Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated R - Prose

 

Author: nodino

Beta-reader(s): Amelds

Status: Completed

Series: City Hunter

 

Total: 22 chapters

Published: 17-02-10

Last update: 17-11-18

 

Comments: 139 reviews

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RomanceDrame

 

Summary: Une nuit, tout bascule et la rupture devient inévitable... L'amour aussi... Mais jusqu'où peut on aimer quand on est City Hunter ?

 

Disclaimer: Les personnages de "Ain't no sunshine." sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo.

 

Tricks & Tips

Can I have my fanfiction proof-read?

 

Yes. You just have to choose one of the beta readers of HFC and contact that person by email. Don't forget to indicate the name of your beta reader when posting your story on HFC. Thanks.

 

 

   Fanfiction :: Ain't no sunshine.

 

Chapter 15 :: A la croisée des chemins : union (2e partie)

Published: 26-11-15 - Last update: 08-01-18

Comments: Allez, je vous envoie la suite. Merci beaucoup à ma beta Amelds et à Cris pour leur coup de main. J'espère que ce chapitre vous plaira. En tout cas il lève le voile sur certains mystères.

 


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Le ton bourru d'Umi me ramène brusquement sur terre et m'arrache aussitôt à l'incessante attraction de tes yeux noisette. Je me libère de ce qui ressemble à un sortilège en m'écartant rapidement de toi.  

 

Il reprend :  

-Donc, puisque tout le monde est là, on pourrait voir ensemble ce que tu as trouvé Kaori. Ryo vient de nous dire que tu as découvert des preuves chez Tybault. Tu nous montres ça ?  

 

Ta voix s'élève alors à mes cotés.  

 

-Oui... mais tout d'abord je voudrais m'excuser Umi, et Miki aussi. Je n'aurais pas dû disparaître  

sans vous prévenir. Je suis vraiment vraiment désolée.  

 

-Ça va Kaori, tempère Miki, l'important c'est que tu ne sois pas blessée. Te connaissant, il y avait forcément une bonne raison.  

 

Tu lui offres un regard reconnaissant, tout en maltraitant tes doigts, signe que tu te sens coupable malgré tout.  

 

-Allez, dis-je pour t'encourager, raconte-nous Kaori...  

 

-Oui oui... Alors voilà... Le clan Futago, commences-tu, hésitante, il en est à la tête.  

 

Un silence accueille ton annonce. Un silence épais. Qui engloutit tes mots et nécessite qu'on y réfléchisse pour les comprendre. « IL » en est à la tête... Tu parles forcément de ce Paris-Plouc... Tybault... Sa mokkori-frappée de sœur... Les Futago.  

 

On les a tant cherchés. Lui nous narguait en se pavanant à tes côtés.  

 

Je ne suis pas étonné. Je le sentais. Je le sentais en conduisant comme un dingue vers chez lui après le coup de fil de Miki. Je le pressentais en courant autour de l'immeuble. J'en ai eu la certitude en te voyant te terrer sur cette fenêtre tandis que je tenais en joue sa sœur. Je savais qu'il fallait faire le lien entre l'agression du vieux Xiang et sa présence près de l'immeuble. Je le savais. J'aurais dû être plus rapide dans mes conclusions. Cela aurait évité que tu risques ta vie.  

 

Je t'écoute exposer ce que tu as appris sur les enfants Gaotuf. Tu racontes leur enfance, cette histoire de code secret qui les liait plus que n'importe quels frères et sœurs, la tragédie de leur adolescence – la mort de leurs parents et l'enlèvement de Paris - les séquelles sur la jeune fille, et quand tu sors ton téléphone pour présenter les photos que tu as prises dans le bureau, toute trace de fatigue a disparu de ton visage. Les yeux brillants et les joues rosies de froid mais surtout d'excitation, tu fais défiler les photos des documents les unes après les autres. Tout autour de toi, nous appréhendons les visages de ces hommes qui ont été menacés, ceux qui ont payé, ceux qui ont été tués, leurs noms, ceux de leurs sociétés. Notre côté professionnel balaie l'envie de nous apitoyer sur leur sort ; nous savons que justice leur sera rendue.  

 

Lorsque tu arrives à la dernière photo, je te sens te tendre, ta respiration s'accélère. Tu tiens une piste penses-tu.Tu nous expliques alors que tu t'interroges sur le fait que seul un des deux noms soit souligné. Celui de Monsieur Makato. Ce petit homme nerveux me revient en mémoire. Excitée par ta découverte, tu nous expliques que tu penses que seul cet homme serait visé, ou du moins qu'il intéresserait plus le clan Futago que l'autre homme menacé en même temps, Monsieur Tkoji.  

 

-Donc si je comprends bien, résumé-je, tu penses que les menaces qui pèsent sur lui ne seraient qu'un leurre ?  

 

-Peut-être, acquiesces-tu, je ne connais pas votre dossier, mais je connais un peu Tybault... et quelque chose me dit que ce pourrait être ça.  

 

-Il nous faut un peu plus que des « peut-être » tranche alors Saeko, en te fixant de son rigoureux regard d'inspectrice.  

 

-N'importe quoi Saeko, la rembarre Miki en te voyant accuser le coup, tu veux des preuves, tu en as. Tout est affaire d'analyse et pour ça, je pense qu'on peut faire confiance à Kaori, qui connaît bien mieux ce Paris-Pl.... Euh ce Tybault que toi et moi. Kaori, qu'est-ce qui te fait penser que cela peut être un leurre te demande-t-elle, en posant une main réconfortante sur ton bras.  

 

-Je ne sais pas vraiment, réponds-tu en secouant la tête, j'en ai l'intime conviction, c'est tout, je ne peux rien te dire de plus je suis désolée.  

 

-J'ai confiance en ta conviction Kaori, rajouté-je à mon tour, un sourire en coin devant la moue boudeuse de Saeko. Essayons de voir si on peut la confirmer. Remontre-nous les photos où on voit les noms des autres victimes, dis-je, ramenant ainsi vers moi tes yeux brillants de reconnaissance.  

 

Lorsque la page contenant les noms des hommes menacés réapparaît, l'évidence nous saute aux yeux en la regardant sous ce nouvel angle que tu nous as offert.  

 

-Regardez, observe Mick en pointant sur la photo la liste de noms, les noms sont regroupés par deux, trois ou quatre et, à chaque fois, un nom se détache des autres. Là il est écrit en majuscules, là il est souligné, là il est associé à un signe. Et si je me souviens bien, chacun de ces hommes est mort.  

 

 

-Tu penses donc que les victimes étaient menacées par groupes de deux à quatre personnes alors qu'une seule intéressait réellement les Futago, analyse à son tour Saeko.  

 

Regardant par dessus ton épaule, j'observe ces noms puis les sommes qui y sont associées. Et là, e comprends enfin.  

 

-Regardez ! les interromps-je... Comparez les sommes que les Futago réclamaient à ces hommes.  

 

-Elles sont toutes différentes, remarque Saeko, qu'est-ce que ça veut dire à ton avis ?  

 

-Oui, elles sont différentes mais regardez, elles sont plus ou moins dans la même fourchette. Par contre, les sommes exigées auprès de ceux qui ont été tués sont exorbitantes. Ils n'avaient aucune chance de pouvoir payer et ils ont donc ensuite été logiquement exécutés.  

 

-Tu penses que plusieurs personnes étaient menacées et rançonnées, réfléchis-tu alors à haute voix en me fixant, mais qu'à chaque fois...  

 

-... une personne seulement était réellement visée et devait mourir, oui c'est ça, terminé-je à ta place.  

 

-Donc si je comprends bien, poursuit Saeko, si on trouve ce que toutes les victimes avaient en commun, on trouvera la clé de tout ceci.  

 

-C’est ça. Cherche surtout ce que Mr Makato a de plus que les autres, car je pense qu’il est la cerise sur le gâteau. Aucun milliardaire, aucune entreprise ne pourrait payer la somme exigée sans mettre la clé sous la porte. En ce qui le concerne, je pense que son sort est scellé…  

 

-… il doit mourir, conclues-tu à ma place, un frisson sûrement glacé faisant légèrement ondoyer la mousseline de tes manches contre moi.  

 

-Je m’en occupe immédiatement, lance Saeko avant d’attraper d’un geste décidé son téléphone et de pianoter dessus le numéro de son service. Malgré l’heure très matinale, quelqu’un décroche dans la seconde et elle donne aussitôt les consignes nécessaires.  

 

-J’y pense ! t’écries-tu soudain en me pressant le bras. Pendant qu’elle était sur le balcon, Paris a dit quelque chose d’important, elle voulait que cela soit terminé aujourd’hui.  

 

-Aujourd’hui ? Tu es sûre ?  

 

Mais je lis dans tes yeux une telle certitude que je n’attends pas ta réponse pour interpeller l'inspectrice :  

 

-Saeko ! Demande à ton équipe de vérifier l’emploi du temps de Mr Makato. La journée risque d'être un peu compliquée pour lui...  

 

Seule la voix de Saeko se fait désormais entendre, disputant aux oiseaux le droit de briser le silence. Je l'entends à peine. Je ne t'ai pas quittée du regard. Tout le temps de la poursuite en voiture, je me suis contraint à t'éviter pour rester concentré. Mais depuis que tu nous as rejoints devant la tombe de Hide je m’aperçois que je ne peux plus m'arrêter. Comme un ivrogne en manque à qui on offrirait soudain sa dose de vodka. Je t'en veux presque d'être aussi belle dans cette robe. Tes yeux brillent trop. Ta pâleur fait ressortir le fauve de tes cheveux. Des mèches folles te tombent devant les yeux et me narguent, me défiant de résister à l'envie de les repousser derrière tes oreilles. La fatigue te donne un air légèrement vulnérable mais je te connais. Ce n'est qu'une fausse impression. Ce léger rose sur tes joues, cette lueur qui illumine ton regard. Tu vibres pleinement en ce moment. Tu es dans ton élément. Et ça te va si bien. Si bien que je dois lutter contre l'envie de te serrer une fois encore contre moi. Tu es juste magnifique Kaori. Bordel, deviendrais-je vraiment romantique ?!  

 

Je te regarde trop intensément je suppose. Doucement, l'excitation dans ton regard laisse place à une légère interrogation. Sur le côté, je devine sur le visage de Miki la naissance d'un sourire entendu. Kazue ne me quitte pas du regard, Mick non plus, les sourcils froncés. Il faut que je dise un truc, n'importe quoi, que je pense à autre chose parce que là je le sens mal.  

 

Que quelque chose arrive ! Maintenant ! Vite !  

 

-C'est ça ! lance soudain Saeko, victorieuse, en raccrochant alors que je la bénis mentalement de m'offrir une distraction.Vous aviez raison. Ceux qui sont morts avaient tous en commun quelque chose. Ils étaient au conseil d'administration de la société Keny. Celle des parents de Tybault et Paris.  

 

-Je vois, dis-tu d'une voix blanche en te tournant vers elle. Alors ce sont ces hommes qui ont pris la décision de refuser de payer la rançon de Paris. Et elle... et Tybault...  

 

-.... le leur font payer, continué-je à ta place en entendant ta voix se briser. Ils ont mis en place cette mascarade de menaces et d'extorsions de fonds pour donner le change afin que personne ne soupçonne que ce qui les intéressait réellement...  

 

-...était de se venger des responsables de ce qu'a vécu Paris, reprends-tu avec plus de force.  

 

Je devine à tes poings serrés que la tragédie vécue par la jeune fille, malgré sa personnalité dangereuse, te touche. La trahison que les deux adolescents ont vécue, leurs destins brisés... Je te reconnais bien là.  

 

-Mais... Et moi ? demandes-tu soudain à Saeko, quel était mon rôle ? Pourquoi Tybault s'est-il rapproché de moi ? précises-tu devant son regard interrogateur. Parce qu'on est tous d'accord, si on s'est rencontrés c'est parce qu'il savait que j'appartenais à City Hunter... enfin... avant.  

 

*******************************************************************************  

 

Oui, cela tourne et retourne dans ma tête depuis que j'ai compris qui était réellement Tybault. Que cherchait-il en me rentrant dedans ce jour-là, alors que j'habitais à trois heures de route de Tokyo et que je n'étais plus en lien avec City Hunter ou la police de Shinjuku ?  

 

La bouche de Saeko initie une petite moue indécise, et je perçois un léger début de haussement d'épaules, signes évidents qu'elle n'en a aucune idée. Ce qui n'est pas le cas de Miki qui répond à sa place.  

 

-Ils devaient savoir que City Hunter s'était séparé mais préféraient garder un œil sur toi, Kao, pour être sûrs que votre duo ne se reconstituerait pas avant la fin de leur plan.  

 

-Mais c'était prendre le risque de se faire découvrir ! Je ne comprends pas.  

 

-Il n'y a que toi et Ryo pour ne pas le comprendre, assène alors Kazue, sortant de son long mutisme en se rapprochant de nous.  

 

-......  

 

Je ne comprends vraiment pas ce qu'elle veut dire par là. Qu'y a-t-il que nous n'ayons pas compris toi et moi et que tout le monde semble avoir saisi, y compris des meurtriers ?  

Le regard de Kazue me traverse, plein d'animosité. Elle m'en veut. De quoi bon sang ?! Puis il se pose ensuite sur toi, derrière moi.  

 

-Ils savent, nous savons tous, même si certains imbéciles – Mick tressaille légèrement – font semblant de l'ignorer, que City Hunter est plus fort, plus rapide, plus clairvoyant quand vous êtes ensemble.  

 

-Te détourner définitivement de Ryo, ajoute alors Miki, était la technique la plus efficace sûrement à leurs yeux pour affaiblir City Hunter et continuer leur petit jeu en toute tranquillité.  

 

-Mais c'était sans compter, avance alors Mick, les mains profondément enfoncées dans les poches, sur le fait qu'ensemble ou séparés, City Hunter reste City Hunter.  

 

Il affiche un masque d'indifférence mais son regard biaise vers Kazue, qui regarde loin derrière nous et fronce encore plus les sourcils, un éclair de colère et de souffrance traversant brièvement son visage.  

 

-Ils se sont trompés en pensant qu'ils auraient ainsi le champs libre, continue Mick en revenant vers nous. Ils n'ont réussi qu'à attirer l'attention sur eux.  

 

-C'était stupide, dis-je en secouant la tête comme pour me défaire de ce détestable sentiment de trahison, il aurait suffi de me surveiller de loin, pourquoi fallait-il qu'il fasse semblant d'être amoureux ?  

 

-Je crois que ce n'était pas prévu, dis-tu dans mon dos...  

 

Surprise, je me tourne de nouveau vers toi. Cette fois, je retrouve mon partenaire. Exit cette étrange lueur caressante qui habitait ton regard quand nous attendions que Saeko ait terminé de téléphoner et qui était si troublante. Je n'y lis plus que cette force de caractère et d'intelligence qui fait la force de City Hunter.  

 

-Je pense qu'il ne jouait pas un jeu Kaori, reprends-tu. Il devait sûrement seulement te surveiller, et c'est allé plus loin qu'il ne le pensait. A mon avis, il a été dépassé par les événements et par ses sentiments, au point même que je suis certain qu'il a pris des risques pour toi.  

 

Cette affirmation me cueille. Tybault aurait pris des risques ? Ce meurtrier qui s'est servi de moi pour mieux arriver à ses fins.... amoureux ? Tout cela me donne la nausée et je plisse le nez de dégoût.  

 

-Les Futago ont raté un rendez-vous hier soir Kaori. Parce que vous étiez ensemble me rappelles-tu tandis qu'un pli ombrageux apparaît sous la mèche de cheveux noirs qui retombe sur ton front. Et ce matin, quand tu étais chez lui, que s'est-il passé ?  

 

-Ce matin ? Heu... balbutié-je, indécise quant au sens de ta question.  

 

-Je doute que tu aies obtenu ces renseignements aussi facilement qu'un simple « clic » d'appareil photo.  

 

-Tu as entendu ce que j'ai raconté non ? objecté-je, vexée que tu minimises soudain les informations rapportées et tous ces risques pris. Il ne m'a pas ouvert la porte de son bureau en me disant de prendre tout ce que je voulais !! Ça n'a pas été aussi facile qu'un simple « clic » et tu es bien placé pour le savoir vu que tu étais là !  

 

-Ne t'énerve pas, me rétorques-tu calmement. Ce que je veux dire c'est qu'un groupe comme les Futago ne laisserait jamais sans surveillance un tel endroit.  

 

J'ai l'impression de recevoir une gifle. Le sang reflue de mon corps et une lame glacée court désagréablement le long de mon échine pendant que ton argument trouve place dans mon souvenir et l'éclaire sous un jour nouveau.  

 

-Tu veux dire que...  

 

-.... que je pense qu'il savait très bien que tu étais dans son bureau et ce que tu y faisais.  

 

Je déglutis péniblement mais, malgré moi, je sens que tu as raison. Comment expliquer autrement son aide providentielle pour m'aider à quitter l'appartement, son attitude et son injonction de ne pas lui poser de question... Et son regard au moment où il m'a laissée partir dans l'ascenseur ! J'avais eu la certitude qu'il savait... Je sais maintenant pourquoi. Il savait.  

 

Je me sens tellement stupide d'avoir cru que je pouvais être d'une aide quelconque ! Je me croyais investie d'une mission pour sauver mon honneur bafoué par la trahison et au final je n'ai fait que me couvrir de ridicule. Mon ennemi me regardait sûrement sur son écran depuis sa chambre tandis que je fourrageais dans ses affaires. C'est à pleurer. Je me sens affreusement nulle.  

 

 

-Pardon... Je... je suis tellement désolée... Pardon d'avoir tout raté, dis-je en fixant mes pieds pour cacher ma honte.  

 

-Ne t'excuse pas Kaori, intervient Saeko, sans toi nous n'aurions jamais eu tous ces renseignements primordiaux, ni même simplement découvert leur identité.  

 

-Oui mais à cause de moi, ils savent qu'ils sont découverts. Ils vont disparaître... objecté-je en repensant à la berline qui fuyait devant nous il y a peu encore. C'est pour ça qu'ils sont partis si vite tout à l'heure Ryo non ?  

 

-Oui, acquiesces-tu en soutenant mon regard.  

 

Je m'en veux tellement que j'en pleurerais, mais tu me parles sans aucune animosité. Tu souris même doucement, comme pour me réconforter.  

 

-Saeko a raison, tu as résolu cette affaire pratiquement à toi toute seule, affirme avec force Miki, il ne manquerait plus que quelqu'un ne te le reproche !!  

 

-Eh, n'exagère pas non plus ! se vexe Mick. On a tous beaucoup bossé sur cette affaire quand même !  

 

-Elle n'a pas tout à fait tort, rétorques-tu posément à l'encontre de Mick. Sans elle nous ne saurions même pas que nous divisons nos forces en protégeant à la fois Mr Tkoji et Mr Makato alors que seul celui-ci est visé. A ce propos Saeko, qu'en est-il de son emploi du temps ?  

 

-Mon coéquipier me rappelle dès qu'il a l'information Ryo.  

 

-Qu'il fasse vite ! Ce n'est pas le moment de flâner. Nous avons un rendez-vous important aujourd'hui avec ces chers Futago dis-tu en me faisant un léger clin d’œil.  

 

 

C'est à ce moment que je me décide. A la lumière de ces dernières informations, je sais où se trouve ma place. Définitivement. Plantant mes deux pieds fermement dans le sol, je lève le menton et fièrement, à la face de tout notre groupe, je clame haut et fort :  

 

-Je veux en être ! Ryo, laisse-moi redevenir ta partenaire. Laisse-moi aller au bout de cette mission avec vous. Je veux refaire partie de City Hunter.  

 

 

**************************************************************************  

 

 

« Ma partenaire » , « City Hunter ».... Comme ces mots ont sonné clairement dans l'air ! Tu nous as tous pris de court si j'en juge par les regards sidérés autour de toi. Même si je me sais très fort pour rester impassible quelle que soit la situation, je sais que moi aussi tu m'as eu. Te retrouver aussi forte et fière qu'il y a quelques mois, avant que mes hésitations n'affectent nos relations, avant que je ne foire tout.... Ce sentiment qui me traverse l'estomac, ce doit être ça le bonheur. Ah Kaori, si tu savais comme j'ai espéré ce moment !  

 

Les poings serrés, droite dans ta robe de soirée, le menton pointant si haut que je défie qui que ce soit de s'opposer à toi en cet instant, le regard droit et assuré, tu attends ma réponse. Seules tes joues qui se sont légèrement teintées te trahissent. Ça doit sacrément tourner dans ta tête en ce moment !  

 

Tu attends, silencieuse. Tes yeux me transpercent. Je n'arrive pas à répondre. Tout le monde attend. Je sens grandir et se gonfler d'impatience l'aura de Miki. Je n'ai pas oublié cette fichue promesse qu'elle m'a soutirée, celle de te récupérer et de te garder pour toujours. On y est. Miki doit être aux anges. Et suspendue à mes lèvres. Elle attend ce moment depuis si longtemps. Depuis bien plus que quelques heures, bien plus que cinq mois d'ailleurs. Car là, il ne s'agit pas que d'une simple proposition de boulot. Il s'agit bel et bien d'une déclaration. Au-delà de City Hunter, c'est de toi et moi dont il est question.  

Ça y est, une goutte de sueur commence à se former sur ma tempe. C'est trop pour moi. Comme je l'ai dit tout à l'heure à Kazue, ce genre de réflexion n'est pas mon truc. Je déteste ça. Parce que je ne sais jamais comment réagir, ni que dire. Et si ce n'était pas la solution, si on se trompait ? Et si ensuite tu regrettais de nouveau ? Et si, encore une fois, je n'étais pas à la hauteur ? Ça y est, la goutte s'est formée, je la sens commencer à rouler le long de ma tempe. C'est bien le moment de paniquer tiens ! Nerveusement, j'enfonce la main dans ma poche. Au fond, deux boutons. Je les fais rouler entre mes doigts. Déconne pas Ryo, ce n'est pas le moment de te planter, c'est maintenant ou jamais...  

 

-Ryo...  

 

Ton aura rayonne un peu moins intensément, ta voix se fait plus hésitante, ma réflexion a dû durer plus longtemps que je ne le pensais.  

 

-Ryo, reprends-tu, si tu ne le souhaites pas, rien ne m'oblige à revenir vivre chez no... toi. Je peux rester vivre chez Miki et Umi, le temps de trouver ensuite un appartement. Laisse-moi juste participer à cette enquête et travailler avec toi. Ryo...  

 

Il y a comme une supplique dans tes yeux. Quel courage ! Je suis fier que tu veuilles être ma partenaire, non pas parce que le destin nous joue des tours ou parce que Hide me l'a demandé, mais simplement parce que tu le souhaites. Et moi aussi. Mes pensées s'évadent et se dirigent vers la tombe de ton frère : « Et toi, mon ami, qu'en penserais-tu ? » ne puis-je m'empêcher de lui demander, « Est-ce que tu m'estimerais digne d'une autre chance ? Tu me dirais sûrement juste que tu es très fier d'elle. Quant à moi... »  

Contre le granit de la pierre tombale, j'imagine en transparence son visage me regarder d'un air désespéré, ses lunettes basculant légèrement sur l'arrête de son nez. Il repousserait ses lunettes contre le haut de son nez et rirait doucement, en me disant qu'on n'a qu'une vie, qu'il en sait quelque chose, et qu'il faut la vivre pleinement avant qu'il ne soit trop tard...  

 

-Hum hum ! toussote alors Umi, pour attirer mon attention. Ryo, je crois que Kaori t'a posé une question.  

 

Je sors brusquement de ma léthargie et quand je pose mes yeux sur toi, il est évident que mon silence représente une véritable torture pour tes nerfs.  

 

-Ryo, m'interpelle encore une fois le géant devenu écarlate de devoir autant insister et par là-même se mettre sur le devant de la scène, veux-tu oui ou non reprendre Kaori comme partenaire ?!  

 

Je plonge dans tes grands yeux noisette et je sais exactement ce que je dois dire. Sans te lâcher du regard, je réponds :  

 

-NON...  

 

Tu deviens aussitôt aussi pâle que la mort. De ton regard soudain vidé de toute énergie tu scrutes le mien, cherchant désespérément le début d'un éclair de moquerie. L'air aussi choqué que toi, Kazue, Saeko et Miki se sont immédiatement rapprochées, comme pour te rattraper en cas de perte de conscience. Elles n'ont rien compris. Personne n'a l'air d'avoir compris. Mick me fusille de son regard transparent et Umi semble prêt à exploser.  

 

-Tu as bien compris ma question Ryo ? insiste-t-il.  

 

-J'ai dit « Non », réponds-je brusquement, pour couper court à tout ça et ne m'adresser qu'à toi. Kaori, si tu dois redevenir ma partenaire, il faut que tu reviennes vivre avec moi. Chez nous. Et c'est non négociable.  

 

Ta bouche s'ouvre et se ferme successivement sans qu'aucun son n'en sorte. Tu papillonnes des paupières, cherchant à comprendre ce que je viens de dire, et je devine aux soulèvements désordonnés de ta poitrine que tu cherches ton oxygène. S'ils n'étaient pas tous là autour de nous je te prendrais contre moi dans l'instant. Tu as l'air aussi perdue qu'une biche aux abois et je résiste toujours aussi mal à ce besoin de te protéger. Mais ils sont tous là alors je reste immobile, te regardant retrouver difficilement une certaine contenance et tes couleurs. Tes joues reprennent cette teinte que j'aime tant y voir quand tu es émue, et tes yeux retrouvent leur éclat doré qui les fait briller si intensément quand je fais quelque chose qui te touche. Bon sang que tu es belle ! Je me doute bien que tu ne vas pas refuser mon offre, même s'il ne faut jurer de rien avec ton foutu caractère, mais j'ai besoin de te l'entendre dire.  

 

-Alors kaori, heu... Tu... bafouillé-je, tu es d'accord ?  

 

Un léger sourire étire doucement tes lèvres roses, et ton regard brille encore plus fort quand, dans un souffle, tu me réponds :  

 

-Oui...  

 

- AAAlleluia !! s'exclame alors Mick dans le silence quasi religieux qui a suivi ta réponse, j'ai bien cru que cela n'arriverait jamais !!  City Hunter reformé, voilà qui ne pouvait me faire plus plaisir. Congratulations guys !  

 

-Calme-toi la schtroumpfette, le contre immédiatement Umi, ce n'est pas leur mariage. Garde tes cris de joie pour le jour où ça arrivera vraiment, ajoute-t-il tandis que son affreux visage rond se fend de cette horrible grimace qu'il appelle sourire et qu'il m'adresse pour se foutre de moi.  

 

-Je te rassure, tête de poulpe, contré-je du tac au tac sans réfléchir, aucune chance que je finisse en cage comme toi ! J'aime trop ma liberté et il reste bien trop de petites culottes dans le monde qui attendent dans leurs tiroirs que je vienne les délivrer eheh !  

 

Pourquoi ai-je eu soudain besoin de dire ce genre d'ânerie ? Impossible à dire. Cet instant était sûrement trop solennel, trop beau pour être vrai. Tu as dit « Oui ». Tu reviens. Chez nous. Je ne peux pas gérer ce genre de bonheur. Va quand même falloir que j'apprenne, mais là je ne sais pas. Alors je me réfugie dans ce que je connais. Le rire... Enfin à ma façon, parce que si Mick ricane d'un air entendu à ma blague, bien content que j'aie pu moucher notre grand chauve préféré, j'oublie que ce genre d'humour ne plaît pas à tout le monde. Et j'en prends brusquement conscience quand je reconnais cette énormissime aura qui gonfle soudain dans mon dos. C'est la tienne. Dure et gorgée d'électricité. L'onde qu'elle produit en grossissant me pousse déjà en avant et j'imagine à peine la force du châtiment qui va naître de ta colère. Inquiet, je prends le risque de me retourner pour voir s'il existe une infime chance de te ramener au calme, ou du moins de réduire un peu la force de ta sentence par de plates et fausses excuses. Mais là, je comprends, terrifié, que je suis déjà foutu. Exit l'éclat doré dans ton regard, disparu le rose de tes joues. Je n'ai plus devant moi qu'une folle furieuse qui me darde d'un regard meurtrier, le front barré de multiples veines prêtes à exploser et la bouche tordue en un rictus furibard. Tous les signaux d'alerte se mettent à hurler dans ma tête, coupant court à toute réflexion et ne me laissant plus comme faculté que les réflexes les plus primaires. Mes bras se replient instinctivement au niveau de ma tête pour protéger mon beau visage et mes cuisses se crispent vers l'intérieur pour enserrer ma virilité. Mes pieds commencent à reculer pour m'emporter loin d'ici avant qu'il ne soit trop tard mais lorsqu' apparaît entre tes mains l'expression de ta colère, je comprends que c'est trop tard. J'ai à peine le temps d'apercevoir le 100 000 t imprimé en rouge sur la masse de bois qu'en un long et indescriptible cri de rage, dans lequel il me semble reconnaître mon prénom, tu l'abats en un rapide moulinet de poignet dans ma direction.  

 

 

A l'effroyable craquement du bois qui s'ensuit, je devine que l'impact a eu lieu. Je dois être mort car je ne sens rien. Ah si... je sens... Bobo.  

Tu n'y as pas été de main morte, mon corps entier n'est plus que douleur. Dans quel état vais-je me retrouver une fois que tu auras retiré cet infâme engin de torture de mon crâne ?! Enfin, si tu le retires un jour, ce qui n'a pas l'air d'être dans tes projets immédiats. Difficilement, j'extirpe un doigt et l'agite dans ta direction, tentant de t'appeler malgré mes dents éparpillées un peu partout dans l'allée.  

 

-...aori... Ve plaivandais... Ah ah... te plé... Enlever... aori...  

 

Lorsque la lumière du jour réapparaît enfin, ce n'est pas ton visage que je reconnais, mais celui, affublé d'un sourire narquois, de Mick.  

 

-Alors ? Heureux ? me lance-t-il en me tendant une main secourable pour m'aider à me relever tandis que tu t'éloignes de cette démarche de camionneur qui est la tienne quand tu es furax.  

 

-Le plu veureux dé zom, assuré-je en riant pour donner le change, tout en replaçant tant bien que mal mes muscles et articulations à leurs places initiales.  

 

Mais nous savons tous les deux à quel point j'attendais ce moment qui verrait le retour des châtiments kaoriens, à quel point je le jalousais ces dernières semaines d'y avoir droit alors que tu ne m'offrais plus que ton indifférence. Plus fort que n'importe quel contact, que n'importe que caresse ou n'importe quel mot, la massue est le signe de ton affection. Et tandis que je fais craquer une vertèbre, je ressens encore une fois cette sensation qui me serre doucement l'estomac. Comme tout à l'heure. Pas désagréable cette émotion qui se diffuse... J'ai la certitude désormais que je fais de nouveau entièrement et pleinement partie de ta vie. « Alors oui, je suis heureux » pensé-je en époussetant mon pantalon pour en retirer les derniers grains de poussière.  

 

-Bon, et toi ? demandé-je le plus discrètement possible à mon comparse blond, tu as changé d'avis concernant Kazue ?  

 

Il fallait que je lui pose la question, même si j'ai bien vu que l'espace qui les séparait physiquement depuis qu'on s'est retrouvés ici ne s'est jamais réduit et que leurs regards ne se sont jamais croisés.  

 

-Non, bien sûr que non, assure-t-il, malgré un tressaillement dans le regard. Ce n'est pas parce que je suis content que vous ayez reformé City Hunter que cela veut dire que j'abandonne mon projet. Comme l'a si bien dit Umi chou, vous n'êtes pas mariés right ? Donc surveille bien tes arrières, Ryo, si jamais tu baisses ta garde, si jamais tu la fais pleurer, alors je serai là.  

 

-Ok, dis-je alors en riant, il ne me reste plus qu'à ne plus jamais baisser ma garde !  

 

-Nous verrons, nous verrons !  

 

-C'est tout vu ! intervient alors Miki en s'incrustant dans notre conversation. Toi le blondinet tu n'as pas intérêt à t'immiscer entre eux ou je ne donne pas cher de ta peau. Quant à toi, me menace-t-elle en m'agrippant par le col, dois-je te rappeler cette promesse que tu m'as faite ?  

 

-Non, non, pas la peine d'en rajouter, protesté-je en ressentant des élancements dans la nuque, souvenir de son argumentation musclée qui m'a mené à cette fameuse promesse, à laquelle elle tient visiblement beaucoup : « Te garder pour toujours. »  

 

-Alors fais en sorte de ne pas tout foirer cette fois ! assène-t-elle tandis que son regard se pose sur Kazue et toi, qui discutez de l'autre coté de l'allée de gravier... regard que j'accompagne du mien jusqu'à ce que tu te tournes vers nous et que je lise sur tes lèvres ce mot : «abruti ».  

 

 

*************************************************  

 

 

-Mais pourquoi cet abruti est-il aussi... abruti ?? grommelé-je en me tournant vers toi.  

 

-Peut-être parce que tous les hommes sont des abrutis ? me répond Kazue en suivant mon regard.  

 

J'oublie ma colère une seconde pour me préoccuper de mon amie, celle qui s'est séparée il y a quelques heures à peine de Mick. Après que j'aie impacté ton crâne de piaf sur les graviers, je me suis éloignée pour me calmer et elle m'a suivie, silencieuse, jusqu'à ce moment où nous sommes tombées d'accord sur ce qu'il fallait penser de la gente masculine.  

 

-Sauf Umi, objecté-je.  

 

-Sauf Umi, m'accorde-t-elle.  

 

Après un silence, nous nous mettons à rire doucement. Elle a toujours l'air triste.  

 

-Je suis contente pour toi Kaori, me dit-elle soudain à brûle pourpoint. Il était temps que tu ouvres les yeux.  

 

-Oh, heu, merci... réponds-je incertaine, pas bien sûre de savoir si elle me félicite ou me remonte les bretelles. Mais j'avoue que je ne vois pas de quoi tu parles Kazue.  

 

Elle me regarde, visiblement atterrée. « Quoi, bon sang ? » ai-je envie de lui crier. Elle m'a déjà tenu ce même genre de phrase sibylline hier, j'aimerais comprendre. Elle continue de me regarder, avec une visible envie de me gifler.  

 

-Pourquoi lui as-tu dit que tu voulais revenir Kaori ? me questionne-t-elle soudain.  

 

-Heu, hésité-je une seconde avant d'éluder, euh... eh bien, je trouvais normal de l'aider jusqu'au bout dans cette enquête puisque j'étais concernée...  

 

-Menteuse ! me coupe-t-elle brusquement. Quand donc allez-vous arrêter de vous mentir l'un l'autre comme vous le faites depuis des années ? s'énerve-t-elle soudain.Vous avez la chance que vos sentiments soient réciproques bon sang ! Alors profitez-en, et ne gâchez pas tout encore une fois ! s'écrie-t-elle, les larmes au bord des yeux.    

 

J'en reste estomaquée. Dans notre groupe, si nous osons parfois nous dire nos quatre vérités, nous exposons assez peu nos sentiments. Elle, en une seule phrase vient de faire les deux. Et me dire qu'elle sait que je t'aime et qu'elle pense que tu m'aimes aussi.  

 

Il va donc falloir que je la détrompe.  

 

Je t'aime. Je l'ai compris depuis bien longtemps et j'ai compris qu'aucun autre homme n'y changerait rien. Je l'ai su quand Tybault me tenait dans ses bras et que mon cœur le rejetait. Mais aujourd'hui je veux redevenir ta partenaire. Celle que tu ne sauras jamais aimer, ou que tu ne voudras jamais reconnaître aimer. J'accepte cette idée et accepte de vivre ma vie à tes côtés en sachant que rien ne sera possible entre nous. Je t'accepte comme le crétin que tu es ; je t'accepte comme tu voudras me prendre. Aujourd'hui comme il y a cinq mois je sais que tu vas hésiter encore et toujours. Cette fameuse nuit entre nous n'y changera rien. Notre séparation et mon retour non plus. J'ai donc décidé de te faciliter les choses et de ne plus rien attendre de toi. Jamais. Je vais simplement continuer à t'aimer en silence. Être avec toi, être ta partenaire devra et sera désormais suffisant à mon bonheur.  

 

Voilà à quoi je pense tandis que mon regard quitte le tien pour se focaliser sur l'ire qui irradie des yeux de Kazue. Hors de question qu'elle sache ce qu'il en est. Je dois garder tout cela pour moi afin que plus personne désormais n'interfère dans ma vie.  

 

-Je ne vois pas de quoi tu parles Kazue. Ryo et moi sommes juste redevenus des partenaires. Nous allons simplement revivre ensemble. J'avais besoin de prendre du recul et maintenant je suis revenue ; c'est tout. Cela n'a rien à voir avec ta relation avec Mick. Vous vous aimiez, vous vous aimez d'ailleurs toujours j'en suis certaine, mais pas nous.  

 

-C'est toi l'imbécile alors Kaori ! s'énerve-t-elle en secouant sa longue chevelure dans un geste de dénégation désespérée. Et décidément tu ne comprends rien à rien ! Mick ne m'a jamais aimée ! Il en aime une autre qui est trop stupide pour s'en rendre compte ! Quant à toi et Ryo... Suis-moi, m'ordonne-t-elle, joignant le geste à la parole en m'attrapant le poignet pour me tirer à sa suite, tandis qu'elle revient à grands pas vers le groupe.  

 

Lorsque nous arrivons devant la stèle de Hide devant laquelle tu te trouves avec Mick et Miki, elle me relâche brusquement et je me félicite d'avoir eu le réflexe de relever le devant de ma robe car, pour une fois, j'arrive à rétablir de moi-même mon équilibre. Je me redresse donc et lui jette un regard d'incompréhension, tout comme le reste du groupe qui l'observe en se demandant ce qui lui prend. Debout devant toi, elle te tend la paume de sa main ouverte :  

 

-Il faut sceller la reformation de votre duo Ryo, avec quelque chose de symbolique.  

 

Interloqué, tu fixes sa main ouverte, puis revient vers elle, puis vers moi, puis de nouveau vers sa main, cherchant visiblement de quoi il est question. Mais elle n'a pas l'intention apparemment d'être plus explicite et je ne peux que te répondre d'un haussement d'épaule perplexe quand tu m'interroges du regard. Sa phrase est plus que mystérieuse, mais elle semble penser que tu vas finir par comprendre car elle insiste, tendant plus avant sa main vers toi.  

 

-Tu sais de quoi je parle Ryo. Allez, donne-les moi.  

 

-Je voudrais bien Kazue, opposes-tu, si seulement j'avais la moindre idée de ce que tu me demandes.  

 

-Dans ta poche, explique-t-elle, passablement agacée de devoir préciser les choses.  

 

Instinctivement, mon regard se porte vers la partie de ton corps qui se situe sous la ceinture, cherchant de chaque côté du pantalon la présence d'un objet qui déformerait une de tes poches. Les autres en font autant, un sourcil levé en signe de grande curiosité. Mais rien ne semble s'y trouver. Par contre, toi tu as visiblement compris car tu te décomposes aussitôt, reculant instinctivement de deux pas, tandis que tes mains s'enfoncent profondément dans ce qui est le centre de toutes les attentions.  

 

-Non mais ça va pas ? protestes-tu avec véhémence, tout en contournant la stèle de Hide pour buter contre Falcon.  

Celui-ci, immobile et inexpressif derrière ses grosses lunettes noires, ne réagit pas immédiatement, baissant simplement la tête vers toi jusqu'à ce que ton visage paniqué se reflète dans ses verres fumés. Tu esquisses alors un geste de recul pour te diriger vers une autre allée, mais avant que tu n'aies eu le temps de t'éloigner, un bras puissant s'abat sur tes épaules pour te retenir et te repousser vers nous.  

 

-Je crois que Kazue t'a demandé quelque chose. Et tu sais quoi ? Je suis très curieux de savoir ce que c'est, expose-t-il tranquillement, tandis qu'un sourire hilare lui vient brusquement. Vu ta tête c'est sûrement très intéressant.  

 

Cerné de toutes parts, tu n'as pas l'air décidé à obtempérer, mais Kazue semble l'être pour deux. Et tant mieux car j'avoue que je meurs littéralement de curiosité maintenant.  

 

-Allez Ryo... insiste-t-elle. De toute façon, tu n'as plus aucune échappatoire, c'est juste l'ultime étape pour réparer ce qui peut l'être. Il te faut juste un peu de courage... sois romantique, pour moi... s'il te plaît... murmure-t-elle, en plantant ses yeux dans les tiens.  

 

Étrangement, c'est en entendant ces mots que tu abdiques. Un soupir résigné s'échappe de ta bouche et tes épaules s'affaissent avant que, sans la quitter des yeux, tu te rapproches d'elle et sortes une main de ta poche, déposant doucement dans la sienne quelque chose que je ne reconnais pas de prime abord. Petit. Blanc. Rond. Qu'est ce que c'est ? Je me tends vers l'avant, comme tout le monde, pour tenter de mieux voir de quoi il s'agit, mais Kazue se tourne brusquement vers moi et m'attrape la main pour y déposer ce que je cherchais à discerner. Elle se retourne ensuite vers toi pour te rendre visiblement le jumeau de ce que je regarde dans ma paume sans comprendre. Petit. Blanc. Rond. Je reconnais un bouton...Mais qu'est-ce que ça veut dire ?  

 

Complètement perdue, je cherche dans le regard de Kazue, puis le tien, une réponse puis fixe intensément ce bouton, cherchant dans ma mémoire ce qu'il peut bien représenter. Étrangement, s'insinue en moi l'impression que je connais ce petit rond de nacre, qu'il a peut-être de l'importance, qu'il représente quelque chose d'important, du moins un moment particu....  

 

Et là, je sais.  

 

Ce bouton.  

 

Cette nuit-là...  

 

Revenant aussitôt vers toi, les yeux écarquillés et sûrement très pale ou complètement écarlate, je scrute ton visage, cherchant à lire dans tes yeux le sens de tout ceci. J'ai des milliards de questions qui me brûlent les lèvres... Pourquoi ? Comment ? J'ouvre la bouche, mais aucun son n'en sort. Je n'ai plus aucun souffle et mon cœur est prêt à exploser tant il bat vite dans ma poitrine. Comme une carpe, je me contente d'ouvrir et fermer la bouche. Tout ceci est ridicule. Je suis ridicule. Mais c'est dingue ! Tu as gardé ces deux vestiges de notre dernier moment passé ensemble. Notre nuit.  

 

Il y a tant à dire, tant à demander, c'est tellement fou ! Mais tandis que mon cœur se remet de sa cavalcade endiablée pour retrouver un rythme presque normal, je reprends légèrement mes esprits et la conscience de tous ceux qui nous entourent. Ce n'est pas le moment. Ce n'est pas l'endroit. Mais à cet instant, mon poing serrant ce bouton si fort que je pourrais le réduire en poussière, mes yeux rivés à la pénombre troublée des tiens, je me fais la promesse, je TE fais la promesse, silencieuse, que nous y reviendrons.  

Mon esprit concentré sur mon poing serré, je ne peux retenir un sourire et une onde légère de bonheur se diffuse en moi, comme un espoir naissant dans la douceur de ce matin d'hiver. Je te l'offre ce sourire, car je ne peux ni ne veux garder pour moi ce sentiment. Cette nuit a été longue, terrible et terrifiante, et jamais au grand jamais je n'aurais pu penser qu'elle se terminerait ainsi, sur un sourire teinté d'espoir que je partage avec toi. Lorsque tu y réponds à ton tour de la même façon, je ne peux que frémir. Cette émotion est délicieuse. Oui, nous avons beaucoup de choses à nous dire. J'ai hâte.  

 

Ignorant les regards et les questions muettes des autres qui ne nous ont pas lâchés des yeux, je me contente simplement de ranger mon bouton dans ma poche. Puis, pour signifier que personne n'en saura plus, je lance à la cantonade :  

 

-Bon, et on fait quoi maintenant ?  

 

C'est à ce moment-là que la sonnerie du téléphone de Saeko se fait entendre, petites notes aigües comme un rire que le destin pourrait avoir laissé échapper pour se moquer de ce bon tour qu'il vient de jouer à tous ces curieux.  

 

-Oui ? Saeko, j'écoute.  

 

Je l'entends à peine répondre au téléphone, et j'ai toutes les peines du monde à me rappeler ce que nous faisons ici quand, après avoir raccroché, elle nous rappelle à l'ordre :  

 

-Ça y est ! Mr Makato est chez lui et sait que nous arrivons. Il nous attend car il a des rendez-vous toute la journée. Alors je vous veux tous concentrés. On oublie tout ce qui n'est pas Makato ok ? Et c'est un ordre ! On se rejoint là-bas ! ordonne-t-elle ensuite en se dirigeant vers le fond du cimetière pour y retrouver sa voiture.  

 

-Kazue, interpelles-tu la voleuse, peux-tu reconduire Kaori chez Miki s'il te plaît ? Mick viendra avec moi.  

 

-Comment ? m'écrié-je, oubliant toute envie de sourire, me reconduire chez Miki ? Mais c'est hors de question ! Je ne suis pas revenue pour qu'immédiatement tu me remettes sur la touche ! Je te préviens que....  

 

-Range ta massue, me calmes-tu immédiatement, tu es une professionnelle Kaori, je le sais. Mais ta tenue ne l'est pas, signales-tu d'un regard avant de t'éloigner en courant. Rentre te changer, je t'attends sur le terrain le plus rapidement possible. Regarde sur ton portable, je t'envoie l'adresse.  

 

Deux secondes plus tard, dans le silence rendu aux habitants de ce lieu éternel, je me retrouve seule avec Kazue, me demandant si je n'ai pas rêvé tout ceci.  

 

 

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Tandis que Mick court à mes côtés, je ne peux me retenir de lui lancer :  

 

-Toujours aucun regret Mick ?  

 

-Tu plaisantes ! me répond-il, tu as vu le sourire de Kaori ? Tant qu'elle sourira comme ça je serai heureux, même si c'est avec le plus mauvais coup de Shinjuku.  

 

Je préfère ne pas répondre. Ma question ne te concernait pas. Mais elle concernait Kazue. Kazue qui a retiré sa main au moment où il a tenté de la lui prendre discrètement, quand tout le monde était focalisé sur cette histoire de bouton. Espèce de sale menteur. Il va falloir qu'il arrête de se voiler la face. Qu'il reconnaisse qu'il a merdé. Tu n'es pas celle dont il a besoin, même s'il est trop fier pour le reconnaître.  

 

Mais après tout, me dis-je avant de sauter dans la Mini et de démarrer en trombe, leur rupture ne date que d'hier, je peux encore lui laisser un peu de temps... Enfin pas trop quand même. Tu es revenue, hors de question que qui que ce soit t'éloigne de nouveau.  

 

 

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Arrivée devant chez Miki, je regarde s'éloigner la voiture de Mick que conduit Kazue. J'ai une légère boule au ventre quand je pense à ce gâchis qu'est leur histoire, mais j'espère encore que tout n'est pas perdu. Il faudrait qu'ils se retrouvent seuls tous les deux, sans rien pour détourner leur attention.  

 

« Détourner l'attention ». Au moment où je mets la main sur la poignée, j'ai un flash back de Tybault me racontant son enfance et mon estomac se serre. Comment ai-je pu oublier de te donner cette information !? J'entends encore celui qui me faisait face il y a encore quelques heures et me racontait qu'il y avait toujours un des deux jumeaux qui détournait l'attention pendant que l'autre procédait au larcin. Je ne suis pas certaine que tu aies conscience que cette technique est la clé de leur façon de procéder.  

 

J'attrape mon téléphone pour te prévenir, quand il se met soudain à sonner entre mes doigts. Je me pétrifie sur place en reconnaissant l'origine de l'appel. Tybault.  

 

-Kaori ! Ecoute-moi ! m'enjoigne-t-il d'une voix blanche dès que je décroche. Prépare ta valise, je passe te prendre d'ici trente minutes. Je sais que tu m'as dit que tu allais y réfléchir, mais nous n'avons plus le choix. J'ai un billet pour toi et nous partons pour Paris ce matin. Dépêche-toi !  

 

Et sans me laisser le temps de répondre, il raccroche aussitôt, me laissant interloquée, à regarder mon téléphone comme si cet objet avait la capacité de m'expliquer ce qui se passe.  

Je n'ai que le temps de me dire que quelque chose cloche avant de sentir cette aura extrêmement violente dans mon dos et de me sentir soudain agrippée vers l'arrière. Une violente odeur éthérée m'agresse aussitôt les voies respiratoires, me brûlant la trachée, la gorge, les yeux, tandis que je tente d'ôter le linge qui est plaqué contre ma bouche et mes narines, m'empêchant de respirer.  

Peine perdue. Mes forces m'abandonnent déjà, me projetant dans cette espèce de torpeur cotonneuse caractéristique du chloroforme. Mes jambes se dérobent sous moi tandis que je distingue à peine le côté du Cat's où l'on m'entraîne.  

 

Avec l'énergie du désespoir, je tente de me dégager d'un coup de coude, mais mon agresseur n'émet qu'un léger grognement de douleur avant de presser encore plus fort de ses doigts manucurés de rouge le mouchoir contre ma bouche.  

 

« Paris.... » pensé-je avant de sombrer... « Ryo... aide-moi ... » 

 


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