ils se déposaient sur le rebord de la fenêtre, avant de glisser et de tomber en petits tas légers sur le trottoir. Les passants les foulaient de leurs pas pressés et se dépêchaient de rejoindre leurs familles. Leurs souffles glacés se matérialisaient devant eux en un petit nuage blanc, leur rappelant sans cesse à quel point leur corps était gelé et réclamait un peu de chaleur. A1ors, ils allongeaient encore leurs foulées et tournaient dans les rues adjacentes, rejoignant des ruelles plus étroites, qui à gauche, qui à droite, soufflant de soulagement quand ils voyaient enfin briller leurs fenêtres. Chacun rentrait chez soi, et les petits flocons duveteux et légers les accompagnaient de leur danse gracile jusque sur le pas de leurs habitations. De leur fragile parure de cristal ils redessinaient la voûte céleste vers laquelle ces passants jetaient un dernier regard, avant de vite claquer derrière eux la porte de leurs foyers. Tournoyant délicatement depuis le ciel nocturne jusqu'au sol, ils apportaient à la ville une ambiance irréelle et douce.  

 

 

En cette nuit de Noël, tels semblaient être ces petits cristaux de coton... Mais, comme dit précédemment, cette vision idyllique du paysage concernait plutôt celui qui l'observerait depuis la chaleur de son intérieur, à la fenêtre de son salon, emmitouflé dans un gros pull de laine, un feu de cheminée crépitant derrière lui. Car pour qui était dehors, ces cristaux étaient autant de couteaux de glace qui venaient mordre la peau. En tout cas, c'était ce qu'ils représentaient pour l'épiderme de cet homme allongé au sol, qui se redressait péniblement sur ses coudes en gémissant de douleur. Alors que les nerfs de sa peau se crispaient sous ces multiples agressions glacées, lui n'y prêtait pas attention. Le souffle court, il porta la main à son œil tuméfié pour remettre en place ses lunettes d'écaille.  

 

 

Le corps endolori par les coups et le froid du bitume enneigé, il ressentait à peine la morsure des flocons. Il n'en percevait que les petites gouttes qui se formaient au contact du verre de ses lunettes. La froidure hostile de l'hiver ne l'atteignait pas. Au travers de ses mèches humides de neige fondue qui lui tombaient devant les yeux, il ne voyait qu'une seule chose : ce canon de revolver qui le fixait de son œil unique, aveugle et implacable.  

 

 

C'était mal parti pour lui, il le sentait bien. Le regard fixant toujours la bouche du pistolet, il rassemblait ses esprits pour tenter d'analyser la situation. Ils étaient bien trop nombreux autour de lui, et s'il avait la force d'en repousser quelques uns il ne viendrait jamais à bout du groupe entier, surtout que sa propre arme avait glissé à l'autre bout de la ruelle. Il n'avait été qu'un imbécile de croire qu'il pourrait gérer ce genre de situation tout seul. Il n'était pas un surhomme et était loin d'égaler Ryo dans la gestion des attaques imprévues. Oui, Ryo aurait géré ça en à peine quelques minutes, mais il n'était pas là, et la jeune fille qu'il avait entendu crier n'avait pas le temps d'attendre qu'il arrive. Alors il avait foncé.  

 

 

 

 

Le crime ne connaissait pas la trêve de Noël. C'est avec cette pensée en tête qu'il était sorti de chez lui, le matin même, pour faire ce qu'il faisait avec le plus de fierté : protéger à sa façon sa ville et ses habitants, leur permettre de passer tranquillement les fêtes, en nettoyant les rues des ordures qui pourraient les faire trébucher. Cela ne lui semblait pas être un gros sacrifice, même s'il éprouvait quelques remords de laisser Kaori seule ce jour-là. Mais il lui avait demandé de l'attendre pour le repas du soir, car il voulait partager avec elle ce moment, quelque soit l'heure à laquelle il rentrerait. Il espérait bien être de retour avant minuit et pensait, qu'avec un peu de chance, il trouverait même le temps d'aller lui acheter un petit quelque chose. Il se disait cependant que rien de ce qu'il pourrait lui offrir ne serait assez beau pour la remercier de tout ce qu'elle faisait pour lui. Elle savait qu'il n'était plus policier et qu'il menait une vie un peu en marge, nécessitant qu'il rentre tard et qu'il prenne des risques, mais à part lorsqu'elle l'avait découvert, elle ne lui en avait jamais fait le reproche. Au contraire, il lui était arrivé de l'aider à soigner une blessure et il retrouvait toujours ses vêtements propres et recousus, sans jamais qu'elle ne lui pose la moindre question. Il avait été prêt à tout abandonner quand elle avait cru qu'il était devenu un assassin, mais elle lui avait donné son accord, sans qu'il ne comprenne bien pourquoi. Il n'avait jamais osé lui demander ce qui lui avait fait changer d'avis et avait trouvé dans sa grande maturité, malgré ses 16 ans, une explication suffisante.  

Cependant, devenir à cet âge tendre la sœur d'un nettoyeur était certainement une bien lourde charge. C'est pourquoi il avait demandé, juste avant de passer la porte, à la jeune fille de 18 ans qu'elle était devenue de l'attendre pour manger. Il voulait lui offrir pour Noël, en plus de ce petit quelque chose qu'il trouverait dans la journée, un moment d'insouciance et de légèreté.  

 

 

 

La journée s'était déroulée sans la moindre anicroche. Le tableau de la gare était vierge de tout XYZ, les indics n'avaient rien de nouveau à signaler et leur tournée s'était faite rapidement et tranquillement. Finalement, le crime avait peut-être décidé d'accorder un peu de répit à la ville, à moins qu'il n'ait été rebuté par l'air glacial. En tout cas, celui qui ne connaissait pas de trêve, quelle qu'elle soit, c'était le mokkori de son partenaire. Ryo s'était mangé plus d'une fois la neige du trottoir, en plus des rebuffades quotidiennes, mais il avait pourtant continué de harceler les jeunes femmes qu'il croisait, leur proposant un petit coup pour les réchauffer. Lorsque la nuit était tombée, c'est le visage rougi par les baffes, les coups de sac et la neige que son partenaire avait déclaré qu'il jetait l'éponge et qu'il allait se rendre au New Bunnies. Une soirée Sexy Christmas était prévue et il comptait bien en profiter. Il lui avait vanté les petites tenues rouges et blanches des serveuses, puis avait souri devant son refus de l'accompagner, avant de lui souhaiter une bonne soirée en famille. La dernière image qu'il avait de lui, alors qu'il prenait la direction du cabaret, était cet air excité et stupide, un filet de bave coulant depuis le coin de sa bouche avant de geler et de former un petit stalactite sur son menton.  

 

 

Il avait alors pris à son tour la direction de chez lui, soufflant dans ses mains dans le vain espoir de réchauffer un peu ses doigts engourdis. Le quartier dans lequel il se trouvait n'était pas vraiment à côté de l'appartement, alors il avait fait comme tous les passants autour de lui : il avait rentré la tête dans les épaules, avait resserré son pardessus et avait pressé le pas. Chacun regardait ses pieds pour se concentrer sur son souffle et sa chaleur interne, et il n'avait pas dérogé à la règle. Cependant, lorsque le léger vent du soir avait porté ce cri de femme jusqu'à lui, il avait aussitôt redressé la tête. Figé, les sens aux aguets, il avait attendu que ce bruit étouffé soit suivi d'un deuxième pour courir dans la direction indiquée par le sanglot apeuré.  

 

 

 

En pénétrant dans la ruelle sombre, il s'était fondu dans l'ombre. Rien de plus simple pour lui que d'avancer sans se faire remarquer. Il avait puisé dans son passé de policier et son présent de nettoyeur pour maîtriser les battements de son cœur et garder son calme. L'arme au poing, il avait fait un tour d'horizon pour mieux analyser la scène éclairée par un réverbère faiblard : entourée d'une dizaine d'hommes portant tous le même blouson, une jeune femme au regard terrifié était acculée contre le mur de l'immeuble adjacent. Serrant contre elle son sac comme ultime rempart à la violence que le rire gras de ces hommes laissait présager, elle les suppliait, d'une voix rendue suraiguë par la peur, de la laisser partir. Mais cela ne suffisait visiblement pas à attendrir ceux qui l'entouraient, bien au contraire. Plus elle pleurait, plus leurs rires montaient dans l'air, emplissant l'espace de leur désir malsain. Lorsque l'un deux avait tendu le bras et avait arraché le sac pour le jeter au sol, elle avait poussé un cri, qui avait aussitôt été étouffé par une main puissante et, comme s'ils n'avaient attendu que ce signal pour partir à l'assaut de sa vertu, les membres du gang s'étaient quasiment jetés sur elle, la faisant disparaître à ses yeux.  

 

 

 

Le son qu'avait produit son arme lorsqu'il avait tiré en l'air avait résonné contre les murs et avait figé la scène. Pris par surprise, les malfrats avaient lâché la jeune femme. Elle se tenait prostrée contre le mur et poussait de petits gémissements de bête aux abois, ramenant contre elle les lambeaux de sa chemise déchirée.  

 

 

-Laissez-la tranquille, espèces de bêtes sauvages ! avait-il lancé en ramenant la visée de son arme en direction du groupe. Mademoiselle, venez vers moi... Allez, ils ne vous toucheront plus... l'avait-il encouragée pour la sortir de sa prostration.  

 

 

La jeune femme avait alors levé un regard perdu vers lui. Puis, doucement, jetant des regards apeurés autour d'elle, elle s'était traînée sur le sol, avant de longer le mur à genoux pour garder le plus de distance possible entre ses agresseurs et elle. Lorsqu'elle s'était sentie suffisamment loin d'eux pour ne plus risquer de contact, elle s'était relevée péniblement. Et c'est là que tout avait dérapé. Se sentant enfin hors de danger, elle s'était mise à courir à toutes jambes en direction de son sauveur, criant et pleurant en même temps, sans plus penser à ce qu'elle faisait. Au bord de la crise de nerfs, elle ne raisonnait plus et s'était interposée entre le gang et lui, l'empêchant de les voir et le mettant dans l'incapacité de tirer, sous peine de la toucher. Il avait crié : «Poussez-vous ! » mais il était trop tard. Et lorsqu'elle s'était jetée à son cou, il n'avait qu'à peine eu le temps de la repousser sur le côté avant de recevoir le premier coup en plein dans l'estomac. Le souffle coupé sous la violence du choc, il avait aperçu, du coin de l'œil, son arme dans laquelle un des malfrats venait de shooter, l'envoyant au loin. Un deuxième coup, reçu dans l'arcade, lui avait voilé la scène, mais il entendait très bien les hurlements de la victime, lui signifiant qu'elle était restée sur place, pétrifiée, sans penser à s'enfuir. Alors, bandant son corps pour le rendre aussi dur que possible, il avait esquivé le coup suivant et s'était rué sur le groupe qui tentait de la ramener vers le fond. Hurlant «  Mais décampez d'ici bordel, foutez le camp !! » il s'était jeté sur eux pour leur faire lâcher prise en les entraînant dans sa chute. Un corps à corps désespéré s'était alors engagé. Il savait qu'il n'en viendrait jamais à bout, mais le claquement des talons de la jeune femme s'éloignant à vive allure lui avait fait comprendre qu'elle avait enfin pris la fuite.  

 

 

 

Et voilà... voilà comment il en était arrivé là, sur ce sol glacial et enneigé, le crâne douloureux comme autant de percussions frappées sur un rythme lancinant. La morsure du froid, la douleur, il s'en foutait. Au moins était-elle hors de danger, se dit-il en fixant cette arme braquée en direction de sa tête. Il ne regrettait pas de s'être ainsi jeté dans la gueule du loup, même s'il sentait bien que l'issue n'allait pas être aussi heureuse le concernant.  

 

 

...Kaori...  

 

 

 

-Tu vas crever !! Tu sais ça ?  

 

 

La voie éructait, reprise par les ricanements de ceux qui l'entouraient, mais il ne les entendait pas. Perdu dans ses pensées, comme peut l'être un homme qui regarde sa Mort en face, il voyait défiler une multitude d'images. Il n'avait plus que Kaori en tête... Le regard perdu dans la gueule sans fond du revolver, il ne pensait qu'à sa petite sœur qui devait être en train de l'attendre... L'attendait-elle à la fenêtre ? S'était-elle habillée pour l'occasion ? Oh, il y avait peu de chances la connaissant... Avait-elle cuisiné un repas de Noël ? Avait-elle préparé sa fameuse soupe de champignons ? C'était sa grande spécialité du moment... Elle devait même avoir fait un pudding, il l'avait surprise en train de regarder la recette quelques jours auparavant. Toutes ces pensées pourraient paraître stupides en de telles circonstances, mais voilà... elles étaient les siennes. Il se disait qu'elle avait certainement dressé une jolie table pour fêter ça avec lui alors que lui, il allait mourir... Il allait mourir alors qu'il avait encore tant de choses à lui avouer sur son histoire, il allait la faire souffrir alors qu'elle avait encore tant de bonheurs à vivre...  

 

 

Il ferma les yeux, rompant ainsi le contact avec la réalité et se coupant complètement de la situation, du froid et de l'imminence du danger. Et là, il vit Kaori... Il la vit assise à la table de fête qu'elle avait préparée à leur intention. La douceur de son regard lui signifiait qu'elle était heureuse qu'il soit là, à ses cotés. Il était si bien soudain, car elle réchauffait l'atmosphère à la flamme de son seul sourire. Elle se mit brusquement à rire, comme une jeune fille insouciante, et lui sauta au cou en découvrant le paquet qu'il avait posé à côté de son assiette...  

 

 

Il rouvrit les yeux et les referma aussitôt lorsqu'un homme lui balança un coup de pied dans les côtes, sûrement un de ceux contre lesquels il s'était battu quelques secondes auparavant.  

 

Kaori... Elle était là, encore, mais dans une autre situation cette fois. Elle semblait avoir quelques années de plus. Lui se trouvait au milieu de ses camarades de classe, assis sur une chaise, dans un gymnase. Devant, au loin sur l'estrade, debout derrière un petit pupitre, rouge de confusion mais les yeux brillants, Kaori prononçait un discours qu'il n'entendait pas, mais il se sentait empli de toute la fierté du monde de la voir là, prête à saisir son avenir entre ses mains.  

 

 

Il rouvrit encore les yeux, faisant disparaître cette image, alors que s'éloignait celui qui venait de le frapper. Chaque battement de paupières ne durait qu'une demi-seconde, mais chacune de ces visions lui réchauffait le cœur. Pourtant ce n'était pas le moment de flancher. Il devait bien y avoir un moyen de se sortir de là... mais lequel ? Son souffle était court, son corps n'était que douleur, il ne tiendrait certainement jamais debout et, pour couronner le tout, il était cerné de toutes parts. Il était à la merci de celui qui le visait visiblement entre les deux yeux. Difficile de faire pire.  

 

Par réflexe, il cligna encore des yeux lorsqu'il entendit qu'on enclenchait le chien de l'arme...  

 

Kaori... Encore ce sentiment de fierté jusqu'au plus profond de lui. Elle, elle était magnifique, si belle dans sa longue robe blanche. Il ne la voyait que de dos, mais il savait que c'était elle et il pouvait deviner son bonheur qui irradiait dans tout l'espace. Cette vision était la plus belle de toutes celles qu'il avait eues jusqu'à présent. A ses côtés, un homme... celui auquel il allait la confier. Qui était-ce ? Il avait la sensation diffuse qu'il le connaissait. Cette silhouette imposante et puissante ne lui était pas inconnue, ainsi que cette aura rassurante qui émanait de lui. Mais, alors qu'il allait s'attarder sur lui pour essayer d'apercevoir ses traits derrière cette chevelure brune, le clic du chien armé parvint à ses oreilles et il rouvrit les yeux.  

 

 

De nouveau le froid le saisit, le froid et la nuit avec, devant lui, cet homme qui lui hurlait maintenant qu'il allait le buter dans la seconde. Les encouragements de ses acolytes rendaient la tension et la haine un peu plus palpables à chaque seconde. Le doigt était maintenant sur la gâchette. Il allait tirer. C'était fini... Alors autant fermer les yeux une dernière fois, et peut-être qu'il saurait ainsi qui était l'homme qui prendrait soin de Kaori après lui.  

 

 

Mais, alors qu'il allait baisser les paupières en une dernière acceptation de son destin, un mouvement dans l'ombre retint son attention, quelque chose de furtif, mais ce fut suffisant et il sut qu'il était sauvé. Il eut un petit sourire et reporta toute son attention sur son adversaire vociférant. Il planta son regard dans le sien et lui dit doucement :  

 

-Si j'étais toi... je ne ferais pas ça...  

 

 

Stoppé net dans son élan sous l'effet de la surprise, l'individu perdit contenance quelques secondes et relâcha la pression de son doigt sur la gâchette. Mais il remit rapidement ce masque haineux qui lui déformait le visage pour demander narquoisement :  

 

 

-Ah oui... Explique-moi donc pourquoi je ne devrais pas faire ça, tiens, tu m'intéresses...  

 

 

-Tu connais City Hunter, je suppose ? interrogea le nettoyeur, en prenant bien soin d'articuler chacun des mots, pour qu'ils prennent tout leur sens dans la tête de celui qui lui faisait face.  

 

Il sentit qu'il avait fait mouche. L'homme sembla vraiment perdre pied cette fois. Il eut l'air inquiet une fraction de seconde, puis il éclata soudain d'un rire sans écho.  

 

 

-Non mais je rêve ! Vous avez entendu ça, les mecs ? Monsieur croit que City Hunter va venir le sauver ! hurla-t-il de rire dans le silence de la ruelle, mais tu crois au Père-Noël mon gars !  

 

 

« Oh Oh Oh ! » entendit-il alors dans son dos, tandis que le canon d'un magnum 357 se posait sur sa nuque. Ce rire tonitruant, reprenant l'intonation du Père-Noël, et le contact métallique de l'arme eurent sur le gangster l'effet d'une bombe, et il sut immédiatement à qui il avait affaire. Déglutissant difficilement, le malfrat lança un regard circulaire autour de lui pour trouver de l'aide auprès de ses « frères », mais il ne vit personne. Il n'y avait que cet homme derrière lui et ce flingue qui lui faisait comprendre violemment qu'il fallait qu'il lâche le sien. Alors il lâcha prise. Face à City Hunter il n'avait aucune chance. Son revolver tomba au sol et il leva les mains en l'air, signifiant par ce geste qu'il se rendait.  

 

 

-Non mais tu te crois où, espèce d'ordure ? entendit-il siffler à ses oreilles, tu crois pouvoir être à deux doigts de violer une jeune fille le soir de Noël et t'en tirer à si bon compte ? Tu crois pouvoir vouloir tuer un homme et endeuiller sa famille et t'en tirer simplement en levant les mains ? Alors laisse-moi te dire un truc, entendit-il en même temps qu'un cliquetis signifiant que sa fin était proche, je crois que c'est toi qui crois au Père-Noël !  

 

 

Et lorsque l'arme tira, lui emportant au passage un bout d'oreille, la détonation lui déchira tellement le tympan qu'il se crut mort, et il tomba de tout son long dans la neige.  

 

 

Au moment où le chef de gang tournait de l'œil apparut aux yeux de Hideyuki celui qu'il n'avait fait qu'apercevoir jusqu'à présent. Ryo, qui se tenait penché au-dessus de l'homme évanoui, affichait un air faussement étonné et un sourire franchement goguenard.  

 

-Vraiment, les malfaiteurs, c'est plus ce que c'était ! fit-il avant de se diriger vers son partenaire auquel il adressa un clin d'œil. Alors, Maki, quel effet ça fait de voir le Père-Noël en chair et en os?  

 

-Ben écoute, je ne pensais pas que ça me ferait autant plaisir de le voir débarquer un jour dans une ruelle de Shinjuku ! répondit-il en agrippant la main tendue et en se relevant péniblement.  

 

-Allez, je te ramène chez toi. Par contre, je suis désolé mais je n'ai que mon épaule à te proposer. Rudolph était malade et il est resté à la maison, plaisanta son partenaire en le soutenant pour l'aider à rester debout.  

 

-Ça ira... Mais on les laisse là ? demanda-t-il lorsqu'il vit que Ryo se dirigeait vers la grande rue, sans plus se préoccuper des hommes qu'il avait mis KO sans que leur chef ne s'en aperçoive.  

 

-T'inquiète, la jeune femme que j'ai croisée a déjà dû alerter les flics. Donc, il vaut mieux qu'on débarrasse le plancher si tu veux mon avis... sans oublier tes petites affaires ! conclut-il en se penchant pour ramasser l'arme qui avait glissé contre le mur.  

 

 

 

Alors que des sirènes hurlantes se faisaient entendre dans le lointain, les deux hommes se fondirent dans le décor enneigé, comme s'ils n'avaient jamais été là, nourrissant ainsi la légende urbaine qui voulait que City Hunter apparaisse toujours au moment où tout semblait désespéré, pour disparaître ensuite sans laisser de traces.  

 

Pourtant, ce n'était pas une légende urbaine qui avançait dans les rues de Shinjuku, c'était bien deux hommes. L'un des deux titubait et avait visiblement beaucoup de mal à mettre un pied devant l'autre, et s'il ne s'effondrait pas, c'était grâce à celui qui lui prêtait son épaule et l'aidait à marcher, tout en se moquant de lui :  

 

 

-Non mais je te jure, jouer les héros pour draguer une miss mokkori ! C'est Saeko qui va être contente de l'apprendre tiens ! Quoique, voilà qui est intéressant... Comme ça, j'arriverai peut-être à lui soutirer un coup ou deux !  

 

 

 

Hide soupirait, Ryo hurlait de rire et faisait l'imbécile, mais son bras continuait de soutenir fermement son partenaire pour qu'il souffre le moins possible de ses ecchymoses. Il le portait presque complètement. En tout cas, c'est ce dont l'ancien policier prit conscience en sentant son corps retrouver soudain tout son poids et sa douleur lorsqu'ils arrivèrent devant chez lui et que Ryo le lâcha doucement. Il se tourna alors vers lui et ne fut pas surpris de lui voir un air soucieux.  

 

-Ça va aller pour monter ?  

 

-Oui... Je te remercie Ryo, vraiment, sans toi je ne...  

 

-Laisse tomber tu veux, le coupa son partenaire d'un ton ferme, promets-moi juste d'éviter, à l'avenir, de te remettre dans une situation de ce genre.  

 

 

-Oui bien sûr... répondit Hide en souriant évasivement, mais ne t'inquiète pas, je n'ai pas envie de mourir demain. J'ai l'intention de finir très vieux... de vivre... certaines choses, dit-il en repensant à ces images que ses paupières baissées lui avaient laissé entrevoir.  

 

 

Puis, devant le regard interrogateur de Ryo, il reprit en riant :  

 

-Oui, je veux voir ce que donnera le grand Ryo Saeba dans 50 ans !  

 

-Oh mais ça je peux te le dire de suite, il sera encore et toujours le plus grand étalon de Shinjuku ! Ah ça oui, et sans Viagra, tu peux me croire ! fanfaronna son fringant partenaire, en souriant de toutes ses dents et en bombant le torse.  

 

Devant son air stupide, Hide ne put s'empêcher d'imaginer un papi Saeba en train de courir derrière les petites jupettes des demoiselles et il éclata de rire. Son corps lui rappela alors brutalement qu'il venait d'être trop malmené pour s'autoriser ce genre de choses. Pris d'un étourdissement, il bascula légèrement en avant et serait tombé si Ryo ne s'était placé devant lui pour le maintenir debout.  

 

-Tu es sûr que ça va aller ? l'entendit-il lui demander, l'inquiétude perçant dans sa voix, tu n'es pas obligé de jouer le héros devant moi, je ne suis pas une miss mokkori tu sais !  

 

-Oui oui, ça va, je vais juste éviter de rire à tes bêtises, lui répondit Hideyuki en retrouvant ses esprits et son équilibre. Mais, dis-moi, est-ce que tu veux monter et dîner avec nous ? Ma sœur a dû préparer un repas de fête...  

 

-Non merci, un repas préparé par une gamine... je suis sûr que je mangerai mieux au Lotus Ecarlate !  

 

-... Lotus Ecarlate... Tu ne devais pas aller au New Bunnies plutôt ? s' interrogea son partenaire qui commençait à se diriger vers la porte d'entrée.  

 

-Heu... oui... Le New Bunnies... mais j'ai changé d'avis. Allez rentre chez toi maintenant, ta sœur t'attend rétorqua un Ryo qui lui semblait légèrement embarrassé, je suis sûr qu'elle a hâte de recevoir ses cadeaux de Noël !  

 

La main sur la poignée de la porte de l'immeuble, Hide se figea alors brusquement. Le cadeau de Noël !! Il avait complètement oublié qu'il voulait offrir un cadeau à Kaori ! Il était maintenant trop tard et vu son état, il n'arriverait de toute façon jamais à se traîner jusqu'à une éventuelle boutique restée ouverte ! Il n'était qu'un imbécile ! Il y avait pensé toute la journée pour finalement finir par oublier !  

 

-Rhaaaa, c'est pas vrai, gémit-il en se frappant la tête du plat de la main, ce qui le fit regémir, mais de douleur cette fois.  

 

-Quoi ?  

 

-J'ai oublié le cadeau de Kaori ! répondit Hide en se retournant vers Ryo, la mine défaite. Il passa alors de la déception à la stupeur en découvrant un paquet tendu dans sa direction.  

 

 

-....... ?? fut tout ce qu'il trouva à dire, en clignant les yeux d'incompréhension.  

 

 

-J'avais l'intention d'offrir ça... heu... à une petite serveuse, histoire de gagner des points sur les autres clients, mais je pense que tu en auras plus besoin que moi ! C'est un cadre... Tu m'as dit que vous aviez fait une photo de vous deux dans le parc... Tu n'auras qu'à la mettre dedans...  

 

Ryo lui semblait de plus en plus mal à l'aise, il bafouillait, cherchait ses mots, mais Hideyuki n'avait vraiment pas la tête à chercher le pourquoi du comment de ce comportement. De toute façon, il ne lui serait jamais venu à l'esprit que son partenaire ait pu acheter ce cadre en pensant à Kaori, ni qu'il l'ait eu sur lui depuis deux jours en se demandant comment faire pour le lui faire parvenir. Aucune chance vu qu'il ignorait que son partenaire et sa sœur s'étaient déjà rencontrés. De toute façon, après cette soirée mouvementée, Hideyuki ne réfléchissait plus, il ne pensait maintenant plus qu'à Kaori qui devait être morte d'inquiétude. Il attrapa donc le paquet enrubanné et ouvrit la porte de l'immeuble. Avant de pénétrer dans l'entrée, il se retourna une dernière fois vers Ryo :  

 

 

-Merci pour tout Ryo... Et Joyeux Noël...  

 

-Joyeux Noël à toi aussi Maki...  

 

Ryo regarda son partenaire se diriger péniblement vers les escaliers et commencer à monter les marches. Il leva alors les yeux vers la fenêtre éclairée du troisième étage, où il savait qu'elle se tiendrait. Et effectivement, dans la lumière, se découpait une silhouette qu'il connaissait bien et qui, parce qu'elle ne regardait pas dans leur direction, ne savait pas encore qu'elle pouvait être rassurée. Il attendit de la voir faire un mouvement brusque, comme un sursaut, puis disparaître vers l'intérieur de la pièce, pour prendre la direction de son propre appartement. Secouant la tête pour débarrasser ses cheveux des quelques flocons qui avaient profité de cette pause pour les pigmenter de blanc, il mit les mains dans ses poches et, un léger sourire sur les lèvres, murmura comme pour lui-même : « … Et Joyeux Noël à toi aussi, Sugar Boy ».  

 

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Il était une fois, un soir de Noël, dans une grande ville que l'on pourrait baptiser Tokyo, une jeune fille qui veillait sur le sommeil de son frère en caressant du bout des doigts une photo qu'elle venait de glisser dans un joli cadre en verre.  

 

Il était une fois un ancien policier, devenu nettoyeur, qui faillit forcer son destin en faisant ce pour quoi il était prêt à mourir : protéger la ville et ceux qu'il aimait et qui, alors qu'il sentait la présence de sa sœur au pied de son lit se disait que, s'il le fallait, il recommencerait.  

 

Il était une fois un homme de l'ombre qui, parce qu'il avait voulu s'abreuver à la chaleur d'une fenêtre derrière laquelle il savait trouver les deux personnes qui comptaient le plus pour lui s'était trouvé, par hasard, au bon endroit au bon moment pour repousser de quelques mois l'inéluctable et leur offrir le plus précieux des cadeaux : du temps.  

 

 

 

 

 


Chapter: 1


 

 

 

 

 

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