Chapter 8 :: Sensation, sentiment, impression........

Published: 03-12-09 - Last update: 29-04-11

Comments: Hello tout le monde! Je sais ce n'est pas cette fic que vous attendiez, mais à défaut de rien mieux vaut celle-ci.... non! J'ai pas eu le temps de revoir mon chap "d'aussi profond" donc je maje le chapitre de cette fic car lui est prêt. On commence avec ce chapitre à entrer dans le vif du sujet. Je ne vous en dis pas plus, vous comprendrez ce que je veux dire après lecture. Un grand merci pour vos encouragements. Je vous dis bonne lecture et à bientôt! Bisous.

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Kaori allait franchir le seuil de la porte de la cuisine lorsqu'elle sentit de nouveau cet air glacial la transpercer de part en part et caresser tout son corps faisant naître en elle un sentiment de peur qui la figea sur place. Elle osa relever la tête et reporta son regard sur ses amis qui avaient pris place sur le canapé autour de la table basse. Ils parlaient et riaient, ils semblaient heureux. A ce constat et malgré le froid apparent qui la gagnait, elle ne put s'empêcher de sourire. Ce soir, en cette soirée festive ils étaient des gens normaux, profitant d'une soirée pour se retrouver entre amis. Elle porta son attention sur leurs visages sereins et souriants. Ils semblaient tous heureux, c'était si rare d'être regroupés ainsi pour des occasions autres que celles de missions et du milieu. L'air ambiant était à la fois si léger mais extrêmement lourd pour Kaori.  

Elle s'apprêta à les rejoindre sourire aux lèvres aux lèvres, lorsque son sang se figea dans ses veines. Elle fut une nouvelle fois comme paralysée, happée par cet étrange sentiment qui la laissa tremblante. Son sourire disparut de ses lèvres et ses yeux s'écarquillèrent d'effroi. Ils devinrent subitement sans vie. C'était plus qu'un froid qui la parcourait, un sentiment d'extrême solitude mêlé à une agonie sans fin la laissant chaque fois un peu plus livide. C'était comme ci elle avait porté l'espace de quelques secondes le poids du monde, non la tristesse du monde sur ses épaules, comme ci tout cela la traversait. Son coeur se mit alors à cogner de grands coups dans sa poitrine à lui faire mal. Sa respiration, ..... sa respiration devint pénible, saccadée, comme si l'air qui flottait tout autour d'elle se refusait à ses poumons.  

Dehors, un éclair déchira le ciel. Paniquée, le souffle court, et alors qu'une autre vague de froid s'empara d'elle la laissant toute tremblante, elle lâcha le plateau qui chuta violemment à ses pieds, sur le sol brisant les verres et faisant un brouhaha de tous les diables ce qui attira l'attention de ses amis sur elle et surtout l'attention de Ryo qui alla la rejoindre. La sensation qu'elle ressentit sur l'instant la déstabilisa. C'était le genre de sensation qui vous laissait presque sans vie et qui éveillait en vous un frisson glacial et angoissant, un sentiment de peur, une peur irraisonnée et prenante qui vous engourdissait.  

Pourquoi son coeur s'était-il affolé ainsi pour se serrer ainsi à lui faire mal?  

Pourquoi avait-elle si froid alors que le chauffage était allumé et que la température de la pièce était de 25 degrés?  

Et cet éclair........  

De plus, de tout ce qui l'entourait, elle ne percevait que les cognements lourds et désordonnés de son coeur mêlés au tic tac de la pendule qui résonnait en elle comme pour lui signifier que le temps était compté et qu'il s'écoulait sans qu'elle ne puisse rien faire. Pourquoi elle avait l'impression que le temps s'écoulait différemment? Différemment dans le sens où tout prenait du relief. Un sorte de compte à rebours, mais un compte à rebours à quoi? Plus elle en prenait conscience et plus sa réalité se transformait.  

Elle aurait aimé se fermer à tout ça, ne rien ressentir, ni cette peur, ni ce froid, ni cette sensation oppressante qui virevoltait tout autour elle, la caressant, s'immisçant en elle pour ne plus la quitter.  

Pourquoi éprouvait-elle cette peur? Et surtout pourquoi était-elle la seule à la ressentir?  

Sa gorge devint subitement sèche, son audition se troubla, son rythme cardiaque s'accéléra, et ses pensées se brouillèrent. Cette angoisse, cette peur lancinante la rongeait intérieurement. Elle était incapable de se l'expliquer, incapable d'y mettre une raison valable. Cette impression, cette sensation invisible qui rodait autour d'elle et qu'elle ne parvenait pas à définir, il fallait qu'elle la fasse cesser sur le champ.  

Mais comment?  

Elle devait retrouver le contrôle de son corps et surtout de ses émotions. Oui, garder le contrôle et elle savait qu'avec Ryo dans les parages elle y parviendrait. Elle baissa alors la tête et se retrouva entourée par des dizaines de morceaux de verres alors que Ryo et Miki se présentaient face à elle.  

Rien chez Kaori ne laissa transparaître cette peur, ni ce sentiment d'oppression. Son comportement ne dénotait pas de d'habitude. Oui rien ne trahissait le trouble grandissant et oppressant qui l'habitait  

_Comme je peux être maladroite ! s'excusa celle-ci gênée en se baissant et en relevant la tête pour croiser le visage rassurant de Miki.  

_Kaori ça va ? s'empressa de lui demander Ryo face à son teint pâle.  

Il se tenait devant elle mais elle ne semblait pas le voir, elle était comme tétanisée, absente et distante. Elle portait son regard à l'endroit même où Ryo s'était tenu quelques secondes plutôt, absorbée par cet impression de flottement. Elle ne voulait pas gâcher cette soirée, pas à cause d'une sensation, d'un ressentir, d'un pressentiment.  

_Kaori............ s'inquiéta celui-ci face à son absence de réponse. Kaori répéta Ryo en agitant sa main devant elle mais il n'eut aucune réaction de la part de sa partenaire. Intrigué, il posa sa main sur son épaule et ce n'est qu'à cet instant précis qu'elle sortit de sa torpeur et qu'il capta son attention. Kaori........  

Lentement elle tourna sa tête et plongea son regard perdu dans celui de son partenaire. Il semblait inquiet et Ryo n'aima pas cet instant de flottement qui les enveloppa tous deux. Elle le regardait comme s'il lui était étranger.  

_Hm........ Ryo..... fit-elle d'une voix incertaine en reportant son attention sur lui avant de regarder de nouveau vers l'endroit où celui-ci s'était tenu quelques secondes plutôt et qui avait capté si longtemps son attention. Ses yeux traduisaient l'incompréhension, mais cette lueur d'incompréhension qui en avait pris possession intrigua Ryo.  

_Ça va, tu es sûre? insista celui-ci. Il l'enveloppa d'un regard tellement doux que Kaori se sentit obligée de le rassurer.  

_Oui, je suis tellement maladroite! Le plateau m'a glissé des mains dit-elle en se baissant et en regardant le sol où jonchaient des bouts de verres.  

A présent elle avait peur de relever la tête et de balayer la pièce de son regard. Elle trouva sa réaction tellement stupide qu'elle sourit de sa bêtise, tout en secouant la tête afin de chasser cette impression d'oppression qui la gagnait. Elle n'avait même pas remarquer que Ryo tenait bien fermement sa main dans la sienne et qu'il la serrait tout en lui caressant de son pouce la paume.  

_Je vais chercher le nécessaire pour nettoyer leur dit alors Miki pour les laisser tous les deux face au geste plein d'attention de Ryo. Celle-ci ne put d'ailleurs s'empêcher d'esquisser un sourire.  

_Hors de question, tu es une invitée ce soir ! lui répondit alors Kaori, j'ai fait les dégâts alors je vais tout ramasser et tout nettoyer. Reprends-ta place !  

Elle s'apprêta à se relever lorsque son regard se posa sur sa main, main que son partenaire tenait fermement. Elle fit alors glisser son regard sur lui en rougissant puis sur leurs mains. Ryo ne comprit pas pourquoi elle rougissait ainsi. Ce ne fut que lorsqu'il suivit du regard le regard de son ange qu'il comprit la raison de ce soudain malaise et surtout de cette jolie teinte rose qui avait gagné son visage. Ils se relevèrent tous deux puis lentement Kaori dégagea sa main. Ryo ne semblait pas vouloir la lâcher. Ses doigts étaient terriblement glacés et tremblants. Il mit cela sur le compte de l'anxiété et aussi et surtout sur l'effet qu'il lui faisait. Le fait d'être si proche d'elle devait la rendre fébrile tout comme elle le rendait nerveux.  

_Hm...... tu veux de l'aide ? se proposa Ryo.  

_Non, tu peux rejoindre les autres.  

La vérité c'est qu'elle avait besoin de se retrouver seule, seule pour faire le point et remettre ses idées en place. Seule pour calmer son coeur et ses battements qui lui donnaient l'impression de résonner jusque dans sa tête, seule pour pouvoir respirer.  

Sans rien ajouter, elle quitta le salon et gagna la cuisine. Elle prit bien soin de refermer la porte derrière elle et elle alla se planter devant le levier sur lequel elle prit appui. Elle posa ses mains tremblantes à plat et serra le plan de travail avec force. Elle ne comprenait pas ce qui venait de se passer, ce qui lui arrivait. Pourquoi son coeur s'était-il affolé? Pourquoi ce bourdonnement dans sa tête ? Pourquoi ce sentiments d'oppression? Elle laissa tomber sa tête vers l'avant et ferma les yeux. Elle devait respirer. Elle avait du mal tellement son coeur battait fort dans sa poitrine, tellement il se sentait pris par ce malaise, pris dans un tourbillon, dans un vertige étouffant qui risquait d'avoir raison d'elle. Elle respira profondément pour tenter de se calmer et de réguler sa respiration mais surtout pour endiguer cette peur croissant qui ne faisait que prendre plus de place à chaque fois, à chaque nouvelle attaque. Cette boule qui s'était formée dans son ventre ne semblait pas vouloir lui laisser un instant de répit. Elle se servit alors un verre d'eau qu'elle but avec difficulté. Elle eut un mal fou à avaler une gorgée.  

Elle espérait que personne n'avait remarqué son trouble. Ne plus y penser. Moins elle voulait y penser et plus ses pensées cheminaient dans cette direction affolant un peu plus son coeur. Il lui donnait presque l'impression de faiblir, de ne pas pouvoir tenir la cadence.  

Elle avait du rêvé, une hallucination, un mirage......C'était impossible! Impossible! Elle avait du rêver! C'était à cause de l'éclair, de cette électricité qui circulait dans le ciel. De cet éclair et de ce froid qui avait pris possession de tout son corps l'empêchant de réagir et qui la glaçait encore à cet instant réduisant ses facultés d'analyse. Oui tout cela c'était dans sa tête et juste dans sa tête.  

Pourquoi ne parvenait-elle pas à s'en défaire? Pourquoi semblait-elle être la seule à le ressentir?  

Toujours ces deux même questions qui hantaient ses pensées et dont elle ne parvenait pas à trouver de réponses cohérentes.  

Cela s'était passé si vite, trop vite. Elle n'avait pourtant rien bu, pas une goutte d'alcool. Elle laissa échapper un profond soupir. Elle se força à reprendre le contrôle de ses émotions, une fois calmée, elle se retourna et fit face à Ryo qui se trouvait adossé au chambranle de la porte.Voyant qu'elle mettait trop de temps à revenir, il avait décidé d'aller à sa rencontre. Il ne la quittait pas des yeux, il était inquiet. Trop prise dans sa torpeur et par ses tourments, elle n'avait même pas remarqué sa présence. Lorsqu'elle se retrouva face à lui elle ne put s'empêcher de tressaillir et de reculer d'un pas en portant sa main à son coeur.  

_Ryo......! murmura celle-ci en se retrouvant acculée tout contre le levier en fermant les yeux afin de se calmer.  

_Qu'est ce qu'il y a Kaori?  

_Tu m'as fait peur idiot ! Ça va pas de surprendre les gens ainsi ! lui dit-elle avec une légère pointe de remontrance.  

_Pardon, ce n'était pas mon intention !  

_Je crois que je stresse lui avoua celle-ci.  

_Si j'avais été un ennemi tu serais morte.  

_Heureusement pour moi tu es mon partenaire lui répondit alors Kaori incapable de soutenir son regard de peur qu'il ne perçoive son malaise.  

_Pourquoi tu stresses?  

_Je voulais que cette soirée soit parfaite, et je commence par une catastrophe. Je suis vraiment irrécupérable.  

_Faut pas, on est entre nous, entre amis, alors pas la peine de se mettre dans des états pas possible.  

_Tu as raison! C'est juste que je voudrais que ce Noël soit parfait, qu'on se fasse de merveilleux souvenirs qu'on gardera toute notre vie. Notre vie est surtout rythmée par le milieu, c'est tellement rare qu'on ait des occasions de s'amuser et de profiter les uns des autres, autres que pour le boulot. Je veux que ce soir tout soit parfait.  

_Ça le sera!  

_J'espère lui dit-elle d'une toute petite voix en passant à côté de lui avec le nécessaire pour ramasser les morceaux de verres.  

Ryo la stoppa en l'attrapant par les bras pour la forcer à lui faire face. Il voyait bien qu'elle fuyait son regard et surtout qu'elle voulait le fuir lui. Alors il se mit à lui caresser les épaules pour la détendre ce qui eut un effet immédiat sur Kaori dont les joues prirent une teinte rose.  

_Tu es sûre que ça va?  

_Certaine ! Ryo, tu peux leur apporter d'autres verres pendant que je nettoie lui demanda celle-ci gentiment en lui offrant un magnifique sourire pour le rassurer.  

_Pas de problème.  

Kaori alla nettoyer, elle n'osait plus relever la tête. Elle devait chasser de son esprit cette pensée qui était entrain de germer dans son cerveau pour prendre des proportions gigantesques et surtout qui était entrain de la faire passer pour une folle à ses propres yeux. A la pensée qu'elle devenait folle elle se mit à sourire et secoua la tête face à sa bêtise.  

Impossible, c'était tout simplement impossible. Elle avait beau se dire cela, tenter de se persuader,de se raisonner, elle ne parvenait pas à faire disparaître cette sensation de malaise qui l'enveloppait.  

Elle ramassa les détritus d'une main tremblante avec la peur au ventre et l'esprit ailleurs. Elle sentait ce froid glacial devenir de plus en plus présent, de plus en plus pressant et la gagner de plus en plus. Elle n'avait pas la tête à ce qu'elle faisait trop prise par ses interrogations si bien qu'elle se coupa le doigt par inadvertance.  

Elle fixa son doigt maculé de sang sans parvenir en en détacher son regard. Elle était comme hypnotisée par cette couleur rouge vive. Etait-ce un signe annonciateur d'une mauvaise nouvelle, d'un mauvais présage.  

_ C'est pas vrai ! lâcha-t-elle alors que des gouttes de sang s'écoulaient sur le sol....... Alors elle mit son doigt dans sa bouche afin d'aspirer son sang et pour arrêter le saignement.  

Sans aucune raison, son coeur s'affola de nouveau.  

_Non pas maintenant ! se dit-elle en serrant des dents.  

Son coeur cognait à présent à un rythme plus lent que précédemment mais des battements toujours soutenus si bien qu'elle eut l'impression qu'il allait exploser. Une fois les morceaux de verres dans sa pelle, elle regagna la cuisine avec toujours cette sensation de froid qui la suivait. Elle se rendit dans la cuisine et s'adossa presque au levier tellement elle avait l'impression de suffoquer..  

Ryo qui n'avait rien raté de la scène la rejoignit à la cuisine.  

_Tu t'es coupée?  

_Ah...... sursauta Kaori au son de la voix de son partenaire et au contact de sa main sur son épaule.  

_Calme-toi ce n'est que moi! Tu es bizarre aujourd'hui!  

_Pardon.  

_Tu t'es coupée?  

_C'est rien lui répondit Kaori en cachant son doigt derrière son dos.  

_Laisse moi en juger.  

_C'est rien je te dis, tu devrais aller rejoindre les autres.  

Ryo ne lui laissa pas le temps de s'éloigner de lui. Il lui attrapa la main et la releva afin d'examiner son doigt entaillé.  

_Une autre blessure de guerre à ton actif. Tu vas finir par me rattraper.  

_Comment tu peux comparer tes cicatrices à cette petite entaille de rien du tout.  

_En attendant cette petite entaille de rien du tout perd beaucoup de sang lui fit remarquer celui-ci en posant son regard sur elle. L'intensité de son regard lui fit de nouveau baisser la tête. C'était bon de l'avoir auprès d'elle, rien que pour elle. Il parvenait de part sa seule présence à éloigner cette sensation de froideur qui la suivait depuis tout à l'heure et lui réchauffait le coeur.  

Il la traîna jusqu'au levier, ouvrit le robinet et mit son doigt sous le jet d'eau.  

Leurs doigts s'étaient emmêlés ce qui fit rougir Kaori. Lentement et discrètement elle releva très doucement la tête et fixa le visage de son partenaire. Il était si sérieux et si concentré sur sa tâche que cela lui arracha un sourire. Il était si prévenant depuis quelques temps que sa réaction ne l'étonna qu'à moitié. Peut-être qu'il avait envie de faire évoluer les choses entre eux? Ce soudain silence fit relever la tête à Ryo. Il la surprit entrain de le regarder, de le détailler. Prise en faute Kaori baissa immédiatement le regard ce qui fit sourire Ryo. Cette timidité qui la caractérisait tant, il espérait que jamais elle ne la perde.  

_Voilà, ça c'est arrêté de saigner.  

Ryo ferma le robinet et prit une serviette qu'il entoura autour du doigt de Kaori sans pour autant relâcher sa main.  

_Merci fit-elle timidement.  

_Disons que c'est pour toutes les fois où tu m'as soigné lui murmura celui-ci à l'oreille. Tu devrais pourtant avoir l'habitude de mes mains sur ton corps depuis hier lui dit Ryo en l'enveloppant d'un regard malicieux.  

Et là, tout en se dégageant d'elle, il lui effleura l'épaule du bout des doigts et parcourut tout son bras d'une suave caresse qui la fit frémir, tout en lui souriant tendrement comme une réminiscence de ce que leur journée avait été. Comme il aimait ces instants de complicité qu'il pouvait partager avec elle. En l'espace d'une journée, ils avaient eu plus d'instants de complicité que durant leur 6 ans de vie commune. Le regard vif et plein de mystères face aux sous entendus de son partenaire la laissèrent sans voix. Sans rien ajouter d'autre, Ryo quitta la cuisine laissant une Kaori au visage cramoisie seule dans la cuisine tentant de reprendre ses esprits.  

Le repas se passa dans la plus douce des ambiances entre les rires et les pitreries de nos trois pervers. Tout était parfait, trop parfait aux yeux de Kaori qui ne parvenait pas à se défaire de cette étrange impression. Elle n'avait pas beaucoup d'appétit mais elle se forçait à paraître joyeuse devant ses amis, et chaque fois que son regard se portait sur son partenaire un splendide sourire apparaissait sur ses lèvres aux souvenirs de ce que la journée de la veille avait été. Elle avait pris place à l'extrémité de la table, à l'opposée de Ryo en face de lui. Son regard allait de Ryo au contenu de son assiette qu'elle touillait plus avec sa fourchette qu'elle ne mangeait.  

_Kaori c'est succulent ! lui fit remarquer Kazue.  

Elle releva alors la tête de son assiette et lui sourit.  

_Merci lui répondit-elle alors que ses lèvres esquissèrent un doux sourire presque mélancolique.  

_Oui, un vrai régal enchérit Mick.  

_Je vois ça! La Kaori lui offrit un vrai sourire à la vue de son assiette qui était plus que pleine alors que sa bouche était déformée par la quantité de nourriture qu'il venait d'engloutir.  

_Je fais honneur à la maîtresse de maison et à ta cuisine, pas comme certain fit Mick après avoir tout avaler d'une traite et en se tapant le thorax pour que tout passe directement jusque dans son estomac. Il jeta un regard accusateur en direction de Ryo, juste pour la narguer.  

_Tu dis ça par ce que tu n'y gouttes pas tous les jours toi à sa cuisine alors, pouette pouette l'amerloque.  

_Qu'est ce que tu insinues Ryo ? lui demanda Kaori en pianotant sur la table avec ses doigts. Elle avait un regard qui était prêt à l'incendier. Dis-le que c'est mauvais!  

_Succulent Kaori, succulent fit celui-ci en portant sa fourchette à sa bouche pour donner plus de poids à ses paroles.  

_Je préfère ça.  

Elle osa un regard derrière Ryo mais replongea aussitôt sa tête dans son assiette alors que sa main se mit à trembler lui faisant lâcher sa fourchette. Elle s'empressa alors de cacher sa main sous la table afin de masquer son tremblement. Non, elle était en plein cauchemar. Pourquoi cette peur venait-elle la cueillir une nouvelle fois? Elle ne comprenait pas. C'était comme ci ce sentiment de peur était relié à cette sensation de froid qui la gagnait. Oui sentiment et sensation allaient de paire.  

Pourquoi ce froid ne voulait pas la quitter? Elle avait mis un gilet en laine et malgré celui-ci elle semblait avoir encore plus froid que tout à l'heure comme si la source de ce froid se rapprochait d'elle, uniquement d'elle. A présent elle entourait toute la table. Elle ne savait pas comment s'en protéger, ni comment l'empêcher de se saisir d'elle. Elle se faisait de plus en plus présente, elle avait fini par la rattraper.  

C'est alors qu'elle ressentit de nouveau cette impression que le temps s'écoulait différemment, comme avec du relief.  

Pourquoi maintenant?  

Pourquoi se sentait -elle happée, au prise avec ce tic tac de la pendule et cette petite aiguille qui ne faisait que tressautait encore plus fort à chaque fois. Oui c'était comme ci à cet instant le temps s'était arrêté et qu'elle seule en avait conscience, une distorsion du temps que personne d'autre qu'elle n'avait remarqué. Les minutes puis les secondes s'étirant à chaque fois plus lentement, encore et encore lui arrachant l'idée que lorsque tout s'arrêterait une chose terrible se produirait. Elle releva alors la tête en s 'armant de courage et vit que tout ce qui l'entourait se mit à bouger au ralenti. Tout flottait autour d'elle, les gestes de ses amis étaient comme alanguis, les paroles de ses amis ne lui arrivaient que par ondes alors qu'une atmosphère de flottement se mit à les entourer. Même les battements de son coeur avaient ralenti avant que celui-ci ne se fige face à ce qui se jouait devant elle.  

Elle perdait la tête, la folie la gagnait, elle ne pouvait l'expliquer autrement. Face à ce constat, elle bloqua sa respiration comme pour arrêter le temps qui semblait déjà s'être arrêté, comme pour retarder ce je ne sais quoi qu'elle ne voulait pas voir se produire. C'était la seule façon qu'elle avait trouvé de s'extraire de tout cela, bloquant ses pensées au stade de l'incompréhension la plus totale. Malgré sa peur irraisonnée, elle prit sur elle afin de garder le contrôle de ses émotions et de ses membres. Elle se connaissait bien, si elle se laissait aller à la panique elle savait qu'elle deviendrait ingérable. Elle se vit violence malgré ce froid qui l'avait entièrement enveloppée en se pinçant les cuisses. Elle alla jusqu'à plonger ses ongles dans sa peau afin que la douleur prenne le dessus sur tout le reste. Elle fit alors appel à son bon sens pour se défaire de tout cela. Les distorsions du temps n'existaient pas. C'était à cause de la peur, ses pensées déformaient la réalité et en aucun cas l'inverse.  

Cette sensation, cette impression, ce sentiment devenait réellement de plus en plus insoutenable.  

Cette cassure dans le temps, cet instant suspendu, ce flottement n'avait duré que le temps nécessaire pour qu'elle réalise que oui cette sensation de froid se battait avec ce sentiment de peur pour annoncer sa venue.  

Ce froid c'était........  

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