Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated R - Prosa

 

Autore: Tenshi

Status: Completa

Serie: City Hunter

 

Total: 30 capitoli

Pubblicato: 23-08-09

Ultimo aggiornamento: 19-10-11

 

Commenti: 244 reviews

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GeneralRomance

 

Riassunto: Une nouvelle aventure pour un couple mythique !

 

Disclaimer: Les personnages de "Je t'aime… un peu… beaucoup… à la folie… Mokkori ?!" sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo.

 

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   Fanfiction :: Je t'aime… un peu… beaucoup… à la folie… Mokkori ?!

 

Capitolo 20 :: Révélation (2) : Une assistante "dévouée"

Pubblicato: 08-09-10 - Ultimo aggiornamento: 08-09-10

Commenti: Bonjour à tous ! Tout d'abord, un grand merci pour vos petits mots qui me font vraiment très plaisir :) Merci ensuite à ma bêta pour sa relecture rapide et efficace^^ Voici la deuxième partie du chapitre Révélation. Comme la précédente, elle est assez sombre. Je dois aussi préciser que j'ai emprunté une citation au manga, vous la retrouverez facilement^^ Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter bonne lecture : j'espère que vous aimerez ! Bisous. Ten

 


Capitolo: 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30


 

- Cache-moi, je t’en supplie !

 

Combien de fois avait-il répété cette phrase ce soir, sans succès ? Lui, si fier, en était réduit à ramper devant ses anciens camarades. Mais leur réponse fusait sans tarder, toujours la même.

 

- P’tain, Ken, je sors tout juste de taule. J’ai pas envie de me faire descendre par City Hunter pour avoir sauvé ton cul. Désolé.

 

La porte à peine entrebâillée claqua violemment à la face de l’ancien bras droit du Lotus écarlate. Anéanti par cet énième échec qui revenait à le condamner à mort, Kentaro reprit avec lenteur la route de l’exil, presque résigné. À quoi bon se presser, désormais ? Les derniers événements avaient démontré qu’on n’échappait pas à Ryô Saeba.

 

Il se traînait de ruelle en ruelle avec difficulté, titubant à chaque pas. Il voyait à peine où il allait, à demi aveuglé par le sang qui coulait des plaies de son visage enflé. Il marcha ainsi le plus longtemps qu’il put, jusqu’à ce qu’il s’effondre, vaincu par l’épuisement et la terreur. En quelques jours, il avait tout perdu. Il était seul. City Hunter le traquait pour lui faire la peau. Personne ne pouvait l’aider.

 

Quoique…

 

Kentaro fouilla ses poches avec frénésie. Lorsqu’il referma ses doigts sur l’objet qu’il cherchait, il se leva, mû par un regain d’énergie. Ce paquet de cigarettes était peut-être sa planche de salut. Avisant la première cabine téléphonique qu’il trouva, Kentaro se saisit du combiné et composa la série de chiffres inscrite sur le paquet. Le numéro qu’elle lui avait donné quelques heures plus tôt… À partir de maintenant, IL prend le relais, avait-elle précisé, un étrange sourire aux lèvres. Kentaro n’avait pas osé demander qui.

 

À l’autre bout du fil, on décrocha à la troisième sonnerie.

 

- Allô ? chuchota une voix contrariée.

 

- Je n’étais pas censé vous appeler si tôt, mais… Je… Peut-être que vous, vous pourrez m’aider…

 

- Non mais vous avez vu l’heure qu’il est ? fulmina son interlocuteur.

 

- Pardonnez-moi, mais c’est très urgent… Il y a un problème avec le contrat…

 

- Lequel ? J’en gère une bonne vingtaine en ce moment, vous savez ? Bon écoutez, le bureau ouvre dans quelques heures, je vous suggère donc de… Oh, c’est malin, vous me l’avez réveillée !

 

Kentaro entendit les pleurs d’un bébé, puis on raccrocha.

 

Le bandit resta interdit. Il songea un instant à rappeler mais y renonça. De toute façon, il n’avait plus de monnaie. La roue de la fortune avait définitivement tourné. Il avait perdu. Une série de coups secs frappés à la porte vitrée de la cabine le sortirent de sa torpeur.

 

- Ouais, c’est bon, j’ai fini ! grommela-t-il.

 

Il reposa le combiné sur son socle et reprit ses clopes avec l’idée de s’en griller une.

 

« La dernière cigarette du condamné » ironisa-t-il, amer.

 

Il s’apprêtait à pousser la porte lorsqu’il reconnut avec horreur la personne qui se trouvait de l’autre côté.

 

- Fumer tue, prononça gravement celle-ci d’un ton sentencieux.

 

Le canon du pistolet fut la dernière vision qu’emporta Kentaro en Enfer.  

 



****

 

La serviette de coton humide passait et repassait sur le corps inerte, le débarrassant avec douceur des dernières traces d’hémoglobine, mais la jeune femme allongée sur le lit n’était pas en mesure de s’en apercevoir. Le Doc avait pansé sa blessure à la tête, le plus urgent, et avait laissé l’infirmière s’occuper du reste.

 

Kazue avait commencé par nettoyer et désinfecter les membres blessés de Kaori, laissant de côté son visage barbouillé de larmes et de mascara. Elle le gardait pour la fin, reculant cette étape le plus possible. Car elle savait que si elle regardait le visage de la nettoyeuse, elle craquerait…

 

Debout derrière la porte vitrée, Mick assistait aux soins, le visage sombre. Ryô se tenait encore à côté de lui quelques minutes plus tôt, mais était parti précipitamment, sans un mot. Mick comprenait fort bien la raison qui avait poussé son ami à s’éclipser de la sorte. Kazue nettoyait le corps de Kaori comme si… comme si elle faisait sa toilette mortuaire. Rien que d’y penser, il en était malade. Mais sa souffrance n’avait sans doute rien de comparable à celle de Ryô… L’Américain ravala la boule de nerfs qui lui obstruait la gorge, et détourna le regard. Le Doc sortait justement de la chambre d’un patient. Mick s’avança de quelques pas dans sa direction. Toute occasion était bonne à prendre pour oublier un instant la peine qu’il ressentait pour la nettoyeuse.

 

- C’est qui ? demanda-t-il.

 

- Ah, lui… C’est un jeune camé que Ryô m’a ramené il y a huit jours. Tu sais à quel point Ryô hait la drogue…

 

- Il n’est pas le seul, murmura Mick, serrant les poings.

 

- Sauf que dans le cas présent, il ne s’agit pas de PCP mais de cocaïne, soupira le vieillard. Je ne sais pas si le petit parviendra à supporter le sevrage, encore moins s’il survivra…

 

Mick entrouvrit la porte et considéra le jeune homme en sueur, au visage pâle comme la mort.

 

- Pauvre gosse.

 

- Je ne te le fais pas dire. Il souffrait tellement que Kazue a été contrainte de lui administrer un sédatif. Seulement, on ne pourra pas user de cette méthode bien longtemps, de peur que le gamin y devienne accro aussi…

 

Le vieux médecin secoua la tête avec lassitude, avant de prévenir Mick qu’il allait préparer la perfusion destinée au coma artificiel de Kaori.

 

L’Américain retourna se poster devant la chambre de son premier amour.

 

Son cœur fit un bond. Penchée sur le lit, Kazue n’avait plus rien de l’infirmière indifférente et blasée au chevet d’une patiente lambda. Le masque de froideur courroucée qu’elle affichait depuis leur arrivée venait enfin de tomber. Peut-être avait-elle réalisé que l’une de ses plus proches amies gisait dans ce lit, qu’on l’avait presque battue à mort, et qu’elle risquait d’en garder des séquelles. Peut-être que Kazue s’en voulait d’avoir nourri de la rancœur et de la jalousie à son encontre, à tel point qu’elle se rappelait même avoir souhaité… Elle se trouvait minable. Des larmes de honte et de détresse brillèrent dans ses yeux. Elle les laissa couler.

 

Mick n’avait aucune idée des pensées qui tourmentaient sa compagne à cet instant précis. Ce qu’il savait, c’était qu’il avait devant lui la femme sensible et droite dont il était tombé amoureux. Lorsque Kazue tourna vers lui son regard noyé de chagrin et qu’un sanglot s’échappa de ses lèvres tremblantes, Mick alla à sa rencontre, sans avoir aucun souvenir d’avoir ouvert puis refermé la porte vitrée de la chambre.  

Il se retrouva juste devant elle. Kazue s’était levée. Elle n’osait pas le regarder en face, fixant la tache pourpre de son tee-shirt, de peur de découvrir à nouveau cette étincelle de colère et de déception dans ses yeux. Aussi la stupeur la cloua-t-elle sur place lorsque l’Américain inclina vers lui son menton fin qui s’était mis à trembler. Il essuya du pouce ses joues striées de larmes.

 

Kazue ne put retenir un sanglot de soulagement. Elle avait l’impression d’avoir retrouvé son Mick.

 

- Ne t’inquiète pas, dit-elle avec une assurance qui l’étonna elle-même. Le Professeur et moi allons la soigner, tu verras. Kaori va s’en sortir !

 

- Je vous fais confiance, à lui, et à toi, répondit simplement l’Américain, sa main toujours sur la joue de l’infirmière.

 

Les doigts de la jeune femme recouvrirent alors ceux de son compagnon.

 

- Tu m’as manqué… Kazue…dit-il dans un souffle.

 

Ses yeux bleus étaient irrésistibles. Mais Kazue, visiblement mal à l’aise, détourna le regard.

 

- Mick, je suis vraiment… Pardon d’avoir été si… si…

 

- Hum hum, fit une voix familière.

 

L’infirmière rougit violemment tandis que Mick pivotait vers le Doc.

 

- Regardez qui je vous ramène, poursuivit le vieux comme si de rien n’était.

 

Une ombre gigantesque envahit le sol derrière lui, puis Ryô apparut dans l’encadrement de la porte. Il braqua aussitôt son regard sur sa partenaire. Si son extrême pâleur et ses multiples bandages lui retournèrent l’estomac, il n’en laissa rien paraître, le visage insondable comme toujours. Mick crut pourtant voir ses yeux s’adoucir, puis s’assombrir en une fraction de seconde. L’affection et l’inquiétude se livrant combat, sans doute. L’Américain faillit lui demander où il était passé – avait-il tué cet homme ? – mais se ravisa. Ryô n’avait d’yeux que pour sa partenaire.

 

Pendant un moment, personne ne parla. Ryô semblait de pierre. On eût dit qu’il ne respirait pas. Mick aurait payé cher pour savoir quelles pensées s’agitaient sous ce crâne. Ces yeux…

 

« Quand tu étais aux Etats-Unis, tu étais bien plus désespéré… Tu ressemblais à un dieu de la mort au regard noir… »

 

Ryô avait exactement le même regard en cet instant, songea l’Américain.

 

- Ryô… Plus on attend, plus les chances de… Enfin… hésita le Doc, d’une voix qu’il aurait voulu moins chevrotante.

 

Le nettoyeur s’écarta alors du lit et Mick alla lui tenir compagnie au fond de la pièce, dans une démarche inavouée de lui apporter un peu de soutien, même maladroit. Sur un signe du Professeur, Kazue installa la perfusion. Après un bref regard adressé au nettoyeur, le Doc injecta lentement le puissant hypnotique qui allait plonger la jeune femme dans le coma.

 

- Et voilà…

 

Le vieil homme commença aussitôt à surveiller les battements du cœur de Kaori. On n’entendait plus que les bip bip réguliers du monitoring. Au bout d’une minute, Kazue se tourna vers le Doc, qui exprima son approbation d’un hochement de tête.

 

- Ça y est, annonça l’infirmière. Professeur, c’est moi qui veillerai Kaori, cette nuit. Allez vous reposer.

 

- Je serai plutôt dans la chambre de notre jeune junkie, si tu me cherches. Ryô, Mick, vous devriez peut-être…

 

Mais Ryô tira à lui un petit tabouret qui se trouvait dans un coin, et s’y assit, manifestant ainsi sa volonté de ne pas bouger de la nuit.

 

- Je reste aussi, déclara Mick d’une voix ferme.

 

Ne restait plus maintenant qu’à attendre.


 

 

Trois jours plus tard.

 

Sousuke Satori avait toujours été un homme solitaire. Sa famille – ou ce qu’il en restait – résidait dans la campagne reculée, et ses amis se comptaient sur les doigts de la main. Ce qui expliquait sans doute que seuls Shinichi, son assistante, le chef du service logistique de KOMACOM et le lieutenant Nogami, qui avait découvert le cadavre dans le coffre de la limousine, soient présents à son enterrement.

 

Un homme au visage sombre assistait également au service funèbre, un peu à l’écart. Bien que sa partenaire fût dans le coma, Ryô devait continuer de protéger leur client, mission oblige. Ce qui impliquait de le suivre dans tous ses déplacements, y compris au cimetière. Comble de l’ironie, la tombe de Makimura se trouvait à deux pas. Mais pas question de s’en approcher. La prochaine fois qu’il viendrait saluer son ex co-équipier, ce serait en compagnie de Kaori.

 

Il faisait un temps magnifique et les hommes transpiraient dans leurs sévères costumes noirs. Ryô, quant à lui, était vêtu comme à l’accoutumée : jean noir, tee-shirt rouge et veste bleu pastel aux manches retroussées. Il n’était d’ailleurs pas le seul à avoir dérogé à la tradition. Moulée dans une robe d’été d’un rouge provocant, Misa baillait sans retenue en regardant sa montre. Sa chevelure blonde étincelait au soleil et elle en jouait, parce qu’elle sentait le regard du nettoyeur qui ne la lâchait pas. Elle se permit même de lui adresser un clin d’œil aussi audacieux que déplacé. Saeko, droite et digne dans son tailleur sombre, lui jeta un regard méprisant.

 

- C’est encore long ? osa demander Misa à voix basse – parfaitement audible. Nous avons une journée chargée, monsieur.

 

L’indignation de Saeko alla croissant mais Shinichi devança l’intervention de l’inspectrice.

 

- Il était mon chauffeur personnel, murmura l’homme d’affaires d’un ton sec. Et c’était aussi un ami.

 

- Oh, je t’en prie ! fit son assistante, les yeux au ciel.

 

- Ssh !!

 

Si Saeko croyait remettre Misa à sa place par ce bref rappel à l’ordre, elle se trompait. Les deux femmes se jaugèrent sans ciller durant de longues secondes. Contre toute attente, Misa céda la première, ponctuant la fin de ce duel visuel par une exclamation de dédain.

 

Le service terminé, Saeko prit Shinichi à part et lui adressa ses condoléances.

 

- Merci de vous être déplacée, lieutenant.

 

- Ne me remerciez pas, c’était bien naturel, répliqua l’inspectrice. Au sujet de l’enquête, je…

 

Saeko remarqua du coin de l’œil Misa traîner mine de rien près de la sépulture du chauffeur. Pour quelqu’un qui avait parlé de vider les lieux au plus vite, c’était plutôt bizarre. À moins d’être particulièrement intéressée par leur conversation.

 

- Vous savez certainement que nous avons retrouvé le corps du meurtrier de monsieur Satori dans une cabine téléphonique des quartiers chauds…

 

Ça, Ryô ne risquait pas de l’oublier. Après avoir veillé Kaori, la nuit de l’attaque, le nettoyeur était parti en chasse à l’aube. Il n’avait laissé que quelques heures d’avance à sa proie – jouissant de la savoir aux abois, tremblante, terrifiée de se sentir traquée – mais quelqu’un l’avait devancé en flinguant ce fils de putain.

 

- Notre laboratoire analyse les pièces à conviction retrouvées sur les lieux. Il est fort probable que votre agresseur a été liquidé par ceux qui l’ont engagé. Toutefois, nous n’excluons pas la piste du crime crapuleux…

 

« Ceux qui l’ont engagé… »

 

Celle, plutôt, rectifia Shinichi avec un frisson. Mais la police pouvait-elle arrêter un fantôme ? L’homme d’affaires écouta d’une oreille distraite l’inspectrice lui promettre de le tenir informé des progrès de l’enquête. Puis il la regarda sans vraiment la voir s’éloigner au volant de sa Ferrari rouge.

 

Rouge…

 

- Misa ! s’exclama Shinichi, rattrapant son assistante. Attends…

 

Difficile d’affronter ses yeux vert pâle qui semblaient tout deviner de son âme.

 

- Oui ? s’impatienta-t-elle.

 

- Misa, j’ai peur… Elle est revenue ! Pourtant, je sais que c’est impossible, mais… Cet homme, il a dit…

 

- Alors là, je t’arrête tout de suite, Shinichi, coupa Misa. Je ne suis plus tenue d’écouter tes élucubrations. Ça ne me concerne plus ! Toi et moi, c’est uniquement professionnel maintenant. Après tout, c’est bien toi qui en as décidé ainsi, non ?

 

Pétrifié par le venin qui suintait des paroles de son assistante, Shinichi resta coi. Misa l’acheva sur une dernière réplique assassine.

 

- Tu n’as qu’à te confier à ta petite rouquine. Ah non, c’est vrai qu’elle est dans le coma… Dommage !

 

L’homme d’affaires contempla son assistante passer devant Ryô, un sourire triomphant aux lèvres, et parcourir les quelques mètres qui la séparaient de la sortie du cimetière. Qu’était-il advenu du temps où il pouvait tout, absolument tout, lui confier ?


 

 

Flashback. Quinze ans plus tôt, dans un pensionnat en Angleterre.

 

Shinichi Komamura, seize ans, l’uniforme réglementaire de l’école impeccablement repassé, termine son petit déjeuner. Assis à une table, au fond du réfectoire. Seul. Son air maussade a depuis longtemps rebuté les maladroits farcis de gentillesse, les arrivistes intéressés et les moins conformistes du groupe des « cool » qui ont essayé d’établir le contact. Ses yeux gris et son aura mystérieuse ont bien attiré quelques filles, mais il n’en a jamais laissé aucune devenir proche de lui. Vite découragées, un peu vexées aussi, elles le surnomment le Frigide chronique.

 

Il ne parle à personne, personne ne lui parle. Autant dire que nul ici ne le connaît vraiment. Sauf Kinusike, son cousin. Ils sont dans la même classe. Même classe, objectifs différents. Kin étudie d’arrache-pied, tout persuadé qu’il est de devoir faire honneur à son oncle qui l’a recueilli. Sportif et sociable, admiré pour son passé tragique d’orphelin, donc populaire. Shin, lui, se laisse vivre. Travaille juste assez pour ne pas se faire exclure. Mélancolique, associable donc méprisé. C’est lui qu’on traite de fils à papa, qu’on chahute. Pas trop, car il possède la plus grande fortune de toute l’école. Le directeur a la famille à la bonne. De ça aussi, on lui tient rigueur.

 

L’un s’emploie à tourner la page de l’affaire Karin, l’autre en est incapable. L’un partage sa chambre avec un camarade, l’autre bénéficie d’un régime de faveur : chambre individuelle, non loin de l’infirmerie. Ordre express du père Komamura. Car il a fallu trouver une explication plausible aux crises nocturnes du fiston. Alors, pour les profs et les élèves, Shinichi souffre de somnambulisme épileptique.

 

Shinichi se lève et dépose son plateau vide avec les autres. Autour de lui règne un brouhaha plus intense que d’habitude, mais il n’y prête guère d’attention. Pour lui, tous les jours se ressemblent.

 

- … Nouvelle… Arrivée ce matin…

 

- Hééé ? Sans blague ?

 

- Une fille ? Cool !

 

- J’espère qu’elle sera dans ma classe !

 

Au moment d’entrer dans sa salle de cours, Shinichi se heurte à deux masses. Il lève son regard vide et blasé pour identifier l’obstacle. Tiens tiens, les deux caïds pourris gâtés de son groupe.

 

- Hé, Komamura ! l’invective le plus costaud. Ça t’arrive de regarder où tu marches ?

 

Même regard insondable.

 

- ‘tain, vise-moi un peu c’te tête. J’en ai marre de voir ta tronche de zombie, t’entends ? poursuit le grand escogriffe en le saisissant violemment par le col de sa veste.

 

- Ouais, c’est vrai ! ricane son benêt d’acolyte. Alors Komamura, t’as pas refait une petite crise ces temps-ci ? Tu veux qu’on t’emmène à l’infirmerie ?

 

Leurs yeux brillent de méchanceté stupide et gratuite.

 

- Arrêtez.

 

Kinusuke vient de se frayer un passage parmi la foule d’élèves qui attendent pour entrer.

 

- Pas touche à mon cousin, les mecs. C’est clair ?

 

- Oh la la, si on ne peut même plus s’amuser…

 

- Mouais, t’as de la chance que Kin soit là, fait Musclor en relâchant son emprise. On se voit au foot, Kin !

 

- C’est ça.

 

Avec un soupir, Kinusuke observe son cousin traverser la salle d’un pas lent et s’asseoir à sa place, au fond. Pas un regard, ni un « merci ». Kin ne s’en offusque pas. Il a l’habitude.

 

Le cours n’a pas commencé que le directeur fait son entrée, accompagné d’une jeune fille. Il fait les présentations, puis s’en va.

 

- Bien, asseyez-vous, mademoiselle Warui, ordonne le professeur.

 

La jeune fille parcourt la classe des yeux, ne prêtant nulle attention aux sifflements admiratifs des garçons et aux murmures jaloux des filles. Son regard s’arrête soudain sur le seul élève qui ne la dévisage pas. Le menton dans la main, il contemple le ballet des feuilles d’automne par la fenêtre. Un éclat étrange s’allume dans les prunelles vert d’eau de la jeune fille.

 

- Viens là ma belle, il y a une place pour toi ! s’exclame Musclor, surexcité.

 

Mais la jeune fille passe sans s’arrêter et pose ses affaires sur la seule autre table inoccupée. À côté de Shinichi.

 

- J’y crois pas, gémit Musclor.

 

Avant de se faire sèchement rappeler à l’ordre par le professeur, sous les rires du reste de la classe.

 

- Bonjour, je m’appelle Misa. Quel est ton nom ?

 

Shinichi tourne lentement la tête et détaille son interlocutrice, depuis ses cheveux blonds coupés au carré, ses yeux verts, ses lèvres rouge sang.

 

- Moi, c’est Shinichi, s’entend-il répondre avec stupeur. Shinichi Komamura.

 

Il ne comprend pas ce qui lui arrive. Misa lui adresse un petit sourire et un regard perçant. Cette fille est bizarre, a-t-il le temps de penser avant que le prof commence son cours.

 

Quelques jours plus tard, à la bibliothèque, la nouvelle tire la chaise voisine de Shinichi.

 

- Encore toi !

 

- Tu as perdu un être cher, commence Misa sans autre forme de procès.

 

À nouveau ce sourire énigmatique.

 

- Co… Comment ?

 

- Je le vois dans tes yeux, poursuit la jeune fille. Tu as le même regard que moi…

 

Estomaqué, Shinichi retient son souffle sans s’en rendre compte.

 

- Et tu as du sang sur les mains, lui susurre-t-elle à l’oreille. Comme moi…

 

Le cœur du garçon bat à cent à l’heure. Soudain, deux grosses paluches s’abattent sur la table.

 

- Salut ma poule !

 

C’est Musclor. Son pote ricane comme un bossu derrière.

 

- Ça te dit de faire un petit tour avec moi ? Je te ferai visiter l’école…

 

Misa le considère quelques secondes puis regarde Shinichi, qui se renferme sur ses bouquins.

 

- Pourquoi pas, fait la jeune fille en se levant.

 

Dans son dos, Musclor adresse un geste obscène à son acolyte et articule silencieusement : « Je vais me la faire ».

 

Après leur départ, Shinichi renifle avec mépris.

 

- Elle est comme les autres…

 

Le soir venu, une grande effervescence règne au pensionnat.

 

- Hé, vous connaissez la dernière ?

 

- Oui, c’est incroyable !

 

- Il a dit qu’il était tombé dans les escaliers !

 

Musclor a le bras en écharpe et le regard fuyant. Ses copains se pressent autour de lui au réfectoire.

 

- Alors, et la fille ? Tu l’as… ?

 

- Non ! rugit Musclor. Et foutez-moi la paix !

 

Shinichi remarque qu’il se tasse sur sa chaise lorsque Misa arrive avec son plateau. Il se met à dévisager la nouvelle avec une réelle curiosité. Mais la jeune fille ne lui adressera pas un regard de tout le repas.

 

Plus tard, dans son lit, Shinichi est en proie à un sommeil agité, lorsqu’il se réveille soudain, sentant une présence.

 

- Qui… Qui est là ?

 

Il n’a pas le temps d’émettre un son de plus que l’intrus l’immobilise, à califourchon sur lui.

 

- Toi ! reconnaît Shinichi, les yeux exorbités.

 

C’est Misa. Elle met un doigt sur sa bouche, lui intimant le silence, puis retire son peignoir, sous lequel elle est nue. Elle se penche sur le garçon, qui s’agite.

 

- Ssh… Laisse-toi faire… fait-elle en l’embrassant.

 

Vaincu, Shinichi s’abandonne.


 

 

Des années plus tard. Tokyo, bureau directorial de KOMACOM.

 

- Père, vous m’avez fait demander, lance une voix grave.

 

Les yeux gris de l’homme plongent sans émotion dans ceux de son père.

 

- En effet, déclare Komamura senior. J’ai quelque chose d’important à te dire.

 

Planquée derrière la porte, Misa ne perd pas une miette de la conversation. Le hurlement qui retentit dans la pièce est cependant parfaitement perceptible.

 

- Comment avez-vous osé faire ça ! éructe Shinichi, livide de rage. Je suis votre fils !

 

- Justement ! C’est parce que je me soucie de toi que j’ai pris cette décision !

 

- Foutaises !

 

- Si j’ai décidé que Kinusuke me succèderait en tant que leader de KOMACOM, c’est pour te préserver des tracas immenses que génère cette tâche ! Tu n’as pas les épaules pour assumer cette fonction, mon fils…

 

Komamura senior soutient sans broncher le regard étincelant de haine braqué sur lui. La fureur de Shinichi est si grande qu’il a de la peine à desserrer les mâchoires pour continuer à argumenter.

 

- J’ai les mêmes diplômes que lui ! J’ai rattrapé son niveau ! Je vaux autant que lui !

 

Il a l’impression de parler dans le vide. A bout de nerfs, Shinichi envoie le cendrier en cristal se fracasser sur le sol.

 

- Tu vois, commente calmement le père. C’est bien ce que je disais. Tu es trop instable, Shinichi. Cette tragédie de ton passé t’a… changé.

 

- Misa et moi avons remporté plus de contrats cette année ! lance le jeune homme en désespoir de cause.

 

Cette fois, c’est le père qui sort de ses gonds.

 

- Tiens ! Parlons-en de cette fille ! Elle ne m’inspire aucune confiance. Même ta mère lui trouve le regard sournois. Elle a une mauvaise influence sur toi !

 

- C’est faux !

 

- Maintenant ça suffit ! La discussion est close. Tu fermeras la porte en sortant.

 

Sur le seuil du bureau, Shinichi s’immobilise.

 

- Une dernière chose, père. Avez-vous informé Kinusuke de votre décision ?

 

- Non, pas encore. J’ai des détails à régler avant, des documents à modifier…

 

Le père se replonge dans la lecture d’un dossier, signifiant à son fils que l’entrevue est terminée. Shinichi ferme la porte. Un murmure rageur franchit ses lèvres.

 

- Je voudrais que tu crèves !

 

- Ça peut s’arranger, fait une voix familière.

 

- Misa !

 

- J’ai tout entendu, précise la jeune femme. Et je pense pouvoir t’aider.

 

- Que… Que vas-tu faire ? balbutie l’homme.

 

Elle a ce petit éclat inquiétant qui fait briller ses prunelles.

 

- Ne pose pas de question si tu ne veux pas connaître la réponse…  

 

 


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