Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated R - Prose

 

Author: patatra

Status: Completed

Series: City Hunter

 

Total: 9 chapters

Published: 28-03-12

Last update: 27-03-19

 

Comments: 58 reviews

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General

 

Summary: Un homme règne sur Tokyo : Saburo Kyô, dangereux trafiquant de drogue et d’armes. Pour les puissants, cet individu devient gênant, il a accumulé trop de dossiers compromettants contre tout un chacun. Ryô Saeba, de retour au Japon, est recruté pour exécuter le criminel. A ses côtés, Hanako Meini est là pour l’aider. Mais rien ne se passe comme prévu…

 

Disclaimer: Les personnages de "Japanese story" sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo, sauf Hanako et Saburo que j'ai créés.

 

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   Fanfiction :: Japanese story

 

Chapter 5 :: Dans l'intérêt de la femme que vous aimez

Published: 28-10-13 - Last update: 28-10-13

Comments: Bonjour! Ca faisait pas mal de temps que je n'avais pas posté. Voilà de quoi me remettre dedans. Bon, j'avoue que je maje aujourd'hui car j'ai une nouvelle histoire à enregistrer et qu'il faut avoir majé depuis moins de 6 mois - ce qui n'était pas mon cas - pour commencer une nouvelle histoire. Ce chapitre, je viens de le terminer. C'est un temps mort dans l'histoire avant la reprise des hostilités et l'épilogue. Et oui, 2 ou 3 chapitres et Japanese c'est fini!!! J'ai hâte! Je ferai certainement quelques retouches car, dans l'euphorie, je n'ai pas passé suffisamment de temps pour peaufiner, mais j'avoue avoir envie de travailler sur mon autre fic. Bonne lecture!

 


Chapter: 1 2 3 4 5 6 7 8 9


 

DANS L’INTERÊT DE LA FEMME QUE VOUS AIMEZ
 

 

— Que fais-tu encore ici ?  

 

Pourquoi ne puis-je étouffer cette colère qui gronde en moi ? Et dont Hanako est destinatrice. Je sais, car je le pressens, que son retour ici n’est pas fruit de sa volonté. Mais comment nier que ce retour imprévu et embarrassant me contrarie plus qu’il ne devrait. Elle me scrute avec incompréhension ; certainement ne suis-je pas là comme je me comporte habituellement. Ma voix est abrupte et sèche.  

 

— Désolé. Je suis sur les nerfs.  

 

Elle paraît encore plus déstabilisée. J’suis con. Je ne suis jamais sur les nerfs.  

 

— Qu’est-ce qu’il s’est passé exactement ?  

 

— Je n’ai pas été autorisée à quitter les lieux. J’ai été stoppée à la porte.  

 

— Physiquement ?  

 

— Non, pas vraiment.  

 

Elle semble réfléchir.  

 

— De manière très habile on m’a fait comprendre que Kyô voulait que je reste. Qu’on reste pour être plus précise. Les gardes m’ont juste dit que Kyô souhaitait s’entretenir avec Mademoiselle Meini et Monsieur Sato avant que nous ne rentrions chez nous. Que cela ne prendrait que quelques minutes… que je ne devais pas m’inquiéter…  

 

— As-tu une idée de ce dont il s’agit ?  

 

Elle se contente de secouer la tête négativement et je sens l’appréhension l’envahir malgré l’air stoïque qu’elle affiche. Je contemple son visage. L’harmonie de ses traits me fascine toujours autant. Comme ce fut le cas dès notre première rencontre.  

 

Cette soirée ennuyeuse où je traîne mon vague à l’âme. La révélation. A la fois salvatrice et déchirante. Oui, je peux encore être bouleversé par une femme. Non, tu ne me hanteras pas jusqu’à la nuit des temps. Rien vu de son corps, de ses courbes, rien à battre du pantin endimanché qui pend à son bras. Séisme inattendu que celui qui fulgure mes entrailles à cet instant ! Je ne vois alors que ce visage irradiant de féminité et de fragilité. L’opposé de toi. Une femme, une vraie ! Qui, comble de l’horreur, se refuse à me considérer. Je la veux. Immédiatement. Que le jeu commence, je suis expert ! Non, finalement non, pas si expert que ça car elle ne m’oppose que sincérité. Ne veut-elle pas jouer ? J’étale mon charme, joue du sourire et des regards. Elle me voit et je le sais. Quelle grâce ! Diable, jamais je n’ai vu femme si gracieuse ! Pourquoi s’obstine-t-elle donc à m’ignorer ? Pourquoi feindre l’indifférence alors que son cœur est touché ? Regarde-moi, brune fatale ! Regarde-moi !  

Après, je ne sais plus exactement, c’en est atroce aujourd’hui de constater le trou noir. J’ai joué. Les mots sucrés prononcés lors de la conquête n’ont aujourd’hui plus de saveur ; Hanako a chaviré, voilà ce qui importe. Certainement ai-je été convaincant, je ne sais plus. Je me souviens très bien pourtant, aujourd’hui encore, de ses grands yeux orgueilleux, onyx mêlés de jade, posés sur moi ; curieux mais timides.  

Son visage… je ne voyais que son visage… son teint si merveilleusement transparent ; je voyais ses lèvres grenat, dessinées avec subtilité, s’élargir d’un sourire prometteur, je voyais l’aura soyeuse de sa chevelure tout autour de son visage de poupée. Oui, je voyais tout cela et tout cela me bouleversait. Mais je n’entendais pas les mots que je prononçais. Je ne les entendais pas. Un seul et unique objectif palpitait en moi : la mener à mon lit. L’urgence était absolue et ne tolérait pas l’échec. Le premier soir, c’était décidé, Hanako succomberait dans mes bras. Mais la brune ne l’avait pas ainsi décidé et sa résistance fut exemplaire ; chaque minute qui s’écoulait, abreuvée pourtant de ma sirupeuse sérénade, voyait ma victoire s’éloigner. La débâcle avait été totale car même un baiser ne m’avait été concédé. Ce fut donc le gosier sec et la fierté en berne que je regagnais mes pénates. Mais mon cœur était ragaillardi, sans que je puisse expliquer pourquoi.  

Les jours et semaines qui ont suivi furent synonymes de renaissance. La hâte m’envahissait chaque soir d’être au lendemain, chaque matin de la retrouver. Elle était aussi belle à l’intérieur qu’à l’extérieur, jouissive révélation. Et, chaque jour, je m’attachais davantage, mais taisais la rencontre à mes amis. Nul ne pouvait partager ce bonheur indéfinissable.  

Enfin, il y eut le premier baiser, l’attente impatiente de notre première nuit. Mais de nuit il ne fut question car Hanako s’offrit à moi un après-midi ; un après-midi pluvieux et gris. Je sondais ce jour là son regard comme je le fais maintenant, leur expression est identique encore aujourd’hui. Mais cette première fois, ce que j’y découvris me fit l’effet d’une bombe : elle m’aimait !  

J’étais, je suis et reste un égoïste assumé. Certainement aurais-je dû fuir, la respecter encore le temps de cerner mes propres sentiments, introspection ma foi pas très habituelle chez moi. Mais je n’en ai pas eu la force, la raison avait déserté mon corps et, dans mes veines, un désir brut et animal circulait à m’en faire exploser le bide. Je n’ai fait d’elle qu’une bouchée. Je l’ai prise comme elle s’offrait. Toute entière. Sans nuance, ni retenue. La chaleur de son ventre, la folie de la passion qu’elle m’opposait m’enracinèrent profondément dans la vie ; profondément et durablement. J’enfouissais alors dans les tréfonds de ma mémoire les souvenirs de toi.  

 

Et voilà qu’aujourd’hui tu me reviens en pleine gueule ! J’avais oublié ça. L’effet que tu me fais. Incomparable. Insupportable à m’en bousiller les neurones ! Comment ai-je pu nier si longtemps l’évidence ? Je ne pourrai renoncer à toi, je le sais. Tout comme je n’imagine pas renoncer à Hanako. Mais il n’est pas l’heure du choix encore. Il n’est pas l’heure du choix… Autour de nous les invités babillent joyeusement mais je reste sourd aux bribes de conversations qui arrivent jusqu’à moi. J’analyse vite, vite et méticuleusement les faits, et l’essentiel ne fait pas de doute :  

 

Il sait !  

 

Voilà tout ce qui m’importe ! Il sait ! Dans quelles proportions, je ne peux en avoir une idée très précise : mon identité, ma mission, le commanditaire, Tosa... Mais il sait qu’Hanako et moi ne sommes pas là pour jouir de sa réception, ni de son hospitalité. Je m’en contreficherais si j’étais seul dans cette galère ; mais, là, deux femmes sont intimement mêlées à l’affaire. Deux femmes qui ne sont ni mes clientes, ni mes partenaires. Deux femmes que j’aime.  

En moi se succèdent, comme les pages d’un livre qu’on feuillette rapidement, tous les contacts que Kyô et moi avons eus : du premier regard dans la salle de concert, regard inconsistant qui me laisse croire qu’à ce moment là de la soirée, il ignorait encore nos intentions ; à la dernière image que j’en ai, à cette ombre, longue et fine comme un poignard, qui s’est projetée dans la laverie. Il venait récupérer Kaori. Savait-il pour moi à cet instant ?  

Assurément.  

Sait-il pour toi ? Cette question est sans réponse. Qu’y a-t-il à savoir ? Ton passé ? Je ne peux croire que Kyô n’étudie pas attentivement les profils des personnes qu’il est amené à fréquenter. A plus forte raison, celui de la femme qui partage sa vie doit être passé au crible, ses anciennes relations doivent être fouillées, son emploi du temps examiné avec attention. Là-dessus, je ne me fais guère d’illusion. D’ailleurs, Kyô lui-même l’a reconnu lors de son tête à tête avec toi, il a dû « faire avec ton passé », je ne suis pas dupe quant à l’interprétation de cet aveu. Sur le coup, j’étais tellement absorbé par l’échange que je n’y avais guère accordé d’importance. Mais, maintenant, les mots qu’il a prononcés résonnent en moi d’une nouvelle façon. Je fais le chemin à l’envers, rembobine le film, m’attarde sur ces détails qui m’ont marqués tout au long de cette histoire, sans pour autant que j’en saisisse immédiatement la véritable signification. Oui, les faits palpitent en moi, s’entrechoquent, se fissurent, puis volent en éclat pour mieux s’imbriquer ensuite ; ils prennent alors une essence nouvelle, une saveur différente.  

Une crispation désagréable envahit mon corps. Hanako me regarde. Je n’ignore pas que mes traits se sont durcis alors que je visitais les souvenirs récents de la soirée, que j’en analysais le contenu. Pourtant, je ne ressens aucun stress, je sais que je vaincrai Kyô. Oui, j’en suis convaincu.  

 

— Que va-t-on faire ? demande-t-elle d’une voix grave.  

 

— On ne change rien à nos plans. Nous allons récupérer le microfilm.  

 

— Mais…  

 

— Il n’y a pas de mais, je compte sur toi pour suivre à la lettre chacune de mes recommandations. Kyô mérite une belle leçon, son assurance est insultante. A sa place, n’importe quel autre criminel nous aurait tenus séparés ; entre ses mains, tu devenais un otage de choix. Qu’il t’ait laissée revenir auprès de moi est une grosse erreur.  

 

— Oui, oui tu as raison, répond-elle comme vidée de toute énergie.  

 

La situation n’est pas si limpide. Hanako ignore toujours qu’une tierce personne est dans la balance. Toi ! Pour autant, il m’est inconcevable que Kyô t’utilise d’une quelconque manière. J’ai la certitude que les sentiments qu’il affiche envers toi, le trouble dont il est assailli dès qu’il est question de toi ne sont pas feints. Il est amoureux. Cela m’est délicat à considérer, il faut bien l’admettre, mais beaucoup moins que cette réciprocité encore opaque, que je devine pourtant ; le regard que tu lui tends, les excuses que tu lui trouves, ta presque soumission avec lui ne laissent pas de doute : il a sur toi une influence amoureuse indéniable.  

Influence amoureuse ? Que je suis con et mal à l’aise lorsqu’il s’agit d’évoquer les sentiments que les autres hommes savent t’inspirer. Mais il n’est pas sujet de toi et moi pour le moment. Je fais confiance à mon instinct : Kyô ne te fera aucun mal, il ne te considèrera pas comme un otage ; peut-être même ignore-t-il encore le lien qui nous unit. Ah, je déteste ne pas maîtriser toute la situation, le goût est rance dans ma bouche et je suis conscient que beaucoup de faits ne me sont pas encore accessibles.  

 

Alors qu’Hanako recouvre peu à peu ses esprits, je balaie du regard l’assistance et focalise mon attention sur l’effervescence des yakuzas présents autour de nous. Ils sont nombreux dans l’immense salle, mais ne paraissent pas, pour le moment, nous prêter plus d’attention qu’aux autres invités. Les convives commencent d’ailleurs à quitter la réception, la soirée n’est pourtant pas si avancée, la fête ne fait que commencer. J’imagine mal ces jet-setters se satisfaire des quelques heures guindées passées ici ; leur précipitation à quitter les lieux ne m’en paraît que plus étonnante, voire suspecte. Et je ne peux m’empêcher d’y voir la volonté du maître de maison.  

 

— Aie confiance, susurré-je aux oreilles de ma bienaimée alors que mon regard t’accroche à nouveau.  

 

Il m’est de plus en plus difficile de rester de marbre à chacune de tes apparitions. Cette dernière n’échappe pas à la règle, surtout que ta main est enserrée dans celle de Kyô. L’image m’est douloureuse ; évidemment. Mais au-delà de la jalousie que je maîtrise tant bien que mal, c’est la tangibilité des risques que tu encours qui me sautent au visage. Tu es encore ici et, pire que tout, il ne te lâche pas. Il ne te lâchera pas. Comment donc échapper aux tentacules de la pieuvre ?  

Je reste malgré tout imperturbable et mon attention se déplace pour se concentrer, pendant que vous vous rapprochez de nous, sur celui qui t’accompagne. Il me regarde. Ses yeux ne sont plus rieurs et menteurs comme lorsqu’ils nous avaient accueillis en début de soirée. Ils sont, là, transperçant et fixes. Les traits ont perdu de leur affabilité, les muscles sont tendus mais gardent une certaine élasticité. La démarche est légère, assurée, les gestes sont amples et francs mais il n’est pas difficile de détecter chez lui une certaine fébrilité. Tout d’abord, il y a ses lèvres, figées dans un rictus que Kyô veut imperceptible, mais qui ne m’échappe pas ; et aussi cette main qu’il te donne, ses doigts jouent nerveusement entre les tiens, pianotent dans un mouvement dont il n’est certainement pas conscient. Doit-on y lire l’impatience du face à face ? La crainte de la défaite ? L’image du couple que vous formez n’est pas sans lien avec son agitation. Voilà que Monsieur expose son trésor, qu’il fait savoir à quel point tu lui es précieuse, telle l’une de ses antiquités âprement collectionnée. Il semble ignorer que nul ne peut se targuer de te posséder. L’expérience m’est encore amère et, d’après ce que j’en ai compris, Eichi aussi a goûté l’horreur de te perdre.  

 

Mon regard glisse sur toi un quart de seconde, juste pour m’assurer que tu vas bien. Ton expression est bien évidemment tendue, car tu sais que c’est vers moi qu’il t’entraîne ; pour autant, tu ne sembles pas inquiète. Mal à l’aise, oui, mais pas inquiète. Ne devines-tu pas qu’il sait déjà tout ?  

 

Hanako et moi nous sommes tournés vers vous et, avec un naturel déconcertant, ma femme a revêtu une mine avenante et détendue. Je suis impressionné par tant de maîtrise. Mais, à bien y réfléchir, celle-ci n’est guère étonnante : le monde dans lequel elle évolue depuis toujours est celui des faux-semblants, du paraître et de la superficialité ; elle a appris à dissimuler ses émotions derrière une apparence hautaine ou un sourire de façade. Mais à ce moment crucial de notre affaire, elle fait preuve d’un sang froid dont je ne l’aurais pas crue capable ; et je lui suis plus que reconnaissant de cette inattendue coopération.  

 

— Mademoiselle Meini, entame Kyô avec un sourire travaillé, j’espère que vous pardonnerez les manières un peu brusques dont j’ai usées pour vous retenir ici.  

 

Transfiguration… Kyô adresse maintenant un sourire bienveillant à ma femme.  

 

— Je suis un peu surprise, vous ne m’avez guère habituée à pareille attitude, ose-t-elle avec un fond d’exaspération dans la voix.  

 

De mon côté, je tente de capter ton regard. Mais tu fuies le contact et sembles concentrée sur Hanako. J’en profite pour admirer le collier qui orne dorénavant ton cou. Les dernières paroles de Kyô résonnent à nouveau en moi : « Viens chérie, j’ai un cadeau pour toi. » Voilà donc le cadeau ! Je peine à réfréner une grimace, faut-il que j’en déduise qu’il est possible de t’acheter maintenant ?  

 

Il me faut pourtant convenir que ledit collier est magnifique et qu’il te sied à merveille. Indéniablement, Kyô te connaît bien, il n’investit pas dans des bijoux grand luxe, dans des rivières de diamants ou autres pierres précieuses, ne te couvre pas d’or, mais a su saisir ton essence, la substance dont tu es faite, la simplicité de ton âme. Je suis écœuré tant ce collier te correspond.  

Un épais lacet de cuir maintient l’énorme œil de tigre au ras de ton cou. Ce jaspe, de taille impressionnante, complète majestueusement la tenue que tu as choisie pour la soirée, souligne ta nature. Féline. Tes cheveux courts, la lumière qu’ils accrochent naturellement renforcent la pureté de la pierre, et tu brilles maintenant de mille feux. Mille feux qui ravivent celui qui couve en moi et qui consume mes chairs. Je voudrais hurler ! Kaori, je voudrais hurler et te ravir à tous ces simulacres de sentiments. Dévêtir ton corps de ces parures indécentes, te mettre à nue, déposer ton cœur au creux du lit qui serait nôtre, défaire de ma bouche, une à une, les caresses qui ont profané ta peau, parjuré les serments idiots que je m’étais imposé, et investir ton ventre. Je te jure Kaori, je te jure que le plaisir des sens dont je saurais te régaler ne t’a encore jamais été accessible.  

Mes reins sont envahis d’une ardeur soudaine et malvenue, mais qu’il m’est impossible de refouler. Pourquoi faut-il que j’ai envie de toi maintenant ? Là, ici, alors que le danger guette, alors qu’à mon bras se cramponne Hanako.  

 

— N’y voyez aucune mauvaise intention de ma part, s’excuse-t-il dans une élégante courbette, j’ai juste saisi l’occasion d’une soirée agréable. Egoïstement. Vous et moi partageons la même passion pour les céramiques chinoises ; il est rare, croyez-moi, que je puisse échanger sur le sujet. Loin de moi, Monsieur Sato, l’idée de gâcher la fin de soirée romantique que vous aviez projetée avec votre fiancée.  

 

Il s’est tourné vers moi et déblatère ses inepties ridicules.  

 

— Certainement n’êtes-vous pas féru de conversations si pointues, reprend-il. Mon amie ne les supporte pas non plus, elles les ennuient à mourir. Mais avec un peu de chance, vous vous découvrirez des centres d’intérêts communs. Mais… je manque à tous mes devoirs, je vais faire les présentations.  

 

Il a depuis quelques instants lâché ta main et enlace ta taille.  

 

— Je vous présente mon amie : Kaori Makimura. Kaori, voici Hanako Meini et son fiancé, Okura Sato.  

 

« Enchanté. »  

Nous nous inclinons tous trois dans une révérence guindée. Le discours de la pieuvre est piqué de sous-entendus que je comprends plus ou moins. Il sait ! Il sait ! Il sait ! Mais que veut-il donc ? Jouer ?  

 

— Hanako Meini, reprend à ton attention celui qui mène l’échange avec un plaisir non dissimulé, est la fille de Takako Meini, qui était une collectionneuse d’art avertie, ma plus grande rivale sur le marché nippon, et de Tosa Meini, bras droit du ministre de l’intérieur, responsable des renseignements généraux. C’est bien cela, n’est-ce pas ?  

 

Il a hésité. Hanako acquiesce. Elle est bien consciente que le rôle de son père au gouvernement n’est pas facile à décrire ; et on ne peut plus opaques que les attributions de cet homme d’exception.  

 

Après une courte pause, il persévère sur le sujet Tosa :  

 

— Eminent personnage que votre père, mademoiselle Meini. J’avais osé espérer le recevoir ce soir mais il semble qu’il soit loin de Tokyo aujourd’hui.  

 

— Tout à fait, murmure Hanako, consciente de mentir.  

 

— Malgré ma déception, je puis vous avouer que vous avoir parmi nous est un régal pour les yeux, vous avez non seulement hérité du goût artistique de votre mère mais également de sa beauté. Votre seule présence suffit à illuminer cette soirée et à excuser la défection de Monsieur Meini.  

 

Ce soir, nous sommes les émissaires de Tosa ; sa prétendue absence nous a fourni le prétexte rêvé pour pénétrer l’antre de Kyô. Au cœur de sa forteresse, nous avions toutes les chances de parvenir à nos fins : récupérer le microfilm, réduire à néant l’ennemi public n°1. Tout me paraît plus compliqué maintenant. A tout niveau. Je pose une main sur l’épaule d’Hanako, son contact est glacé.  

Quant aux messages de notre hôte, j’éprouve toutes les peines du monde à les décrypter ; j’y devine pourtant un sens caché. Qu’insinue-t-il ?  

 

— Et permettez-moi de vous féliciter Monsieur Sato.  

 

— Comment ça ?  

 

L’abject individu m’oblige à sortir de ma réserve. Nos yeux se sondent enfin. Il n’y a rien de transparent dans cet amas couleur de cendres qu’il me tend. De la haine ? Une curiosité, assurément. Une curiosité dévorante. Il engloutit mon visage, l’expression qui y est peinte. Je le vois courir sur mes joues, accrocher mes lèvres, caresser mes cheveux et revenir enfin à mes yeux. Pourquoi lui faut-il ainsi me détailler ? C’est plus fort que moi, ma bouche s’étire en un rictus agressif. Regarde-moi Kyô ! Vois le sourire de vainqueur que je t’offre ! Contemple celui qui causera ta perte ! Admire celui qui te ravira celle qui, pour quelques minutes encore, est à ton bras ! Oui, regarde-moi comme il te plaira ! Mais il n’est pas simple de croiser le regard ennemi de si près, n’est-ce pas ?  

 

— Lorsque je vois Mademoiselle Meini aussi resplendissante et aussi heureuse, je ne peux que convenir que l’honneur vous en revient monsieur Sato.  

 

— Saburo.  

 

Ta voix est claire et assurée.  

 

— Il semble que nos invités étaient sur le point de partir, je ne crois pas qu’il y ait urgence à débattre vaisselle, non ? Laissons-les rentrer chez eux et remettons à plus tard cette soirée.  

 

Le silence qui suit ton intervention est facilement interprétable. Saburo te contemple avec fascination. Il ne cherche pas à dissimuler les sentiments que tu lui inspires. Certainement exagère-t-il d’ailleurs l’expression amoureuse béate qui transparaît sur son visage. Cela m’est destiné. Evidemment ! Et ses récentes déblatérations perdent toute sincérité. Il n’est en fait, ce soir, que question de toi !  

 

— J’imagine que vous êtes impatients de rentrer chez vous, demandes-tu à Hanako. Je suis moi-même épuisée.  

 

— Très bien, acquiesce rapidement le maître des lieux, ne laissant pas à ma femme le soin de répondre à la question. Mademoiselle Meini, me permettez-vous de vous contacter cette semaine pour fixer une date à votre convenance ?  

 

Pourquoi Kyô semble-t-il si heureux ? C’est incompréhensible ! Se donner tant de mal pour nous garder ici puis sauter sur la première occasion pour se débarrasser de nous.  

 

— Bien entendu.  

 

Je t’observe. Un voile triste s’est abattu sur tes yeux. Que se passe-t-il mon ange ? Kyô me tend la main. Il veut abréger l’échange. Il consent même à un rapprochement physique : une poignée de main !  

Il jubile ! Oui, il jubile alors que résonne dans la pièce le désarroi qui est le tien. Est-ce si simple ? Enrober notre confrontation de bonnes manières, de faux-semblants, d’une factice bienveillance et le tour est joué ? Je n’aime pas la tournure que prennent les évènements, tout cela a un goût de défaite.  

Tu oses enfin un regard vers moi ; et tout devient limpide. Evidemment !  

 

Je ne te reverrai pas. Putain, je sors de cette maison et je te dis adieu. Le piège se referme sur nous. Il est à parier que dès demain vous serez très loin d’ici, qu’il mettra autant de distance entre toi et moi qu’Eichi l’avait tenté avant lui. La réalité ne fait plus de doute : Kyô ne prévoyait pas de nous retenir dans sa maison, non. Il voulait juste que j’en sorte moi aussi. Et, cerise sur le gâteau, il a le beau rôle, il redore son blason, il n’y a ni effusion de sang, ni colère, ni bataille rangée ! Rien qui ne pourrait te choquer ou t’éloigner encore davantage de lui. Mais tu n’es pas dupe Kaori. N’est-ce pas que tu ne l’es pas ! Tu as d’ores et déjà deviné que notre séparation définitive est son principal objectif, qu’aux manœuvres il excelle, que sa feuille de route est minutieusement renseignée. Qu’il parviendra même certainement à te reconquérir. Son habileté n’est pas à démontrer, et il sait ! Il sait tout déjà ! Il lui suffira de décrire Hanako, le couple que nous formons elle et moi depuis trois ans. Trois ans ! Une éternité ! Et toi qui me cherchais ! Certainement louera-t-il notre bonheur sans nuage, nos voyages, nos projets de famille. Probablement a-t-il déjà en sa possession tout ce qui permettrait de te convaincre. Des preuves, des photos, des anecdotes, des détails savoureux…  

 

Je sors mon flingue et lui explose la tête ?  

 

Oui, je lui explose la tête.  

 

— Je crois… que nous allons accepter votre invitation, monsieur Kyô ! Il ne faut jamais remettre au lendemain ce que l’on peut faire le jour même, non ? Je pense que nous avons là l’occasion de passer une excellente soirée. Si bien sûr vous en êtes d’accord Mademoiselle Makimura.  

 

Un sourire vers toi. Tu fronces les sourcils de désapprobation mais je sais d’ores et déjà que tu as abdiqué, que tu te ranges à ma décision.  

 

— Soit, s’il vous plaît de discuter chinoiseries, conclues-tu pleinement consciente qu’il ne sera pas un instant question des collections de la pieuvre.  

 

Kyô, quant à lui, palpite de colère. Je le sais, je le sens. Ses mâchoires sont contractées et le regard qu’il me tend en dit long sur sa volonté de m’écraser et de m’anéantir. Je paierais cher pour contempler ma propre face en ce moment. Lui rend-elle la politesse ? Ou est-ce que je ne lui oppose qu’une indélicate indifférence ? Comment a-t-il pu imaginer que je renoncerais aussi facilement ?  

 

— Dans ce cas, je vous demanderai quelques minutes de patience, il me faut prendre congé de mes autres invités, coupe-t-il abruptement. Kaori… tu m’accompagnes chérie.  

 

Hanako est pétrifiée à mes côtés, aucun son ne semble capable de franchir le seuil de sa bouche, elle se contente donc d’une mini-révérence ; je devine combien elle m’en veut d’avoir accepté l’invitation de Kyô. Ce dernier empoigne ton bras et s’éloigne vers la sortie. Mais à peine est-il distant de quelques mètres qu’il se retourne et revient vers moi. Je vais à sa rencontre.  

 

— Profitez-donc du jardin pendant notre absence. Il est magnifique, même de nuit.  

 

— Quelle bonne idée !  

 

Mon ton est on ne peut plus narquois et enjoué. Rien de ce qu’il s’attend à affronter. La vermine n’apprécie guère mes manières de brute et la moue méprisante qui déforme sa bouche n’en est que plus lisible. « C’est donc cet homme qu’il va me falloir combattre et vaincre ! C’est lui que Kaori a élu comme étant mon principal rival ! Je ne peux y croire ! »  

 

Et si, Kyô ! Il faut se méfier des apparences !  

 

— Monsieur Sato, reprend-il en murmurant mais en veillant à articuler. Je ne saurai que trop vous conseiller de rentrer rapidement chez vous. Ni vous, ni moi n’avons l’intention de donner un spectacle désolant à nos amies. N’est-ce pas ?  

 

Je ne réponds pas. Il sourit ; prenant mon silence pour de la déférence.  

 

— Aussi, dans l’intérêt de la femme que vous aimez, Monsieur Sato, il y a urgence à quitter ma demeure. Je crois comprendre qu’il y a beaucoup de choses que vous ignorez, des détails que je suis seul à savoir et qui, divulguées aux mauvaises personnes, pourraient engendrer des catastrophes que vous n’imaginez pas.  

 

— Est-ce une menace ?  

 

— Non, Monsieur Sato. C’est une prédiction. Mais s’il s’avérait que je sois dans l’obligation d’agir à votre encontre, vous seriez seul responsable du désastre.  

 

— Je prends mes responsabilités.  

 

A nouveau, il sourit. Mais il n’y a ni joie, ni moquerie dans son sourire.  

 

— Comme bon vous semble, mais vous disposez encore de quelques minutes pour changer d’avis Monsieur Sato. Kaori et moi ne serons pas longs.  

 

Il tourne les talons et te rejoint. Nos yeux se croisent un instant, la fébrilité a gagné tout ton corps et je ne distingue plus en toi que la femme fragile dont je suis fou. Evanouie la beauté fatale aux courbes infernales, endormie la rebelle obstinée dont je raffole également. Non, à partir de maintenant tu t’en remets à moi, presqu’aveuglément. Ta confiance est absolue et m’honore Kaori. J’en serai digne.  

« A tout de suite. »  

Je me retourne, plein de cette conviction inébranlable qui est la mienne : celle de la victoire. Et c’est la mine désemparée d’Hanako qui me bouleverse ; elle n’a pas bougé d’un millimètre, est restée figée dans l’effroi de la situation. Les mots de Kyô resurgissent alors en moi avec une diabolique résonance : « Dans l’intérêt de la femme que vous aimez, Monsieur Sato. »  

 

« Hanako ! »  

 

 

 

 


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