Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated PG - Prose

 

Author: MelleKaori

Status: Completed

Series: City Hunter

 

Total: 3 chapters

Published: 23-05-20

Last update: 02-06-20

 

Comments: 2 reviews

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RomanceHumour

 

Summary: Les années passent, se suivent et se ressemblent… ou pas.

 

Disclaimer: Les personnages de "Des fleurs et des chocolats" sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo.

 

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   Fanfiction :: Des fleurs et des chocolats

 

Chapter 1 :: Chapitre 1

Published: 23-05-20 - Last update: 23-05-20

Comments: A la base un OS, "avant oui, plus main-nan" Bonne lecture, j'espère.

 


Chapter: 1 2 3


 

Il faut se méfier de l'eau qui dort. Toujours. Je n'ai pas tenu compte de l'avertissement, c'est impensable d'être aussi crédule après une décennie de vie commune avec mon obsédé de partenaire. Je suis complètement passée à côté des infimes éclats métalliques animant cette mer d'huile sombre et insondable qui accrochait mon regard et je m'y suis précipitée tête la première. Je me suis faite avoir comme une débutante, quelle idiote !  

 

 

Notre précédente cliente, une miss Mokkori de plus, avait occasionné bon nombre de cratères autant dans les murs que dans le plancher de notre appartement et éprouvé ma résistance à la privation de sommeil. Evidemment qu'il y aurait des sanctions une fois la « chaaarmante» Megumi envolée, glaciales mes représailles devrais-je probablement préciser au vu des températures extérieures. Mon infernal pervers faisait donc acte de pénitence en réparant les dégâts matériels le jour et se plongeait dans une méditation éclairée à la nuit tombée. C'est si désespérant de constater à quel point certaines vieilles habitudes ont la vie dure...  

 

Après quatre heures de repentance larmoyante, le pendule humain avait contemplé la lune rousse puis proposé une trêve afin de respecter l'une de ses promesses. Anguille sous roche ? Baleine sous gravier ? Ces fêtes commémoratives, il n'y est pas attaché, aussi avais-je été touchée à leur évocation. Ma petite voix intérieure m'intimait de tourner les talons mais, portée par mon émotivité ainsi que ma curiosité, je l'avais étouffée pour prêter une oreille attentive à la proposition de Ryô. J'avais pris le temps de la réflexion avant de conclure ce pacte avec lui, très naïvement je m'étais laissée croire que « Nettoyeur irréprochable et nettoyeuse pacifiste » me garantirait un certain respect des règles élémentaires de la bienséance.  

 

Oui, je croyais. Certes, je ne m'attendais pas à un déluge d'attentions romantiques mais j'en espérais tout de même un minimum. Je me leurrais. Je mésestimais, une fois de plus, les fabuleuses aptitudes de l'homme de ma vie en matière d'inconvenance parce que là, il avait atteint des sommets. Il a déjà explosé son précédant record de ficelages consécutifs et ce n'est pas prêt de s'arrêter si je m'en tiens à mon œil pour œil, dent pour dent … Le pervers numéro un du Japon ? Ça pour sûr, il l'est !  

 

 

Je délaisse le plafond de ma chambre pour considérer ce paquet qui trônait sur mon lit hier soir et que je n'ai pas encore ouvert, vais-je y découvrir les grenades aveuglantes sur lesquelles je louchais ostensiblement lors de notre dernière visite au Cat's ? Va-t-il me pousser dans mes derniers retranchements ? J'y jetterai un œil au sortir de ma douche, juste avant d'aller le libérer. Il faut d'ailleurs que je pense à reconstituer mon stock de corde, celui-ci a si considérablement diminué que je risque fort d'en être à court.  

 

Je ne traîne pas au lit. Le printemps peine à s'imposer, toutefois nous déjeunerons comme prévu avec nos amis sous de timides éclosions florales même s'il me faut pour cela emporter ma couette avec moi. Je m'étire une dernière fois, en établissant mon plan de bataille culinaire, puis je gagne la cuisine. Ni une ni deux, je lance mes premières cuissons avant de m'atteler au petit-déjeuner et regrette rapidement d'avoir fait l'impasse sur la caféine pour dégourdir mes neurones afin de ne pas imbiber les manches de mon pyjama. C'est que j'ai perdu certaines de mes vieilles habitudes notamment celle de revêtir mes armures de tissu.  

 

La désagréable humidité sur mes poignets me fait pester. Contre moi-même, contre Ryô, contre ma vengeresse résolution impossible à tenir. Vingt-neuf ficelages dans l'obscurité contre vingt-neuf gribouillis sur fond blanc, sérieusement ? Mon échec est inéluctable, je l'ai déjà plus que frôlé lors de notre retour à l'appartement cette nuit. Minuit n'avait pas sonné, la trêve courrait toujours et moi j'étais piégée, capturée par son incandescence, trahie par mon propre corps...  

 

Un salvateur intrus permit au discret Frank Morris de se substituer à Cendrillon sur le point de succomber à son prince charmant. Ensuite… Ensuite la discussion entre les deux obsédés chassa l'envoûtée demoiselle au profit de la nettoyeuse experte ès suspensions, regonfla ma motivation à ne pas passer l'éponge sur son abominable trophée.  

 

Je prépare davantage de café tandis que je me laisse emporter par les souvenances de ma soirée de la veille se soldant par l'accrochage du brun et du blond à la rambarde de notre terrasse. Au début du commencement, lorsque la lune rousse avait déteint sur mes joues, j'étais persuadée qu'il se ferait gentleman pour le quinzième anniversaire de notre rencontre et qu'il respecterait un tant soit peu mes féminines aspirations. J'avais envisagé en retour un tête-à-tête romantique. Juste lui et moi. Et quelques bougies. Sans oublier une parure de dentelle. La trêve se serait muée en une réconciliation extatique mais au lieu de me sortir le grand jeu, l'homme de ma vie avait jeté de l'huile sur le feu.  

 

Consumé le dîner aux chandelles, envolé l'ensemble ajouré, jeté aux oubliettes mon plan A tout en rapprochements. Il m'en fallait un autre, un plan B avec un périmètre de sécurité autour de moi afin de demeurer hors de sa portée et fuir ses hypnotisantes prunelles ainsi que son sourire ravageur car il mettrait tout en œuvre pour me faire tomber dans ses bras. Victime collatérale de sa transformation en balancier, je n'aurais pas su lui résister.  

 

J'avais donc trois contraintes à respecter, quitter notre domicile – ne pas être seule avec lui – ne surtout pas rentrer avant minuit, sous peine de perdre davantage qu'une boucle d'oreille ou qu'un escarpin et d'écrire une version indécente d'un conte sage aussi m'étais-je sacrément trituré les méninges pour aboutir à cette sortie au goût subtil d'end of the road. Pour commencer, repas à l'extérieur et ensuite la Fiat me permettrait de conserver le contrôle quant à l'échéance temporelle, j'avais juste occulté un minuscule détail. Sa capacité à lire en moi comme dans un livre ouvert.  

 

-On prend la mienne., annonça-t-il tandis que je m'emparais de mes clés de voiture.  

-Mais Ryô, je pourrais m'y rendre les yeux fermés.  

-Je ne pensais pas que cela te manquait autant les entrepôts désaffectés., plaisanta-t-il.  

-Je trouve pas ça drôle., bougonnai-je en considérant d'une part mes nombreux enlèvements m'ayant conduite sur les quais et d'autre part sa prodigieuse connaissance des ruelles de Tokyo risquant fort de hâter notre retour.  

 

Je ne pouvais pas le laisser bousculer ainsi mon organisation, je cherchais un argument valable pour conserver les rênes de cette soirée, j'entends par-là le volant.  

 

-Je te signale que j'ai beaucoup moins d'accidents que toi., tentai-je.  

-Une petite démonstration de pourquoi on doit prendre ma voiture s'impose.  

-Tu… Mais… Tu… Tu n'es qu'un obsédé., soufflai-je.  

-Oh, vraiment, moi ?, s'amusa-t-il en refermant brutalement le coffre ce qui me recentra sur les aléas de notre monde professionnel.  

 

J'étais coincée, je ne pouvais rien opposer au principe de précaution, ma Panda ne disposant pas d'un tel arsenal défensif et plus je demeurais silencieuse, plus le démon au sourire enjôleur se rapprochait de moi. Nous n'étions même pas encore sortis du garage que déjà mon cerveau se dérobait à mon contrôle et dérivait dans de lascives considérations.  

 

-Je n'y avais même pas pensé…, ronronna-t-il en me coinçant contre ma portière.  

-Je… Tu… Enfin c'est… Euh… Hum… Ryô… , bafouillai-je troublée par mes propres pensées.  

-Tu montes dans mon carrosse ou ?  

-… D'accord., chuchotai-je sans pouvoir empêcher la coloration de mes joues.  

-D'accord ?  

-Je…voiture… quais, parvins-je à articuler.  

-D'accord !, s'exclama mon chauffeur aussi subitement qu'il s'éloignât de moi.  

 

Adossée à la Mini, je peinais à réaliser la sobriété langagière du pervers numéro du Japon, aucune raillerie quant à mon interprétation de sa ''démonstration''. Impossible. Tout bonnement inconcevable de le supplanter dans ses obsessions de chair. Non ! Je fermai les yeux, me concentrai sur le vrombissement du moteur et, reprenant enfin mes esprits, je m'assis dans la voiture. Il jubilait, moi je luttais pour bouter définitivement les sulfureuses digressions hors de mes cellules grises.  

 

Je resserrai les pans de mon gilet plus pour me donner une contenance que pour lutter contre le froid tout en proclamant le contraire. Monumentale erreur, il me proposa aussitôt de rester en nos murs. « Non ! » Non, bien sûr que non, je n'allais pas précipiter ma reddition. Mais c'était si évident. Fichue, j'étais fichue. Je m'appliquai à fuir ses ensorcelantes prunelles, ma vitre devint donc mon bouclier improvisé, elle me renvoya aussi les tressaillements d'épaules de mon tentateur absorbé par la torture que j'imposais à mes lèvres.  

 

Nous devions sortir d'ici au plus vite, je précisai notre destination d'une voix plus fluette que je ne l'escomptais, en effet je menais trop de combats simultanés pour tous les remporter. S'il ne relançait pas, j'avais au moins une toute petite chance de maîtriser mes neurones. L'horripilant grincement métallique se mêla au doux ronronnement du moteur, pour une fois l'ouverture disgracieuse de la porte du garage ravissait mes oreilles car nous sortions. Et pour résister autant que faire se peut à ma Méduse, je persistai à uniquement m'adresser à son reflet durant tout le trajet. Application du nécessaire principe de précaution.  

 

Il perturba mon timing parfait car, puisqu'il conduisait, nous étions sur les lieux bien plus tôt que prévu. Comment pouvais-je me lancer à la recherche de tout ce temps perdu ? Une tâche, non une mission digne de Mr Phelps. Avant de me hasarder à l'extérieur, je m'assurai, une fois de plus, du complet boutonnage de ma chaude cotte de mailles puis contemplai un instant les nimbes colorées dans l'éther sombre pendant qu'il pestait contre les températures fraîches pour la saison. C'est-à-dire qu'il exprimait sans vergogne son aversion envers les chauds – informes – infranchissables obstacles constituant le dress-code de ce soir.  

 

J'expirai bruyamment tout en étant, d'une certaine manière, soulagée par ce retour à la normale puis commentai brièvement la multitude de véhicules garés et les minuscules espaces de parking. S'en suivit une douteuse histoire de proportionnalité inversée qui mourut étouffée dans le claquement de ma portière, j'écopai alors d'une slave de bougonneries, Monsieur ne m'estimant pas assez attentionnée avec son trésor. Ah, Ryô et ses obsessions, il frise la caricature parfois ! Sans me soucier des vérifications aussi scrupuleuses qu'inutiles qui le retenaient, je m'avançai vers l'entrée de la fête foraine.  

 

Il ne lui fallut guère plus qu'une poignée de secondes pour me rattraper et me dépasser, proclamant au passage que je lambinais. Mauvaise foi quand tu nous tiens…masculine la mauvaise foi, cela va sans dire. Je m'efforçai simplement de regagner un peu de toutes ces précieuses minutes qu'il avait grappillé et qu'il grappillerait encore au trajet retour mais son sourire me convainquit de ne pas m'entêter à ralentir mon allure. L'instabilité du sol, fallacieux prétexte, ne ferait pas long-feu face à sa détermination à continuer de s'immiscer dans les rouages de mon plan, je ne tenais pas être transportée sur son épaule.  

 

A peine le portique franchi, je réalisai mon appartenance à la catégorie la plus frileuse de toutes les tokyoïtes de sortie, comme quelques jours auparavant… Je secouai la tête pour remettre mes idées en place préférant me féliciter d'avoir pris les contre-mesures quant à une potentiellement sévère pneumonie, de plus ses égarements visuels me seraient certainement profitables, j'avais déjà onze minutes à reconquérir rien que pour l'aller et je pouvais d'ores et déjà faire l'impasse sur de salvateurs embouteillages au retour. Étirer au maximum l'examen détaillé des lieux dans un premier temps, ensuite sembler indécise, au moins un tout petit peu et puis…  

 

-Tu veux tester le Hammer Force ?, me glissa-t-il à l'oreille.  

 

Je n'allais tout de même pas tomber dans un piège aussi grossier, je le laissai argumenter sur le caractère non transgressif de l'attraction par rapport à notre pacte et les effets dévastateurs de mon sevrage brutal de mes armes contondantes pour le rembarrer d'un simple rappel du cercle très retreint auquel s'appliquait la prodigieuse efficacité de mes massues. Je passai sous silence leur plaisante inactivité de ces derniers jours, si seulement cette dernière pouvait perdurer. « Pour que tu m'appelles Thor le reste de la soirée, non merci sans façon », ajoutai-je en jetant un furtif coup d'œil à l'étalonnage de la machine. Il perçut mon dépit malgré mes efforts pour le contenir, ne surenchérit pas et coupa court à toutes velléités de fuite en enserrant mon poignet.  

 

Il m'entraîna dans le flot mouvant jusqu'au palais des glaces, illustration parfaite du labyrinthe dans lequel nous avions évolué pendant toutes ces années. « On se retrouve de l'autre côté » J'aimai ce simulacre de contrôle qu'il me tendait, je m'engageai, je m'égarai sciemment avec un plaisir non dissimulé en explorant consciencieusement chaque impasse, je progressai à tâtons, je plongeai dans les réminiscences de notre premier baiser à chacune des retrouvailles de nos mains de part et d'autre des parois transparentes.  

 

Bien évidemment, il ne respecta pas les règles, j'étais entrée dans le dédale de fausses routes en même temps que lui et pourtant il était là, tout sourire à attendre ma sortie. Du coup je rebroussai chemin pour jouer les prolongations, exacerbant fortuitement au passage sa jalousie. Ni un yakuza, ni un séducteur de pacotille, juste un étudiant se divertissant dans une attraction de fête foraine. Pfff, non mais quel crétin ! Le jeune homme ne trichait pas, contrairement à un certain nettoyeur, il tendait les bras devant pour s'épargner un douloureux écrasement facial. Tout à fait accidentelle la rencontre de nos mains, et pourtant je sentis Ryô bouillir et s'engouffrer à nouveau dans le labyrinthe.  

 

Ainsi je n'étais pas la seule à verser dans les réactions excessives, je gravai sa jalousie dans un recoin de mon cerveau afin de lui ressortir au moment opportun, puis me concentrai sur le sauvetage de mon innocent obstacle de chair. Je n'avais pas le temps de concevoir une stratégie très élaborée, elle se résuma donc à faire volte-face et trébucher malencontreusement. Ce faisant, je stoppai son élan belliqueux en atterrissant dans ses bras, j'agrémentai le tout d'un « Mon héros» malicieux sauf que… sauf que j'avais enfreint la première de mes résolutions. Trop près, j'étais bien trop près de lui et si j'appréciais l'inactivité de mon arsenal punitif, d'autres accalmies s'avéraient plus compliquées à gérer … Trois – deux – un centimètre, l'espace entre nous diminuait et ses mains légères sur mes hanches n'y étaient pour rien.  

 

Je m'appliquai à fuir son regard en me concentrant sur le col de sa chemise qui n'avait pourtant nul besoin d'être réajusté, au chatouillis de mes narines s'ajouta un subtil effleurement lorsqu'il replaça délicatement une mèche de cheveux derrière mon oreille gauche. Il avait déjà fait des dizaines, des centaines de fois ce geste machinal pourtant, là tout de suite maintenant, ce réflexe pavlovien s'apparentait à une torture oscillant entre le trop et le trop peu. Trop pour moi, trop peu pour lui assurément. Quoique. Trop peu pour moi et trop pour lui si je me fiais à… un – deux – trois centimètres, la distance raisonnable et nécessaire qu'il réinstaurait entre nous, lentement mais sûrement.  

 

Nous reprîmes nos pérégrinations dans l'allée centrale, tentant de résister aux sirènes des stands où l'adresse se démontre avec des projectiles de plomb mais les moues enfantines empreintes de déception finirent par nous convaincre. J'y rencontrai une certaine réussite bien en deçà de la sienne avec mes ballons baudruches, cependant je décrochai des peluches de taille honorable et autant de sourires reconnaissants. Les réserves de chatoyantes fourrures furent fortement entamées par mon adroit partenaire, néanmoins au bout du cinquième stand il devint évident que le mot avait été passé quant à ses aptitudes. Nous étions devenus des indésirables aux divers jeux d'adresse, toutefois de nombreux enfants avaient pu bénéficier de soyeuses offrandes, cela nous suffisait amplement.  

 

Depuis notre arrivée la foule s'était peu à peu densifiée mais Ryô œuvrait habilement pour que nous ne nous retrouvions pas entraînés à l'exact opposé de notre point d'entrée. J'aimais déambuler ainsi à ses côtés. Simplement. Comme tout à chacun. Sans toutefois baisser complètement notre garde. Je me plaisais à croire qu'aucun incident fâcheux ne viendrait entacher notre escapade festive d'une normalité absolument ravissante, je savourais les bouilles extatiques de tous ces bambins croisés au gré de notre promenade et ses onyx pétillantes. Un nouveau fan-club s'était formé, celui des détenteurs d'immenses compagnons à poils synthétiques, ce dernier avait de loin ma préférence au regard de celui constitué de voluptueuses créatures.  

 

Encore étourdie par ses démonstrations d'habileté exclusivement dédiées à l'enfance, je cédai à l'appel d'une horrifique promenade mais sitôt le premier hommage à l'astre rond et blanc promulgué dans l'obscurité artificielle, je compris que je frémirai pas de peur. Loin de là. Le duo de lycaons surpassa mes capacités vocales pourtant hors normes, ensuite une alliance improbable se noua entre les affamés de cerveaux et les suceurs de sang aux canines affutées, puis le sol fut brusquement jonché de savants emberlificotages de bandages sur lesquels reposa un large assortiment de boulons oxydés et, pour parfaire le tout, une mélopée inconnue entonnée par les puzzles de 208 pièces et les dignes héritiers de Jack l'éventreur rythma ma balade. Oui, MA balade, car j'étais esseulée dans mon wagonnet biplace alors si mes épaules tremblèrent, ce ne fut certainement pas de frayeur.  

 

« Impossible, impossible, impossible…» pulsa à mes tempes. Mes compagnons de voyage, c'est-à-dire les couples ayant embarqués à notre suite dans ce périple censé être effrayant, s'esclaffaient joyeusement tandis que mon déserteur me tendait une main secourable pour quitter mon inconfortable banquette. Je choisis de m'en extirper par mes propres moyens avec toute la grâce et l'élégance qui me caractérisent et, ne souhaitant pas vraiment m'attarder ici pour entendre narrer la sévère déculottée des occupants du Manoir de l'horreur, je le dépassai promptement non sans lui avoir adressé au passage un éloquent froncement de sourcils.  

 

Il me fallut un certain temps pour saisir le pourquoi de ma traversée en solitaire. Je croquais à belles dents le fruit rouge et recouvert de sucre caramélisé sur lequel j'avais jeté mon dévolu lorsque nous fûmes, en quelque sorte, encerclés par d'imposants ursidés colorés et Ryô ne trouva rien de mieux que de ressortir particulièrement collant de son affrontement avec le blanc nuage de filaments. Une fois les gigantesques pandas et autres bisounours repartis vers leurs destinées, mes yeux se posèrent sur les stigmates de son combat contre la barbe à papa. Je me plantai solidement devant lui, sans pouvoir m'empêcher de le sermonner sur ses pitreries « Mais c'est pas possible, qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de toi ?! », lorsque le voile de mon incompréhension se désagrégea.  

 

Pile à l'instant où nos épidermes se touchèrent. Tandis que j'essuyais du pouce le sucre sur son menton, insuffisant ! clama ma matière grise me renvoyant autant à mon sevrage d'endorphines qu'à l'efficacité discutable de mon geste. Mes neurones engourdis se réveillaient peu à peu. Souhaitant ne pas égaler la teinte écarlate de mon dessert, j'enfonçai mes dents dans ma lèvre inférieure y trouvant quelques vestiges de caramel et les aspirai minutieusement. Mes gris paresseux s'agitaient. C'était si évident, me coller à lui dans un espace restreint et obscur était loin d'être une bonne idée de même que ma collecte effectuée sous très haute surveillance.  

 

Sérieusement, qu'allais-je faire de tous ces cristaux amassés sur la pulpe de mon doigt ? La bourrasque chaude sur mon visage m'intima de suspendre immédiatement mes traques minutieuses, Ryô avait orchestré son combat d'un main de maître, depuis son choix des armes jusqu'au grignotage de mon pouce. Panique respiratoire, cavalcade assourdissante, faiblesse musculaire et rougissement instantané. Il désorganisa mon centre de commandement d'un « Absolument tout ce que tu veux » suggestif et n'eut aucun mal à m'entraîner vers la sortie ni à slalomer promptement dans le flot clairsemé de voitures en établissant un nouveau record de vitesse.  

 

Mon plan B avait capoté, inutile de consulter ma montre pour confirmer que nous n'avions pas enfreint le couvre-feu. Si je parvenais à rejoindre mon antre la première, je pouvais encore tenir mes vengeresses résolutions, je n'attendis donc pas l'arrêt total de la Mini avant de me précipiter dans les escaliers. Pouvais-je lui échapper ? Non, bien sûr que non, il me devança aisément puis s'interposa entre mon refuge et moi. Pouvais-je me soustraire à ses sombres prunelles ? Evidemment que non, les ténèbres me happèrent.  

 

« 23h17 » souffla-t-il d'une voix rauque en m'acculant au mur du couloir. Ma résistance se réduisit telle une peau de chagrin lorsque survint l'attaque éclair contre les boutons de mon gilet, une offensive si soudaine que je m'attendais à les entendre rebondir puis rouler sur le parquet. Je chancelai sans quitter des yeux l'obscurité brûlante, plus il se rapprochait et moins mes mains pouvaient se détacher de lui. Pouvais-je me endiguer la conquête de ma peau ? Non, encore et toujours non.  

 

L'interstice de coton sur ma taille n'était plus, la chaleur investissant la chute de mes reins s'ancra en moi, ma bouche se soumit à son assaillante. « Trop tôt pour la corde mais pas pour des menottes » s'égrena le long de mon cou tandis que la rupture du barrage métallique influa la course de ses doigts, j'étais incapable de protester tant mon cerveau s'éparpillait dans de délictueuses considérations. Et subitement, les conquérants cessèrent leur manœuvre et ses lèvres se retroussèrent en une moue contrariée.  

 

-Angel, qu'est ce que tu fous là ?, bougonna mon ténébreux pyromane en relâchant son emprise.  

-Alors c'est vrai ?, interrogea fébrilement notre ami alors que je réajustai ma tenue.  

-Mais de quoi tu parles ?, demanda-t-il au perturbateur de trêve voluptueuse.  

-Ben de ce que m'a dit le Doc., répondit Mick à présent dans notre champ de vision.  

 

Quelle primordiale révélation du praticien avait pu inciter notre ami à pénétrer dans notre appartement à cette heure aussi tardive ? Cela devait être sacrément important, avais-je mécompris le dernier compte-rendu concernant les blessures de…  

 

-So, how many ?, coupa court à mes considérations médicales.  

-Vingt-neuf !, répliqua triomphalement Ryô.  

 

Voilà, l'abjecte collection réapparaissait alors qu'elle était totalement sortie de mes pensées, elle provoqua l'extinction immédiate du crépitement au creux de mon ventre et le retour de flammes de ma fureur.  

 

-Well done ! Je peux le voir ?! , quémanda l'intrus.  

-Bien sûr ! Il est dans l..., commença ma limace avant de croiser mon regard.  

 

Quel idiot ! Quels crétins obsédés ! Le grand bond essaya bien de m'attendrir, mais rien n'y fit, en deux temps trois mouvements, tout fut plié et ficelé fermement, ensuite je rejoignis une nouvelle fois ma bambouseraie sous une plaintive sérénade à laquelle je demeurai hermétique. Pour sûr, ma nuit serait sage, très sage. Trop sage, pff ! Je me momifiai dans ma couette et maugréai en renouant avec mes bouillantes alliées.  

 


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