Hojo Fan City

 

 

 

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Rated PG-13 - Prose

 

Auteur: A. Dust

Beta-reader(s): Cristinampm

Status: Complète

Série: City Hunter

 

Total: 6 chapitres

Publiée: 29-10-21

Mise à jour: 03-12-21

 

Commentaires: 17 reviews

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GeneralHumour

 

Résumé: Une jeune fille américaine, Jade Makimura se rend à Tokyo, espérant ainsi retrouver ses racines, à défaut de son histoire familiale. Que va-t-elle y découvrir ? (Une des suites possibles à la précédente fiction : La Lettre).

 

Disclaimer: Les personnages de "Racines" sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo.

 

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   Fanfiction :: Racines

 

Chapitre 4 :: "Dis-moi qui tu es, Moustique, et je te dirai qui je suis."

Publiée: 19-11-21 - Mise à jour: 19-11-21

Commentaires: Bonjour à toutes et tous !
Un peu en panne d'inspiration ce matin pour vous présenter ce chapitre 4 ... Alors, ça sera un simple mais sincère : J'espère que ça vous plaira et que ça répondra à certaines de vos questions !
A bientôt

Angel

 


Chapitre: 1 2 3 4 5 6


 

 

La policière était partie depuis trois bonnes minutes maintenant, laissant derrière elle le vigile en faction, redevenu indifférent et somnolent, assis dans son fauteuil défraîchi, les pieds croisés sur son bureau tout aussi défraîchi, sorte de dernier rempart de sécurité, comme si tout le reste était inutile et anodin ... Ce qui n'était évidemment pas le cas : les barreaux épais et la serrure fermée à double tour, les trois caméras de surveillance et la porte blindée ... Autant d'obstacles infranchissables ...  

 

Et Jade était restée debout, immobile, les mains accrochées aux barreaux, les yeux portés vers la porte qui demeurait close, tournant toujours le dos à l'homme assis derrière elle.  

 

Elle ne fut pas surprise quand elle l'entendit s'éclaircir la gorge. Elle soupira avant de répondre à sa question muette :  

- "Je vous répète que j'vous dirai rien."  

- "Et moi, je te répète que tu viens de me dire quelque chose." Répliqua la voix grave derrière elle.  

- "JE VOUS DIRAI RIEN."  

- "Héhéhé, est-il nécessaire que je te la ressorte ?"  

- "Nan, c'est bon."  

- "T'es sûre ? Parce que là encore, tu viens de me dire autre chose que "rien" ..."  

- "On vous a jamais dit que les meilleures blagues sont les plus courtes ?"  

- "Ahhhh ! Ca a dû m'arriver une ou deux fois, c'est pas impossible !"  

- "Alors vous devriez appliquer ce conseil ..."  

- "Oh, et bien, ça veut dire que si je l'avais faite qu'une seule fois, elle aurait été drôle ?"  

 

Jade posa son front contre les barreaux en soupirant une nouvelle fois :  

- "Mais c'est pas vrai ..."  

- "Roooo, arrête de râler, Moustique !" Dit l'homme en sortant son paquet de cigarettes de sa poche.  

- "M'appelez pas Moustique."  

- "C'est dommage ... Je trouve que ça te va bien pourtant ! Et, d'habitude, je suis assez doué pour trouver les sobriquets adaptés."  

 

Elle ne tourna pas la tête vers lui mais elle entendit qu'il tapotait une cigarette sur son paquet. Là aussi, comme oncle Mick ...  

- "Étrange comme certains hommes se ressemblent dans leurs habitudes." Songea-t-elle avant de lancer d'un ton faussement intéressé : "Ah oui ?"  

 

L'homme sourit passant sa cigarette dans la bouche, cherchant son briquet dans sa poche :  

- "Oui, oui, je t'assure ! Mes amis n'ont jamais eu à s'en plaindre !"  

- "Ben tiens ..."  

 

Il prit le temps d'allumer sa cigarette, inspira la fumée et la rejeta lentement avant de répondre posément :  

- "Si, si. J'en ai de beaux à mon actif : Luciole des Mers, Gueule d'Ange, Dragon Tentateur, Policière de mon Coeur, Reine du plateau, ...."  

- "Y'a quelqu'un qui accepte que vous l'appeliez Luciole des Mers ?"  

- "Et oui !" Répliqua-t-il fièrement.  

- "Sérieux ?"  

- "Si j'te'l dis. Faut dire qu'il a pas trop le choix mais, non, la plupart du temps, il dit rien. Je l'appelle aussi Tête de Poulpe de temps à autre ou Mammouth tout simplement."  

- "Pourquoi ?"  

- "Pourquoi quoi ?"  

- "Pourquoi il vous laisse dire ça ? Vous le faites flipper, comme les autres types, là, ceux qui vous ont appelé City Hunter ?"  

 

Le type éclata de rire :  

- "Je ne pense pas que je lui aie jamais fait peur de toute sa longue et interminable vie. Sauf peut-être une fois ... mais c'était il y a très très longtemps et nous n'étions pas vraiment amis, si tu vois ce que je veux dire ..."  

- "Pas vraiment."  

- "Pas grave." Répondit le type en prenant une nouvelle bouffée.  

 

Incommodée par l'odeur de la cigarette, Jade plissa le nez en répondant, lui tournant toujours le dos :  

- "Alors, il est votre ami et vous, vous ne trouvez rien de mieux à faire que de le surnommer "Tête de Poulpe"?"  

- "Mouiiii. Pourquoi ?"  

- "C'est blessant et on ne blesse pas ses amis."  

- "Je ne suis pas tout à fait d'accord avec toi. Si c'était faux ou injustifié, oui, ça serait blessant. Mais, je te promets que ça lui va comme un gant !"  

 

Jade étouffa un rire moqueur en murmurant :  

- "Et puis quoi encore ? Qui peut bien avoir une tête de Poulpe tout en étant une Luciole des Mers et un Mammouth ?"  

 

Le type poursuivit :  

- "Si, si, Tête de Poulpe, c'est parce qu'il a plus un poil sur le caillou, donc voilà, je pense que le rapprochement est vite fait. Ensuite, avec son crâne immaculé, je t'assure qu'il éclaire la nuit la plus sombre donc, Luciole des Mers, c'est nickel. Et Mammouth ... Bah il est encore plus grand que moi, super large, donc voilà ... Les trois lui vont vachement bien !"  

- "N'importe quoi ! Un tel type ne peut exister ..." souffla-t-elle en jouant avec les écailles de peinture des barreaux, faisant tomber des paillettes jaunes sur le sol.  

- "Pas grave si tu ne me crois pas. Moi je sais que c'est vrai. Et ça me va."  

- "Mouais, bah tant mieux pour vous."  

- "Et toi, personne ne t'a donné de surnom rigolo ?"  

 

Jade se retourna vivement et ouvrit la bouche pour répliquer que si, effectivement, elle avait bien un surnom, un surnom rigolo, un surnom rigolo et affectueux, un surnom que lui avait donné un homme qui comptait énormément pour elle, qui comptait comme un père, elle qui ne connaissait pas le sien et qui ne le connaîtrait peut-être jamais.  

 

Crevette.  

Son Oncle Mick l'appelait Crevette. Et elle avait beau râler à chaque fois, elle adorait ça quand il l'appelait Crevette.  

 

Mais les mots ne franchirent pas ses lèvres et elle resta finalement silencieuse. Elle n'avait pas à se justifier après tout.  

 

L'homme poursuivit d'un ton moqueur :  

- "Ou bien est-ce que tout le monde t'appelle princesse, pupuce, choupinette ou chaton, pour te faire croire que tu es toute mimi ?"  

 

Jade tiqua et se retourna vivement :  

- "Je ne suis pas une pupuce ou une princesse !"  

- "Tout à fait d'accord avec toi, Moustique !" Répondit le type en souriant étrangement à travers les volutes de fumée, comme quand ils s'étaient dévisagés alors qu'ils se trouvaient dans la ruelle.  

 

Ne parvenant plus à retenir sa colère, Jade serra les poings et s'avança d'un pas rageur vers l'homme en criant :  

- "Je suis pas un Moustique !"  

 

Ils entendirent alors le gardien se lever brusquement, faisant racler bruyamment sa chaise métallique sur le sol en béton. Il s'avança, visiblement fâché et se planta devant la cellule de Jade et de son compagnon :  

- "Hé, vous ! C'est pas parce que vous avez des autorisations de Je-Ne-Sais-Pas-Trop-Qui-d'En-Haut," dit-il en levant les yeux au ciel, "que vous avez le droit de faire n'importe quoi ! C'est interdit de fumer ici !"  

- "Quoi !"  

- "Parfaitement ! Vous rendez compte si tout le monde faisait comme vous ?" Répliqua le gardien en montrant d'un geste théâtral la rangée de quatre cellules semblables à celles de Jade.  

- "Bah, elles sont vides, mon brave." Répliqua le fumeur. "On va pas en faire une maladie pour une petite clope par ci par là ..."  

- "On n'est pas dans un salon ou un bar pour taper la discut ici, mais dans une prison. Alors, la ferme et tenez-vous à carreaux, tous les deux ! Mademoiselle, arrêtez de brailler et vous, écrasez-moi cette clope !"  

 

Le type s'exécuta de mauvais gré, passant son pied sur le mégot à peine entamé :  

- "Pfff ... peux même pas m'en griller une petite ... La nuit va être longue."  

 

Constatant que son ordre avait été appliqué, le vigile hocha la tête, satisfait puis tourna brusquement les talons en maugréant :  

- "Nan mais ! Tout ça parce que ça se croit être au-dessus des lois, le Journaleux de mes d*** ! Tssss ..."  

 

Jade et l'homme se regardèrent quelques secondes. Il murmura :  

- "Ca, c'est parce que je l'ai pas invité pour le p'ti déj ..."  

 

Il tenta un sourire de connivence mais, après avoir haussé négligemment les épaules, la jeune fille retourna se poster à ses barreaux, le front à nouveau contre le métal, les yeux tournés vers la porte comme si la seule force de son regard parviendrait à l'ouvrir miraculeusement, lui offrant ainsi un retour à la liberté. Jade soupira : elle allait sûrement moisir ici jusqu'à la fin de ses jours ...  

 

Elle passa son ongle sous le début d'une écaille jaune et la fit sauter, révélant le métal du barreau, déjà lépreux.  

- "Bon alors, Moustique, dis-moi pourquoi tu t'es mise comme ça dans les embrouilles ?"  

- "Je suis pas un moustique !" Répliqua-t-elle une nouvelle fois en refoulant les larmes qui montaient dans sa gorge.  

- "OK ... Pourtant, tu ressembles bien à un moustique, je t'assure !"  

- "N'importe quoi !"  

- "Si ... t'es petite, malingre, rapide, insaisissable ou presque, énervante ..."  

- "Hééé !"  

- "Quoique ... tu ne me pompes pas encore le sang ... Donc, je te l'accorde, tu n'es pas un moustique ! Tiens, je sais ! Moucheron, ça t'irait bien !"  

- "Arrêtez ! On ne se connaît pas, alors vous n'avez pas à me donner de surnom !"  

- "C'est vrai, on ne se connaît pas, toi et moi ... Par contre, ce que je sais, c'est que tu t'es mise dans les embrouilles pour trois fois rien."  

 

Jade serra les barreaux de toutes ses forces et prit une grande inspiration :  

- "Je vous dirai rien ! Ni à vous ni à personne !"  

- "Pourquoi ?" Demanda l'homme d'une voix parfaitement calme.  

 

Il n'obtint que le silence en réponse. Il étendit alors lentement ses jambes, enfonça les mains dans les poches et bailla ostensiblement sans mettre la main devant la bouche :  

- "Ah, là, là, c'est d'un commun ton histoire !"  

 

Jade ne répondit toujours pas et l'homme poursuivit, penchant la tête en arrière pour regarder le plafond :  

- "Tu sais, j'en ai connu quelques-unes des comme-toi, qui devaient cacher leur véritable identité. Alors, le meilleur truc dans ces cas là, c'est de donner un nom bidon et pouff, on n'en cause plus."  

 

La jeune fille se tourna vivement vers lui, le fusillant du regard mais ne dit rien. Le type regardait toujours le plafond comme s'il pouvait voir le ciel au travers.  

- "Pas la peine de me regarder comme ça, Moustique ... Oh pardon Moucheron ... Y'a pas quinze mille explications, tu sais. Après moi, ce que je me demande, c'est pourquoi t'as pas inventé un nom quelconque ?"  

- "Le flic voulait mes papiers." Murmura la jeune fille.  

- "Et ? Tu n'en as pas, tu n'en as plus ou tu as des faux ?"  

- "Ca vous regarde pas, ça."  

- "Bah, quoi qu'il en soit, tu pouvais dire que les abrutis te les avaient volés. Comme ça, tu n'étais pas obligée de les présenter tout de suite. Suffisait d'ajouter que tu étais traumatisée par leurs menaces, de simuler un état de choc et hop ..."  

- "Je ..."  

 

L'homme rit :  

- "T'y avais pas pensé, c'est ça ?"  

 

Jade se retourna et alla à nouveau se poster contre la grille. Le type répéta :  

- "T'y avais pas pensé ... Donc ... Tu n'es pas une pro. Tu es novice et on t'a formée à moitié. C'est bien ce que je pensais. Que peut-on en conclure ?"  

 

La jeune fille se mura à nouveau dans sa carapace de silence, épluchant à nouveau méthodiquement le barreau à sa portée. L'homme continua d'une voix calme et posée, presque douce :  

- "J'en conclus que tu n'es pas une habituée des faits. Tu as eu besoin d'une fausse identité pour une raison que j'ignore mais, à mon avis, c'est un truc pas bien grave ..."  

 

Jade soupira pendant qu'il poursuivait :  

- "Je ne pense pas que ce soit pour consommer de l'alcool ou traîner dans les bars ... Pas ton genre, j'dirais ... Tu n'es pas en cavale car, visiblement, tu n'as pas peur d'attirer l'attention. Quand tu es intervenue, tu l'as fait de bon cœur. Une personne poursuivie se cache et évite de faire des vagues. Ce n'est pas ton cas ... Donc ... Tu as effectivement fait un truc pas tout à fait dans les rails mais pas non plus catastrophique ... Et pour finir, mon petit doigt me dit que tu couvres quelqu'un ... Sinon, tu aurais déjà fait appeler notre amie l'Hirondelle pour lui servir mon bobard, comme quoi les types avaient pris tes papiers et que tu étais en état de choc ..."  

 

Devant le mutisme de sa co-détenue, l'homme insista, gardant toujours les yeux vers le plafond :  

- "Alors ?"  

- "Alors, quoi ?"  

- "Alors : est-ce que je me trompe ?"  

 

Jade serra les dents et fit encore sauter une écaille de peinture, se faisant mal quand le bout jaune passa sous l'ongle de son pouce. Mais Jade continua, ignorant volontairement la douleur, regardant, fascinée, le métal apparaître peu à peu, comme si arrêter son dépeçage signifiait rendre les armes. Sentant que le type ne lâcherait rien, elle dit :  

- "Ça ne vous regarde pas."  

- "Si, un peu."  

- "Non."  

- "Si."  

- "Non."  

- "Si ..."  

- "Non."  

- "Si ... parce que je me suis quand même investi dans ton affaire-là ... Bon, ça m'a pas coûté grand-chose, je te l'accorde, ils étaient pas bien costauds ... et si tu n'étais pas intervenue avant moi, je leur serais tombé sur le râble moi aussi. Mais tu as déboulé de je-ne-sais-où et tu t'es sentie une âme de justicier, alors, j'ai attendu un peu et j'ai observé."  

- "Pfff ... et ça vous a bien fait marrer je parie !"  

- "Oui. Mais pas comme tu le penses."  

- "Ah bon ? Et comment est-ce que je le pense ?"  

- "Tu penses que je me suis moqué de toi et de ton manque d'expérience."  

- "Oui. Et c'est pas le cas peut-être ?" Demanda Jade, agressive.  

 

Après un court silence, l'homme déporta son regard du plafond pour le poser sur le dos de la jeune fille et prononça très sérieusement :  

- "Non. Ce n'est absolument pas le cas."  

 

Jade suspendit son dépeçage. Comme le métal était à nu sur presque soixante centimètres de haut en bas, elle ne pouvait continuer sans se mettre sur un escabeau ou sans s'accroupir. Elle passa donc au barreau suivant, faisant toujours sauter les écailles jaunes.  

 

L'homme soupira et regarda à nouveau le plafond, les mains toujours enfoncées dans ses poches :  

- "Ce qui m'a fait sourire, c'est ... une sorte de ... c'est pas comme si tu me faisais penser à quelqu'un, non ... Enfin si, un peu. Mais, c'était un peu comme une sorte de "déjà-vu" ... Enfin bref, c'est compliqué."  

 

Il se redressa et regarda à nouveau le dos de la jeune fille :  

- "Tout ce que tu as à savoir, c'est que tu as du cran. Beaucoup de personnes savent se battre mais font un mauvais usage de leur force, comme ces types-là. Toi, tu n'avais pas l'avantage. Tu as une bonne technique mais peu de pratique, ça se voit. Cependant, ça t'a donné assez d'assurance pour ne pas hésiter. Et tu as foncé. Ta tactique aurait pu marcher si les types en face n'avaient pas été armés de canifs. Et ... à cinq."  

 

Il s'éclaircit la gorge tout en posant les coudes sur ses genoux :  

- "Je connais peu de personnes capables de se mettre ainsi en danger sans réfléchir simplement pour faire ce qui leur semble juste."  

 

Jade eut un petit hoquet d'indignation :  

- "Oh, dites tout de suite que je suis bête !"  

 

L'homme ne put se retenir de rire doucement avant de murmurer :  

- "Inconsciente, impulsive, sincère, intègre et courageuse ... J'aurais plutôt dit ça. Mais, bête ? Non, sincèrement, non, je ne pense pas que tu sois bête."  

 

Jade se retourna vers lui, le dévisageant de loin. Elle sentit des larmes lui picoter les yeux, brûlantes, irritantes, désagréables. Sa gorge se serra et soudain, l'émotion provoquée par ces compliments vint s'ajouter à la fatigue, à l'angoisse et au sentiment d'abandon qui couvaient en elle depuis presque deux heures maintenant. Les digues se rompirent brutalement et des larmes libératrices coulèrent enfin sur ses joues alors qu'elle laissait échapper un gros sanglot qui lui secoua les épaules et la poitrine. Elle serra les poings pour l'aider à retenir son cri qui, malgré tout, lui déchira la gorge.  

 

L'homme sursauta et la regarda de loin, les yeux écarquillés :  

- "Non, non ... fais pas ça ..." Murmura-t-il, visiblement impuissant et désarmé face à cette jeune fille en pleurs.  

 

Comme si elle l'avait entendu, Jade se reprit soudain, renifla bruyamment puis lança rageusement, relevant la tête et dardant son regard brillant et perdu dans celui de l'homme qui, tout aussi perdu qu'elle, restait pétrifié sur son banc en béton :  

- "Putain, mais comment je fais, moi ! Pourquoi j'ai pas pensé à sortir votre excuse bidon ! Pourquoi j'ai pas dit qu'il m'avaient chouré mes papiers et qu'ils m'avaient menacée ! Mais pourquoi j'y ai pas pensé ? Mais quelle conne ! Je fais comment, maintenant ? Mais quelle conne ! Quelle conne ! Quelle conne !"  

 

Cette fois, ce fut au tour de l'homme de rester muet et Jade poursuivit d'une voix tellement haut perchée qu'elle se brisa rapidement :  

- "Et personne sait que je suis ici, personne ! Je suis toute seuuuuuule ! Et personne ne viendra jamais m'aider, jamais !"  

 

Elle commença à faire les cent-pas, canalisant la panique qui tentait de prendre les commandes sur sa raison :  

- "Canalise et analyse." Murmura-t-elle pour elle-même.  

 

Comme elle lui tournait le dos, elle ne vit pas l'homme se figer soudain. Il ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais ce quelque chose resta coincé dans sa gorge alors que Jade se retournait brusquement vers lui, parlant à tout vitesse :  

- "Vous pensez que je peux lui sortir votre truc-là, comme quoi j'avais eu peur de mourir ! Etat de choc, vous avez dit, c'est ça ? Ça serait plausible ? Pensez que ça peut encore marcher ? Je veux dire ... C'était y'a quelques heures maintenant et elle m'a plusieurs fois posé la question. Elle a pas arrêté de me dire : Vous êtes sûre que vous ne voulez pas me donner votre nom, ça serait mieux pour vous, c'est vous qui vous braquez et gni et gna ... Elle avalerait ça, que j'étais simplement choquée ? Pensez qu'elle goberait ça, votre Hirondelle ?"  

 

L'homme ouvrit à nouveau la bouche mais Jade ne lui laissa pas le temps de répondre, poursuivant sa marche imperturbable dans les quelques mètres carrés disponibles :  

- "Bah non, je suis idiote. Bien sûr que non. Vous avez raison votre Poulette me croira jamais !"  

 

L'homme essaya à nouveau de l'interrompre mais Jade ne lui accorda pas la moindre attention, continuant à parler de plus en plus vite :  

- "Elle m'a dans le pif, c'est certain, ça ! Rooooo et MEEEERDE ! Elle ne me croira jamais ! Pis telle que je me l'imagine, dès que je lui aurais donné mon nom, elle va aller vérifier dans les registres et les actes de naissance et là, je suis dans la merde ! Mais une merde encore plus grosse que celle-ci !!! Parce qu'elle verra que je suis arrivée hier et elle trouvera qui m'accompagnait et làààààà .... Là, ça va être la merde mais version Fucking Bulshit, voyez ?"  

 

Elle arrêta de tourner en rond et se laissa tomber sur le banc à côté du type qui ne l'avait pas quittée du regard :  

- 'Et MEEEEEERDE !" dit-t-elle. "Comment je vais me dépêtrer de cette meeeeeeerdeuuuuu ? Putain, fait chier !"  

 

Elle tapa des pieds en criant puis se calma soudain, soupira bruyamment, passant nerveusement les mains sur son visage et dans ses cheveux. Un instant de silence s'installa entre la jeune fille désespérée et l'homme abasourdi qui n'avait plus rien à dire maintenant. Le moustique avait fini par se poser sur le banc en béton, sous les yeux interloqués d'un homme complètement dépassé.  

 

Au bout de quelques secondes, il osa murmurer :  

- "On m'a toujours dit que ça ne se fait pas pour une jeune fille de jurer comme ça. Et en plus, il paraît que la vulgarité n'arrange rien ..."  

 

Jade sursauta en entendant ces mots, si proches de ceux que prononçait sa mère lorsqu'elle lui faisait les gros yeux :  

- "Jade Makimura ! C'est très vilain de jurer comme un charretier quand on est une jeune et jolie fille ! Un peu de retenue ! La vulgarité n'a jamais rien arrangé !"  

 

La jeune fille sentit son coeur se calmer lentement quand elle songea à un autre souvenir : le sourire éclatant de sa maman quand elle ajoutait avant d'éclater de rire :  

- "Mais, Sacré nom de Dieu, je reconnais que quand ça sort, ça soulage !"  

 

L'homme tira Jade de ses pensées en ajoutant, un doux sourire aux lèvres :  

- "Mais je ne te jetterais pas la pierre. J'avoue que ça soulage toujours un brin quand même de balancer quelques "Merde, bordel, putain, fait chier" ... J'avoue que je cède facilement à ce petit travers, moi aussi !"  

 

Elle le regarda, interloquée. Est-ce que tous les vieux de plus de quarante piges sortaient le même discours sur les gros mots ? Peut-être ...  

 

Trouvant soudain le regard de l'homme doux, espiègle et rassurant, elle finit par sourire, sentant la panique se calmer définitivement dans son cœur. Il lui rendit son sourire. Et, sans rien pour le justifier, ils éclatèrent de rire.  

 

Quand ils eurent repris leur souffle, elle refit méticuleusement sa queue de cheval en silence puis, elle se tourna vers lui et prononça très sérieusement tout en le regardant dans les yeux :  

- "Bon, vous avez pigé que je ne peux pas donner ma véritable identité. Mais, vous ? Pourquoi vous ne l'avez pas donné non plus ?"  

 

Il eut un petit sursaut de surprise:  

- "De quoi tu parles ?"  

 

Jade insista :  

- "Vous foutez pas de moi ..."  

- "Comment tu parles toi !" répliqua l'homme en lui lançant un regard trop fortement outré pour être sincère.  

- "Oh, c'est bon, vous ! Jouez pas votre Sainte Nitouche rabat-joie, là ..."  

- "Ma quoi ?"  

- "Rooo, vous avez compris, faites pas l'imbécile fini, ça vous va pas."  

- "Je ..."  

- "Bon alors ? Z'êtes qui, vous ?"  

- "Hein ? comment ça, je suis qui ?"  

- "Oui, c'est quoi votre nom ? A part City Hunter ?"  

 

L'homme éclata de rire :  

- "Tu ne me dis pas ton nom, je ne te donne pas le mien. Aussi simple que ça. Mais dis-moi qui tu es, je te dirai qui je suis."  

- "Oh ..." Fit Jade, surprise. "Ok. Je peux comprendre. C'est plutôt logique finalement."  

 

L'homme croisa les bras sur sa poitrine, satisfait. Jade reprit cependant :  

- "Alors, dites-moi plutôt ce que vous faites."  

- "Comment ça ?"  

- "Vous faites quoi ?"  

- "Bah tu vois bien ? Je suis assis, là, sur ce banc froid, dur et inconfortable, non-fumeur de surcroît ... ça, si je l'avais su plus tôt, je crois que je t'aurais laissée te dépatouiller toute seule ... Donc voilà ... je fais ça."  

 

Jade soupira, levant les yeux au ciel :  

- "Rooo, mais c'est pô vrai ! Faut tout vous expliquer ou vous êtes dur de la feuille ?"  

- "Quoi ! Mais dis tout de suite que je suis vieux !" S'insurgea l'homme.  

- "Pfff, j'ai l'impression d'entendre mon oncle ! Incroyable !" Répliqua Jade ouvertement moqueuse, en désignant les tempes grises du type : "Bah, z'avez plus vingt ans quand même, faudrait peut-être commencer à assumer ..."  

 

L'homme se figea et la dévisagea soudain, cherchant quelque chose d'introuvable dans les yeux bruns clairs de la jeune fille. Ou noisette ? Seraient-ils noisette par hasard ? L'éclairage blafard de la veilleuse de la sortie de secours et la lumière diffuse de la lampe de bureau du vigile n'étaient pas suffisants pour confirmer cette impression.  

 

Il la regardait toujours quand elle lui redemanda :  

- "Vous faites quoi dans la vie ? Je veux dire ... Vous avez dit que vous êtes journaliste, non ?"  

 

L'homme hocha la tête, la dévisageant toujours, presque soupçonneux.  

- "Vi, c'est ce que j'ai dit ..."  

- "Ouais, bah, si vous, vous êtes journaliste, moi je suis ... Je ne sais pas moi, détective privé ... ou tueuse à gage, tiens ..." Dit-elle en lui rendant son regard scrutateur, le sondant par en dessous, la bouche pincée, les yeux acérés.  

 

Elle désigna l'emplacement du holster de l'homme, derrière sa veste bleue en ajoutant :  

- "Ce qui expliquerait pourquoi je me baladerais avec un flingue et que mon surnom ferait fuir les petites frappes ..."  

 

L'homme resta silencieux et impassible, sondant toujours les yeux de la jeune fille.  

 

Noisette ou pas ?  

 

Il était presque sûr que oui ... Mais il ne voulait pas y croire. Après tout, c'était peut-être simplement lui qui voulait y voir cette teinte familière aux fond de ces prunelles vives et innocentes, peut-être avait-il simplement besoin de la retrouver, Elle, son insolence, sa vivacité, son honnêteté ... Et si ?  

 

Ses pensées se perdirent mais revinrent vers cette question apparemment anodine : Les yeux, noisette ou pas ?  

 

Ils restèrent ainsi un moment, immobiles, se mesurant à nouveau du regard, cherchant à lire l'un dans l'autre. Puis, toujours sans prononcer un mot, l'homme lui sourit doucement et se remit lentement le dos contre les barreaux, les bras croisés derrière la nuque, étendant ses jambes droit devant lui.  

- "Vous lui avez donc menti ..." Murmura Jade.  

- "Comment ça ?"  

- "Vous avez dit à la flic que vous étiez journaliste. Ce que vous n'êtes pas."  

- "J'ai dit ça, moi ?" Répliqua-t-il d'un ton faussement innocent.  

 

Jade soupira :  

- "Essayez pas de noyer la poiscaille, please et répondez à mes questions."  

 

L'homme sourit à nouveau, mais sans la regarder, les yeux perdus sur le plafond et ne lui répondit pas. Jade reprit :  

- "Vous lui avez menti."  

- "Oh ... Pas tellement."  

- "Bah si, vous n'êtes pas journaliste et vous n'avez pas l'intention d'écrire d'article sur la place des femmes. Donc, vous avez menti."  

- "C'est vrai. Je n'écrirai rien de tel et certainement pas dans un journal. Mais je pensais certaines choses quand même."  

- "Mouais, c'est ça."  

- "Oh, oui ! C'est boooon !" Souffla l'homme, en exagérant son ton exaspéré : "J'ai menti mais, tout comme toi, moi aussi j'ai des petits secrets ... qui doivent rester secrets, tu piges ? C'est mieux comme ça, tu sais."  

- "N'empêche, vous lui avez menti." Répéta la jeune fille en croisant les bras sur sa poitrine, accusatrice. "C'est moche, le mensonge."  

- "Un peu oui ..." Répondit l'homme dans un souffle. "Mais c'était pour la bonne cause."  

- "Laquelle ?"  

- "Pouvoir rester et veiller sur toi."  

 

 

 


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