Chapter 1 :: Chapitre 1

Published: 04-01-19 - Last update: 04-01-19

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Chapitre 1  

- Je suis enceinte.  

Surprise, Kaori regarda Ryo, ne sachant comment réagir. Elle vit son partenaire passer en un instant du choc à l’expression de désespoir grotesque. Tombant à genoux, les lèvres prises dans un rictus, il se mit à hurler :  

- Pourquoiiiiiiiii ?Pourquoi tu me fais ça à moiiiiiii ?  

Il se jeta sur la future mère mais fut rapidement intercepté par un coup de massue qui l’encastra dans un mur adjacent…  

- Ca t’apprendra à grandir !  

Elle se tourna vers sa meilleure amie.  

- Miki, c’est merveilleux ! Je suis tellement heureuse pour vous deux.  

Kaori se jeta dans les bras de son amie, arborant le plus radieux sourire qui soit. Pourtant en son for intérieur, tout n’était que chaos et elle se sentait vaguement jalouse de son amie. Elle aurait tant aimé être à sa place… Mais le meilleur d’elle-même l’emporta et elle fit face avec un naturel déconcertant même lorsqu’elle se tourna vers Umibozu et le prit dans ses bras brièvement pour le féliciter. Celui-ci rouge de confusion se contenta de toussoter un merci gêné.  

- C’est un merveilleux cadeau de Noël. C’est prévu pour quand ?  

- Juillet. Je suis tellement heureuse si tu savais…  

Ryo regarda Kaori et Miki échanger. Il avait tout de suite senti dans le regard de sa partenaire la détresse qu’avait provoquée l’annonce de Miki. Il savait que la maternité était un de ses rêves les plus importants mais qu’elle ne pourrait pas y accéder dans cette vie de dingues qu’ils menaient… Il s’était empressé de faire le pitre pour détourner son attention et lui faire reprendre le dessus. Il avait réussi au prix d’une belle bosse… Il se tourna vers Umibozu, l’air sérieux, et lui tendit la main :  

- Félicitations, Falcon.  

Celui-ci le jaugea un dixième de seconde et accepta la poignée de mains. Kaori le regarda interloquée :  

- T’es malade, Ryo ? Même pas une petite vacherie ?  

- Eh !!! Je sais me tenir quand même…., s’offusqua-t-il. Je ne comprends pas ce qu’elle trouve de plus à tête de poulpe mais maintenant qu’un petit octopus est en route…  

Il ne put achever sa phrase : une massue, un plateau et une pile d’assiettes lui atterrirent en pleine figure et il se retrouva par terre, les quatre fers en l’air, sans avoir eu le temps de réagir. Kaori s’approcha de lui avec un sourire moqueur.  

- Tu me rassures… C’était trop beau pour être honnête…  

- Mais je suis un homme droit…  

- Oui, surtout le matin et en dessous de la ceinture…  

Kaori avait répliqué sans réfléchir et se couvrit la bouche lorsqu’elle réalisa l’énormité de ses propos… Elle ne put s’empêcher de visualiser tous ces matins où elle l’avait surpris, le mokkori bien éveillé, alors qu’elle venait le réveiller, de ressentir ce sentiment de gêne mêlé de désir inassouvi qui faisait se teinter ses joues d’une couleur rouge plus ou moins vive et de l’inévitable massue qui masquait son trouble aux yeux de son partenaire.  

Elle ne savait plus où se mettre et finit par prendre la poudre d’escampette en prétextant des courses à faire.  

- Eh bien, j’en connais un à qui on a rabaissé le caquet pour une fois, ironisa Miki.  

En effet, surpris par la répartie de Kaori, Ryo était resté sans voix. Ce fut autour de la barmaid de rester ébahie lorsque Ryo la prit dans ses bras sans tenter d’en profiter :  

- Félicitations Miki. Prends soin de vous deux. Un enfant est une chose très précieuse. Je…  

Il se ravisa et s’éloigna vers la porte en leur faisant un geste de la main.  

- A demain, les amis…  

La porte se referma sur lui, laissant le couple pantois…. Miki se tourna vers son mari.  

- C’était quoi ce numéro ?  

- Ce n’était pas un numéro… pour une fois, lui répondit Falcon d’un ton égal. Voyant sa femme bailler ouvertement, il l’envoya se reposer. Octopus… le bébé, se reprit-il avec un très léger sourire, la fatiguait.  

Kaori n’était pas rentrée directement après être partie du cat’s eyes. Elle avait erré sans but dans la ville jusqu’à finir au parc où elle regarda longtemps les enfants jouer dans la neige. Elle n’arrivait pas à se sortit de l’esprit cette unique pensée : pourquoi elle et pas moi ? Pourquoi Miki avait-elle tout ce dont elle rêvait ? Un mari qui l’aimait et la respectait, des bras qui l’entouraient le jour et la nuit, bientôt un bébé, une vraie famille… Kaori sentit les larmes lui monter aux yeux. Elle se sentait tellement nulle, insignifiante, lorsqu’elle comparait sa vie à celle de son amie. Elle n’avait rien ou presque : plus de famille, pas de petit ami, un métier où elle n’était pas toujours sure d’assurer…  

Elle travaillait d’arrache pied pour se montrer à la hauteur de sa position, pour trouver grâce aux yeux d’un homme à la fois professionnellement et sentimentalement, un homme et un seul : Ryo. Mais, même s’il lui avait déjà montré des signes d’affection et de considération, rien ne laissait présager quelque chose de plus fort qu’un partenariat plus ou moins amical. Elle voulait tellement plus avec lui : elle voulait lui offrir son amour, son âme, sa vie…. Mais lui n’en voulait pas.  

Les larmes sortirent d’elles-mêmes, amères et douloureuses. Elle pleura pendant un long moment et attendit encore avant de rentrer pour que les stygmates de sa douleur s’atténuent.  

Ryo rentra directement du café à l’appartement. Il n’y trouva pas Kaori et se douta qu’elle ne rentrerait pas avant un moment. Elle devait avoir besoin de réfléchir. Miki était enceinte… Falcon allait être père… Il était heureux pour eux mais ne comprenait pas qu’ils aient envie de faire entrer un être innocent dans le monde dans lequel ils évoluaient. Ils étaient retirés, se dit-il, ce qui n’était pas son cas.  

Il aurait aimé être comme eux, libre d’aimer et de fonder une famille. Mais fidèle à ses principes et surtout enferré dans ses craintes, il ne pouvait supporter l’idée de risquer la vie d’êtres chers, cibles bien trop privilégiées par ses ennemis pour l’atteindre.  

Et il savait aussi qu’il se mentait à lui même : il avait déjà bafoué ses principes en gardant Kaori près de lui. Même s’ils n’étaient pas en couple, il en avait déjà fait une cible visible auprès du milieu. Une petite voix dans sa tête, nullement inédite, revint à la charge : qu’attendait-il pour approfondir sa relation avec elle ? Il connaissait ses sentiments et les siens. Il savait qu’elle n’attendait qu’un signe de lui… Le danger était déjà là, pourquoi ne pas ajouter un peu de douceur et de bonheur dans l’équation...  

Il entendit la clef tourner dans la serrure et elle pénétra dans la pièce. Il sentit instantanément son coeur battre un peu plus vite puis se serrer douloureusement lorsqu’il croisa son regard. La petite lumière qui faisait briller ses yeux d’ordinaire était vacillante. Kaori détourna vite les yeux et se dirigea vers la cuisine.  

- Je vais faire à manger.  

Il la suivit en silence et la regarda s’activer nerveusement. Elle sortit des casseroles qu’elle entrechoqua, prit un couteau dans sa main qui tremblait légèrement… Il sentait qu’elle faisait un gros effort pour maintenir le contrôle et il aurait donné n’importe quoi pour pouvoir alléger sa peine. Il se rendit compte qu’elle pleurait en silence. Il s’approcha d’elle et posa les mains sur ses épaules, ce qui la fit légèrement sursauter.  

- Kao, pourquoi pleures-tu ?  

- Ce sont les oignons…  

D’habitude, elle ne pleurait pas autant, mais ça il ne le lui aurait pas dit car cela aurait signifié qu’il la regardait vaquer à ses occupations sous couvert de lecture pernicieuse. Tant de non-dits existaient entre eux…  

- Miki va avoir un bébé, dit-il d’une voix songeuse. Il sentit Kaori se tendre et soudain ses épaules furent secouées de sanglots. Il la força à se retourner et la serra contre lui. Quelques minutes plus tard, elle se calma mais ne s’écarta pas.  

- Ryo… je suis morte de jalousie…, dit-elle d’une voix honteuse. C’est moche d’en vouloir à sa meilleure amie d’être heureuse… Elle a tout ce que je voudrais.  

- C’est humain. Et je ne suis pas sûr que ce soit à elle que tu en veuilles. Plutôt à moi pensa-t-il.  

- Réfléchis, tu t’imagines avoir un enfant de Umi ?  

- Ryo ! Elle s’écarta de lui, horrifiée.  

- Mais si réfléchis, une petite fille avec des muscles saillants et des lunettes noires.  

Kaori s’en voulut mais ne put s’empêcher de rire. Ryo la regarda droit dans les yeux. Il avait encore réussi. La petite lumière reprenait de la vigueur, tout comme une certaine partie de son anatomie qui avait bien senti les formes bien placées et les lèvres sensuelles de la personne enlacée touchant légèrement son torse au travers du tissu… L’air se chargea en intensité. Son regard, descendu vers les lèvres de Kaori, y restait scotché. Il les vit frémir d’impatience. Les mains de Kaori s’étaient installées sur ses hanches et il sentait ses doigts pianoter de nervosité sur son pantalon provoquant des petites décharges électriques. Il n’était plus maître de lui et sa main remonta vers la nuque de la jeune femme tandis que l’autre descendait au creux de ses reins. Tout doucement, il rapprochait ses lèvres des siennes. Elle ne reculait pas et soutenait son regard. Il sentait leur souffles saccadés s’entremêler...  

Soudain la porte de l’appartement claqua. Ils s’éloignèrent l’un de l’autre, comme pris en faute. Mick fit son apparition, inconscient du trouble des deux jeunes gens. Il entraîna Ryo à sa suite pour une tournée des bars, ce dernier remerciant silencieusement le ciel de son intervention. Nul doute qu’il aurait apprécié embrasser sa partenaire mais pas les conséquences que cela aurait entraîné.  

Kaori s’appuya sur le plan de travail pour reprendre ses esprits et invectiva tous les dieux et esprits du ciel pour le mauvais tour qu’ils venaient -encore une fois- de lui jouer. Ryo était parti la laissant seule. Bien, elle se reposerait et ne serait que plus fraîche pour le réveillon de Noël qui aurait lieu le lendemain... 

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