Chapitre 16 :: La réception ou le bon-mauvais plan de Kaori

Publiée: 02-02-07 - Mise à jour: 02-02-07

Commentaires: Alors, va t-elle enfin comprendre ? Pas comprendre ? Ou alors ?... Ou alors ?... Va t-on encore une fois de plus alimenter les quiproquos comme tout bon auteur à suspens ?... Une seule chose à répondre à toutes ces interrogations insoutenables d'intensité ... Lisez... Merci à tous ceux qui nous reviewent. Bonne lecture et surtout, n'hésitez pas à nous noyer sous des tonnes de commentaires. Kiss

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Auteur : Tamia  

Kaori en avait ouvert la bouche de saisissement ! Un disciple d’Eriko était le costumier de Bagheera ? Mais pour l’heure, ce n’était pas cela qui retenait véritablement son attention même si elle devait bien admettre que tous les chemins finissaient par la ramener au strip-teaseur. C’était incroyable ! Elle cherchait un moyen de rencontrer la star du Baiser du Dragon depuis des jours alors que sa plus vieille amie avait peut-être entre ses mains le passeport qui l’amènerait directement à la porte de l’homme !  

Non ! Mais qu’est-ce qu’elle racontait là comme bêtises ?! Il ne manquerait plus que cela ! Qu’elle aille voir son amie pour lui demander de l’aider à rencontrer ce mystérieux inconnu alors qu’elle avait ordonné à la bande de comploteuses de la laisser enfin mener sa vie comme elle l’entendait ! Même en ayant cette cruciale information, elle ne pouvait malheureusement pas en faire grand chose !  

Mais pour l’heure, ce n’était pas cela le plus important. Non. Ce qui retenait ici son attention plus que le reste était le costume de Zorro qui reposait sur le corps parfait de Bagheera. Elle voyait ce dernier s’en donner à cœur joie sur la scène se prenant effectivement pour la plus fine lame de tous les temps avec un savoir faire indéniable ! C’était comme s’il avait fait de l’escrime toute sa vie ! Avec le bémol qu’il en profitait pour s’effeuiller gaiement ! Et elle suivait avec délice les mouvements de ses mains sur son propre corps, ses doigts agiles qui ôtaient méticuleusement un à un les vêtements de ce justicier masqué.  

Et quand le mot « justicier » frappa son esprit, ce dernier refit un bon de quelques heures en arrière pour revenir à l’instant précis où elle avait ouvert le paquet pour découvrir une panoplie de Zorro pour adulte qui était destinée à son partenaire ! Et cet étrange costume fermés par des boutons à pression faciles à enlever se trouvait à présent sur le dos de Bagheera ! Mais comment cela était-il possible ? Comment un paquet destiné à Ryô avait bien pu se retrouver entre les mains de cet homme sur scène ? Un costume qui avait été créé par une connaissance d’Eriko ? Eriko… Ryô… Bagheera… Mal à l’aise tout d’un coup, elle se cala contre le dossier de sa chaise tandis que le strip-teaseur n’avait plus qu’une ou deux choses à enlever. Mais, pour la première fois depuis des semaines, elle n’était plus seulement subjuguée par cette obsession presque malsaine. Non, c’était devenu flou et âcre dans le fond de sa gorge car, bien qu’elle ne le réalisait pas réellement, elle percevait qu’il y avait un lien entre Ryô et la panthère…  

De son côté, Eriko ne se sentait plus ! Dieu que cet homme avait du charme, du charisme ! Il avait de plus un corps de rêve ! Un corps dont elle aimerait bien se servir de modèle pour une de ses collections ! Peut-être pourrait-elle convaincre Igor d’en toucher un mot à la vedette ? Il était si viril, si… Argh ! Elle en devenait complètement gaga ! (ndl : elle n’est pas la seule, hein les filles LOL) Il était bien un des rares hommes à avoir réussi à percer un peu sa carapace de femme intouchable ! Bon, OK, dans son fort intérieur, elle admettait que Ryô, à un moment (mais alors un très court moment), ne l’avait pas laissée totalement indifférente. Mais le spécimen sur la scène n’était rien en comparaison du nettoyeur ! (nda : si tu savais ma pauvre fille…) Que c’était bon de rêver ! Elle pensa avec peine qu’elle n’avait pas eu l’occasion de profiter d’une séance privée avec lui. Quand quelques jours auparavant elle avait enfin pris la décision de se lancer et de demander rendez-vous, elle avait appris avec une grande déception que pour le moment, il n’y avait plus de prises de rendez-vous pour des strips privés. Mais l’hôtesse n’avait pas voulu lui dire pourquoi. Enfin, elle pouvait toujours admirer les formes généreuses de l’homme sur scène. Ce qui n’était pas si mal en somme ! Mais elle enviait un peu Kaori d’avoir pu profiter des attentions du jeune homme. Elle était bien curieuse de voir l’objet de la fascination de son amie de plus près. Si quelqu’un comme Kaori, d’habitude si timide et réservée, avait succombé à son charme, quel genre d’homme ne devait-il pas être ! Et à voir son regard vide et extasié, elle ne s’en était pas encore remise la pauvre ! Même après tout ce temps, il avait suffit que son amie pose les yeux sur lui pour qu’elle soit transportée ailleurs. Bien sûr, Eriko ne pouvait pas savoir que la mine fermée de son amie reflétait en fait bien plus de préoccupations.  

Et puis la prestation de Bagheera s’acheva sur un dernier pas de danse qui le mena sur le bord de la scène à genoux, les bras ouverts comme pour embrasser tout son public. Un cri général s’éleva, demandant un second tour de la star ce qui lui arracha un indéniable sourire. Il aimait quand le public en redemandait. Cela signifiait que le spectacle lui avait plu. Même s’il savait parfaitement que sa plastique sans défaut était une des causes des rappels incessants. Par moment, il accordait à son public des minutes supplémentaires, lui accordant ainsi les rappels tant demandés. Mais là, le spectacle était planifié alors il ne le pouvait pas. Il salua et regagna sa loge pour se doucher et s’habiller. Il avait fini par s’avouer à lui-même que jouer la star pouvait être plaisant. Il aimait monter sur scène et être vu et adulé. Car l’adoration des spectateurs n’avait rien à voir avec le respect et la crainte qu’il inspirait en tant que City Hunter. Mais il soupira en songeant à la suite de cette soirée. Comme il s’agissait d’un gala de récoltes de fonds, beaucoup de personnalités et de notables étaient présents et, par conséquent, il y avait une réception après le spectacle et il était malheureusement tenu d’y participer. Comme il était une des « attractions » principales de la boîte, il ne pouvait s’y soustraire. Une bonne partie des dons ayant été données par des fans du strip-teaseur. Cela ne l’arrangeait pas du tout mais il n’avait pas trop le choix. Il allait devoir se montrer très prudent. Quoique… Il avait su tellement bien tromper Saeko et même Kaori qu’il ne risquait sans doute pas grand chose… Ca ne l’empêchait pas de souhaiter pouvoir disparaître dans un trou de souris pour les prochaines heures. Surtout qu’il allait devoir faire son entrée à côté d’« ELLE » ! Comme si passer toute une soirée à sourire bêtement à des gens qu’il ne connaissait pas, à faire des conversations sur des sujets dont il ignorait tout et à donner son opinion sur des évènements qui ne le concernaient pas du tout n’était pas une torture suffisante. Il était certain qu’« ELLE » en profiterait pour lui faire du charme, voire plus même. Un frisson d’horreur lui parcourut le dos. Le pire dans tout ça c’est qu’il ne pourrait même pas s’esquiver de la salle sans avoir de reproches de Sung par après. Son patron ne le lui pardonnerait jamais… Quoique ça en vaudrait peut-être la peine si ça épargnait ses fesses… Soupirant à en fendre l’âme, Bagheera pria pour un miracle.  

Le spectacle sur les plus grandes séries revisitées par les bons soins du Baiser du Dragon prit fin. Le propriétaire, Monsieur Sung, vint remercier les organisateurs d’avoir proposé que la collecte se fasse dans son établissement, remercia tous les bienfaiteurs et les donateurs (et surtout les donatrices !). Il annonça que la réception débuterait dans quelques instants le temps que son personnel mettent en place les derniers détails, et précisa également qu’il y aurait un bureau à disposition des personnes qui souhaitaient faire un don pour la recherche contre le cancer. Le rideau retomba sur la scène, les lumières se rallumèrent et le personnel commença à s’agiter.  

Kaori, elle, était ailleurs, totalement perdue dans l’incompréhension la plus totale. Eriko s’approcha alors de son amie et lui encercla les épaules.  

« _Et bien ma chérie ! Redescend donc un peu sur terre ! Je sais que ce gars est un vrai canon et que tu as eu l’immense chance de le voir de près, mais alors de très près, mais tout de même ! Et puis, il sera là dans quelques minutes alors, remet-toi ! Tu pourras le saluer ainsi ! Je suis sûre qu’il se souviendra de toi ! »  

A ce moment, Eriko vit son amie prendre une teinte rouge tomate. Elle leva un sourcil. Elle savait Kaori timide mais son instinct lui soufflait qu’il y avait autre chose. De la gêne ? De la peur ? Du remords ? Du désir… Elle sentait qu’il avait dû se passer quelque chose de particulier le jour de cette séance privée. Mais comme elle n’avait rien voulu expliquer et qu’elle les avait même sommées de la laisser en paix, elle n’avait pas osé l’interroger. Et elle le regrettait un peu. Parviendrait-elle à savoir un jour ce qui s’était produit entre son amie et la panthère noire ?…  

« _Allons nous rafraîchir le temps que la salle prenne forme. Les boissons sont gratuites ce soir ! Autant en profiter. »  

Quelques minutes s’écoulèrent durant lesquelles Kaori dégusta son cocktail sans oser poser de questions à Eriko au sujet de cet Igor Ivgonovitch. Elle en avait pourtant des tas sur le bord des lèvres mais elle ne pouvait pas mettre la puce à l’oreille de la jeune femme. Le monde afflua doucement et un fond musical très doux envahit les lieux. Les murmures des conversations se faisaient de plus en plus entendre. L’atmosphère feutrée indiquait bien qu’il s’agissait d’une soirée privée où se côtoyait du beau monde. Elle observait en silence les notables de la ville se saluer, se sentant mal à l’aise de se retrouver au milieu de cette « élite », tandis qu’Eriko identifiait en murmurant toutes les personnes que son regard croisait et qu’il serait bon qu’elle aille saluer. Même les petits commentaires de son amie n’arrivaient pas à lever la tension que Kaori sentait se développer entre ses épaules et dans son estomac. Elle était tellement nerveuse qu’elle ne pouvait pas empêcher ses doigts de se crisper sur son verre. Elle avait besoin d’un autre cocktail ! Elle se tourna pour se diriger vers le bar quand trois coups sourds résonnèrent dans la salle. C’est alors qu’une porte qui donnait sur les loges s’ouvrit pour laisser passer Monsieur Sung. Et quand il fut dans la lumière, tout le monde vit apparaître derrière lui les deux stars du cabaret : Bagheera tenant à son bras Zaza. Le silence se fit dans la salle et le temps se suspendit pour Kaori. Elle ne voyait que lui. Il avait passé des vêtements de ville. Pas de costume mais un pantalon de toile écru et une chemise lavande dont le col n’était pas fermé. Et sur ses épaules, une veste légère un peu plus sombre que le pantalon. Elle leva alors les yeux sur son visage et constata qu’il portait toujours un masque. Enfin, plutôt un demi-masque mais qui le rendait malgré tout méconnaissable. Mis à part qu’à présent, elle pouvait voir qu’il était brun.  

« Comme dans mon rêve », pensa t-elle. « A croire que je ne suis attirée que par les bruns… Et ce, même sans le savoir… »  

Mais comme il était beau ainsi ! Son charisme était indéniable. Et celui de sa cavalière aussi. Kaori la reconnut de suite. C’était la meneuse de revue numéro un. Le couple gagnant du Baiser en somme. Une pointe de jalousie monta en elle quand elle vit cette superbe femme se collait à Bagheera. Mais ce dernier se détacha d’elle après avoir visiblement vu quelqu’un qu’il connaissait. Il lui souffla un mot, sans doute pour s’excuser de l’abandonner, et se dirigea vers un coin de la salle. Kaori inspira. Maintenant qu’elle l’avait enfin près d’elle, elle devait absolument trouver le moyen de l’approcher et de lui parler. Elle le suivit des yeux et ce qu’elle vit failli lui causer un apoplexie !  

Ryô avait chaud. Et cela n’avait rien à voir avec la réception mais plutôt avec le corps qui se pressait sur lui. Zaza ne s’était pas avouée vaincue depuis son arrivée et ne cessait de le poursuivre de ses assiduités. Et comme il l’avait prédit, elle profitait à chaque seconde de la situation ! Bien qu’il essayait d’éviter ses mains baladeuses, il était déjà sûr de ne pas pouvoir s’asseoir de la soirée tellement elle lui avait pincé les fesses ! Et Sung qui prétendait ne rien voir de ce qui se passait sous ses yeux !! Ce traître ! Il allait le payer cher ! Mais en attendant il avait besoin d’une excuse urgente pour fausser compagnie à « sa cavalière ». Et sa prière muette fut entendue ! Il aperçut Saeko. Il prit quelques secondes pour admirer la jeune femme qui avait revêtu pour l’occasion une toilette très chic et très sexy comme elle en avait le secret. Il se pencha vers Zaza.  

« _Désolé, je vais t’abandonner. Je viens de voir Saeko.  

_Tu devais être mon cavalier ce soir Bagheera, s’insurgea Zaza qui n’avait pas oublié tout le temps que Bagheera lui avait consacrée quelques semaines plus tôt, tout en l’ignorant elle !  

_Non, il a juste été dit que nous devions faire « bonne figure » ! Ce qui est fait ! Je te laisse ! »  

Et il rejoignit son amie laissant une Zaza furibonde encore plus déterminée que jamais à le mettre ne serait-ce qu’une seule fois dans son lit !  

Bagheera se pencha sur Saeko et l’embrassa sur la joue. Cette dernière lui fit un gigantesque sourire.  

« _Alors ? Zaza te court toujours après, demanda-t-elle en jetant un coup d’œil en direction de la jeune femme qui frappait du pied tellement elle était en colère.  

_Tu n’as pas idée ! Heureusement que je t’ai vue ! Je ne sais pas ce qu’elle m’aurait fait sinon !  

_Allons Baghee, tu es un grand garçon capable de te défendre, plaisanta l’inspectrice bien qu’elle eut quand même pitié pour son ami. Elle l’aimait et le respectait beaucoup, et bien qu’elle ne connaissait pas sa véritable identité, elle ne lui souhaitait que le meilleur dans la vie.  

_Moque-toi ! Sais-tu que tu es ravissante dans cette robe ? Tu es venue sans cavalier ?  

_J’aurais bien aimé mais, hélas, si, j’ai un cavalier ! Et pas des moindres, soupira-t-elle en levant les yeux au ciel.  

_Tu m’intrigues ? Qui est venu avec toi ?  

_Regarde là-bas, fit-elle en pointant du doigt une direction. »  

En se retournant, Ryô vit le Préfet de Police qui discutait chaudement avec le maire de Tokyo ! Depuis qu’elle était revenue de son séjour à la montagne, Saeko l’avait invité plusieurs fois chez elle. Au cours de leurs conversations, elle lui avait parlé de sa famille aussi n’eut-il aucune difficulté à reconnaître l’homme qu’elle pointait discrètement du doigt. Il avait d’ailleurs un air de famille incontestable avec son amie.  

« _Ton père est venu dans une boîte de strip, s’étonna t-il. Je n’aurais jamais cru une chose pareille !  

_Et oui ! Il est resté le nez baissé durant tout le spectacle tellement rouge que j’ai bien cru qu’il allait exploser, ria t-elle. Mais il y a ici beaucoup de notables alors il se devait de venir. Au passage, je t’ai trouvé craquant dans ton costume de Zorro, fit-elle malicieusement en se collant à lui dans le simple but de taquiner son ami. »  

Il lui lança un regard charmeur avant de sourire. Il secoua légèrement la tête en se disant qu’il pourrait très bien avoir ce genre de relation avec elle dans « son autre vie » s’il faisait un petit effort…  

Kaori, quant à elle, se sentait désabusée et furieuse ! Mais que faisait cette bonne femme ici ? C’était pas croyable ! Elle était partout ! Même là où on ne l’attendait pas ! Et visiblement, Bagheera la connaissait et plutôt bien puisqu’il avait délaissé sa cavalière pour la rejoindre, elle ! Et elle vit l’homme embrasser la policière qui lui rendit un magnifique sourire. Elle n’avait d’ailleurs jamais vu Saeko sourire ainsi ! Et c’est avec une jalousie mal dissimulée qu’elle vit cette pimbêche se coller contre le strip-teaseur qui ne la repoussa pas. Il semblait d’ailleurs très à l’aise avec elle ! Non mais ce n’était pas vrai !! Pourquoi devait-elle toujours la rencontrer sur son chemin ? Pourquoi ? Elle avait été la petite amie de son frère, elle entretenait une relation des plus ambiguë avec Ryô et voilà que maintenant, elle se mettait également en travers de la panthère et d’elle ! Elle devait être maudite ! Il n’y avait pas d’autre explication ! Comment faire pour s’approcher de la star sans se faire repérer par l’inspectrice ? Et elle ne voulait pas être remarquée par elle ! Elle sentait ses espoirs tomber à l’eau…  

Kaori fut soudainement tirée de ses réflexions par une Eriko surexcitée ! Enfin, une Eriko normale en fait vu qu’elle était toujours dans cet état.  

« _Kaori, ma chérie, viens que je te présente Igor ! Il vient juste d’arriver ! Si on veut avoir une chance de lui parler c’est maintenant car dès que les autres invités le verront, il sera tellement accaparé que ce sera fichu !  

_Mais s’il est ton disciple, il te consacrera du temps, non ?  

_Il m’en consacre assez quand on travail ! A l’extérieur, il a le droit d’être le roi ! Il est très demandé car il a un talent monstre ! Allez ! Suis-moi, fit-elle en la tirant. »  

C’est ainsi que la jeune femme se retrouva devant un homme d’environ 25 ans, châtain, les cheveux court plaqué en arrière, les yeux marrons et le teint plutôt clair. Eriko lui sauta presque dessus.  

« _Salut mon mignon, fit-elle en le serrant dans ses bras avant de l’embrasser profusément sur la joue. Pendant que j’ai la chance de te tenir, je voudrais je présenter une grande amie.  

_Bonsoir Eriko. Je ne savais pas que tu serais-là.  

_J’ai reçu l’invitation en dernière minute. Mais laisse-moi te présenter Kaori. C’est une amie d’enfance. Kaori, voici Igor Ivgonovitch, un jeune créateur très prometteur que j’ai pris son mon aile ! Mais ça tu t’en es déjà rendu compte par toi-même ! Les costumes de Bagheera sont géniaux non ?  

_Euh, oui… Je suis enchantée de faire votre connaissance Monsieur Ivgonovitch.  

_Appelez-moi Igor. Alors comme cela, mes créations vous plaisent ?  

_Et bien, j’avoue que je ne suis pas tellement la mode mais j’ai eu l’occasion de voir plusieurs fois Bagheera sur scène et ses costumes ne me laissent pas indifférente.  

_Et sais-tu que c’est Igor aussi qui a conçu les masques ?  

_Vraiment ? Et bien, je vous félicite dans ce cas ! L’illusion est absolument parfaite !  

_Je vous remercie. J’ai eu bien du travail pour arriver à ce résultat. Mais j’en suis assez fier.  

_Mais tu peux mon chou, s’extasia Eriko. »  

A cet instant de la discussion, Kaori perdit le fil et son regard fut attiré par un coin de la salle. Elle venait d’apercevoir la silhouette d’un homme qui ne lui semblait pas inconnu. Elle ne le voyait pour l’instant que de dos mais elle était persuadée de le connaître. Il était plutôt grand, assez fin et avait les cheveux blonds qui lui tombaient sur les épaules. Il était en pleine discussion avec le patron du Baiser, Monsieur Sung. Elle sentit comme un malaise l’envahir. Et puis, il se tourna légèrement et montra à Kaori son profil. Son sang ne fit qu’un tour et se glaça dans ses veines !  

Non, ce n’était pas possible… Pas lui… Pourquoi était-il là ? Et s’il était là, peut-être que… Qu’IL était là lui aussi… Une panique sans nom s’empara d’elle. Elle se sentit comme prise au piège et regarda tout autour d’elle avec la crainte au corps de le voir, lui ! Mais elle avait beau chercher des yeux sa carrure imposante, elle ne le voyait nulle part. Les battements désordonnés de son cœur se calmèrent un peu et elle reporta son attention sur l’homme toujours occupé avec Sung. Elle n’arrivait pas à décoller ses yeux de lui alors qu’un film repassait dans sa tête. Un film douloureux sous une pluie battante…  

De leur côté Eriko et Igor discutaient gaiement quand tous les deux remarquèrent le visage fermé et pâle de Kaori qui semblait fixer un point à l’horizon. Intrigués, ils se tournèrent dans cette direction pour voir ce qui pouvait bien autant accaparer l’attention de la jeune femme. Le visage de la styliste se fendit d’un large sourire tandis que celui de Igor s’illumina. Ce dernier soupira d’aise. Enfin il était arrivé ! Il était temps ! Il n’attendait que lui mais il avait pris son temps pour se montrer. Soudainement, les traits du jeune créateur se crispèrent. Pourquoi cette fille ne cessait-elle pas de le fixer ainsi ? Elle était tout à coup toute blanche ! Serait-elle une de ses admiratrices ? Ou même plus ? Elles étaient toutes folles de lui ! Et il semblait que cette Kaori n’échappait pas à la règle ! Et cette constatation ne lui plaisait guère. Il ne supportait pas qu’on s’approche trop de lui ! Ou alors, c’est qu’elle était simplement impressionnée de le voir ici. Toujours était-il qu’il n’aimait pas. C’est alors que cette fameuse personne dut se sentir observée car elle se tourna vers le petit groupe…  

Kaori paniqua. Non ! Elle ne voulait pas qu’il la voit ! Après tout, lors de ce fameux après-midi de cauchemar, ce gars l’avait bien regardée en face durant quelques secondes. Il serait peut-être en mesure de la reconnaître même si cela remontait à plusieurs mois maintenant. Rapidement, elle se cacha derrière Eriko qui eut des yeux ronds. Mais, qu’est-ce qui lui prenait soudainement ? Pourquoi agissait-elle si bizarrement. Igor eut la confirmation qu’il se passait quelque chose de louche. Il sentit le poison de la jalousie monter en lui. Jusqu’à présent, il avait trouvé cette jeune femme sympathique mais là, elle l’était beaucoup moins ! Il se détourna totalement des deux femmes quand il rencontra le regard de son ami. Celui-ci eut un large sourire et fit un signe de la main qui demandait à Igor de le rejoindre.  

« _Veuillez m’excuser, mesdemoiselles, mais le devoir m’appelle, fit-il dans une légère révérence. »  

Puis il s’éloigna gaiement.  

Kaori en profita pour reculer et se mettre dans un coin sombre. Cette soirée était en train de virer au cauchemar ! D’abord Saeko et maintenant lui. Eriko s’approcha de son amie et colla son nez contre le sien, le regard accusateur et scrutateur.  

« _Dis-moi toi ! J’ai comme l’impression que tu me caches quelque chose d’important ? Tu es vraiment bizarre tout à coup ! Qu’est-ce qui te prend ?! Tu as de drôles de réactions depuis 5 minutes ! Je sais que tu nous as expressément demandé de ne plus nous mêler de tes affaires, mais là, je ne sais pas si dois obéir ! Vas-tu te décider à me raconter ce qui t’arrive ? Ou va t-il falloir que je te tire les vers du nez comme à chaque fois ? C’est lassant d’ailleurs ! Alors ? J’attends ! »  

Son ton ne soufflait aucune réplique ! Une sueur froide s’empara d’elle. Elle ne pouvait pas lui dire la vérité. Hors de question ! Mais elle avait peu de temps pour inventer une raison à son malaise. Mais qu’est-ce qu’elle pouvait bien lui raconter ? Qu’elle venait de voir se matérialiser devant elle le « fiancé » de Ryô ? Le fameux « Chéri » ? L’homme aux vêtements bariolés ? Quoique, là, il n’avait absolument pas revêtu de vêtements rococo !! Non, il était même extrêmement élégant dans son beau costume noir ! Très viril même ! Et cette constatation lui causa un second choc ! En effet, la seule et unique fois où elle l’avait vu, il n’avait pas le comportement d’un homme viril mais bien d’un gay plutôt largement efféminé ! Alors le voir si « normal » c’était imaginer Ryô dans les bras d’un…homme… Une image de Ryô et lui dans un lit se matérialisa et elle en eut la nausée ! Son cœur se fit si lourd qu’elle fut à deux doigts de tout balancer à Eriko pour se soulager de ce poids. Mais elle se retint de justesse. Ce n’était pas à elle de révéler ce secret mais bien à Ryô d’avoir le courage de dire la vérité et d’avouer son homosexualité. Elle reporta à nouveau son attention sur lui. Peut-être que son amie pourrait lui dire qui il était ? Elle savait juste qu’il se nommait Vlad…  

« _Je vais bien, ne t’inquiète pas. C’est juste que… Comment te dire… Quand j’ai vu cet homme là-bas, j’ai eu comme une sensation de déjà vu et je ne me suis pas sentie bien. Je sais que je connais ce type mais je n’arrive pas à me souvenir exactement de où. Dis-moi, toi qui connais tellement de monde, sais-tu qui il est ? »  

Kaori espérait que la flatterie détournerait l’attention d’Eriko. Elle adorait qu’on lui rappelle qu’elle avait plein de relations ! Et son subterfuge fonctionna.  

« _Montre-moi de qui tu me parles ?  

_Et bien de l’homme pour qui Igor nous a lâchées, fit-elle en tentant de mettre un peu d’humour dans son ton. Tu vois, le grand blond moustachu ? »  

Eriko se tourna et vit Vlad. Elle sourit puis regarda à nouveau son amie avec une expression de profonde désolation.  

« _Ma chérie, parfois, tu me désespères ! Comment peux-tu ne pas savoir qui est cet homme ? Pas étonnant que tu aies eu cette sensation de déjà vu car je suis persuadée que tu as dû le voir soit à la télé, soit sur des affiches publicitaires ou même dans un magasine ! C’est Vladimir Zlopslinsky voyons !  

_Qui ça ?  

_Alors là, tu vas réussir à me fâcher ! Vladimir Zlopslinski ! Le danseur étoile russe ! Il est à l’Opéra National de Tokyo depuis quelques temps maintenant ! Tu devrais revoir ta culture ma chérie !  

_Mais que fait un danseur étoile dans un cabaret ? C’est pas vraiment sa place ! On ne joue pas le « Lac des Cygnes » ici !  

_Mais n’oublie pas qu’il s’agit d’une collecte de fonds ! Et puis, en plus, il est l’entraîneur de Bagheera ! Tu imagines ? Un des plus grands danseurs étoiles est le prof de danse de notre belle panthère ! Oh ! Tiens, je vois Mani ! Excuse-moi quelques minutes, je reviens ! »  

Et elle planta Kaori qui était toute abasourdie.  

Elle resta assise dans l’ombre comme une cruche, la bouche un peu ouverte de saisissement. Et son esprit quelques peu embrumé passa en mode ordinateur supra sophistiqué.  

« Je comprends maintenant pourquoi il y avait tous ces trophées de danse dans la vitrine, chez Vlad… Un danseur étoile… Ryô est amoureux d’un danseur étoile… Lui qui ne voulait même jamais aller danser avec moi. Voilà qu’il plonge tête baissée dans le monde du classique, des tutus et collants serrés et des petits rats de l’Opéra… Tous mes repères tombent à l’eau. L’imaginer gay était déjà dur à supporter mais imaginer qu’il évolue désormais dans ce monde-là c’est la cerise sur le gâteau… Respire Kaori… Calme-toi et réfléchis un peu… Récapitulons… Igor est le costumier de Bagheera. Il est visiblement ami avec Vlad qui est à la fois l’entraîneur du strip-teaseur et le petit-ami de Ryô. Le fameux « Chéri »… Ce qui signifie que Ryô doit forcément connaître Bagheera et toute sa bande… Tout s’explique… Je ne parvenais pas à comprendre pourquoi le costume de Zorro de Bagheera était arrivé à la maison. Mais maintenant je sais… Enfin, du moins, en gros ça doit être ça : Igor avait fini le costume et devait le faire essayer à Bagheera mais pour une x raison, il n’a pas dû le trouver. Alors il a sans doute pensé que son prof serait en mesure de lui porter l’habit. Mais Vlad devait être trop occupé pour s’en charger ou était aussi introuvable, alors Igor s’est tourné vers Ryô sachant parfaitement qu’il verrait à un moment ou un autre soit Vlad soit Bagheera… Et si Ryô s’est montré si brusque avec moi, c’est parce qu’il avait peur que je ne découvre le pot aux roses ! Que je comprenne tout vu qu’il sait parfaitement que je suis déjà allée au Baiser du Dragon… Oh Mon Dieu ! Peut-être même a t-il su que j’avais assisté à une séance privée ? Oh Seigneur ! C’est un cauchemar… On m’a porté une malédiction, je ne peux pas l’expliquer autrement… »  

Mais sa raison reprit le dessus.  

« Mais non voyons. S’il l’avait su, je m’en serais aperçue. Il ne me l’aurait sans doute pas dit pour ne pas révéler son secret mais il me l’aurait fait sentir, je le connais trop bien… Mais pourquoi m’avoir mentie sur la profession de Vlad ? Il aurait pu me dire qu’il était danseur ! Enfin « danseuse » puisque « Chéri » est sensé être une femme au lieu de m’inventer cette histoire de magasin de parfums naturels ! Il m’a donc mentie sur tous ces jours passés loin de l’appartement… Il n’a pas travaillé pour aider son cher et tendre… Alors quoi ?… Oui, il avait sans doute dû aider à la mise en place des spectacles de Bagheera. A bien y réfléchir, Bagheera a fait son apparition un peu après que je ne découvre la vraie personnalité de Ryô… Mais pourquoi Ryô n’est-il pas là ? »  

Elle regarda à nouveau autour d’elle et ses yeux se reposèrent sur Saeko.  

« Humm, il ne voulait pas prendre le risque d’être vu et reconnu. Il a dû apprendre qu’elle serait là… Mais quel rôle a t-il tenu dans tout ce cirque ? Ryô est un nettoyeur, un garde du corps pas une ballerine ! A moins qu’il ne soit son garde du corps justement ! Bagheera déclenche des émeutes ! Oh la la ! Dans ce cas, ça craint pour moi ! S’il est dans les parages et qu’il me voit, c’est la cata ! Bon OK, je n’aurais fait que suivre Eriko à une soirée, je pourrais toujours prétendre au traquenard. Mais il serait forcé de me raconter le pourquoi de sa présence en ces lieux… Et je ne suis pas sûre d’être prête à l’entendre ! Il faut que je parte d’ici ! Ca devient trop dangereux de rester ! Je vais devoir trouver autre chose pour m’approcher de Bagheera ! »  

Dépitée, elle reporta son attention sur Vlad et Igor. Les deux hommes discutaient à tambour battant. La conversation semblait bien animée…  

Igor se précipita sur Vlad et lui donna un baiser tonitruant sur la joue ce qui fit rire Vlad.  

« _Eh ! Doucement mon chou ! Il faut se tenir en public !  

_Pff ! C’est toi qui me dis ça ! répondit Igor en levant un sourcil interrogateur.  

_Oui, je te l’accorde, ça peut surprendre mais il y a ce soir parmi les invités le maire de Tokyo et le Préfet de Police Nogami… Faut parfois savoir s’effacer ! Au passage, je suis désolé, je n’ai pas vu le passage de Bagheera. J’étais pris ailleurs, une urgence à l’Opéra mais heureusement rien de grave. Je n’ai donc pas pu me réjouir de son beau petit corps moulé dans la peau de Zorro ! Quel dommage, fit-il malheureux d’avoir raté une telle occasion ! »  

Le visage d’Igor se contracta alors.  

« _Arrête un peu de baver comme un bouledogue devant lui ! Ca fait désordre ! J’admets qu’il est plutôt bien foutu mais faut pas non plus tomber dans le over ! Et puis tu as dit toi-même qu’il n’était pas intéressé !  

_Oh la la ! Qu’est-ce que tu me fais là ? C’est une crise de jalousie ou quoi ?  

_Je ne suis pas jaloux ! »  

Puis il se tourna un peu pour bouder. Vlad en resta coi ! Non, mais, il ne rêvait pas ! Il était bel et bien en train de lui faire une crise de jalousie ! Alors cela voudrait-il dire que ?… Ca alors ! Il n’avait pas remarqué que le jeune styliste en pinçait pour lui ! C’était une sacrée révélation ! Il savait parfaitement qu’Igor était gay, bien que ça ne se voyait pas, mais il ignorait qu’il lui plaisait. Un sourire se dessina sur ses lèvres en constatant que cette idée n’était pas pour lui déplaire… Et Igor remarqua que Kaori avait toujours les yeux rivés à Vlad. Sa colère monta d’un cran.  

« _Et puis, moi, je ne m’intéresserais pas à une folle qui a même des tickets avec les femmes, répliqua t-il, vexé. C’est dégoûtant !  

_Des tickets avec des femmes ? Qu’est-ce que tu me chantes là ?  

_Regarde par toi-même, la brunette aux cheveux courts dans le fond à droite ! Elle ne cesse de te dévorer des yeux comme une friandise ! »  

Vlad chercha cette fameuse jeune femme du regard…  

Kaori, bien qu’elle fut totalement omnubilée par Vlad, réalisa qu’il ne tarderait pas à la voir. Instinctivement, elle se leva et s’éloigna le plus rapidement possible vers les toilettes…  

Vlad balaya la zone indiquée par son ami mais ne vit rien.  

« _Tu as bu combien de verres depuis ton arrivée ? Il n’y a pas de brunette !  

_Quoi ? »  

Igor virevolta et scruta la salle du regard mais dut admettre que c’était vrai.  

« _Mais, je t’assure qu’elle était encore là il y a 30 secondes !  

_Mais bien sûr ! Chercherais-tu un prétexte pour te quereller avec moi, demanda t-il en s’approchant dangereusement de Igor.  

_Et pourquoi donc ? Y’a pas de raison ! Va plutôt rejoindre « ta star » puisque, de toute façon, tu ne vois qu’elle ! Sur ce, bonsoir ! »  

Et c’est draper de sa dignité qu’il planta Vlad en beauté. Ce dernier secoua le tête, moqueur. Et oui, pas de doute, c’était surtout avec Igor qu’il avait un ticket ! Mais il avait raison, il devait aller saluer Ryô…  

Kaori revint presque à pas de loup. Ouf, tout danger semblait pour le moment écarté. Elle devait trouver Eriko pour lui dire qu’elle s’en allait, qu’elle en avait assez et qu’elle s’ennuyait. Elle ne pouvait pas prendre le risque de rester davantage. Elle jeta tout de même un regard vers la panthère dans l’espoir qu’elle pourrait encore l’approcher mais c’était peine perdue. Il était à présent en compagnie de Vlad et de Saeko. Elle l’admira une dernière fois. Il se tenait avec élégance, une main dans une poche de son pantalon, un peu comme le faisait Ryô. Son cœur se serra. Il était si près d’elle et pourtant si loin en même temps. Il parlait, il souriait, il riait même parfois. Tant de malchance ! L’objet de ses désirs, de ses convoitises était là et elle ne pouvait rien faire ! Quelle frustration ! Elle vit alors les trois amis, car c’est ce qu’ils étaient vraisemblablement, s’éloigner. Bagheera sortit alors la main de sa poche pour la poser sur le dos de Saeko, qu’elle eut envie de fusiller sur place, afin de la guider. Et une chose attira l’œil exercé de la jeune nettoyeuse : en ôtant sa main de sa poche, un objet en était tombé. Précautionneusement, elle s’approcha afin de voir de quoi il s’agissait avant qu’une autre personne ne remarque cet objet. Elle s’agenouilla et ramassa ce qui ressemblait à une carte bancaire. Elle y porta plus d’attention. Son cœur s’arrêta de battre. La salle fut alors plongée dans le noir et seul un spot lumineux éclaira Kaori comme si elle venait d’être frappée par la grâce de Dieu. Des chœurs d’anges apparurent et on les entendit lancer des « Alléluia, alléluia, alléééélouuuuiiaaaa ». Puis tout redevint normal. Elle tenait dans ses mains le pass magnétique qui permettait d’ouvrir toutes les portes du Baiser du Dragon…  

Il ne lui fallut pas une minute pour trouver Eriko, lui dire qu’elle partait sans laisser le temps à son amie de la convaincre de rester. Elle rentra chez elle plus vite que Speedy Gonzales, se débarrassa de sa robe, de son maquillage, se doucha rapidement, enfila un pyjama moelleux et s’enferma dans sa chambre en tenant entre ses mains la carte magnétique comme s’il s’agissait du Saint Graal ! Enfin… Finalement, Dieu était avec elle…  

Il lui fallut trois jours de concentration et de prise de courage pour oser s’approcher de la porte qui se trouvait dans la petite ruelle. Cette porte qui était l’entrée des artistes. Elle espérait de tout cœur que personne ne s’apercevrait qu’elle était une intruse. Et surtout, que Ryô ne traînait pas dans les parages. Jusqu’à présent, elle ne l’avait ni vu ni senti sa présence. Ce qui était plutôt bon signe. Elle inspira et s’avança. Toute nerveuse elle passa la carte dans le lecteur, et ô bonheur, la porte s’ouvrit sans protester. Elle entra prudemment, comme si elle entrait dans un sanctuaire, et jeta un coup d’œil autour d’elle. Le garde à la porte la regarda d’un drôle d’air mais en voyant qu’elle avait un pass et devant le gentil sourire nerveux de Kaori, il ne se méfia pas. Il lui rendit son sourire et la vit continuer son chemin tout en se disant qu’elle était un très beau brin de fille. Kaori fut alors prise dans l’effervescence des coulisses d’un spectacle. Tout le monde courait en tous sens, criait, ordonnait. Bref, ayant participé à des défilés de mode, rien qu’elle ne connaisse déjà. Mais il lui fallait trouver la loge Bagheera. Comment faire sans se faire remarquer ? Elle vit alors un costume plié posé sur une tablette. Elle s’en empara et arrêta une danseuse.  

« _Excusez-moi. Je suis nouvelle et on m’a demandé de remettre ça à Bagheera. Pouvez-vous m’indiquer où se trouve sa loge ?  

_Euh, oui, c’est celle du fond, là-bas. Vous ne pouvez pas vous tromper, il y a son nom sur la porte.  

_Merci. »  

Enfin, elle touchait au but. Elle se trouve très vite devant la dite porte. Son cœur se mit à cogner si fort qu’elle en eut un vertige. Elle inspira alors plusieurs fois. Elle devait se détendre. Bientôt elle serait face à lui et elle pourrait comprendre ce qui se passait, lui poser les questions qui avaient envahies son esprit et donner une explication à la réaction indécente de son corps sous les doigts de cet homme dont elle ne connaissait rien, même pas le visage ! Avec un peu de chance, elle pourrait peut-être découvrir ses traits. Elle avait peur mais elle n’avait pas le choix ! Si elle ne voulait pas devenir totalement folle à le voir partout, à halluciner comme une démente, elle devait avoir une sérieuse conversation avec lui…  

« _Bagheera, en scène dans deux minutes ! Bagheera, deux minutes, proclama soudain une voix à travers le haut-parleur. »  

Kaori sursauta à cette annonce et pesta intérieurement. Elle était arrivée juste au moment où la Panthère allait donner son spectacle ! Il devait déjà être dans les coulisses derrière la scène. Maintenant elle allait devoir attendre et espérer que personne ne découvre qu’elle était là clandestinement. Lâchant un juron elle ouvrit la porte de la loge sans frapper et entra. Quelle ne fut pas surprise d’y trouver quelqu’un ! Et pas n’importe qui, Bagheera en personne ! Il lui tournait le dos et semblait se battre avec les boutons de son costume. Sur la commode à côté de lui Kaori vit un petit tas de tissu et son cœur fit un bond dans sa poitrine quand elle reconnut le masque de la star. Elle allait enfin connaître son visage !  

« _Vlad ! C’est toi ? Aide-moi ! Ces putains de boutons refont des leurs et je rentre en scène dans moins de deux minutes ! »  

N’attendant pas la réponse de son « professeur », il se retourna… 

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