Capitolo 18 :: Logistique

Pubblicato: 24-10-20 - Ultimo aggiornamento: 24-10-20

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Elle regardait autour d’elle cet environnement qui lui était si inconnu. Le vert et le brun abrutissants, l’humidité suffocante et les bruits que son esprit n’arrivait pas à identifier. Les odeurs étaient aussi difficiles à reconnaitre et chaque pas lui demandait un effort de concentration pour éviter de tomber.  

Ils avaient quitté la jeep une heure plus tôt pour s’enfoncer dans la vraie jungle, celle qu’on ne voit que dans les documentaires télévisés. Tous avaient l’air à l’aise même Mick qui avait adapté sa tenue pour les circonstances. Elle, elle avait la désagréable impression d’être la seule à se sentir inconfortable dans ces lieux.  

De grosses gouttes de sueur coulaient le long de sa peau et malgré plusieurs repas consistants et une bonne nuit de sommeil, elle se sentait épuisée et devait fournir un effort colossal pour suivre le rythme imposé.  

Manquant de trébucher à de nombreuses reprises, Kaori se retrouva rapidement à la fin du petit groupe. Alerté par son état, Ryô leva la main pour stopper leur avancée.  

-On va se reposer ici, décida-t-il en rejoignant sa femme et lui tendant sa gourde d’eau.  

Mick poussa un soupire de soulagement qui fit rire leur guide.  

-On ne se moque pas ! ria à son tour le blond en essuyant tant bien que mal la sueur de son visage.  

-On doit être à encore 20 minutes de marche, enchaina Camila.  

Ils étaient partis tôt le matin pour rejoindre une milice que Camila connaissait et qui pourrait leur fournir plus d’armes. Ryô avait été inquiet quand elle leur en avait parlé car ils pouvaient très bien retomber sur des mercenaires qui attenteraient à leur vie. Mais la jeune femme l’avait rassuré en lui disant que c’était là que son oncle s’était réfugié et qu’elle irait en éclaireur leur parler. Après avoir libérés leur village, elle ne doutait pas qu’ils leur viendraient en aide. Le nettoyeur lui avait alors demandé pourquoi la milice n’avait pas libéré le village elle-même et la jeune hispanique avait alors expliqué que leur puissance de frappe n’était pas aussi importante pour y arriver et que beaucoup étaient aussi assez âgés et agissaient plus en sous marin. Il s’était contenté de cette réponse mais restait sur ses gardes quand même. Les seuls alliés, qu’il avait, se trouvaient près de lui.  

Au bout de 10 minutes de pause, ils reprirent leur marche à travers la nature luxuriante de la jungle et Ryô resta près de Kaori pour la guider au mieux.  

Camila avait bien estimé la distance et à peine plus de 20 minutes après leur départ, elle les stoppa en silence.  

-Je vais y aller seule et je reviendrai dès que cela sera bon. Restez ici.  

Elle les quitta aussitôt et les trois hommes se mirent en position de défense autour de la japonaise. Armes à la main et œil vigilent.  

Les minutes leur parurent des heures et quand enfin un mouvement se fit sentir, Falcon se détendit en laissant passer leur guide.  

-Suivez-moi, ils vous attendent.  

Mick fut le premier à la suivre, suivi du reste de la bande. Apercevant les premiers hommes, une aura combative s’éleva au dessus des nettoyeurs. Même Kaori l’a ressenti. Elle regarda son époux qui lui fit un sourire entendu.  

A Tôkyô, Miki n’en menait pas large. Autour d’elle se trouver plusieurs yakuzas, voleurs, SDF et prostituées. Elle passa ses yeux sur tout ce beau monde présent dans le café et fixa les trois autres femmes qui se tenaient près d’elle. Aucune ne parlait et elle toussota pour attirer leur attention. Saeko fut la première à la regarder et elle lui fit un sourire chaleureux.  

-Les amis de Ryô !  

La porte s’ouvrit sur Erika et Kenji qui rentrèrent dans le café de concert. La foule se tue et tous attendaient la suite des événements.  

La travesti se fraya un chemin jusqu’à la barmaid et claironna un bonjour sonore à l’assemblée.  

-Merci à tous d’avoir répondu à notre appel. Vous savez tous pourquoi nous sommes ici et la nécessité de rester unis.  

En prononçant ces mots, elle regarda plus particulièrement les yakuzas disséminés partout dans la salle.  

-Je sais que nous n’avons pas tous les mêmes intérêts en temps normal mais en ces temps troubles, nous avons le même but, continua-t-elle en se tournant vers la commissaire. Je vais laisser la parole à quelqu’un qui va vous expliquer ce qu’il en est.  

Saeko la remercia d’un mouvement de tête et elle ramena une mèche de ses cheveux sur l’arrière pour se donner contenance.  

-Certains me connaissent… aujourd’hui oubliez mon statut, je veux la même chose que vous et rien d’autre. Pour les autres sachez que je ferai de mon mieux pour vous aider et couvrir ce qui pourra être couvert par contre je ne ferai aucun cadeau à ceux qui profiteront du chaos ambiant.  

Elle fit une pause pour balayer la salle du regard.  

-Ce soir, on m’a signalé plusieurs attaques dans le quartier mais aussi aux abords. On rentre dans le vif du sujet, ils ne se cachent même plus, la guerre est déclarée. Leur but est de dominer totalement la ville voir le pays si on en croit les informations qui circulent.  

Une prostituée leva la main timidement.  

-De qui parlez-vous ?  

Erika prit à nouveau la parole.  

-Plusieurs clans se sont alliés aux coréens, les Bonged, qui aidés par une milice sud-américaine, veulent prendre le pouvoir. Ils profitent du départ de Ryô pour déstabiliser l’équilibre en place.  

Un énorme brouhaha se répandit dans le café. Nombreux étaient ceux qui ne savaient pas que l’ancien nettoyeur n’était plus là. Certains yakuzas se mirent à rire et les autres eurent des sueurs froides. Il fallut plusieurs minutes à Erika pour que le silence reprenne place.  

-Calmez vous ! Je ne vous ai pas dit de venir pour compter les pâquerettes ! Si on est tous réunis ici c’est que l’on ne peut compter que sur nous !  

Une autre voix s’éleva.  

-Mais que veux-tu que l’on fasse ? Tu as vu qui nous sommes ? On ne fait pas le poids, lança un SDF la voix tremblante.  

D’autres voix lui donnèrent raison et le son monta en puissance.  

-Stop ! hurla Ayako qui jusque là n’avait pas pris par aux interventions. Je sais que la situation peut paraitre critique et effrayante mais je vous signale que City Hunter n’était plus depuis près de 2 ans et que nous y avons survécu.  

-Peut-être mais il était quand même là ! D’ailleurs pourquoi nous a-t-il abandonné ? Il se fou de son quartier ? De nous ? enchaina le SDF.  

-Ca suffit !! cria Kazue qui n’en pouvait plus de la tension qui augmentait dans la pièce. Ryô a dû partir pour régler des problèmes personnels ! Vous croyez quoi ? Qu’il est parti de gaieté de cœur ? On a tous à perdre et lui autant que nous, voir plus ! Alors arrêtons de nous plaindre et voyons comment faire pour l’aider au mieux.  

La doctoresse repris son souffle et posa sa main sur son ventre. Elle avait les yeux brillants de larmes contenues et le visage rouge d’avoir prit vivement la parole. L’assemblée la regarda surprise et se tut, attendant la suite.  

-Merci Kazue. Elle a raison. Si vous êtes là c’est que vous voulez nous aider alors si ce n’est pas le cas, partez, pipa la chef de clan.  

Personne ne bougea, elle continua donc.  

- Ce que nous allons vivre, va être difficile, je ne vous le cache pas. Mes hommes ont été sur les premiers lieux d’affrontements et ils ne font pas dans la dentelle… Ils sont fortement armés et organisés. Nous pensons qu’ils veulent régler ça rapidement. De mon côté, j’ai passé de nombreux appels pour avoir des appuis… je ne sais pas encore ce que ça va donner alors je ne peux pas vous donner de faux espoirs mais pour le moment nous sommes seuls.  

Ayako se tourna vers la policière et Saeko reprit la parole.  

-Les forces de l’ordre seront aussi sur le front mais je ne fais face qu’à des rumeurs alors pour le moment je ne peux pas mobiliser plus de monde. Mais dès que les choses dépasseront les rumeurs, j’en aviserai en haut lieu. Il faut faire front ensemble et s’organiser nous aussi pour ne pas les laisser prendre du terrain. Le monde sous-terrain va être chamboulé et j’ai les mains liées sur tout ce qui restera invisible.  

-C’est pour cela que je vous ai demandé de venir ce soir. On doit activer nos réseaux et voir comment on va lutter. A notre niveau, on peut déjà déstabiliser les clans. Avec l’aide involontaire de la police et le soutien du chef Serizawa, cela permettra d’augmenter notre force de frappe, continua Erika. Même si vous avez l’impression que l’on ne fait pas le poids, on peut saboter, informer ou attaquer !  

La conviction mise dans ces propos, rassura la foule qui reprit contenance. Certains commençait à s’organiser entre eux ou à échanger avec leur voisin. Ils se connaissaient tous plus ou moins, évoluant dans les mêmes sphères.  

La porte d’entrée s’ouvrit à nouveau sur une jeune femme habillée d’un justaucorps. A sa suite, une vieille femme au visage fermé.  

-Kasumi…souffla Miki. Entrez, je vous en prie, continua-t-elle avec respect pour la personne qui la suivait.  

La voleuse et sa grand-mère fendirent la foule et Miki montra une chaise libre pour la vieille femme.  

-Merci. Je vois que certains voleurs sont déjà là. Vous voyez mon soutien pour cette opération. Sachez que nous avons déjà été touchés par une attaque hier qui nous visait spécifiquement. C’est qu’ils ont peur des forces en puissance ! Alors, soyons unis car on ne pourra y arriver qu’ensemble.  

La vieille femme avait dit ça d’une traite avant de s’assoir et elle dominait l’assemblée malgré sa carrure. Son charisme parlait pour elle et le silence était la meilleure réponse. Kasumi, qui se tenait sur sa gauche, regarda l’ensemble des gens présents et s’adressa à son tour à eux.  

-Le clan Asou va mettre à disposition de ceux qui le veulent, armes et autres nécessaires. Comme vous l’a dit ma grand-mère, nous avons été touchés personnellement. Et comme nombreux d’entre vous ici présents, nous avons aussi une dette envers Ryô, alors nous allons défendre le quartier et même la ville s’il le faut !  

Des cris se mirent à raisonner et des voix à acquiescer. Les femmes présentes se regardèrent fières d’elles puis le café se vida doucement, laissant la pression retomber.  

Ca parlait espagnol et plus du tout anglais, Kaori était totalement perdue depuis plus d’une heure. Assis à même le sol sur la terre battue et la mousse, les quatre hommes et la japonaise faisaient face à deux hispaniques d’une cinquantaine d’année. Seuls Mick et Falcon parlaient, Ryô n’avait pas ouvert une seule fois la bouche mais sa femme voyait qu’il enregistrait tout.  

Elle s’était concentrée sur la conversation au début mais vite fatiguée de ne rien comprendre, elle avait décroché pour prendre connaissance du lieu où elle se trouvait. Cinq tentes au lieu des arbres qui cachaient le ciel et un foyer où le feu rougeoyant permettait de diffuser un peu de lumière dans ce coin reculé de la jungle. Pour trouver cette milice, il fallait s’en donner la peine car pour la jeune femme tout se ressemblait. Des arbres, des fougères, des lianes, des plantes qu’elle ne connaissait pas et de la mousse. Plus ils s’étaient enfoncés dans la forêt et plus elle avait l’impression que tout était pareil. Elle se rendait compte alors de la complexité des lieux et de la vie qu’avait dû mener son époux ici.  

Prise d’un frisson, elle imagina la vie d’un enfant de 3 ans perdu dans la jungle et elle fixa Ryô comprenant enfin la douleur qu’avait du être la sienne. Puis, un tremblement la parcouru et elle se demanda ce qui se passerait si c’était sa fille qui errait comme son père. Elle avait le même âge que Ryô quand ça lui était arrivé et elle eut un choc, maintenant c’était certain, le parallèle était fait. On avait pris sa fille pour atteindre Ryô en plein cœur, il n’y avait aucun doute possible. Les coïncidences n’en étaient pas et ils n’étaient pas ici par hasard.  

Elle se mit à frissonner de nouveau et elle vit son mari qui la regardait intensément. Elle lisait de l’inquiétude dans ses yeux sombres mais aussi de la détermination. Cela lui suffit pour que les battements de son cœur se calment rapidement. Elle n’était pas la seule à vouloir retrouver sa fille, ils étaient là, tous les quatre, pour cette mission périlleuse et ils ne repartiraient pas sans elle. Elle respira un grand coup et émit un sourire pour rassurer son homme. Il continua à la regarder quelques minutes puis il fixa à nouveaux les deux hispaniques.  

Kaori comprit que la conversation prenait fin quand Falcon se leva et parti dans une direction puis Mick et Ryo échangèrent quelques paroles. Les mercenaires se levèrent à leur tour et leur indiqua une tente. La japonaise se sentait perdue et déboussolée. Elle se leva à son tour mais resta interdite sans esquisser le moindre mouvement. Ce ne fut que quand Ryô posa sa main sur son épaule qu’elle se tourna vers lui, le regard perdu.  

-Viens, lui dit il tendrement sentant son trouble.  

Elle le suivit docilement, la fatigue la gagnant à force d’essayer de tout contrôler sans y arriver.  

Sous la tente, Mick se posa lourdement au sol en soupirant.  

-Bon, je ne sais pas vous mais je pense qu’on peut leur faire confiance… en tout cas ils vont nous donner des armes et aller à la pêche aux infos…  

-L’un de vous peut me dire de quoi vous avez parlé ? demanda Kaori en s’asseyant à son tour sur le seul lit de camp présent dans la tente.  

Ryô regarda à l’extérieur quelques secondes puis se tourna vers sa femme.  

-Miguel est le chef de cette milice et Augustino est l’oncle de Camila. Ils nous ont dit ce qu’ils savaient du groupe armé qui sévit depuis plusieurs mois et qui fait des ravages grâce à la poussière d’ange. Il n’a pas le nom qu’on lui connait mais en recoupant leurs informations et ce que nous nous savons, il ne fait pas de doute que ce groupuscule est un héritage de Kaibara. Ou du moins la personne qui en est à sa tête, a reprit les mêmes activités en se diversifiant quelque peut. Ils ne savent pas où ils se trouvent en ce moment exactement mais l’une des dernières attaques revendiquées a été perpétuée vers le nord à plus de 5 jours de marche. Ils vont essayer d’obtenir des renseignements plus récents et nous fournir armes et vivres… Augustino est assez réticent à ce que sa nièce parte avec nous mais Camila est partie directement traiter du sujet avec leur chef. Pour le reste, ça a été plus des échanges de logistique et de regroupement d’informations et surtout des prises de température sur le degré de confiance mutuel.  

-Qu’en est il des enfants ? demanda la femme d’une voix incertaine.  

Ryô se tourna vers son acolyte américain et les deux hommes se regardèrent mal à l’aise.  

-Ryô ? Que me caches-tu ?  

-Rien, soupira le nettoyeur. Juste qu’ils n’en savent pas tellement plus que nous mais pour eux, les filles servent pour ce à quoi tu peux t’imaginer et les petits garçons pour les entrainer au combat. Les temps sont moins troubles que quand nous y étions Falcon et moi et le recrutement volontaire a fortement diminué alors ils ont suivi un exemple et ils élèvent les enfants directement pour en faire des combattants…  

La voix de Ryô mourut dans le silence qu’il laissa dans la tente et Kaori du retenir un sanglot.  

-Ai est trop jeune pour les deux hypothèses, enchaina Mick en regarda son amie. Ne t’en fais pas, je pense qu’on la retrouvera avant qu’ils lui fassent quoique se soit… de plus…  

-De plus, elle n’a pas été enlevée pour ça, poursuivit la rouquine.  

Les deux hommes la regardèrent intensément, attendant la suite.  

-J’ai enfin comprit que la véritable cible c’est toi Ryô… Ai a le même âge que toi quand tu t’es retrouvé seul dans la jungle, on a essayait de me tuer et on te fait venir ici… qui que se soit derrière cette machination, c’est une vengeance plus que personnelle…même Kaibara ne s’était pas donné cette peine et était venu t’affronter directement au Japon… on veut te faire souffrir plus que de raison.  

Les mots avaient été prononcés de façon claire et même trop articulés pour faire naturel comme si Kaori voulait les détacher de sa bouche. Elle regardait son époux avec tendresse mais les yeux voilés d’une tristesse infinie. Elle ne se senti pas mieux quand il l’a pris dans ses bras et qu’il lui murmura un pardon à peine audible. Elle savait qu’il n’était pas responsable de leur malheur mais elle ne fut pas capable de le rassurer à ce moment là.  

Mick comprenant leur douleur, sortit de la tente pour leur laisser un peu d’intimité. Il parti rejoindre Falcon qui se tenait près du feu avec Camila.  

-Comment va Kaori ? demanda ce dernier se doutant que l’aura de tristesse venait d’elle.  

-Mal comme une mère a qui on arrache son enfant… laissons-les seuls un peu, ils ont en besoin.  

Le mercenaire acquiesça silencieusement, fixa la direction de la tente sans pour autant la voir. 

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