Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated R - Prose

 

Auteur: patatra

Status: Complète

Série: City Hunter

 

Total: 9 chapitres

Publiée: 28-03-12

Mise à jour: 27-03-19

 

Commentaires: 58 reviews

» Ecrire une review

 

General

 

Résumé: Un homme règne sur Tokyo : Saburo Kyô, dangereux trafiquant de drogue et d’armes. Pour les puissants, cet individu devient gênant, il a accumulé trop de dossiers compromettants contre tout un chacun. Ryô Saeba, de retour au Japon, est recruté pour exécuter le criminel. A ses côtés, Hanako Meini est là pour l’aider. Mais rien ne se passe comme prévu…

 

Disclaimer: Les personnages de "Japanese story" sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo, sauf Hanako et Saburo que j'ai créés.

 

Astuces & Conseils

Je n'ai pas reçu d'email d'activation.

 

Si vous n'avez pas reçu d'email d'activation, c'est sans doute parce que votre email n'est pas valide ou que vous ...

Pour en lire plus ...

 

 

   Fanfiction :: Japanese story

 

Chapitre 2 :: Bienvenue chez Saburo Kyô

Publiée: 12-04-12 - Mise à jour: 12-04-12

Commentaires: Bonjour à tous! Voilà un nouveau chapitre de Japanese. Et oui je sais, sur ce coup je suis rapide mais j'avertis tout de suite que ça ne sera certainement pas le cas pour le prochain, je souhaiterais terminer le 18ème chap du vent sur lequel je galère depuis pas mal de temps. Il est vrai que les nouvelles histoires sont toujours plus faciles à faire avancer, tout se met en place dans nos caboches et du coup, nous sommes en verve. Pour mon autre fic, tout est déjà emballé pour moi, et maintenant je rame pour me donner envie de la terminer sur le papier... Bon ce chapitre reste dans la lignée du précédent, je compte construire ma fic de l'intérieur de Ryô, c'est vrai que cela me coupe de ce que les autres pensent ou savent mais c'est un point de vue intéressant aussi, du coup, il y a plein de choses qui ne seront que sous-entendues; aux lecteurs de se construire leurs propres points de vue de ce qu'il en est réellement. Merci à toutes pour vos com et j'espère que la suite vous plaira tout autant :) Et à très vite pour une suite. Bises

 


Chapitre: 1 2 3 4 5 6 7 8 9


 

- Ryô ?  

 

- Tu peux m’expliquer pour Kaori ?  

 

Je suis bien conscient d’être brutal dans ma question, que le ton de ma voix est particulièrement inamical, mais je m’en contrefiche…  

 

Au bout du fil : silence.  

 

- Angel ?  

 

- Qu’est-ce que tu veux que je t’explique ? Sois clair au moins ! Me répond-il, à peine plus aimable.  

 

- Tu vois très bien de quoi je veux parler… mais commençons par sa présence ici, à Tokyo.  

 

- J’ignorais qu’elle se trouve à Tokyo, Ryô. Et même si je l’avais su, tu es la dernière personne que j’aurais mise au courant. Je te rappelle que je ne suis pas ton informateur personnel sur les faits et gestes de ton ancienne partenaire.  

 

- Es-tu stupide ?  

 

- Voyons tu plaisantes là ?… Kaori est revenue d’Europe deux mois après que tu aies décidé de disparaître, de tomber dans l’oubli. On t’a cherché et on t’a pas trouvé, déclame-t-il avec une voix suintant le reproche. Après, elle est partie sur Osaka, on a des nouvelles de temps en temps, elle va bien, c’est tout ce qu’on demande. Je sais que Miki a plus d’infos que moi, mais ça ne me regarde pas ! Et toi, encore moins.  

 

Je prends appui sur un mur, je cherche l’oxygène nécessaire à la survie de mes neurones. Ainsi elle est revenue il y a longtemps déjà… Je repousse le malaise… les questions qui, logiquement, m’assaillent et dont j’aimerais que Mick me fournisse les réponses… Qu’en est-il d’Eichi ?  

 

- Sais-tu qu’elle est avec Saburo Kyô ?  

 

Et là, c’est moi qui ressens le vertige de celui que j’ai au téléphone.  

 

- Quoi ?  

 

Il s’étrangle.  

 

- Mick, je viens de voir Kaori au bras de Kyô il n’y a pas plus d’un quart d’heure de cela et laisse-moi te dire que je n’ai aucun doute sur la nature de leur relation.  

 

J’entends des bruissements de papiers, des jurons étouffés.  

 

- T’es où ? J’arrive…  

 

- Mick, comment est-il possible que tu ne sois pas au courant ? Je t’ai demandé avant-hier de te renseigner sur ce type, ne me dis pas que tu es passé à côté de ça !  

 

- … Si ! On dirait bien… J’ai pas d’excuse… Mais Saburo Kyô change de petite amie comme de chemise, et j’ai sous les yeux la photo de son ex, elle date d’il y a huit semaines. Il est plutôt discret sur ses conquêtes et… Kaori, c’est impensable !...  

 

- Il m’est impossible de changer mes plans, je dois supprimer Kyô ce soir. Mais la connaissant, ça risque d’être plus compliqué que prévu…  

 

Je parle et réfléchis en même temps, Mick m’interrompt.  

 

- Comment a-t-elle réagi ?... Quand elle t’a vu. Et c’est quoi cette histoire de supprimer Kyô ?  

 

J’élude.  

 

- Venez chargés Falcon et toi. Attendez mon signal derrière la propriété des Kyô. J’aurais très certainement besoin de vous.  

 

- Mais…  

 

Je raccroche. J’écrase ma cigarette et rejoins Hanako qui m’attend dans la voiture.  

 

- Qui appelais-tu ?  

 

- Un indic, je voulais quelques informations complémentaires sur notre homme.  

 

- Tout va bien ?  

 

Le stress filtre dans sa voix et ses doigts jouent nerveusement avec une mèche de ses cheveux, l’entortillant, l’enroulant serrée autour de son index, la libérant enfin avant de reprendre le même jeu avec sa voisine. Je contemple le manège… Comment vais-je gérer le tourbillon qui me dévaste de l’intérieur ? Cette euphorie désespérée de t’avoir retrouvée ? Qui m’en fait oublié toutes mes obligations, tous mes engagements de la soirée, jusqu’à ma mission, et Hanako qui m’accompagne. Hanako…  

 

Emane d’elle une tension diffuse qu’elle maîtrise mal. Normal, ça sera une première pour elle de se confronter au danger. Réellement. Les autres fois, son rôle ne s’est borné qu’à désigner la cible, commandement paternel auquel je me plie moi aussi, et à collecter toutes les informations nécessaires à ma mission.  

 

Exécuteur. Voilà ce que je suis devenu. Renouant ainsi avec mes amours anciennes. Exécuteur à la solde de l’Etat. Changement notoire, me dirais-tu. Mes commanditaires sont haut placés, je ne les connais pas, ne veux pas les connaître d’ailleurs, ils sont ministres, chefs de la police, princes ou hauts dignitaires. Peu m’importe en fait. Tosa Meini se charge d’amener jusqu’à moi les expresses « demandes ». A moi ensuite d’éliminer les gêneurs intouchables par la voie classique : les criminels couverts par l’immunité diplomatique, ce fut le cas en Inde où l’un de nos ressortissants, haut placé, affichait sans entrave ses déviances sexuelles, profitant de sa position, ou encore des terroristes protégés par un milieu qui leur est favorable, deux cibles au Pakistan, une en Sibérie, et puis d’autres sujets plus complexes, des « secrets d’état », « convenance personnelle »... Je pose peu de questions et ai, jusqu’à maintenant, un excellent rendement. Cent pour cent.  

 

En trois ans d’activité, huit cibles. Saburo Kyô est la neuvième.  

 

Mais aujourd’hui, Hanako m’accompagne…  

 

- Oui tout va bien. Mais je voudrais que ton rôle dans cette affaire soit déjà terminé. Je n’aime pas t’exposer.  

 

- Je fais une heure ou deux de figuration et puis je rentre t’attendre à l’hôtel. C’est ce qui est prévu, non ?…  

 

J’acquiesce avec un sourire et reçois le plus doux des baisers. Là, sur la tempe.  

 

- Avec toi, je n’ai peur de rien tu sais. Me murmure-t-elle avec assurance.  

 

En me tournant vers elle, je ne peux m’empêcher de penser à toi. Au risque inconsidéré que tu cours. En es-tu seulement consciente ?  

 

Prise dans son élan de tendresse, Hanako scelle ses lèvres aux miennes, s’abandonne contre moi.  

 

Sais-tu que l’homme qui a osé tout à l’heure te caresser l’épaule, glisser à ton oreille des mots que je préfère ne pas tenter de deviner, est le plus dangereux de tous ? Qu’il a sur les mains plus de sang que n’en ont fait couler toutes les organisations que nous avons combattues ensemble ?  

 

Ses bras se nouent autour de mon cou, me serrent avec ferveur, indicible amour. Je l’enlace à mon tour et approfondis le baiser.  

 

Je perds haleine lorsque j’imagine les moments d’intimité que vous partagez. Oh Kao, comment vais-je réussir à gérer cette soirée ? La recherche du microfilm, l’exécution de Kyô, la protection d’Hanako, la tienne…, nos retrouvailles. J’en tremble mon ange, et alors que je repousse doucement la femme qui partage ma vie depuis maintenant trois ans, je sais pertinemment que la seule chose que je crains dans l’énumération précédente, ce sont nos retrouvailles. Oui, je les crains autant que je les espère.  

 

Pour le reste, je m’en accommoderai.  

 

- Ako, sais-tu exactement qui a exigé la tête de Kyô ?  

 

Elle semble surprise de ma question et, tout en reprenant sa place sur le siège passager, secoue négativement la tête.  

 

- Non je ne sais pas. Mon père ne me dit jamais rien à ce sujet, tu sais bien.  

 

Elle a raison. Tosa Meini ne précise jamais qui est l’instigateur, pour qui nous travaillons, par contre, nous connaissons toujours les raisons de l’exécution, il met en effet un point d’honneur à justifier le meurtre. Justifier le meurtre, quelle ironie des mots. Et pourtant, Hanako et moi adhérons. Elle, par fidélité filiale certainement, pour cet amour inconsidéré et aveugle qu’elle porte à son père. Moi ?... Parce que… Je ne sais pas bien en fait… Parce que justice doit être rendue, probablement. D’une façon ou d’une autre. Et je suis l’autre.  

 

- Et si nous ne trouvons pas le microfilm ?  

 

La voiture de luxe s’insère dans la circulation plus que dense du samedi soir. Nous avons la ville à traverser.  

 

- Nous le trouverons. Jamais une information de papa ne s’est révélée fausse jusqu’à présent, non ?  

 

- C’est vrai. Mais c’est la première fois que je dois récupérer quelque chose avant de supprimer la cible.  

 

- Je suis certaine que nous trouverons le microfilm dans la statuette.  

 

- JE trouverai le microfilm ! Ai-je besoin de rectifier.  

 

Hanako me sourit et hausse les épaules. Je décrypte le message : « On verra bien ! »  

 

Le silence revient dans l’habitacle et le tumulte des voitures, la pseudo-concentration que j’affiche, me permettent de revenir vers toi. J’ai hâte… et laisse à nouveau la tempête m’envahir. Les vagues s’écrasent dans mon ventre, éclaboussent ma poitrine. Etranges impressions qui me donnent envie de me plier, de remonter les jambes sous mon menton, contraction viscérale fulgurante. Pourtant je refuse de lutter contre ce désagrément inconnu, bien au contraire, je me délecte de ces douleurs d’impatience et d’appréhension mêlées. Je vis.  

 

« J’ai hâte »  

 

Je gare la berline dans une rue adjacente à la propriété des Kyô ; cette rue sera idéale pour couvrir ma fuite si je décide de prendre la voiture, elle débouche sur un carrefour central qui m’offrira toutes les possibilités directionnelles et désorientera les poursuivants si d’aventure il y en a. Pour autant, j’ai prévu de disparaître à pied, les alentours regorgent de grandes propriétés et les parcs me fourniront plus d’endroits que nécessaires pour me cacher.  

 

J’ouvre la portière de ma cavalière, lui offre un sourire rassurant. Elle est sublime. Ne l’ignore pas. Et c’est un regard chargé de sous-entendus qu’elle me jette tout en se saisissant du bras que je lui tends.  

 

« Oh Hanako, tu es irrésistible lorsque tes yeux parlent pour toi ! »  

 

Juste un sourire échangé. Nous nous comprenons sans un mot.  

Nous longeons le mur immense délimitant la propriété des Kyô, j’en ai, bien évidemment, déjà fait le tour hier. Moult fois. Ce n’est pas un mur d’ailleurs mais une véritable enceinte défensive, il n’y manque que les miradors pour parfaire l’impression. Je devine un chemin de ronde au sommet et sans difficulté aucune, y détecte la présence d’un nombre important de yakusas. La partie ne sera pas aisée, c’est le moins qu’on puisse dire.  

 

En approchant de l’entrée, je remarque que tout a été fait pour rendre les lieux faussement accueillants : des gardes en costume traditionnel, portant hakama et haori, reçoivent les invités avec force ojigi, courbant têtes et échines dans ces saluts protocolaires. Des fleurs et des plantes vertes, d’une rare magnificence, ornent chacun des battants du coche et c’est dans la solennelle musique de Mahler que les hôtes sont reçus. Nous avons passé sans réelle difficulté le barrage des sentinelles avec l’invitation nominative d’Hanako, non sans une impressionnante vérification, et arpentons maintenant un des sentiers, vaguement éclairés par des lanternes, qui serpentent dans le jardin entourant la demeure. Celle-ci de l’ère Meiji se dresse devant nous. Imposante et sombre. Il est évident qu’elle ne possède pas le charme des palais traditionnels, et que l’influence occidentale l’a dépourvue des atouts architecturaux japonais. Malgré tout, la luxuriance du jardin typiquement nippon, entretenu dans le moindre détail, rehausse l’austérité de la grise habitation. Il est fort possible que dans la clarté du jour, l’harmonie naisse de ce mariage surprenant. Cependant, pour le moment, je ne reconnais pas, dans ce qui s’offre à mes yeux, l’expression du soi-disant « bon-goût » de notre hôte.  

 

Hanako marche à mes côtés, elle est aux aguets et vient seulement de détecter l’armée qui rôde un peu partout et qui profite de la complicité involontaire de la pénombre pour ne pas dévoiler sa face horrifiante aux invités. Oui, nous sommes épiés. Epiés, dévisagés, scannés, enregistrés, surveillés. Et je n’ignore pas, alors que nous montons les marches du perron, que c’est dans la gueule du loup que nous pénétrons sciemment.  

 

Grand dieu Kaori, où as-tu mis les pieds ?  

 

Ako connaît la plupart des convives présents, les salue avec déférence, me présente certaines grandes figures. Quelques uns me fixent avec intérêt, curieux de découvrir celui qui est parvenu à conquérir la fille du grand Tosa Meini. Mais la plupart m’ignorent avec courtoisie. Il y a là deux directeurs du Kabutocho (bourse japonaise), je ne suis évidemment guère surpris de rencontrer ces maîtres de la finance chez la plus grande fortune tokyoïte, idem lorsque nous croisons le ministre de l’Économie, du Commerce et de l’Industrie accompagné d’une femme qui n’est visiblement pas son officielle. Plus loin, quelques ténors du barreau discutent avec effervescence d’une affaire en cours, une coupe de champagne à la main. Et plus je sonde l’assemblée, plus j’y découvre des visages connus, des acteurs, des présentateurs de télévision, de grands industriels, tout ce beau monde, l’élite du pays, réuni ici par Saburo Kyô, à l’occasion d’un concert exceptionnel. Il ne faut pas être une flèche pour prendre conscience de l’influence qu’il a su développer dans tous les domaines : politique, entrepreneuriale, intellectuel, culturel, people... Tentaculaire avait dit Umi. Tentaculaire.  

 

Mais je m’interroge : combien de ces hommes sont tenus fermement par leurs parties sensibles par celui qui a su les mener là où ils sont maintenant ? Certes, ils lui doivent leur position, leur fortune, mais à quel prix ? Jamais ils ne pourront s’affranchir de Kyô, un dossier à charge étant inéluctablement monté à chaque nouvelle association, leurs travers sont traqués, leurs faiblesses découvertes et utilisées, leurs familles menacées. Et l’étau se resserre sur eux, jusqu’à étouffement, ils ne sont plus alors que des pions que le maître avance sur l’échiquier au gré de ses désirs et de ses nécessités personnelles. Qui pour échapper à la justice, qui pour permettre de nouvelles destinations à ses odieuses marchandises, qui pour démanteler un réseau rival, qui pour endormir des journalistes scrupuleux. Les raisons ne manquent pas et la pieuvre veille : rien n’ébranlera l’Empire. Rien.  

 

Toutes les informations, minutieusement collectées, méthodiquement amassées, sont bien à l’abri dans un microfilm. Fameux microfilm que je dois absolument retrouver avant de mettre un point final au règne incontesté de Saburo Kyô. Combien, parmi ceux que j’observe ce soir dans cette salle de réception, ont leur nom en caractère gras dans le fichier? Certainement plus que je ne pense. Mais peu m’importe. Je n’entre plus dans ces considérations là ; et il y a bien longtemps que la nature humaine ne m’étonne plus.  

 

Oh Kaori, il semblerait que tous tes efforts pour réveiller en moi un soupçon d’indulgence pour mes congénères homo-sapiens-sapiens se soldent par un cuisant échec. La triste réalité de leur vilénie ne cesse de me rattraper et de m’écœurer.  

 

Ako se plante devant moi, mettant un terme à mes divagations, et me propose une coupe.  

 

- Il n’est pas encore là.  

 

- Notre gus a la fâcheuse habitude d’arriver en retard on dirait.  

 

Je suis évidemment contrarié de ne pas te trouver au milieu de toutes ces têtes apprêtées, mes nerfs sont soumis à rude épreuve et, mine de rien, la crainte que tu ne m’échappes ce soir m’effleure.  

 

Impossible Sugar ! Impossible ! Ne me fais pas ça !  

 

Hanako s’éloigne de moi, subjuguée par un objet que je distingue à peine : une vulgaire poterie bleue et blanche en vitrine et qui semble l’aimanter. Je la suis sans grande conviction.  

 

- C’est quoi ce vase ?  

 

- C’est une pièce unique, regarde.  

 

Je connais l’engouement d’Ako pour tout ce qui est céramique. Cette passion, elle en a hérité de sa mère, tout comme la fabuleuse collection que celle-ci a amassée tout au long des années et des merveilleux voyages partagés avec Tosa.  

 

Je pose la main sur son épaule.  

 

- C’est un Ming ! La couleur est d’une pureté incroyable et par endroit, si tu observes bien, la céramique paraît presque transparente. Le matériau semble d’une qualité exceptionnelle. Oh lala ! Cette pièce est inestimable. Le décor est à la fois riche, sobre, délicat.  

 

- Je me doutais bien que cette faïence vous interpellerait.  

 

En nous tournant, nous découvrons avec quelque étonnement le visage de notre hôte. Avenant. Souriant. Exquisément courtois.  

 

- Mademoiselle Meini, c’est un honneur pour moi de vous accueillir ici ce soir, prononce-t-il avec affabilité, le corps se penchant légèrement dans la révérence respectueuse.  

 

Ako lui rend le salut.  

 

- Le plaisir est pour moi Monsieur Kyô. Mais laissez-moi vous présenter Okura Sato, mon fiancé.  

 

Il pivote alors vers moi, et me fixe quelques instants avant de s’incliner à nouveau.  

 

- Bienvenue chez moi Okura Sato. Avez-vous apprécié le concert ?  

 

- Evidemment. C’était magnifique.  

 

Pourquoi est-ce que je me trouve idiot avec ma voix empruntée ? Je ne suis vraiment pas à l’aise dans ce monde de superficialités. Comment fais-tu pour y évoluer ? C’est étouffant de contraintes, tellement contraire à ta nature véritable, tu n’es que candeur et simplicité, et lui suinte les manières compassées, semble surveiller le moindre de ses gestes et être pétri d’outrecuidance, uniquement préoccupé par les apparences. Ici tout est calculé, maîtrisé, orchestré. Je ne comprends pas. Il va falloir que tu t’expliques. Que tu m’expliques.  

 

Où es-tu d’ailleurs ? Qu’attends-tu pour apparaître ? Je reste calme et impassible mais, bien caché dans mon enveloppe corporelle, je hurle d’impatience, je me débats comme un diable avec cet impérieux besoin de toi.  

 

- Parfait ! Il est important pour moi que vous ayez apprécié le spectacle Monsieur Sato.  

 

SPECTACLE ? Tu parles que je l’ai apprécié le spectacle !  

 

Où est-elle ?  

 

Il se tourne de nouveau vers Hanako et se lance dans quelques explications concernant le cérame qu’elle admire. Je ne le sens vraiment pas ce type et son air guindé me déplait au plus haut point. Cependant, ce qui me gêne le plus chez lui, c’est l’expression de son regard, ses yeux semblent avoir un discours totalement opposé à celui de sa bouche et, lorsqu’il les a posés sur moi, j’ai senti l’inquisitrice curiosité me brûler le visage. Cela n’a certes duré que quelques instants mais l’attentive analyse de mes traits m’a incommodé. Et je n’aime pas être incommodé. Pas comme ça. Mais j’ignore encore pour le moment comment analyser cette gêne qui m’étreint.  

 

- Sachez mademoiselle Meini que j’ai toujours eu beaucoup d’admiration pour votre mère. J’ai d’ailleurs eu l’occasion et l’honneur de m’entretenir avec elle, il y a quelques années de cela, sur notre passion commune pour l’art antique. C’était une femme exceptionnelle. D’une incroyable culture.  

 

- Merci beaucoup Monsieur Kyô. Je sais aussi que maman jalousait secrètement votre incroyable collection de faïences chinoises, elle me décrivait avec beaucoup d’emphase les Ming et les Qing exceptionnels que vous possédez et que vous exposez régulièrement. Pour notre plus grand plaisir.  

 

Il sourit à la confession sincère d’Ako. Et je devine que ce sourire là, qui élargit la bouche carnassière, n’a rien d’inoffensif. Non, c’est un rictus de prédateur, une grimace maîtrisée qui dit à quel point la flatteuse remarque l’indiffère. Le jeu n’est pas là. Hein Saburo Kyô. Le jeu est ailleurs…  

 

Je profite de son échange de banalités avec Ako pour détailler son profil. Le grain de sa peau est d’une perfection absolue, qui ferait pâlir de jalousie plus d’une femme, il semble même imberbe. Est-il possible de se raser d’aussi près ? Je devine derrière l’apparence travaillée l’obsession de cet homme : maîtriser tout jusqu’au plus infime des détails. L’impression est encore renforcée par la chevelure longue et soyeuse disciplinée par le catogan, ainsi que par le costume à la coupe ajustée au millimètre et qui laisse deviner une stature moyenne mais une musculature tendue, nerveuse. Je ne lui trouve aucun charme, cela va sans dire. Et je n’ose imaginer ce que vous faites lorsque vous vous retrouvez seuls, et qu’il profite de l’intimité que tu lui offres. Depuis quand a-t-il des droits sur toi Kaori ? Et jusqu’où les lui octroies-tu ?  

 

Je le déteste déjà. Au-delà de tout… Et mes yeux conduisent mon inventaire de sa personne jusqu’à ses mains. Des mains de combattant à n’en pas douter, puissantes, larges, brunes et sèches. Leur contact doit être des plus rudes. J’en vomirais si je me permettais cette faiblesse.  

 

Je veux te voir !  

 

- Nous aurons certainement le plaisir de nous recroiser pendant la soirée, dit-il avec douceur en me considérant à nouveau. N’est-ce pas Monsieur Sato ?  

 

- Sans aucun doute.  

 

Je le regarde s’éloigner et Hanako se rapproche de moi, pose sa tête contre mon bras.  

 

- As-tu des frissons dans le dos toi aussi ?  

 

- Non…, pas dans le dos…, dans l’index.  

 

Nous suivons sa déambulation au milieu des convives et je constate à quel point tous les gens présents ici le craignent. C’est vrai qu’il se dégage de lui une autorité naturelle, mais le silence qui suit ses pas, les attitudes de soumission, empruntées aux meutes canines, laissent deviner une ferveur peu commune, qui touche à l’adoration. L’emprise est indéniable, elle paraît même sans limite et ne tolère certainement aucune résistance. La mission sera périlleuse. J’en suis convaincu.  

 

Au tout début, j’avais pris pour une étrange faiblesse de Kyô la concentration de toutes ses munitions dans un seul et même objet, le microfilm, mais il m’apparaît maintenant qu’en réalité le mystère qui entoure ledit objet, ne serait-ce que concernant son contenu, l’endroit où il est conservé, caché, comme un trésor inestimable, à l’image de ceux qu’il expose un peu partout, ne font qu’accroître la fascination qu’il exerce sur sa cour, le pouvoir qu’il développe sur tout un chacun. Et cela colle parfaitement avec le personnage. Il nimbe sous un voile de secret tout ce qui l’entoure, nul ne sait réellement démêler le vrai du faux, il donne ainsi une dimension d’inaccessible à son règne, presque romantique, ce qui réveille tous les fantasmes mais suscite aussi la crainte séculaire qu’inspire tout ce qui dépasse l’entendement, ce qui échappe à la compréhension, à la maîtrise. Du grand art !  

 

Je me sens soudainement nu, désagréable sensation dont je connais l’origine : je suis désarmé !  

 

- Ako, je vais continuer de faire le tour de la salle de réception. Je dois repérer l’endroit où sont cachées armes et munitions.  

 

- Notre complice les a mises sur la terrasse sud, tu te souviens ?  

 

Je la regarde et hausse les sourcils. Evidemment que je m’en souviens…  

 

- Chers amis ! Rappelle à l’ordre la voix que je connais maintenant parfaitement et qui nous fait tous deux regarder dans la même direction.  

 

Saburo Kyô a posé sa coupe et s’apprête à haranguer l’assemblée. Le discours de bienvenue, très certainement. J’en profite pour fausser discrètement compagnie à Hanako et me rapproche de la fameuse terrasse. M’appuie nonchalamment contre le mur. Ainsi placé, j’embrasse toute la salle des yeux et peux également m’intéresser à ce qui se passe à l’extérieur. Le balcon est désert d’ailleurs. Je pourrais sans problème m’y faufiler, trouver la poterie désignée par celle qui est infiltrée ici depuis de nombreuses années, prendre mes armes et regagner la salle sans que quiconque ne remarque mon absence. Cependant, je dois avant cela m’assurer qu’aucun garde n’est chargé de la surveillance de cette terrasse car mon instinct m’ordonne de ne pas bouger d’un iota et de continuer à scruter le peuple en servitude.  

 

- Je tiens avant toute chose à remercier maître Abbado pour la somptueuse, l’émouvante interprétation de la seconde symphonie de Mahler. Il nous a encore aujourd’hui fait la démonstration de son immense talent. Que dis-je ? Cela dépasse largement la notion de « talent », il est bien question ici de l’essence même du compositeur, saisie avec une incomparable justesse, avec une sensibilité qui pour tous les férus de musique reste inégalée. Je ne suis qu’un profane, certes, mais je peux dire que si je meurs ce soir, je mourrais heureux.  

 

Petite décharge électrique dans tout mon corps. Aurait-il, en plus du reste, des dons d’extralucide ?  

 

- Hélas, le Maître ayant d’autres obligations doit reprendre l’avion dans la nuit. Cependant, il m’a chargé de vous remercier tous en son nom pour l’accueil chaleureux que vous lui avez accordé et toutes les marques de respect et d’affection qu’il a reçues. Nous pouvons je pense l’applaudir ici aussi pour tout le plaisir qu’il nous a donné lors de ce concert unique.  

 

Les mains obéissent toutes dans la seconde, donnant l’impression d’avoir été mises en branle par un interrupteur invisible, là, bien caché dans la bouche de Kyô.  

 

Pathétique obédience !  

 

Je reste immobile, en proie à un malaise encore inexpliqué mais quelques frissons ont déjà envahi ma nuque et une tache brune, là, dans le coin externe de mon œil droit, attire mon attention. Pourquoi est-ce soudain le déluge dans tout mon corps ? Jusqu’à paralyser complètement mes membres, mon cou, mon cœur. Et je reste stupidement inerte quelques secondes avant de pouvoir reprendre possession de moi et d’enfin parvenir à me tourner légèrement, juste assez pour que cette tâche pénètre entièrement mon champ de vision.  

 

 


Chapitre: 1 2 3 4 5 6 7 8 9


 

 

 

 

 

   Angelus City © 2001/2005

 

Angelus City || City Hunter || City Hunter Media City || Cat's Eye || Family Compo || Komorebi no moto de