Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated R - Prose

 

Author: cityxyz

Status: Completed

Series: City Hunter

 

Total: 38 chapters

Published: 08-06-11

Last update: 02-09-17

 

Comments: 79 reviews

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RomanceAction

 

Summary: /!\ AU 29/02/2020 chapitre 1, 2, 3, 4, 5 et 6 réécrit /!\ La vie apporte parfois des événements qui poussent les individus à agir en conséquence... C'est la mystérieuse et douloureuse expérience à laquelle va faire face le nettoyeur ainsi que ses fidèles camarades d'armes... Entre amour et raison, ils vont devoirs arriver à dompter leurs sentiments...

 

Disclaimer: Les personnages de "XYZ : De vous à moi..." sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo.

 

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- G: General Audience. All ages admitted. This signifies that the fanfiction rated contains noth ...

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   Fanfiction :: Amour Ultime

 

Chapter 5 :: 5

Published: 25-11-11 - Last update: 24-06-18

 


Chapter: 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38


 

Chapitre 5 : « Bénissons nos désirs insatisfaits, chérissons nos rêves inaccessibles : l’envie nous maintient en vie. » Frédéric Beigbeder.  

 

*** chapitre réécrit le 24.12.17***  

 

 

Kaori errait dans les rues marchandes de Shinjuku sans grand intérêt ; ses yeux se posaient sur les vitrines dans le vague. Elle n’était ni morose ni triste, mais plutôt, frustrée, insatisfaite… Depuis la nuit où Ryô avait dormit dans sa chambre pour tenir compagnie à ses cauchemars et les faire fuir ; rien. Absolument rien, pas un signe de tendresse, pas un mot pouvant faire éclore ses sentiments, pas même un autre geste maladroit qui définirait son envie d’aller vers elle ; rien.  

 

Ryô savait se montrer disponible pour Kenji, Saeko et encore Reika, mais il avait comme décidé de laisser tomber la quête de leur relation. L’esprit de son partenaire était toujours dans le furtif, dans l’incohérence, ce secret sur cette mission devenait de plus en plus incompréhensif et ingérable pour les nerfs de Kaori.  

 

Kaori s’installa à une terrasse de café et commanda un thé. Attrapant la tasse fumante posée devant elle – sa main tremblante – ses yeux se posèrent sur son délicat bracelet. Elle adorait ce bijou, et son pendentif avec ce message discret. Parfois, dans son imaginaire de petite fille, elle voyait se pendentif en forme de cercle comme une alliance ; « partenaires pour toujours » ; son cœur bondissait à sa lecture.  

 

Mais voilà trois semaines passées que Ryô ne donnait plus ce genre de signe, plus ce genre d’approche, il recommençait à s’éloigner dans son horizon de confort ; là où Kaori ne serait pas en danger. Et c’était ça, c’était ça qui la mettait en rage, en colère, et qui la frustrée, comment pouvait-il encore après toute cette communion, faire encore comme si rien n’existaient entre eux qu’un silence amoureux.  

 

Autant dire que les massues de cent tonnes avaient volés en nombres ces derniers temps.  

 

Que devait-elle faire ? Est-ce qu’elle devait le suivre et fouiner dans ses affaires, écouter aux portes comme l’autre jour lors de sa rencontre avec Saeko et Reika ? Aucunement ! Kaori ne souhaitait pas ça, elle faisait assez confiance à Ryô pour tout lui dire, tout lui confier, pourquoi n’en faisait-il pas autant ? Est-ce qu’ils en étaient venus à ça, à se cacher l’un de l’autre, à retourner dans un mutisme accompagnés par les faux-semblants.  

 

- Qui regardez-vous avec une telle colère ?  

 

Kaori leva le regard et fut surprise d’une telle visite ; Kenji.  

 

. . . . .  

 

Ryô était assis sur le rebord de la fenêtre du bureau de Reika et fumait une cigarette. Il avait pris son petit-déjeuner tout seul ce matin ; Kaori avait fui à l’aube. En ce moment, ce n’était pas l’osmose entre eux, et il devait se l’avouer, c’était en grande partie de sa faute.  

 

Ryô recommençait à s’échapper face à ses sentiments, à esquiver les preuves qu’il avait déposé devant le cœur de Kaori, et il s’évadait de son propre amour pour elle… Ryô se détestait ; comment osait-il être sûr de lui une arme à la main et complètement déstabiliser lorsqu’il s’agissait de Kaori. Être un incorrigible pervers lubrique devant la beauté féminine, et devenir un enfant de cinq ans vilement timide devant celle qui apparaissait pour lui comme la femme parfaite ; sa femme parfaite ; quel pathétisme.  

 

- Je suis pathétique… Grimaça Ryô, écrasant sa cigarette dans le cendrier posé sur la table basse  

- À quel propos ? Sourit Saeko  

 

Saeko et Reika firent leur entrée dans le salon, et s’installèrent sur les divans. Ryô avait promis de tenir les filles informées du moindre indice sur Serge Dieter, mais les renseignements sur cet homme furent difficiles à obtenir ; il lui fallait plus de temps. De son côté, les nombreux informateurs de la détective Reika n’avait rien donné ; ou personne n’avait souhaité lui révéler. Quant à Saeko, le gang Shu’Kiru relatait toujours d’une affaire classée secrète pour elle ; pas plus de résultat.  

 

Ryô n’écoutait rien. Le regard du nettoyeur se perdait dans le vague, sa préoccupation même en cet instant n’était pas Serge Dieter, ni le gang Shu’Kiru ; mais Kaori… Sans le paraître, les souffrances et les tristesses qu’elle pouvait ressentir ; et surtout celles à cause de lui ; lui faisait du mal également. Jusqu’à quand, jusqu’à quand allait-il repousser le jour de la faire sienne, non plus d’âme et de cœur, mais de corps !  

 

Ryô l’aimait, ce n’était plus ésotérique ni pour elle, ni pour lui. Kaori serait capable éternellement de vivre à ses côtés sans même attendre un geste charnel de sa part ? Hier il aurait répondu « oui », aujourd’hui ; il doutait. Kaori était une femme comme toutes les autres ; unique ; mais elle avait besoin de sentir l’homme aimait aimant, et amant.  

 

Pourquoi était-ce si difficile ?  

 

Ryô n’avait plus d’hésitation sur leur partenariat, et le fait qu’ils seraient ensemble pour toujours… Les craintes de mettre sa vie en danger restaient bien évidemment présentes, mais il savait Kaori forte et téméraire, et elle était la meilleure partenaire qu’il n’avait jamais eu, et qu’il n’aurait jamais.  

 

À l’intérieur de lui, ça bouillait, sa conscience lui confirmait son ridicule ; il avait tout simplement peur de faire le premier pas, ce pas qui scellerait ses lèvres aux siennes, posant une main sur sa hanche pour ramener son corps vers le sien… Ça bouillait dans son estomac, d’envie et de peur ; il n’aurait jamais imaginé que ça soit aussi difficile de désirer et de tenter en même temps.  

 

Kaori n’était pas une femme comme les autres, c’était Kaori, sa Kaori, la Kaori de son meilleur ami ; Hide ; sa partenaire, son amie, Kaori, et juste ça, c’était une épreuve insurmontable.  

 

- Ryô, tu nous écoutes ! Râla Reika.  

 

Ryô se leva ; il s’excusa auprès de ses amies, et quitta la pièce en prétextant qu’ils verraient ce dossier ensemble un peu plus tard – Ryô avait une envie subite de marcher, marcher des heures vers un panorama qui lui apporterait le courage qui lui manquait.  

 

. . . . .  

Kenji prit place en face de Kaori, et demanda à ce qu’on lui apporte un café bien serré. Elle fut surprise qu’il s’arrête pour la saluer, et en plus s’installe à sa table pour partager un petit-déjeuner ; qu’allaient-ils bien pouvoir se raconter ?  

 

- Que faites-vous ici toute seule sans votre partenaire ; City Hunter !  

 

Kenji avait un regard froid, une diction hautaine, et une posture assaillante. Kaori n’avait jamais observé autant de tristesse, de solitude et de colère dans un même regard. Perdu semble-t-il, entre le monde du bien et du mal. Ryô le considérait comme un ami, un ami pour lequel il était prêt à exécuter une mission qui inquiétait tellement son partenaire qu’il se mettait à avoir des secrets l’un pour l’autre. Dans quel péril le menait-il ?  

 

- J’essayais de trouver un moyen de connaître la vérité sur la mission que me cache Ryô pour lequel vous êtes le commanditaire…  

 

Kenji eut un mouvement de recul ; Kaori venait de l’impressionnait pas sa finesse. Il s’attendait à voir une femme bégayait, rougissante, mais voilà qu’elle enfilait le masque de nettoyeuse ; fière et concentrée. Kenji comprenait pourquoi Ryô était tombé amoureux de Kaori ; fidèle, généreuse, combative, loyal et bien plus adroite qu’elle le faisait paraître.  

 

- Je vais respecter les désirs d’un homme maladroitement amoureux, et ne rien te dire !  

 

« Tu » ; Kenji venait de la tutoyer, sortant d’un cadre de proximité où deux individus cherchaient encore à se connaître avant de se laisser le champ libre dans un espace personnel. Cherchait-il à briser les barrières, à la saisir, elle et ses sentiments, elle et son combat de découvrir le pot eau rose. Kenji était habile, sans contexte, mais Kaori ne se laisserait pas être dépossédée ; même si elle avait un instant rougit lorsqu’il avait prononcé « homme maladroitement amoureux ».  

 

- Tu es différent de d’habitude, tu sembles éprouvé et perdu…  

 

Kaori rentra dans le jeu pervers de Kenji, et répondit par ce même tutoiement ; elle venait d’accepter les règles de ce concours d’investigation. Kenji remercia la serveuse de lui avoir apporté un café et déposé son numéro de téléphone en même temps sous la tasse ; il but une première gorgée en se rallumant une nouvelle cigarette – la première à peine terminée.  

 

- Tu semblais aussi égaré que moi tout à l’heure… Ton regard se dirigeait vers le bas…  

- Rien de particulier, je réfléchissais ! Rougit-elle  

- Tu te demandais comment séduire Ryô…  

 

Kaori devint écarlate ; impossible de contrôler la vérité sur ses sentiments. Une honte s’empara de tout son corps, et son cœur se mit à battre très fort ; elle rêvait d’appartenir à Ryô, c’était vrai. Et la façon de s’appartenir lui échapper, et elle avait toujours en elle cet affreux doute que son partenaire ne souhaite pas se lier à elle autrement que par l’esprit et le cœur.  

 

- Tu vis avec Ryô depuis plus de cinq et tu n’as donc rien remarquée…  

- Et bien… Qu’aurai-je du remarquer qui paraît si évident ?! Se frustra-t-elle, gênée  

- Ryô est très timide devant les personnes qu’il aime sincèrement ! Et devant toi, s’en est presque risible tellement il se recroqueville sur lui-même !  

- Hein ?!  

- Ryô ne fera pas le premier pas s’il ne sent pas que c’est « le » bon moment !  

- Comme mourir sur un bateau… Murmura-t-elle  

 

Kenji n’entendit qu’à moitié la réponse de Kaori, mais elle semblait être perturbée et un peu contrariée de ce qu’il venait de rétorquer. Il ne s’agissait pas là de lâcheté – bien qu’un peu – mais de relation humaine ; Ryô était le maître pour dissimuler ses sentiments, tel le ninja capable de tout pour dissimuler sa présence. Dévoiler ses sentiments, c’est se mettre à nue devant l’autre, en démontrant ses défauts et ses qualités, ses forces et ses faiblesses, et les faiblesses n’étaient pas permises dans le milieu. Ryô faisait constamment l’enfant devant Kaori, espérant qu’elle entende ; « même si je ne te le montre pas, j’aime que tu me remarques ».  

 

- Il n’y a rien de désagréable à ce qu’une femme fasse le premier pas ! Admit Kenji  

- Comme la serveuse qui vous a laissé son numéro sous la tasse ! Bouda Kaori  

- Au moins, elle a tenté…  

 

Kaori se mis à réfléchir ; elle séduire Ryô ; impossible ! Comment ferait-elle ? Comme s’y prendrait-elle ? Il était impossible qu’elle lui propose un rendez-vous comme toutes les autres jeunes femmes pourraient se le permettre ; si un yakuza du milieu les surprenait, la réputation se transformerait et le danger ferait reculer son partenaire. Impossible pour eux de se retrouver en tête à tête autour d’un verre dans un bar, partager un dîner dans un restaurant, s’amuser ensemble dans une fête foraine ; à moins que ?  

 

Kenji vit Kaori se levait brusquement, elle paya leur deux consommations, remercia Kenji et s’enfuit en courant ; elle semblait subitement heureuse.  

 

Kenji but d’une gorgée son café ; il ne pensait pouvoir aider quelqu’un aussi rapidement, mais sans savoir pour quelle raison, la présence de Kaori était agréable ; il n’avait plus aucune raison de rester ici.  

 

Kenji prit le papier où s’inscrivait le numéro de téléphone de la serveuse ambitieuse – il finit à la poubelle, chiffonné par des doigts transpirants de doute.  

 

- « Trois semaines et elle perturbe encore toutes mes pensées ! »  

 

. . . . .  

 

Hélène ouvrit les yeux, sortant de son sommeil. Aujourd’hui était un jour spécial, le jour de son anniversaire – date de naissance choisie par son père adoptif – elle fêtait ses seize printemps. Ce jour de fête serait pour elle un jour ordinaire, comme les autres jours ; sa famille ne lui souhaitait pas, et le célébrait encore moins ; banalité.  

 

À peine levée et déjà le cœur lourd, elle se prépara le petit-déjeuner dans le silence absolu de la maison. Marie était partit juste au moment où elle se leva, et son père était sur le point de s’en aller également – claquant la porte il partit sans un mot – l’ignorance fut pire que les autres années. Elle n’avait même plus d’économie de côté pour se faire un cadeau cette année, elle qui n’avait jamais reçu de présent – très peu à noël – les pourboires vaillamment gagnés avaient servi à débarrasser Keiko d’un sombre individu ; c’était pour la bonne cause.  

 

Hélène buvait un agréable chocolat chaud, lorsqu’elle pensa à Kenji… Elle n’avait pas cessée de penser à lui depuis leur première rencontre, et même si elle ne l’avait pas revue depuis trois semaines, son esprit ne parvenait pas à se débarrasser de lui. Le timbre de sa voix, la virilité de ses gestes, sa posture assurée, déjà ces détails lui manquaient. Et en ce jour morose, penser à lui tout en sachant qu’elle ne le recroiserait probablement jamais l’attrista davantage.  

 

Hélène avait déjà hâte que ce jour se finisse…  

 

. . . . .  

 

- Au secours, un pervers !!  

 

Kenji était appuyer sur un banc dans le parc, et fumait une paisible cigarette. Il avait passé sa journée ici, attendant l’arrivée du crépuscule qui arrivait enfin et libérant ses pensées pour du vagabondage. Rare, pour ne pas dire jamais, Kenji laissait ses pensées l’envahir et les sentiments le gagner. Mais depuis des jours, il était hanté par le souvenir d’Hélène. Avec certitude, il pensait qu’une fois ses remerciements donnés, il passerait à autre chose, et débarrasserait sa tête de son image en s’abandonnant au corps de ses trop bien nombreuses amantes ; méprise.  

 

Le visage de cette jeune fille en train de lui demander comme il se portait, son regard assis sur le sol de sa chambre en train de supplier de l’épargner hantait ses rêves, et même la réalité. Là, en plein jour, son regard apparaissait, là, en plein ébat torride, son visage se dessinait. Que faire ? Aucune femme ne l’avait jamais obsédé, il passait d’amante en amante sans lendemain promis, et voilà qu’il s’était laissé prendre dans la toile d’une gamine insignifiante.  

 

- Laissez-moi à la fin, je vous ai déjà dit non deux fois !!  

 

Kenji n’en pouvait plus d’entendre toutes ces femmes bêler devant les demandes insistantes d’un pervers du dimanche. Levant légèrement son pied droit, Kenji fit une croche pied à ce vicieux bruyant ; il chuta devant lui, et la jeune femme pris ses jambes à son cou.  

 

- Tu es en forme aujourd’hui… Ryô…  

- À cause de toi la miss mokkori m’a échappé !  

- Plus tu fais l’imbécile, plus tu es mélancolique, qu’est-ce qu’il t’arrive ?  

 

Ryô eut les yeux aussi rond et arrondi que la lune dans son plus simple appareil ; ses orbites avaient touchés presque son nez tellement la surprise l’avait gagné. Kenji, être censé et demander à être un confident sur lequel son épaule servirait de confesseur ; improbable.  

 

Ryô se leva sa main avec fougue et toucha le front de son ami pour vérifier qu’il soit à bonne température. Kenji repoussa sa main, quelque peu rougissant ; improbable également.  

 

Ryô prit place à ses côtés et s’alluma aussi une cigarette que Kenji avait proposée, son paquet sous le nez ; l’odeur de la nicotine avait irrémédiablement calmé les nerfs de Ryô. La cigarette consommée fut un bon prétexte au silence pour ces deux hommes pudiques. Les sentiments, ce n’étaient pas ce qu’ils savaient ni montrer, ni démontrer de mieux. Et puis, Kenji desserra les dents, car après tout, n’était-il pas venu en cet endroit trouver son ami pour évacuer son mal, et s’en libérer.  

 

- Tu n’arrêtes pas de penser à elle, avoue-le ! Sourit Ryô  

 

Kenji n’avait pas eu le temps de formuler correctement sa pensée, que Ryô l’avait déjà cerné. Et force fut de constater qu’il avait raison ; sa tête ne parvenait pas à la gommer comme un mauvais coup de crayon, à l’effacer comme une faute d’orthographe tapée. Elle était là, le matin et le soir, au réveil et à l’approche du sommeil.  

 

- Ça me rend dingue ! Cette fille est tellement quelconque en plus !  

 

Ryô esquissa à nouveau un sourire fier. En son for intérieur, il devinait bien au contraire qu’elle n’était pas « quelconque » ; elle était bien plus que ça. Car qu’importe son jeune âge, la tristesse de son regard, l’allure qu’elle démontre, et le mystère qui l’entourait. Ce qui comptait fut bien plus fort, plus puissant, plus envoutant, plus important et ils chassaient les habitudes de Kenji.  

 

- Cette jeune fille s’est penchée sur toi…  

 

« Hélène », elle avait touché Kenji par le cœur, par l’esprit, par l’âme ; elle ne l’avait pas abandonné à son sort, seul et meurtri dans une rue étroite et humide. Avec toute sa volonté, elle l’avait sauvé, bien qu’il fût un inconnu peu recommandable. Sous les sifflements des balles, avec l’odeur du sang, la peur, l’adrénaline, elle ne l’avait pas laissé pour mort ; elle l’avait sauvé, et ce geste fou et inconscient eut réussi à briser la glace qui étouffait le cœur de Kenji. Un peu de chaleur dans ce milieu inerte.  

 

- Et qu’est-ce que je peux faire pour l’oublier ?! S’agaça-t-il, écrasant sa cigarette dans la poussière.  

- Absolument rien…  

 

Ryô écrasa aussi sa cigarette sur le sol, et se mis à regarder le ciel. Pourquoi fallait-il que son ami traverse les mêmes doutes que lui cinq années auparavant pour qu’il trouve les circonstances grotesques ? Ryô était jeune, insipide, et le goût du lendemain ne s’était jamais imposé à lui, mais sa rencontre avec Kaori avait elle aussi bouleversée ses habitudes ; il vivait pour quelqu’un ; pour une femme qu’il aimait, et qu’il savait impossible d’oublier. Combien de fois avait-il fait trois pas en arrière pour en avancer finalement de deux, combien de temps avait-il pensé pouvoir vivre sans elle et qui pour seul résultat valut la souffrance et la tristesse de Kaori.  

 

- J’irais la voir si j’étais toi… Conseilla Ryô, se levant.  

- …  

- Tu es un homme d’instinct ! Et tu ne commettras pas d’erreur, quoi que tu veuilles faire !  

 

Un long silence s’installa, Kenji regardait Ryô d’un air étrange ; sous ce frivole dragueur, pervers, et obsédé du mokkori se trouvait bien un homme censé et conscient des sentiments humains. Quel grand timide ; ça devenait trop étroit comme sensation pour la solitude de Kenji.  

 

- Et tu vas faire avaler tes grandes paroles à qui avec ta petite culotte rose dans la poche de ta veste ! Ironisa Kenji  

 

Ryô s’écroula à terre – un corbeau passa devant sa tête déformée par la honte – quel grand imbécile. Pour une fois, il était sérieux, et croyait profondément en ces mots, et il fallait qu’une erreur de débutant vienne le démentir.  

 

Pathétique.  

 

. . . . .  

 

Kaori courrait dans les rues de Shinjuku avec un sourire indécrochable de son visage. Discuter avec Kenji lui avait donné une idée, une idée inconsidérée, mais présente dans sa tête malgré ça. Est-ce qu’elle irait jusqu’au bout de son désir ? Ne serait-elle pas stoppée par les aprioris et surtout, la honte ?  

 

- Est-ce que c’est une bonne idée de recommencer ?  

 

Kaori s’arrêta net devant l’endroit qu’elle convoitait en courant depuis le café. Pleine d’entrain, de bon sentiment, de motivation, la voilà hésitante, et perdue. Devait-elle se contraindre à ses points négatifs qui apparaissaient subitement ? Avait-elle raison de vouloir faire ça ?  

 

- Kaori ?  

 

Kaori leva les yeux et tomba nez à nez avec la personne désirée ; Eriko. Son amie styliste qui prenait l’air à la fenêtre de son bureau avec remarqué Kaori courir jusqu’à sa boutique et se stopper net.  

 

Eriko cogita rapidement et elle comprit pourquoi Kaori était venue la voir aussi rapidement, avec tant d’élan, un sourire permanent sur le coin de ses lèvres. Attrapant sa main, elle eut plaisir à conduire son amie d’enfance, sa meilleure amie de lycée dans les coulisses de l’arrière-boutique, et de faire préparer, vêtement, maquillage et…  

 

- Attend, Eriko ! Finalement, je ne suis pas certaine que ça soit une bonne idée… Souffla Kaori, penaude.  

- Vraiment ? Pourtant, en arrivant devant ma boutique, tu avais l’air d’une femme prête à crier son amour au monde entier !  

 

Kaori rougit, vivement, écarlate, et demanda à son amie de ne pas exagérer.  

 

- Écoute Kaori, de tout temps, les hommes ont courtisé les femmes, mais ce monde-là est révolu !  

- …  

- Aujourd’hui, les femmes aussi déclarent leur flemme ! Dit-elle, mettant une robe jaune devant le corps de son amie.  

 

Kaori regarda avec tendresse son amie, et admira sa générosité. Après toutes ces années, elles parvenaient encore à se comprendre, et malgré le peu de temps qu’elles ne pouvaient s’accorder, elles restaient complices. Kaori sauta au cou de son amie, et la remercia, chaleureusement ; qu’il était agréable d’être comprise et motivée dans son action.  

 

. . . . .  

Hélène marchait le pas pénible jusqu’au restaurant où elle avait déjà cinq minutes de retard ; la non ponctualité ne lui ressemblait guère. Elle trainait, elle trainait alors qu’elle souhaitait que cette journée se terminer rapidement, mais son cœur ne cessait d’hurler la douleur face à la réalité qui s’allongeait de jour en jour ; ne plus apercevoir Kenji.  

 

- Hey, ma poupée !  

 

Hélène se retourna, elle entendit enfin Keiko l’appeler – trois fois qu’elle l’interpellait sans réponse.  

 

- Bah ma poupée, tu as la tête en l’air aujourd’hui !  

- Oh… Un peu…  

- Qu’est-ce que c’est que ce petit air tout triste là, hein !  

 

Hélène baissa le regard, et mordit sa lèvre pour empêcher des larmes de rouler sur ses joues. Aujourd’hui était le pire jour qu’elle n’est jamais connu – aucun ne fut heureux – mais ce jour fut plus douloureux que les autres encore. Dans un râle penaud, et très embarrassée, elle murmura à Keiko que c’était son anniversaire aujourd’hui.  

 

- Quoi ? Et c’est ça qui te met dans cet état ? Ça se voit que tu ne souffles pas tes quarante-six ans dans trois mois toi !  

- …  

 

Keiko aperçu la peine sans nom dans le regard humide d’Hélène, et la jeune femme compris, elle comprit que depuis ce matin, personne n’avait eu l’adorable attention de lui fêter dignement.  

 

Keiko releva le menton d’Hélène, et tout en l’embrassant sur le front, elle lui chantonna ;  

 

- Joyeux Anniversaire, ma poupée !  

 

Hélène ne put retenir ses larmes face à la déclaration gracieuse de Keiko, et plongeant dans ses bras, elle la serra fort, très fort. Keiko, émue – elle ne recevait pas beaucoup d’amour également, pas même de ses amants, surtout pas de ses amants – resserra son étreinte, touchée, vraiment touchée.  

 

Elles étaient restées un long moment dans cette position, telle une mère embrassant sa fille pour ce jour le plus important pour elle… Keiko avait installé son foulard sur le sol, et elles étaient assises toutes les deux sur le béton adossées au mur.  

 

Keiko, fort de son expérience, devinait qu’il n’y avait pas que l’ignorance de son père et de sa sœur pour son anniversaire qui la chagrinait. Depuis plusieurs jours maintenant, sa « poupée » était plus terne et pâle que d’habitude, comme si une grosse pierre pesait dans son cœur frêle, mais au combien débordant de bonté.  

 

- Allez, dit à ta vieille Keiko ce qui te perturbe ma poupée !  

 

Hélène se recroquevilla davantage sur elle-même, hésitante à révéler à Keiko ce qui la faisait se morfondre. Elle faisait confiance à Keiko, mais c’était en elle qu’elle n’avait pas confiance.  

 

- C’est à cause d’un garçon ? Demanda Keiko, s’allumant une cigarette  

- Hum… Mh… ! Approuva Hélène  

- Quoi ?! Ce n’est pas vrai ? Mais, où, quand, comment ? Me dit pas que c’est un vieux yakuza du restaurant hein ?  

- Non, non ! Non ! Rougit Hélène  

- Ah bon ! Bah, alors, qui c’est ?  

 

Hélène n’arrivait toujours pas à décrocher un mot, trop paralysée par son intimidation. Le meilleur moyen de parler de Kenji, s’était encore tout d’abord de lui montrer une photo, sa photo, qu’elle gardait précieusement toujours sur elle. Hélène l’attrapa les mains tremblantes, et la confia à Keiko.  

 

- Ouah ! Bah, tu n’as pas choisi le plus moche ! S’exclama Keiko  

- …  

- C’est quoi ce petit nom à ce bellâtre ?!  

- Bellâtre ?  

- Bah, il dégage de l’assurance, mais bon, rien de bien séduisant ! C’est sûrement un homme qui passe de femme en femme !  

 

Hélène se sentit encore plus triste qu’avant ; mais parce que Keiko avait sûrement raison. Kenji semblait attirer toutes les femmes – même sa sœur qui n’était pas la femme la plus expressive en matière de sentiment. Il était déjà papa, à son jeune âge – bien qu’elle ne le connaissait pas, elle s’imaginait une petite vingtaine – et puis, ça paraissait évident…  

 

- Ok !  

 

Keiko se leva, elle dépoussiéra ses fesses, et se tourna vers Hélène.  

 

- Partons à la conquête de ce bellâtre !  

- Hein ?  

- Bah quoi ?! Tu le veux ce loulou oui, ou non ?  

- Mais… C’est que… Tout nous sépare…  

- Eh, s’il y a quelqu’un qui connaît bien les hommes ici, c’est moi ! Et crois-moi, ils aiment les femmes avenantes ! Alors, allons vite te faire une beauté, et court le rejoindre !  

- Quoi ?  

 

Keiko prit la main d’Hélène et la releva fiça. Elle récupéra son fouloir, qu’elle ventila et remit autour de son cou, et reprit la main de sa protégée pour veiller à ce qu’elle ne se décourage pas.  

 

- Mais, mon service de ce soir ?!  

- T’inquiètes pas, le patron comprendra ! Et puis, il t’a à la bonne !  

 

Keiko fixait un coin de ruelle en certifiant son dire ; comme si elle regardait les faits, la preuve de son affirmation. Les bavardages étaient inutiles, Keiko préférait l’action, et elle guidait Hélène dans son appartement.  

 

Une ombre surgit à l’endroit qu’elles venaient de quitter ; il comptait suivre les deux jeunes femmes, lorsqu’une main empoigna son épaule.  

 

- Stéphane ?  

- Laisse… Keiko ne lui fera rien…  

- Tu as trop facilement confiance aux gens ! Se détacha le patron d’Hélène  

- Et toi tu te méfies trop de tout et de tout le monde !  

 

Stéphane quitta son ami sur ces dernières paroles ; il savait qu’à elles seules elles le feraient réfléchir, et resterait planté là jusqu’au lendemain ; certain qu’Hélène serait bien présente.  

 

. . . . .  

 

Kaori se tenait devant la porte de leur appartement – elle entendait Ryô bougonnait qu’il mourrait de faim ; il était là. En cet instant, ce qui faisait plus de bruit que les râles de Ryô, c’était le cœur de Kaori qui tambourinait une symphonie digne d’un grand festival. La peur tenait son corps, ses mains devenaient moites, et son ventre criait de terreur face à la déception qu’elle pourrait ressentir au nez de l’échec.  

 

Eriko avait eu beaucoup de difficulté à la motiver jusqu’au bout de son idée, et maintenant qu’elle se tenait près de son désir, elle fut tétanisée. Fermant les yeux, elle essaya de se donner du courage ; Kaori souhaitait appartenir corps et âme à Ryô, et l’un comme l’autre, ils étaient agrippés par leur profonde timidité ; elle se devait d’agir.  

 

Les doigts de Kaori se serrèrent pour former un poing et cogna à la porte. Elle sursauta ; Ryô venu ouvrir très rapidement, et elle vit son partenaire être bouche-bée ; il ne s’attendait visiblement pas à sa visite, à la visite de Cendrillon.  

 

Kaori avait revêtu à nouveau sa perruque longue et brune, s’était parée de discret bijou, un maquillage léger glisser sur ses yeux et ses lèvres, des escarpins blanc rehaussaient sans complexe sa taille, une veste noire couvraient ses épaules, mais surtout, son corps parût dans une robe jaune splendide. Un jaune citron, mais délicat, un décolleté rond pudique, et le jupon plissée sur un seul côté. La robe ne tenait que grâce à une ceinture noire où le nœud s’accrocher sur le côté opposé.  

 

Ryô déglutit difficilement ; jamais il n’avait encore vu Kaori être d’une telle beauté, et même s’il décelait ses frissons lié à la peur, elle avait les yeux pétillants de bonheur. Néanmoins, il ne comprenait pas ce que signifiait encore cette fausse identité ; pourquoi s’être mit encore dans la peau de Cendrillon ? Qu’avait-elle derrière la tête ?  

 

- Vous vous souvenez de moi, Monsieur Saeba…  

 

La voix de Kaori tremblait, et elle n’était pas encore parvenue à le regarder dans les yeux. Elle triturait ses doigts, son cœur au bord de l’implosion ; Ryô la trouvait encore plus irrésistible sous ses airs d’adolescente nerveuse au premier rendez-vous.  

 

- Et bien… Non ! Répondit Ryô, faisant mine de chercher son identité  

 

Kaori se sentit écraser sous cents massues de cents tonnes ; quel imbécile, quel idiot, quel benêt insensible, mais pourquoi diable avait-elle perdue son temps et son énergie pour lui ? Grognant sous ses dires de gougeât habituel, elle comptait abandonnée cordialement sa manœuvre, lorsqu’il approcha son visage du sien, munit d’un large sourire.  

 

- Est-ce que j’aurai oublié de vous payer à ma dernière visite d’un Love Hôtel…  

 

Les cheveux de Kaori se mit debout, tel des soldats alignés au carré face au commandant, sommant sa colère, sa frustration, et la haine qu’elle éprouvait pour cet impitoyable égoïste. Elle lui claqua la porte au nez, faisant pousser un cri de douleur à Ryô qui se tenait le nez.  

 

Kaori descendait les marches vivement, contrariée et ressentant une stupidité intérieure, trouvant ridicule sa manigance qu’elle penserait romantique, quand subitement, sans s’y attendre, Ryô se retrouva devant elle – il avait sauté la rambarde de l’escalier pour lui barré irrémédiablement le chemin.  

 

- Navré d’avoir été brusque, je voulais simplement vous détendre…  

 

Kaori ne faisait plus face à l’homme maladroit et expéditif, mais à l’homme séduit et tendre ; son regard avait sans contredit, changé.  

 

- Je suis ravi de vous revoir, Cendrillon… Sourit-il  

- …  

- Vous pouvez m’attendre cinq minutes, que j’aille me changer !  

- …  

 

Ryô était un peu perturbé par le mutisme soudain de Kaori, elle qui avait montré de véritables intentions, confiante, la voilà déstabilisée ; sa partenaire attendait sincèrement quelque chose de cette soirée. Décidant de ne plus jouer avec son cœur meurtri, et sa patience qui s’échappait de plus en plus, il monta rapidement à l’appartement enfiler un pantalon, une chemise et un bombers, et rejoignit Kaori qui n’avait pas bougé depuis son départ ?  

 

- On y va ?  

 

Ryô se positionna face à Kaori, et tendit son bras vers elle pour qu’elle l’agrippe. Encore plus tremblante, elle glissa son bras en dessous du sien, et se laissa guider par les bons sentiments de son partenaire.  

 

Ryô proposa à Kaori, ou plutôt Cendrillon, de partir dîner dans un restaurant de ramen ambulant. Un endroit éloigné du romantisme, mais proche de l’intimité. Le cuisinier fut ravi de préparer ses pâtes et son bouillon pour ce « couple » charmant. Ils n’étaient que tous les deux, et pouvaient discuter et plaisanter en toute liberté.  

 

Ryô faisait l’imbécile, faisant rager l’impatience de Kaori, pour finalement l’amuser. Finalement, la nettoyeuse ne regrettait pas son plan de « séduction » et la soirée commençait plutôt bien. Bien que, elle aimerait être dans la peau de Kaori et pas de Cendrillon, et elle se demandait si Ryô apprécierait autant ce moment s’il était avec elle.  

 

Est-ce que Kaori jouait avec le feu ?  

 

. . . . .  

 

Keiko mit un dernier détail autour du cou d’Hélène ; un collier de perle blanche, où un pendentif en forme de fleur était piqué de rubis. Reculant pour l’observer, elle n’avait jamais vu sa poupée aussi belle.  

 

Hélène portait une robe – servant de tunique à Keiko – un style de chemise rouge, où une ceinture marron maintenait le vêtement et soulignait la taille incroyablement fine de sa protégée. Une paire de ballerine blanche pour garder sa taille moyenne – adorable. Keiko avait ondulé ses cheveux et l’avait très peu maquillée.  

 

- Tu es à croquer ma poupée ! Ton bellâtre ne va pas résister cinq secondes !  

- Je ne sais pas si c’est une bonne idée… Dit-elle se refermant sur elle-même  

 

Keiko avait proposé à Hélène de la pouponner pour qu’elle rende une visite surprise à Kenji ; l’homme de toutes ses pensées. Les hommes aimaient les femmes entreprenantes, surtout lorsqu’il était de l’espèce de ce jeune homme ; séducteur. Il n’aimait pas être dominé, mais appréciait les femmes hardies, prête à tout pour les faire craquer – il y avait en eux une espèce de sentiment de dominance ; « je lui plais, elle fera tout pour me saisir ».  

 

- Ma poupée, dans la vie, lorsqu’on veut quelque chose, il faut agir ! Ce n’est pas en restant coincée dans tes habitudes qu’il viendra vers toi le bellâtre !  

- Vous… Vous avez raison…  

 

Keiko posa ses deux mains sur les épaules de sa protégée, et lui donna un baiser sur le front, encore, pour transmettre un maximum de courage, et de force. Hélène méritait plus que quiconque le bonheur, et la chaleur d’un être qui vous aime.  

 

- Allez, zou ! Le fait pas attendre ce bellâtre !  

 

Keiko raccompagna Hélène jusqu’au coin de la rue, et la laissa partir en direction du domicile de Kenji. Elle était nerveuse, et ses jambes tremblaient… Une image adorable, mais la jeune femme espérait que sa protégée s’en sortirait, et surtout, qu’elle ne ferait pas de mauvaise rencontre sur le chemin.  

 

Étrangement, Hélène n’avait jamais peur de se promener dans les rues de Shinjuku. Elle en connaissait les dangers, les rumeurs et les non-dits, mais impossible de ressentir de l’angoisse dans les ruelles sombres, elle s’y sentait comme chez elle, comme si elle avait toujours vécue en ces lieux. Aucune mauvaise rencontre depuis qu’elle y travaillait, mais elle devait probablement ce miracle à cet inconnu qui la suivait pour la raccompagner dans l’ombre jusqu’à chez elle. Le calme régnait en cette nuit d’avril, et rien n’aurait pu détruire ce silence agréable, même si de gros nuages gris menaçaient le ciel de sa pluie.  

 

Hélène sursauta un instant, elle entendait des pas venir en face d’elle et une silhouette fine venait en sa direction. À son soulagement, ce n’était qu’une autre jeune femme, à peine plus âgée qu’elle.  

 

Les deux jeunes femmes se croisèrent sans trop d’attention, lorsque l’étrangère pivota sur elle-même pour observer Hélène ; elle la connaissait.  

 

- Eh toi ?!  

 

Hélène stoppa ses pas, et se retourna face à la jeune femme ; que voulait-elle ? Un renseignement ? Observant celle qui l’avait interpellé, son visage commençait à lui être familier…  

- Mais oui, c’est toi ! C’est toi qui es sorti de chez Kenji l’autre jour !  

 

Hélène se trouvait face à Amélie, la plus piquante et jalouse des femmes de plaisir de Kenji. Une boule de nerf possessive, et étouffée par son caractère lié à sa maladie bipolaire. La blonde sentait par ailleurs la colère montait jusqu’à sa tête, et tout alla très vite.  

 

Les yeux saphir d’Amélie firent le tour du corps d’Hélène, c’était à cause de ses vêtements propres et élégants, de sa coiffure moderne et de son maquillage léger qu’elle avait eu des difficultés à la reconnaître vraiment. Tout était clair, sa rivale à l’identité peu connue, celle qui perturbait Kenji depuis sa rencontre partait le rejoindre pour terminer son jeu de séduction – il en était hors de question !  

 

Amélie s’avança l’air menaçant vers Hélène, et la fit prisonnière entre elle et le mur glacé. Hélène sentait son cœur se décrocher de sa poitrine, et sa bouche devint sèche face à son regard menaçant. Vaguement, il lui semblait l’avoir aperçu, était-ce la jeune femme qui avait pénétrée en trombe chez Kenji un matin ? Affirmatif ! Elle la reconnaissait enfin…  

 

Hélène se pétrifia devant l’objet menaçant et tranchant que venait de sortir Amélie de son sac ; un couteau à cran ? Qu’allait-elle faire ? La défigurer ?  

 

- Kenji est à moi… Et je vais tout faire pour que tu t’en souviennes !  

 

Hélène mit ses bras instinctivement devant son visage ; elle entendit un bruit, puis deux de tissu en train de se déchirer, Amélie venait de trouer et d’effilocher sa robe. Comme pour empêcher le froid de pénétrer la peau de son corps mi nue, Hélène se protégea la poitrine découverte avec ses mains. Elle vit Amélie s’approcher d’elle, et arracha à son cou le collier de perle de Keiko, et brisa de son talon le rubis.  

 

Amélie devenait incontrôlable, et les deux ombres qui les observaient dans la pénombre hésitaient à intervenir ; dans tous ses états de crise, leur amie ne faisait plus de différence entre l’allié et l’ennemi.  

 

- Marie, qu’est-ce qu’on fait ?!  

 

Marie vit Amélie approcher son couteau du visage de sa sœur, et déposa la lame de l’arme blanche sur sa joue, causant une légère égratignure où du sang s’écoula quelque peu. Elle déposa son pouce sur les lèvres d’Hélène, et dessina un sourire morbide avec son rouge à lèvres qu’elle étala sur sa bouche.  

 

- Et maintenant, si j’arrangeais un peu ton visage…  

 

Marie s’avouait être prise entre deux sentiments, la haine et la pitié ; Hélène versa des larmes de peur, et la frayeur se lisait dans son regard ; méritait-elle vraiment cette humiliation ? Marie se concentrait pour réfléchir à une approche ou pas, lorsqu’elle entendu Amélie hurler – Déborah avait empoigné son amie. Elle lui arracha le couteau des mains, et mit un coup de pied dedans pour l’éloigner. Marie rejoignit ses deux amies ; Amélie était difficile à maîtriser, elle criait des insultes à Hélène : « chienne », « garce », ou encore « grognasse ».  

 

- Allez, fini le spectacle, on y va !  

 

Déborah souleva de tout son poids son amie, et l’éloigna d’Hélène pour parvenir à la calmer, et la forcer à avaler des pilules pour interrompre sa crise définitivement.  

 

Marie resta plantée devant Hélène, ses jambes n’avaient pas supporté l’adrénaline de la peur, et elle s’était assise par terre, tremblante, larmoyante, pâle comme la neige. Marie aurait pu ressentir de la compassion pour sa petite-sœur, mais l’inhumanité séparait toujours l’instinct fraternel. Néanmoins ce soir, Marie se contenta d’un bref avertissement, glacial, mais tenu,  

 

- Tu as compris cette fois… Ne cherche pas à revoir Kenji…  

 

Marie tourna les talons et laissa Hélène, là, par terre, les vêtements déchirés et le visage tuméfié par la honte, et l’affront. Honteuse, elle se sentait ridicule, et se demandait bien qu’elle faute elle avait commise pour que le ciel la punisse ainsi. Et pour finir d’écraser la dignité d’Hélène, la pluie commença à tomber, une goutte, deux gouttes, puis une trombe d’eau vint humidifier sa peau et ses os.  

 

Maudite, Hélène devait être maudite.  

 

. . . . .  

 

Ryô et Kaori courraient en direction de la porte de l’immeuble, Ryô se protégeant de la pluie ainsi que sa Cendrillon sous sa veste qui s’égouttait. Pénétrant à l’intérieur de l’appartement, ils enlevèrent rapidement leurs vestes et leurs chaussures trempés.  

 

Kaori prit place sur le canapé, nerveuse. C’était déjà la fin du rendez-vous, et la pluie avait écourtée leur balade suave dans le parc, sous une lune brillante. Ils se baladaient bras-dessus, bras-dessous, rigolaient de leur exécution à la fête foraine du coin, et de la peur irrationnelle de Kaori dans le train fantôme. La grande roue avait terminé leur balade en mettant à leur pied la beauté de la ville éclairée ; un instant silencieux, mais suavement savourée.  

 

L’objectif de Kaori était de se déclarer, de finir sa soirée chimérique par un baiser, un vrai baiser, pas deux lèvres caressant une vitre froide – même si ce premier baiser échangé dans les airs avaient provoqué autant d’électricité dans son bas ventre que lorsqu’il avait déposé ses lèvres sur son front pour la remercier de sa date d’anniversaire donnée.  

 

Que faire ?  

 

Kaori paniqua, et son inconscient prévoyait déjà sa maladresse.  

 

- Et bien, je vais m’en aller ! Ricana-t-elle  

 

N’était-ce pas sur le départ que Ryô avait manqué de l’embrasser la dernière fois ? Minuit avait sonné, et ce prince charmant – à deux yens – avait interrompu son attention entendant les douze coups retentir. Le risque était de zéro en cet instant, l’horloge de la cuisine n’indiquait que dix heures du soir…  

 

Kaori passa l’encadrement de la porte que Ryô avait ouvert avec politesse. Elle se tourna vers lui pour lui déclarer une bonne soirée et approché son visage pour lui faire comprendre son envie de l’embrasser, lorsqu’elle tomba nez à nez avec la porte, un courant d’air lui « souhaitant une bonne soirée » et un « rentrez-bien ».  

Kaori n’en revenait pas, cet étalon du dimanche venait de lui claquer la porte au nez, sans aucun mot tendre, ni regard langoureux. Que s’était-il passé ? Qu’avait-elle mal interprété, ou qu’avait-elle manqué de faire ? Une grosse goutte se pencha sur le derrière de sa tête – une libellule voyageuse définit son interrogation. Est-ce Ryô n’aimait pas la femme que Kaori interprétait ? Pourtant, lors de leur départ, il semblait plutôt à l’aise, séducteur et attentionné. Qu’est-ce qui avait changé ? Avait-elle brusqué les choses et brûlée des étapes ? Ou est-ce que comme elle le pensait, Ryô ne la désirait que d’esprit et pas de corps – elle rougit à cette pensée.  

 

Ryô avait le dos collé à la porte ; songeur. Il avait parfaitement deviné ce qu’attendait Kaori de lui ce soir. Est-ce qu’il avait envie de lui donner ce qu’elle désirait ? Oui – et bien plus qu’elle encore. Est-ce qu’il était prêt ? Non ; et bien moins qu’elle davantage. Pourquoi ?  

 

Qu’est-ce qui l’effrayait au point de claquer la porte à son plus vertueux désir : Kaori.  

 

Ryô n’aurait pas assez d’une vie pour confesser tout le désir luxurieux qu’il avait pour elle ; l’embrasser, la toucher, la caresser, la posséder, il aimait son âme, sa personnalité, sa force, sa loyauté, tout, tout ce qui faisait qu’elle était, elle, Kaori. Et voilà ce qui l’effrayait ; Kaori n’était pas n’importe quelle femme, c’était Kaori, Kaori Makimura, la petite sœur d’Hideyuki, son sugar boy, sa partenaire, son amie…  

 

Ryô se rendait malade de timidité lorsqu’il s’agissait de Kaori, et il se demandait bien où était née cette pudeur envers elle. Était-ce un sentiment, une appréhension que ressentaient tous les hommes amoureux ? Il suffisait de voir le visage rouge de honte d’Umibozu pour répondre à sa question.  

 

Ryô, de tout temps, n’avait eu peur de rien ni de personne, pas même de mourir ! Est-ce que l’amour était encore plus effrayant que la mort ? Ryô l’apprenait chaque jour depuis cinq ans à l’apparition de Kaori. Tous les matins, et quel que soit la façon de se dire « bonjour » il avait peur de la perdre ce jour… Et puis, est-ce que passer cette étape ruinerait leur relation ? Est-ce qu’ils seraient moins proches, moins aimants, moins unis, moins mordus ?  

 

Pourquoi ! Pourquoi fallait-il que Ryô se pose ses questions dignes des plus grandes lignes de roman pour adolescentes – pensée à Yuka Nogami.  

 

Et justement, s’il faisait l’inverse de sa réponse donnée à Yuka Nogami ! Et s’il embrassait Kaori comme un adolescent écoutant son instinct sans penser à ce qui résulterait de cette acte, juste l’embrassait et libérer ses désirs, sans se préoccupait de demain – demain dont il avait appris à ne jamais se soucier.  

 

Ryô ouvrit la porte brutalement – hors de question que son courage d’une seconde ne s’échappe. Kaori était restée plantée devant la porte, attendant son sort, attendant qu’une action se passe, et visiblement, elle allait se produire.  

 

Ryô attrapa vivement la main de Kaori et la fit rentrer dans l’appartement. Claquant la porte, il la plaqua contre cette dernière, avec un entrain certain. Kaori sentit son cœur aux bords des lèvres, Ryô avait un regard flamboyant, et jamais un tel sérieux n’avait dessiné son visage. Il approcha son visage du sien ; elle pouvait sentir un souffle sur ses lèvres, lorsqu’à sa grande déception, il recula. Qu’est-ce qui venait encore le faire changer d’avis ?  

 

- Navré, mais je n’ai pas envie de vous embrasser… Cendrillon…  

 

Kaori ne comprenait pas, et des larmes de déception montaient à ses yeux, lorsqu’elle vit Ryô faire un geste inattendu ; il lui ôta sa perruque. Tombant à ses pieds, Cendrillon venait à jamais de disparaître dans l’imaginaire, pour laisser place à la femme réelle, Kaori,  

 

- C’est toi que je veux…  

 

Ryô colla son front bouillant à celui de Kaori – montait en température – et effleura ses lèvres avec les siennes, tremblantes, mais rapidement estompées par la main qu’il posa tendrement sur sa joue. Kaori ferma à son tour ses yeux, et laissa la raison gagner sa tête qui vacillait ; le baiser de Ryô lui donnait le tournis. Le baiser fut timide, réservé, presque frôlé, chacun des cœurs battants devaient réaliser ce qui se produisait. Et puis, et puis le vertige.  

 

Ryô accentua son baiser, valsant désormais avec les lèvres sucrées de Kaori. Il vint passer une main derrière son dos pour attirer son corps encore plus sur le sien. Et sa main qui était posée sur sa joue finie dans sa chevelure brune. Quelques minutes plus tôt, toute la timidité et les doutes qui avaient empêchés Ryô de faire le premier pas se transformèrent en regret maintenant. Ce baiser fut si bon, si savoureux, son cœur s’était décroché pour rebondir dans toute sa poitrine, qu’il regrettait de ne pas avoir embrassé Kaori avant…  

 

À bout de souffle, Ryô rendit sa liberté aux lèvres de Kaori et dut affronter son regard brillant de bonheur, et ardent de désir. Le goût de ce baiser se pendait à sa bouche, des larmes perlaient au bord de son regard, et il crut un instant entendre son cœur exploser. Ryô fut paralysé par le plaisir et la tentation de l’embrasser à nouveau avec encore plus de ferveur rongeait sa fierté, mais il ne voulait pas la brusquer, ou plutôt, inexplicablement, ce fut lui qu’il ne voulut pas brusquer.  

 

Ryô savait ce qui était bon, lorsque le corps d’un homme frôlait celui d’une femme, seulement, la femme qui faisait vibrer tout son corps sans même l’avoir encore touché, c’était Kaori. Et la timidité le gagna encore, tellement, sévèrement, que son en posséder le contrôle, il éteignit la lumière du salon, et eut comme seule compagnie de lumière, la lune. Kaori n’avait pas totalement disparue, mais son visage fut moins perceptible.  

 

Et l’intimité de l’obscurité donna à Ryô assez de force pour abandonner complètement et sans retenue sa sollicitude à posséder Kaori dans tout son être. Il ne sut par quel moyen, mais toujours est-il qu’ils se retrouvèrent corps ardent dans la chambre de Ryô, étendus sur le lit, Kaori portant le poids attisé de son partenaire, ne cessant ses baisers et ses caresses ; maladroites ; mais ô combien savoureuses.  

 

Kaori fut émue de l’embarra de Ryô, elle sentait ses doigts trembler, passer et repasser constamment au même endroit, sans avoir encore osé passer sous le vêtement. Kaori se moqua, elle ne valait pas mieux, se contentant de suivre le déhanché des lèvres de Ryô sur les siennes, elle était tellement envahi de bonheur, qu’elle se sentait devenir ivre, et se voir incapable de soumettre un ordre à sa tête, son cœur quant à lui, ne répondait plus.  

 

- Ryô…  

 

Kaori souffla son prénom avec émotion, mais aussi… Ferveur… Ryô, contre elle, la serrant dans ses bras, caressant son corps, sentant ses mains sur elle, ses lèvres l’embrasser comme s’il en avait envie depuis si longtemps.  

 

- J’ai envie de toi, Kaori…  

 

Les oreilles de Kaori devinrent brûlantes, et son cœur explosa, un feu d’artifice de plaisir, de désir,  

 

La barrière de la timidité céda au fanatisme charnel.  

 

. . . . . .  

 

L’eau rouillée s’abattait sur son corps, ses cheveux s’aplatissaient, son corps tremblait de froid, et seules les larmes qui roulaient sur ses joues la réchauffaient – mais son cœur fut glacé. Glacée, Hélène frissonnait, désespérée, c’était le pire de ses anniversaires, seize années obscures, une enfance oubliée, une adolescence misérable, et parfois elle se demandait quelle adulte elle serait. Peut-être devait-elle rester là, dans la rue, à attendre que le froid l’emporte dans un sommeil éternel. À qui manquerait-elle ? Personne ! Attendre la fin, c’était sans doute la meilleure des solutions pour que le tourbillon de sa vie ne cesse…  

 

- Qu’est-ce que tu fous là ?!  

 

Hélène reçue comme une claque à l’attente d’une voix masculine qu’elle reconnue immédiatement. Y croyant à peine, elle releva doucement la tête, mais son regard la heurta à une réalité, une improbable réalité : Kenji.  

 

Kenji pencha la tête pour la regarder plus attentivement ; elle était dans un état pitoyable. Galant – rarement – il positionna son parapluie au niveau de la tête d’Hélène, et fut quelque peu déstabilisé par son accoutrement ; elle portait une robe déchirée, et son maquillage portait les traces de doigts qui l’avaient abîmé.  

 

Est-ce qu’elle avait été agressée ?  

 

- Lève-toi !  

 

Kenji lui donna l’ordre sans même l’aider à se relever, et lorsqu’elle fut debout, devant lui, il eut comme un frisson, à la fois d’excitation et de frayeur ; belle à faire peur ; un petit clown.  

 

Kenji, sans ajouter un mot, mit le parapluie dans la main droite d’Hélène, et commença à s’avancer dans le couloir de la rue. Hélène ne bougea pas, convaincue que Kenji la laissera là, il avait eu la délicate attention de la protéger de la pluie, mais se moquait de ce qu’il lui était arrivé.  

 

- Tu attends quoi ?!  

 

Kenji se retourna vers elle, et lui fit signe de l’épaule de le suivre. Le cœur d’Hélène rata un battement, ne parvenant à croire que Kenji avait finalement décidé de l’aider. En silence, elle le suivi, et semblait reconnaître les rues qu’il empruntait ; est-ce que Kenji l’emmenait chez lui ? Elle rougit, se remettant doucement de ses émotions, elle devait maintenant parvenir à croire que l’homme pour lequel elle s’était pouponnée la conduisait lui-même dans sa maison.  

 

Arrivés, Kenji lui indiqua la salle de bain, précisant qu’elle pouvait se sécher et se changer ; il lui donna un bas de pyjama et un tee-shirt. Hélène pénétra dans la salle de bain, une petite pièce toute faite de carrelage, avec une douche italienne et un petit lavabo. Hélène ôta sa robe trempée, s’essuya et enfila le pantalon et le tee-shirt. S’approchant du miroir, elle se fit peur avec son maquillage dégoulinant. Elle attrapa un gant et défit toute trace de maquillage. Enfin, elle attrapa une autre serviette, et épongea ses cheveux.  

 

Hélène sortit de la salle de bain, et vit Kenji en train de faire cuire des oeufs, cigarette fumante à la bouche. Impressionnée, intimidée, elle n’osait pas l’interrompre dans sa tâche, et surtout, elle ne savait pas quoi faire de son corps.  

 

- Tu t’es fait agresser ? Questionna Kenji, soudainement  

 

Hélène baissa le regard, honteuse. Devait-elle lui dire la vérité, qu’elle venait le rejoindre pour fêter son anniversaire et qu’en chemin elle avait été remis à l’ordre par Amélie, défendant sa visite ? Que faire ?  

 

- Tu es muette ?! Je t’ai posé une question non !?  

 

Kenji se tourna vers elle, saisi. Il enleva sa cigarette de la bouche et souffla sa fumée de nicotine en direction du corps d’Hélène, emparait par sa vive beauté. Kenji secoua sa tête, perdait-il la raison ? Et dire qu’il l’avait pendant une seconde trouvé désirable, à quoi pensait-il, dans son pantalon trop grand, son tee-shirt large, sans maquillage et les cheveux ébouriffés, fatigué, il devait être fatigué.  

 

- Je… Je…  

 

Hélène tripota ses doigts, plongeant toujours plus son regard dans le planché, paralysée par le regard de Kenji, sa carrure, sa présence. Le silence, lui, rongeait la l’impatience de Kenji, et il était curieux de savoir ce qu’elle faisait dans les rues de Shinjuku, à une heure pareille, la robe déchirée, le maquillage balayé. Décidément, Hélène était un mystère complet pour lui, elle se retrouvait toujours dans des situations houleuse, et il devait s’avouer ne pas comprendre cette gamine.  

 

- Assis-toi et mange puisque tu as perdu ta langue !  

 

Kenji se mit à table, et dégusta ses œufs accompagnés de riz. Hélène regardait la table, d’où une odeur agréable se dégageait, mais rester toujours les pieds collés au sol, n’osant pas s’approcher. Kenji sentait ses nerfs bouillir, il n’avait jamais encore eu à faire à une femme aussi craintive, à l’air apeuré. D’habitude, les femmes présentent dans sa demeure à peine passé la porte avait sauté à son cou, arracher son haut, jouissant déjà du plaisir qu’il allait donner. Kenji allait bientôt s’agacer, lorsqu’encore une fois, ses yeux croissant son corps, son visage, il ressenti un courant d’électricité dans son bas-ventre, calmant son énergie négative.  

 

- Je ne vais pas te bouffer, j’ai assez de mon assiette !  

 

Hélène leva son regard, enfin, et dessina même un léger rictus face à l’allusion ironique de Kenji. La bulle de confiance qu’il venait de former donna un peu de courage à Hélène, et venu s’installer à table, doucement, mangeant lentement, gardant le nez dans son assiette. Kenji n’attendit pas qu’elle eut fini, il fit la vaisselle, et s’occupa. Malgré ça, une question traînait encore dans sa tête, que lui était-il arrivé ?  

 

Kenji se retourna pour lui faire face, et tomba nez à nez avec elle, tendant son assiette, rougissante, et murmurant un léger « merci », à peine audible. Il arracha presque le couvert de ses mains, et lui tourna le dos, vivement, ordonnant à son cœur de bien vouloir arrêter de battre de manière différente à chaque fois qu’il croissait ses yeux.  

 

- Je… Je vais y aller…  

 

Kenji n’en crut pas ses oreilles, mais qu’est-ce qu’elle avait dans la tête cette gamine ? Rentrer seule, en pleine nuit, en pyjama, après l’atrocité qu’elle venait sans doute de vivre, elle voulait quoi, qu’on l’achève ?  

 

- Tu n’es vraiment pas ordinaire toi ! Tu viens de te faire agresser par un mec, et toi, tu penses à rentrer avec le risque de retomber sur ce tordu pour qu’il finisse le travail ! Tu as quoi, dans la tête ?!  

 

Sans s’en apercevoir, Kenji s’était avancé vers Hélène, pour la coincer entre la porte et son corps. Il espérait qu’elle parle, qu’elle s’exprime, qu’elle fasse tomber ses larmes qui pendaient à ses yeux depuis tout à l’heure, et qu’elle soulage son cœur en se confiant, mais appliquait-il la bonne méthode.  

 

- Ce… Ce n’est pas… Un homme… Qui m’a agressé…  

- Quoi ?!  

- C’est… C’est…  

- Arrête de balbutier et crache !  

- C’est votre amie ! La blonde ! Elle m’a… Elle m’a fait comprendre de ne plus vous approcher !  

 

Finalement, la confession tomba, et les derniers mots laissèrent la place aux larmes, pour soulager encore davantage sa douleur. Kenji fut ébahi par ses dires, Amélie était donc l’auteur de cette agression – encore emportée par l’une de ses crises de bipolarité – son caractère jaloux n’arrangeait rien. Ce qu’il ne comprenait pas, c’était la raison, Amélie et son imaginaire possessif avait monté tout un film entre Hélène et lui, mais de là à s’en prendre à elle de manière violente.  

 

- Pourquoi Amélie t’a fait ça ?  

 

Hélène cacha son visage avec ses mains, honteuse, épuisée. Péniblement, Kenji du avancer son ouïe pour entendre sa réponse. Elle marmonna qu’aujourd’hui, c’était son anniversaire, qu’une amie à elle l’avait préparé pour qu’elle soit présentable devant lui, Kenji, celui qu’elle voulait voir en ce jour particulier, car elle ne voulait pas être toute seule.  

 

Kenji s’attendait à tout, sauf à cette réponse. L’idiote, elle avait fait tout ça pour vivre ça : l’humiliation. Encore une fois, il avait marqué une femme au fer rouge, ne résistant pas à l’envie de le voir, et de se faire consumer par son appétit charnel.  

 

- « Non. »  

 

Autre chose, c’était tout autre chose qu’elle était venue chercher de lui ; une compagnie, une présence, pour ne pas être seule. Hélène n’avait pas fait le bon choix, Kenji était loin d’être une bonne compagnie, et il n’était pas certain que sa présence puisse procurer du bonheur. Au fond de lui, à chaque fois qu’un sentiment le traversait, il le fuyait, il ne voulait plus aimer, il ne voulait plus appartenir à quelqu’un…  

 

Kenji le pensait, mais alors que sa tête rappelait son code de vie, son cœur, lui, insistait pour lui faire comprendre le contraire : céder. Céder devant la retenue d’Hélène ? Non ! Céder à ses propres envies. Kenji avait Hélène dans la tête depuis des jours et des jours entier, sans comprendre les raisons, les réponses à ceux pourquoi il avait envie de la revoir, de comprendre ce qui se cachait derrière ce regard noyé par la tristesse… La même tristesse…  

 

Kenji attrapa les poignées d’Hélène, et écarta ses mains de son visage qu’elle cachait. Mouillée, ses prunelles marron furent diluées par de l’eau salée, ne voulant cesser de cascader sur ses joues.  

 

- Eh, regarde-moi !  

 

Hélène sentit son cœur tambouriner, cogner, vaciller, elle sentait comme une boule de billard roulait dans tout son estomac. La voix de Kenji, suave, chaude, quel effet papillon dans son ventre. Et puis, près de ses lèvres, elle sentit un souffle bouillant, le visage de Kenji s’était approché, rapproché, pour bientôt frôler son front.  

 

N’attendant rien d’autre que du mépris, qu’une demande de quitter les lieux, Hélène sentit sa bouche être capturée. Les lèvres de Kenji contre les siennes, valsant, puis en tango, il donnait un baiser gourmand, une gourmandise sucrée qu’elle n’avait jamais goûtée. Et le plaisir fut si bon, si intense, que ses jambes lâchèrent, mais elle fut rattraper par les bras de Kenji, qui passa ses bras en dessous de ses fesses et la transporta pour la jeter sur son lit.  

 

Kenji se positionna à califourchon, ses yeux brûlant, son corps vibrant, sa présence sauvage, Hélène sentait le châtiment tomber, il allait la posséder, de corps, et un petit instinct murmurait à son oreille qu’il serait plus bestial que sentimental.  

 

 

 


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