Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated R - Prose

 

Author: nodino

Beta-reader(s): Amelds

Status: Completed

Series: City Hunter

 

Total: 22 chapters

Published: 17-02-10

Last update: 17-11-18

 

Comments: 139 reviews

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RomanceDrame

 

Summary: Une nuit, tout bascule et la rupture devient inévitable... L'amour aussi... Mais jusqu'où peut on aimer quand on est City Hunter ?

 

Disclaimer: Les personnages de "Ain't no sunshine." sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo.

 

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   Fanfiction :: Ain't no sunshine.

 

Chapter 6 :: A la croisée des chemins : Souvenirs from Paris

Published: 07-09-10 - Last update: 10-04-16

Comments: Bonsoir **Hcity rougit de honte en regardant la date de sa dernière maje** Désolée d'avoir tant tardé pour majer cette suite et j'espère que vous avez encore ma fic en tête, mais je vais peut être me faire pardonner en disant que je maje sans l'avoir fait corriger car ma beta est en vacances (quoique ce n'est pas forcément un argument en ma faveur °^^). Avant de vous laisser lire, je voudrais vous remercier pour vos reviews qui m'ont fait vraiment très plaisir. Je suis contente que le chap précédent vous ait plu, même si je ne suis pas persuadée que celui ci vous plaira autant. Mais il faut bien parler un peu de ce personnage non ? Non ? mais si, juste un peu allez ... ^^ Bon, je vous laisse et je vous dis à bientôt pour la suite lol

 


Chapter: 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22


 

La porte se referme sur le dernier invité, tandis que le tintement de la clochette s’estompe dans le silence du Cat’s.  

 

Assise sur un tabouret, devant le comptoir, je regarde Miki revenir vers moi en se frottant les mains, l’air fatigué mais heureux.  

 

-Voilà une bonne chose de faite, dit-elle en passant de l’autre côté du bar, je te fais un café et après on range tout ça ?  

 

-Oui, je veux bien merci.  

 

Miki attrape trois tasses qu’elle pose devant moi et s’attelle à la préparation du café, avant de me lancer avec le sourire :  

 

-Je suis désolée Kaori… Tu es mon invitée et c'est toi qui te retrouves chargée du rangement…  

-Tu plaisantes j’espère ! Ça ne me gêne pas du tout voyons ! Et puis la pauvre Kasumi était tellement épuisée d’avoir passé la soirée à repousser le Doc qu’elle ne tenait plus debout !  

 

Le rire clair de Miki résonne dans l’espace, alors qu’elle repense au calvaire de Kasumi. En effet le Doc, après avoir décrété que Saeko n’était pas la femme qu’il lui fallait, surtout après qu’elle l’ait collé au mur à l’aide de ses lames, avait reporté toute son attention et son « affection » sur l’ancienne voleuse. Celle-ci avait eu alors toutes les peines du monde à le convaincre qu’elle ne souhaitait pas quitter son célibat pour un homme dans la fleur de l’âge et au Mokkori encore bien vigoureux.  

A mon tour, je me remémore les cris de Kasumi pendant qu’elle courait autour de la table en balançant tout ce qu’elle trouvait en direction du Doc pour ralentir sa « fougue » et je joins mon rire à celui de Miki, qui est en train de remplir nos tasses. Chaises, coussins, casseroles, rien de ce que le Doc s'était reçu dans la figure n'avait réussi à tempérer son enthousiasme mokkorien, digne d'une poussée hormonale juvénile, et la pauvre Kasumi avait fini la soirée perchée sur une des poutres de la salle.  

 

-Oui, la pauvre, je suppose qu’elle n’imaginait pas recevoir autant de preuves d’ « amour » pour son anniversaire ! Heureusement que Falcon était là pour la protéger… Hein Nounours ? dit-elle en faisant glisser une tasse vers Umi.  

 

-Humpf… Quand apprendront-ils donc à se tenir correctement, tous ces imbéciles ? répond celui-ci en avalant son café d’une traite, avant de repartir vers la table armé d’un plateau. Restez à discuter les filles, je vais commencer à ranger.  

 

Miki tourne la tête dans sa direction et Umi s’arrête brusquement dans son élan, avant de se mettre à rougir jusqu’au sommet du crane. Malgré sa cécité et le fait qu’il nous tourne le dos, il a réussi à ressentir le regard empli d’amour que sa femme vient de poser sur lui. Ils sont touchants tous les deux, même si j’ai surtout envie de rire en le voyant soudain se mettre à fumer comme un volcan au bord de l'éruption. Mais Umi finit par maîtriser ses émotions et repart en direction de la table, non sans avoir au préalable ronchonné : «Humpf... Ces femmes... »  

 

Alors que le bruit de la vaisselle prend la place qu'occupaient nos rires, je sens que le regard de Miki se porte désormais sur moi, un regard dont l'intensité est révélatrice des questions qui tournent dans sa tête. Je préfère éviter de le croiser et m'absorbe dans la contemplation de mon café, jouant à redessiner ses volutes blanches au parfum corsé, en tournant doucement la cuillère au fond de ma tasse. Quelques secondes passent ainsi, dans un silence seulement rompu par le bruit que fait Umi en empilant les assiettes sur le plateau. Mais les espoirs que j'y avais placés sont apparemment vains, car l'aura de Miki est toujours autant chargée de curiosité.  

 

Qu'attend-elle de moi ? Que je lui confirme ce qu'elle soupçonne du tête à tête entre Ryo et moi sur le balcon de la chambre ? Que je lui raconte la tempête émotionnelle qu'il a réveillée en moi et les doutes qui viennent désormais désagréablement agrémenter la façon dont je perçois le futur ? Que je lui avoue à quel point ce moment d'intimité emplit ma tête et mon cœur ?  

 

Non, je ne suis pas assez forte pour ça ce soir, surtout que j'imagine très bien l'enthousiasme que cela déclencherait chez elle et le mal que j'aurais ensuite à l'empêcher de comploter pour finir de nous rapprocher. Je choisis donc de botter en touche et, au moment où je relève la tête, j'affiche un large sourire et lance sur un ton léger :  

 

_On peut dire que la fête était une réussite. Je voulais te remercier d'avoir ainsi accueilli Tybault. Il m'a dit qu'il avait passé une très bonne soirée.  

 

Effectivement, grâce à son flegme affiché face aux vannes de Mick et à son excellent score aux fléchettes, bien qu'il ait perdu, Tybault semble avoir gagné quelques petits points dans l'estime du groupe. Je les sens toujours sur leurs gardes, mais c'est quand même un bon début. Le reste viendra avec le temps.  

 

_Oui, j'ai vu ça, répond-elle avec une légère moue involontaire, il est ton compagnon, je ne pouvais décemment pas le laisser dehors....  

 

Miki... La fin de sa phrase, laissée en suspens, me fait froncer les sourcils, car si elle ne dit pas que ce n'est pas l'envie de le laisser dehors qui a manqué, l'expression de son visage parle pour elle.  

 

_Miki... S'il te plaît...  

 

_Oui, bah excuse-moi, je ne peux pas non plus me forcer hein ! Je fais de mon mieux pour l'accepter, parce que c'est de toi dont on parle, mais justement parce qu'il s'agit de ton bonheur, je ne peux m'empêcher de m'inquiéter pour toi... Et de m'inquiéter aussi pour Ryo.  

 

« Ryo... »  

 

***********  

 

 

 

« Kaori... »  

 

Je regarde le dossier que j'ai finalement été récupérer auprès de Saeko - une fine chemise à rabats sur laquelle est écrit le nom de ce Tybault, ce Paris-Plouc comme l'appelle désormais Mick - et c'est à toi que je pense encore. Mais ce n'est pas le moment de me laisser aller à des émotions par trop humaines. City Hunter est en filature ce soir. Je dois donc demeurer invisible et me recentrer pour devenir mur d'impassibilité, pour que mon ombre se fonde dans les murmures inquiétants de la nuit, pour ne faire plus qu'un avec l'air, le froid et l'obscurité. Je ferme mon esprit à tout autre chose que ma cible, afin que personne ne puisse soupçonner ma présence dans cette ruelle à peine éclairée. Je suis en chasse.  

 

Je relève la tête et plonge mon regard dans la profondeur de la nuit, à la recherche de cette silhouette que je suivais. Je la devine devant moi, jusqu'à ce qu'un réverbère confirme qu'il s'agit bien de celui que je cherchais, et je le regarde traverser la route pour se diriger vers cet immeuble de standing, sur l'autre trottoir. Rien de bien intéressant à noter. Je me demande si je ne fais pas fausse route en étant ici. Mais il s'agit de toi alors forcément, la donne est faussée, surtout après ce qui s'est passé tout à l'heure entre nous. Si ce moment sur le balcon m'a lancé en pleine figure à quel point je suis faible devant toi... il a surtout réveillé mon besoin viscéral de te protéger. Quand tu étais à Nagoya, et que Miki me certifiait qu'elle avait régulièrement de tes nouvelles et que tout allait bien, j'avais mis ce besoin de côté pour respecter ta volonté de quitter City Hunter. Je me disais alors que rester loin de toi était la meilleure façon de te protéger, afin que tu puisses retomber dans l'anonymat le plus total et que le monde du Milieu t'oublie. Miki jouait son rôle d'informatrice à la perfection, même si elle restait très vague dans ce qu'était ta nouvelle vie. A croire qu'elle s'inquiétait et qu'elle avait trouvé là un moyen de me rassurer, pour m'empêcher d'aller vérifier par moi-même que tout allait bien pour toi. Maintenant, je comprends mieux pourquoi elle restait autant dans le flou.  

 

Mais ton corps contre le mien et tes lèvres frémissantes m'ont rappelé que je ne suis pas le seul à être faible et mon instinct s'est remis en branle : tant que tu m'aimeras il y aura un risque que tu sois visée... Et tu m'aimes, donc je veux vérifier qu'aucun danger ne te menace dans l'ombre.  

 

 

 

 

Et l'ombre qui m'intéresse, justement, s'apprête à passer la porte de chez lui quand mes sens perçoivent une présence. Je ne me suis pas trompé, car je le vois sursauter lorsque une silhouette émerge de la pénombre pour s'avancer vers lui. Une silhouette féminine. Il se fige en la voyant surgir de nulle part et la silhouette se déplace lentement jusqu'à lui, pour le rejoindre sous la lueur du réverbère.  

 

Je découvre alors celle qui l'attendait. Une femme, magnifique : grande, élancée, le port altier, des traits fins encadrés par des cheveux ébène, longs et soyeux, des yeux dont je perçois l'éclat dur et froid depuis l'endroit où je me trouve et une bouche qui prendrait volontiers une moue boudeuse si les lèvres n'étaient pas autant pincées. Bref, une miss Mokkori de la plus grande classe qui, apparemment, attendait depuis longtemps dans l'ombre qu'il daigne rentrer et qui n'a visiblement pas apprécié d'avoir autant poireauté.  

 

De mon côté, je ne doute pas une seconde d'arborer sur le visage le même masque glacé que la demoiselle. Mais je maîtrise assez rapidement le début de colère qui semble vouloir poindre. Je dois rester professionnel et ne pas me laisser aller aux conclusions hâtives. Je sais que dès qu'il s'agit de toi, je suis capable de faire des erreurs, et ce n'est pas le moment. Mais une chose est sûre, si jamais ce Tybault-Paris-Plouc mène une double vie, je le tue. Je ne le laisserai pas te faire souffrir.  

 

La femme est maintenant suffisamment proche de lui et je devine que la conversation s'est engagée, mais elle parle trop bas pour que je puisse l'entendre, malgré mon ouïe surentrainée. J'ai l'impression qu'elle doit siffler sa colère car je la vois tendue à l'extrême, les poings collés le long du corps et les lèvres tellement serrées qu'elles remuent à peine. J'en connais un qui doit passer un sale quart d'heure. Bien, ça lui fera les pieds et moi ça me défoule par procuration. Mais cela n'apporte pas de réponse à la principale question : qui est-ce ? Ancienne maîtresse ? Partenaire actuelle ? Femme bafouée ? Collègue de travail ?  

Cette dernière hypothèse s'effondre brusquement lorsque je le vois poser une main sur la joue de l'inconnue et qu'il lui murmure, suffisamment fort pour que je l'entende :  

 

_Mais non Princesse, ne réagis pas comme ça...  

 

Ce salopard mène donc une double vie... Je vais le tuer... Il était bien trop propre sur lui pour être réglo... Oui, c'est ça, je vais le tuer, ça me soulagera... La colère afflue dans mon corps, tel un fluide glacé, et elle vient mordre mes muscles et les crisper sous ses assauts. La mâchoire et les poings serrés, je laisse cette émotion brute finir de me convaincre qu'il m'est définitivement impossible de rester impassible lorsqu'il s'agit de toi. Je ne te mérite pas, je le sais, mais je me dis maintenant que je ne suis pas le seul à ne pas mériter ta pureté et ta grandeur d'âme. Comment ose-t-il se jouer ainsi de toi ? Tu vas certainement m'en vouloir mais je vais me faire le plaisir de lui régler son compte ce soir et lui faire sentir qu'on ne peut s'en prendre à un Ange sans en subir les conséquences !  

 

 

Je continue d'observer la scène qui se joue de l'autre côté de la rue, cherchant à saisir les murmures qui fusent entre les lèvres serrées de la demoiselle. La colère gronde chez elle aussi, une colère froide, semblable à la mienne, et j'enrage de ne pas comprendre ce qu'elle lui dit. Mais brusquement, alors que rien ne laissait présager un changement d'humeur, elle se détend et son attitude devient féline. Elle se veut envoutante dans ce deuxième round et tente la séduction, jusqu'à se rapprocher de lui pour venir pratiquement se coller contre son torse.  

 

 

Tous mes sens se tendent alors vers l'aura de ce Tybault que je me ferai un plaisir d'assommer dans la seconde qui suivra sa réaction. J'en arrive à presque souhaiter qu'il la prenne dans ses bras pour pouvoir avoir la certitude de sa traitrise et n'avoir aucun remord à lui refaire le portrait. Mais, chose étrange, rien n'émane de lui. Rien. Je n'arrive pas à capter ce qu'il ressent, comme si ce type, alors qu'une fille vient se lover contre lui, était sans émotion, aucune. Puis, lentement, comme au ralenti, à moins que ce ne soit ma colère qui déforme l'axe du temps, il vient poser les mains sur ses épaules... et la repousse, doucement mais fermement.  

 

-Non Princesse, je comprends ce que tu ressens, mais je tiens vraiment à ce projet...  

 

Mais la « Princesse » ne semble pas vouloir l'entendre de cette oreille. Au moment où il la repousse doucement, elle relève la tête. Elle rouvre alors les yeux qu'elle avait gardé fermés pendant le court laps de temps où elle se tenait contre lui, et j'entrevois un éclat presque métallique dans son regard, un éclair quasi meurtrier. La colère de cette femme dépasse pratiquement la mienne et son aura vengeresse emplit toute la rue. Elle se dégage soudain des bras de Tybault d'un geste brusque et, le regard dur, les traits déformés par la fureur, des mèches de cheveux balayant son visage, elle lève alors le bras jusque derrière elle pour acquérir un maximum de puissance et lui assène une gifle magistrale, dont l'écho vient résonner contre les murs de la rue.  

 

-JE NE SUIS PAS D'ACCORD !!  

 

Son cri de rage, les premiers mots que j'entends d'elle, claque dans l'air et elle se fige dans la position impulsée par son élan. Puis, brusquement, elle semble prendre conscience de son geste et vient poser sa main sur la joue de Tybault, qui est resté stoïque et n'a pratiquement pas bougé pendant l'attaque, pourtant violente, de la demoiselle... demoiselle qui a d'ailleurs perdu toute sa superbe et bafouille maintenant des mots d'excuses.  

 

-Oh... Tybault... Je... Je... Je suis désolée... Je... Non, je ne voulais pas... Oh, pardon.. Excuse-moi... Tybault...  

 

Les mots meurent dans sa gorge, comme s'ils hésitaient à se transformer en sanglots, et dans ses yeux, le froid métallique a laissé place à une supplique. Mais il lui attrape alors le poignet, doucement, sans violence, et recule d'un pas pour mettre de la distance entre eux. Dans sa voix, il n'y a aucune colère, juste de la lassitude, quand il lui répond :  

 

_Rentre chez toi maintenant, ça suffit...  

 

La jeune femme hoquete devant le rejet et se redresse brusquement, relevant fièrement le menton , comme si elle venait d'être victime d'un affront auquel elle se devait de faire face avec mépris. La brume de tristesse a disparu de son regard et c'est d'un ton empli de défi qu'elle lance, avant de se détourner pour partir :  

 

-Je n'ai pas dit mon dernier mot Tybault !  

 

Je la regarde s'éloigner en courant... j'aurais bien aimé qu'elle lui mette encore une droite avant de partir, mais bon...  

 

Je me concentre de nouveau sur Tybault, qui se masse maintenant la joue en la regardant s'éloigner, et je sors de l'ombre pour m'approcher de lui.  

 

***********  

 

 

 

Appuyée contre le mur de ma chambre, je regarde par la fenêtre comment le froid de janvier redessine les contours de la ville. Il estompe les lignes dures des bâtiments et agrémente les arbres de petits cristaux de givre, sur lesquels viennent se refléter les rayons de lune, pour rendre la nuit plus scintillante.  

 

 

J'ai quitté Miki pour clore la conversation qui risquait de redevenir houleuse. Lorsque j'ai compris qu'elle allait encore me demander de faire attention, j'ai préféré dire que je voulais finir de ranger la salle avant d'aller me coucher. Du coup, même si j'ai bien vu qu'elle était embêtée qu'on se quitte de cette manière, elle a compris que je ne souhaitais pas reprendre la discussion engagée plus tôt dans la cuisine.  

 

 

Elle s'inquiète pour moi, soit, mais alors il faudrait qu'elle choisisse son camp une bonne fois pour toutes ! Quand j'attendais que tu se décides enfin à faire un pas vers moi, elle me pressait de cesser de rêver après toi, disant qu'un tel abruti ne me méritait pas et que ça te ferait les pieds que je soupire après quelqu'un d'autre, et maintenant que la chose est faite, voilà qu'elle te plaint... Il faudrait savoir !  

 

 

Je me remémore ce qu'elle m'a dit de ton état pendant ces quatre derniers mois et je comprends à quel point te voir ainsi abattu et borderline a pu toucher son cœur. Je la sais suffisamment fine pour avoir ressenti correctement ton état d'esprit, et si elle me dit que tu n'étais plus qu'une coquille vide et que cette mission pour Saeko était ta bouée de secours, une sorte de dernier rempart pour ne pas sombrer, alors je la crois. Oui, je la crois car je sais le potentiel de souffrance qui réside en toi, je connais cet abîme que la vie a creusé autour de l'enfant puis de l'homme que tu es. Je la crois d'autant plus quand elle dit qu'elle s'inquiète pour toi que je la sais sincère et entière dans ses émotions. La preuve en est qu'elle avait failli venir se battre contre toi lorsque j'ai débarqué chez elle, un certain matin d'octobre.  

 

 

Ce matin-là, il y a si longtemps déjà, lorsque le taxi s'est garé devant le cat's, elle m'attendait devant la porte et elle avait accouru vers moi, en robe de chambre, pour m'aider à m'extraire du véhicule, avant de me soutenir pour avancer jusqu'au café. Elle m'avait ensuite installée dans cette même chambre, pour que je puisse dormir un peu, ou du moins me reposer, et m'avait demandé si je voulais parler. Devant ses yeux emplis de compassion, j'avais craqué encore une fois, comme dans le taxi, laissant mon corps exprimer pour moi toute ma détresse. Elle m'avait alors prise dans ses bras, comme une enfant, et moi qui n'ai aucun souvenir de ce que peuvent être les bras d'une mère, je me suis laissée bercer jusqu'à ce que les larmes se tarissent et que ne reste plus que la fatigue.  

 

D'une voix éteinte, je lui avais alors raconté ce qui s'était passé : ton comportement après leur mariage, la dispute, ce qui en avait découlé – elle avait alors retenu son souffle - et enfin ma résolution de quitter cette vie qui ne m'apporterait jamais aucun des rêves auxquels j'aspirais. Elle m'avait écouté parler de tout ce qu'elle savait déjà, la solitude qui ne me quittait pas, mon sentiment d'être seule à côté de toi, l'impression que je faisais une croix sur mes rêves pour rien. Elle n'avait rien dit au début, mais je sentais bien qu'elle fulminait et, plus je parlais, plus ses poings se serraient et, finalement, j'ai dû l'empêcher d'aller te voir pour tenter de te coller une balle entre les deux yeux. Je l'ai retenue en lui disant que c'était mieux comme ça, qu'aujourd'hui j'avais enfin eu la force de partir, que ce qui s'était passé ce soir m'avait enfin libérée de toi... Elle a alors pris sur elle et est revenue vers moi, mais je sais, la connaissant, qu'elle te tenait pour responsable et qu'elle a dû longtemps t'en vouloir. Et puis te voir souffrir a dû remplacer la colère par de la compassion. Miki ne supporte pas de voir les autres souffrir, c'est ce qui nous rapproche autant... Voilà surement pourquoi elle a du mal à se positionner.  

 

 

Je me dis que sa grimace de tout à l'heure vient du fait qu'elle s'inquiète de te savoir si près du gouffre et qu'elle ne connait pas Tybault. Peut-être que si elle l'avait rencontré en même temps que moi, elle serait plus tendre avec lui...  

 

Tybault... Lorsque j'ai débarqué à Nagoya et que j'ai commencé à travailler dans la boutique d'Eriko, il était hors de question pour moi de laisser qui que ce soit entrer dans ma vie. J'étais comme un animal blessé, refusant qu'on m'approche, refusant même de simplement sortir boire un verre avec Eriko. Je ne pleurais plus, je ne pouvais plus, je n'avais plus aucune larme en moi. J'aurais préféré, cela m'aurait soulagée. Le soir tombé, je ne souhaitais qu'une seule chose : me calfeutrer chez moi et dormir, dormir pour ne pas réfléchir, pour que le temps passe le plus vite possible et pour que ce moment où la douleur serait moins forte arrive enfin. Cela a duré ainsi plus de deux mois, deux mois à travailler comme une damnée et à dormir en attendant qu'un léger mieux se fasse sentir... En vain : j'étais toujours aussi mal, j'avais l'impression que j'étais entourée d'obscurité et que le soleil ne se lèverait jamais plus sur ma vie.  

 

 

Et puis, un jour, alors que je courais pour ne pas arriver en retard, j'avais bousculé un homme qui se trouvait en face de la boutique et qui attendait pour traverser. Je m'étais étalée lamentablement sur le trottoir, l'entraînant avec moi dans ma chute. On s'était retrouvés tous les deux au sol et, alors que je me m'asseyais péniblement en m'excusant platement de ma maladresse, je m'étais aperçu que l'homme tenait dans sa main un cornet de glace, glace qui se trouvait maintenant écrasée et étalée sur son blaser blanc. Totalement confuse, j'avais redoublé d'excuses, sorti un mouchoir et tenté désespérément d'enlever la tache, que mes efforts étalaient de plus en plus sur le tissu. Soudain, le ridicule de la situation m'avait frappée... et je m'étais mise à rire. Il m'avait regardée sans comprendre, en se demandant s'il devait se mettre en colère ou rire devant tant de nonchalance. J'avais redoublé d'hilarité devant son air pincé et ce cornet vide qu'il tenait toujours à la main, et il avait fini par rire avec moi. Ce rire était vraiment le bienvenu, j'avais l'impression de respirer comme je ne l'avais pas fait depuis plus de deux mois alors, lorsque j'avais arrêté de rire, je lui avais souri. Sans le savoir, il venait de m'offrir une bouffée d'air frais et je lui en étais reconnaissante.  

 

Je l'avais invité à venir dans la boutique pour voir avec Eriko ce qu'il était possible de faire pour sa veste et c'est ainsi qu'il était entré dans ma vie. Au début, il venait juste pour faire quelques achats et en profitait pour venir me parler puis, au fil des jours, il n'avait même plus cherché à trouver des excuses pour venir. Il entrait dans la boutique, lançait un bonjour à la cantonade et venait ensuite tenter de me convaincre de sortir prendre un verre avec lui, ce que je refusais systématiquement. C'était devenu comme un jeu entre nous, mais ce n'était pas parce que j'adressais de nouveau la parole à quelqu'un que j'étais prête à me laisser apprivoiser. La douleur était toujours aussi présente dans ma poitrine et je n'avais toujours qu'une seule hâte : que la nuit apparaisse, que le soleil se couche dans la vie comme il l'était dans mon cœur pour pouvoir aller dormir.  

 

Cela avait duré pratiquement un mois, jusqu'à ce jour où un homme s'était présenté à la boutique et avait malmené une jeune vendeuse. Je l'avais attrapé par le col et lui avais intimé l'ordre de la laisser tranquille. Je n'avais pas peur, j'étais une ancienne nettoyeuse et je me savais capable de prendre le dessus sur lui s'il voulait s'en prendre à moi. En tout cas, il était hors de question de le laisser s'en prendre à plus faible que lui, et j'étais prête à le lui faire savoir. Alors que je faisais face à cet homme, prête à en découdre, une ombre s'était dressée à mes côtés : Tybault... qui, sans me regarder, m'avait lancé : « Je suis persuadé que tu peux t'en sortir seule, mais dis-moi seulement si tu as besoin de moi ».  

 

 

Tybault... qui était là, qui me faisait confiance et qui voulait m'épauler...Tybault qui me confortait dans cette force que je ressentais... Tybault qui fixait cet homme avec un regard que j'avais déjà vu chez quelqu'un d'autre, mais qui, lui, croyait en moi...Tybault qui n'attendait qu'un geste de moi pour essayer de m'offrir un peu de bonheur, un peu de soleil...  

 

 

L'affreux qui s'en était pris à la petite vendeuse n'avait pas insisté et avait rapidement disparu du magasin. Peu importait que ce soit dû à mon assurance ou au regard de Tybault. Je l'avais alors regardé s'assurer que ma petite collègue allait bien et j'avais été touchée par son visage redevenu serein et calme après avoir été aussi tendu quelques secondes auparavant. Lorsqu'il était revenu vers moi, un petit sourire en coin mais les yeux si sérieux, j'avais pris ma décision :  

 

-Et si on allait manger une glace ?  

 

 

*********************  

 

 

 

Alors que ce Tybault me tourne le dos, je sors de l'ombre et m'approche de lui. Il a des choses à m'expliquer et j'espère pour lui que ses explications tiendront la route.  

 

_Rebonsoir Ryo...  

 

Il est toujours de dos... Il m'a senti arriver... Intéressant... Décidément, cet homme est plein de surprises.  

Il se tourne lentement vers moi et nous nous faisons alors face, en silence, chacun soutenant le regard de l'autre. La rue est de nouveau silencieuse, mais la colère de la mystérieuse miss Mokkori flotte encore dans l'air et tient compagnie à mon animosité.  

 

_Vous me suivez ?  

 

J'ignore la question et tourne la tête en direction du chemin emprunté par la demoiselle.  

 

_Qui était-ce ?  

 

_Je ne vois pas en quoi ça vous regarde...  

 

Je plante mon regard dans le sien, noir. Encore une fois, il le soutient sans sourciller.  

 

_Je ne plaisante pas. Je vais reposer ma question... Qui est-ce ?  

 

Il soupire et lève les yeux au ciel, comme si ce genre de situation lui était habituel.  

 

_C'est ma sœur... Satisfait ?  

 

Les bras m'en tombent et j'en suis tellement abasourdi qu'il me semble entendre un cri de corbeau dans le lointain. Cette fille qui se lovait langoureusement contre lui... sa sœur !?  

 

_Hein ? Votre sœur ? Noonnnn !? Pas possible !? dis-je en tentant tant bien que mal de retrouver une certaine contenance.  

 

_Oui je sais, les gens sont souvent perplexes, mais c'est bien ma sœur... Elle s'appelle Paris, rappelez-vous.  

 

_Quoi !? Mais elle était... et elle a... J'en perds mes mots tellement la situation me semble étrange et … Blahhhhh.... Franchement Tybault, je n'ai jamais eu de sœur mais je ne crois pas que ce soit un comportement des plus habituels entre frère et sœur !  

 

_Oui, je sais... Elle est... disons... un peu exclusive et exaltée. Nos parents sont décédés alors que nous étions très jeunes et nous avons vécu en vase clos, comptant surtout l'un sur l'autre pour nous en sortir. Aujourd'hui encore, nous sommes très proches et elle m'est très attachée.  

 

_Euh, elle ne serait pas un peu dingue plutôt ? demandé-je en me grattant la tête, pendant que la scène à laquelle j'ai assistée repasse dans ma tête sous cet angle nouveau.  

 

_Ça suffit ! Ce qui concerne Paris ne vous regarde pas !  

 

La phrase a fusé, presque menaçante et je peux voir à ce petit froncement au niveau de son front que le flegme qu'il affiche n'est qu'apparent. Je souris intérieurement, j'ai marqué un point. Il inspire profondément pour reprendre le contrôle, avant de reprendre sur un ton plus neutre :  

 

_Je ne devrais même pas vous répondre, mais si je le fais c'est parce que je sens bien qu'il s'agit de Kaori. Vous vous inquiétez pour elle, vous avez vu Paris, vous en avez tiré des conclusions. C'est normal, j'ai l'habitude. C'est pourquoi je vous réponds, mais je n'ai aucun compte à vous rendre. Ne vous inquiétez pas pour Kaori, je tiens beaucoup à elle. Tout ira bien. Maintenant bonsoir.  

 

-Effectivement, vous n'avez aucun compte à me rendre, du moins tant que je verrai le sourire de Kaori. Il est mon baromètre, alors faites en sorte qu'il reste au beau fixe. Sinon, je vous le dis, que vous le vouliez ou non, vous aurez des comptes à me rendre.  

 

 

Sur ces derniers mots, je me fonds de nouveau dans la pénombre de la nuit... Sa sœur... Voilà qui répond à une des nombreuses questions de cette soirée. En reste encore une autre... et non des moindres. Comment ce type qui, dans la vie et sur papier, semble être le gendre parfait, le quidam le plus insignifiant, devient-il finalement un homme capable de deviner ma présence ? Comment se fait-il que, tout à l'heure, quand sa soeur se collait contre lui et l'incendiait sur place, je n'aie pas réussi à capter son aura ? Serait-ce un maître en arts martiaux ? A moins qu'il ne soit capable de la dissimuler ? Voilà qui changerait bien des choses... Et pourquoi Paris était-elle si remontée contre lui ? En tout cas, elle, elle colle tout à fait avec le profil que le dossier de Saeko en faisait. Je me demande si elle pourrait représenter un danger pour Kaori... Quelque chose m'échappe, je ne sais pas quoi, mais tout ça ne me plait pas beaucoup...  

 

Des questions encore plein la tête, je quitte la rue pour une petite ruelle sombre, où je tombe sur une silhouette courbée que je connais bien pour l'avoir souvent fréquentée ces derniers temps : le vieux Xiang. Il est penché au dessus d'une benne à ordures et fourrage dedans consciencieusement.  

 

_Xiang... Que fais-tu là ? Tu as changé de quartier ? Tu préfères les poubelles de haut standing maintenant ?  

_Hey, montre un peu de respect à tes aînés, jeune blanc-bec ! Je te signale que je travaille pour toi là !  

 

_Hmmm ? C'est à dire ?  

 

_Ton clan Futago... Il semblerait que les ordres viendraient de quelque part dans cette partie de la ville. Alors, quitte à faire les poubelles, autant les faire dans ce coin et voir si je ne peux pas trouver quelque chose d'intéressant.  

 

_OK OK, toutes mes excuses mon ami, dis-je en souriant. Et puisque tu es dans le coin, je vais te demander un service. Tu as vu les personnes qui étaient devant l'immeuble. Je te connais, tu vois tout, je suis sûr que tu as assisté à la scène. Donc, j'aimerais que tu me surveilles cet immeuble et que tu me dises si tu vois des choses intéressantes les concernant.  

 

_Intéressantes ?  

 

_Oui... je ne sais pas trop... Particulières... Reste dans ce coin, tiens-moi au courant de ce que tu verras et voilà de quoi boire un coup à ma santé, dis-je en glissant un billet dans la main du vieil homme.  

 

 

Je laisse le vieux Xiang derrière moi et plonge dans la nuit de la ruelle. Je suis plus tranquille maintenant, j'ai un œil sur ce Paris-Plouc et sa frangine-mokkori-frappée. Maintenant, il faut que je garde un œil sur toi aussi parce que franchement, Kaori, je me demande dans quel guêpier tu t'es encore fourrée...  

 

******************  

 

 

 

_Kaori ? Tu ne dors toujours pas ?  

 

Miki entre dans la chambre et vient me rejoindre à la fenêtre. Sans me regarder, elle me lance :  

 

_Je suis désolée à propos de tout à l'heure... En fait non, je ne suis pas vraiment désolée, mais je ne voulais pas que nous nous quittions fâchées.  

 

_Je ne t'en veux pas. Ne t'inquiète pas. Mais, tu sais Miki, c'est grâce à Tybault que j'ai retrouvé le sourire.  

 

_Oui, je le sais et je lui en suis reconnaissante. D'ailleurs, jusqu'à ce soir j'étais très heureuse de ce qui t'arrivait. C'est juste que, maintenant, je ne suis plus tout à fait sûre que ce soit une bonne idée...  

 

Je murmure, malgré moi, dans un soupir :  

 

_Toi aussi tu penses ça...  

 

_Hein ? Qu'est-ce que tu as dit ? s'écrit-elle en écho à cet aveu qui m'a échappé, avant de m'attraper par les épaules et de me secouer comme un prunier, il s'est passé quelque chose tout à l'heure quand tu étais sur le balcon hein ? Hein ? Je le savais ! exulte-t-elle, un immense sourire de satisfaction aux lèvres.  

 

_Calme-toi Miki, ce qui s'est passé ne veut rien dire du tout, c'était... un accident... Voilà, un accident...  

 

_Mouais... Mais c'est pour ça que tu es toute... bizarre ! Tu doutes maintenant ?  

 

_Je suis un peu perdue c'est vrai... Je ne sais plus trop quoi penser. Mon cœur et ma tête m'envoient dans des directions opposées.  

 

_Tu sais ma chérie, je l'ai longtemps détesté pour ça, mais Ryo s'est aussi trouvé dans cette situation...  

 

_.... ?  

 

_Rappelle-toi ce que tu m'as raconté... Il hésitait entre te garder et te laisser partir... Entre son cœur et sa raison, il a longtemps tergiversé.  

_Il n'a jamais réellement choisi Miki, c'est pour ça que je suis partie.  

 

_A ton tour de faire face à ce dilemme. J'espère que toi tu sauras faire le bon choix. Bonne nuit ma chérie, à demain, me lance-t-elle, le sourire toujours aux lèvres, avant de disparaître pour rejoindre sa chambre.  

 

Ce sourire... C'est pas vrai ! Elle est persuadée que parce que j'ai reconnu qu'il s'était passé quelque chose entre nous les choses sont gagnées d'avance ! Si seulement c'était si facile ! Mon cœur m'envoie inéluctablement vers Ryo mais ma raison me crie que c'est une erreur et que Tybault m'apportera plus de stabilité, une relation à double sens, des rêves...  

 

Ryo... Tybault... Tybault... Ryo... la raison, le cœur... J'en ai mal au crâne tellement tout ceci tourne dans ma tête. Mais il faut que je prenne une décision. Que j'aille dans un sens et que je m'y tienne.  

 

Un éclat de lune se reflète sur mon portable... Réminiscence d'un instant douloureux qui me prend au dépourvu et, à ce moment précis, au moment où mon regard se pose sur le métal miroitant, je sais ce que je dois faire...  

 

J'attrape mon téléphone et compose ce numéro que je connais maintenant par cœur. Au bout de quelques instants, la tonalité laisse place à cette voix qui doit tracer mon chemin.  

 

_Allo ?  

 

_Tybault ? C'est moi... On mange une glace ensemble demain ? 

 


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