Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated G - Prose

 

Auteur: Mercury80

Status: Complète

Série: City Hunter

 

Total: 24 chapitres

Publiée: 24-11-20

Mise à jour: 17-12-20

 

Commentaires: 31 reviews

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SongficRomance

 

Résumé: Une voix dans la nuit, un nouveau chemin, un nouveau regard...

 

Disclaimer: Les personnages de "[vwa]" sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo.

 

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   Fanfiction :: [vwa]

 

Chapitre 18 :: Chapitre 18

Publiée: 11-12-20 - Mise à jour: 11-12-20

Commentaires: Bonjour, voici la suite de l'histoire. Bonne lecture et merci pour vos commentaires^^

 


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Chapitre 18  

 

- Je passe te reprendre après l’émission. Tu m’attends., lui indiqua Ryo, le jeudi soir suivant.  

 

Elle le regarda, indécise, puis acquiesça.  

 

- Kaori, on en a parlé. C’est temporaire. Le temps que les choses se tassent., lui rappela-t-il, soucieux.  

- Je sais., répondit-elle.  

- Tu…, commença-t-elle.  

- Quoi ?, l’interrogea-t-il, un sourcil levé.  

- Non, rien, oublie., souffla-t-elle, sortant de la voiture, le regard fuyant.  

 

Il la regarda entrer dans le bâtiment et poussa un long soupir. Il savait ce qu’elle attendait. Il avait jusqu’au lendemain pour se décider. Sept jours, c’était à la fois très long quand on se languissait de quelqu’un et très court pour prendre une décision qui allait changer une vie entière. Au moins, cela ne faisait pas six jours qu’ils s’ignoraient ou se disputaient sans cesse. Passé le premier jour où la tension était encore trop vive, ils avaient réinstauré le dialogue petit à petit, essayant de comprendre comment ils avaient pu en arriver tous deux à ces extrêmes de violence. Ils avaient cerné le problème mais il n’avait pas trouvé la solution et, sans solution, pas de décision.  

 

Après avoir grimpé les trois étages qui menaient à l’escalier, Kaori s’arrêta devant la porte, faisant le vide dans sa tête. Hiro était là. Elle sentait sa présence non loin et elle savait qu’elle devrait affronter ses questions par rapport à la semaine dernière, à ses blessures, à son changement de comportement entre les deux jours… Elle n’en avait pas envie mais elle ne reculerait pas juste pour y échapper. Il avait su se montrer présent et amical et, si elle ferait tout pour garder ses petits secrets, elle ne le rejetterait pas non plus. Comme elle s’y attendait, ça lui prit plus longtemps que d’habitude pour reléguer à l’arrière-plan toutes les questions qui trottaient dans son esprit torturé par le désir, la colère liée à l’injustice de leur situation, l’amour malmené et la douleur.  

 

- Bonsoir., le salua-t-elle, se dirigeant vers le studio pour poser ses affaires.  

- Attends un peu. Tu crois vraiment t’en tirer par un bonsoir ?, lui demanda son collègue, lui emboîtant le pas.  

 

Elle retira sa veste, accrochant au passage l’un des bandages qui se défit. Elle le retira complètement et allait le refaire lorsqu’il lui prit la main sans ménagement, la faisant grimacer.  

 

- Désolé, je ne voulais pas te faire mal., s’excusa-t-il.  

- Ca va. C’est juste sensible., le rassura-t-elle.  

- Qu’est-ce que tu t’es fait, Kaori ? Que s’est-il passé ?, l’interrogea-t-il soucieux.  

- Un accident domestique. Rien de grave., répondit-elle, tentant d’esquisser un sourire rassurant.  

- Tu te fous de moi ? J’ai bien vu ta tête la semaine dernière. C’est la fusillade qui a eu lieu ? Tu as eu peur et tu as craqué ? On ne sait pas qui était visé mais il y avait une voiture qui devait être garée là. Tu l’as peut-être vue en sortant…, supposa-t-il.  

- Je… Je n’ai pas fait attention. Ecoute, vraiment, ce n’est rien. J’ai appris une mauvaise nouvelle et j’étais distraite. J’ai buté dans la table basse à l’appartement et je me suis coupée. C’est tout. Regarde, ça va être l’heure., lui fit-elle remarquer.  

 

Il lança un regard noir à l’horloge puis, après un soupir de frustration, s’en alla. Kaori finit de remettre le bandage en place puis s’assit à son poste, le casque sur les oreilles.  

 

- J’espère que tu écoutes, Ryo., murmura-t-elle comme une prière alors que le jingle publicitaire résonnait dans ses oreilles.  

- Il est vingt-et-une heures. Vous êtes sur Super Tokyo Radio. Ici Kaori pour vous accompagner pendant une heure en espérant vous faire passer un bon moment dans l’émission Atout cœur. Et c’est bien de cœur que nous allons parler aujourd’hui, de cœurs qui se cachent, de coeurs qui apaisent, de coeurs qui se remettent à battre ou de coeurs sièges de violents conflits mais, pour commencer, nous allons bercer nos oreilles avec Muse et Undisclosed desires., annonça-t-elle.  

- Vaste programme… Tu veux que j’appelle Shinobi pour lui demander le créneau suivant voire toute la nuit ?, la taquina Hiro.  

- Non, ça va aller. J’ai comme l’impression qu’il serait trop heureux et j’ai autre chose à faire., répondit-elle.  

- Tu parles qu’il serait heureux. Il te donnerait les clefs si tu les voulais. Si tu relèves le défi, je suis ton homme., lui affirma-t-il.  

- J’aime bien ce temps passé ici mais j’ai d’autres occupations dans la vie.  

- Vraiment ? Lesquelles ?, l’interrogea-t-il.  

- Si je te le disais, je devrais te tuer…, lâcha-t-elle avec un sourire amusé.  

 

Il la regarda un instant interloqué puis se mit à rire.  

 

- Comme si tu pouvais faire du mal à une mouche…, plaisanta-t-il.  

- Tu n’as jamais vu la tête de Ryo après un coup de massue…, marmonna-t-elle.  

- Tu dis ?  

- Je… rien., se reprit-elle, tendant l’oreille pour écouter la musique.  

 

I know you've suffered  

Je sais que tu as souffert  

But I don't want you to hide  

Mais je ne veux pas que tu te caches  

It's cold and loveless  

C’est froid et sans amour  

I won't let you be denied  

Je ne te laisserai pas te renier  

 

Elle l’avait écouté cette semaine, beaucoup écouté pour une fois qu’il avait voulu lui parler. Ca avait commencé le deuxième jour par des échanges très courts alors qu’il soignait ses coupures. La veille, elle avait pris un tel air fermé qu’il avait certainement préféré se taire et, honnêtement, ça avait été préférable. Le seul moment où elle s’était sentie bien, c’était dans les brumes du réveil, sentant ses bras autour d’elle, sa peau contre la sienne, cette chaleur confortable et son odeur qui l’entouraient. Elle aimait ce moment où tout semblait beau et simple. Quand sa conscience s’était réveillée à son tour, elle avait senti le froid l’envahir, surtout à ce qu’elle avait osé faire. Comment avait-elle pu lui demander une dernière fois alors qu’elle était en colère ? Elle s’était détachée de lui, encore endormi, et était montée se doucher et s’habiller. Tout était remontée à la surface et la douleur provoquée par le savon sur certaines coupures avait achevé le tout.  

 

- Je ne sais pas comment faire, Kaori., avait-il murmuré.  

- Je ne peux pas t’aider si tu ne le veux pas., lui avait-elle répondu finalement au soir.  

 

Accoudé au bar, Ryo écoutait la musique. La semaine avait été riche en émotion d’un tout autre ordre. Il avait passé beaucoup de temps en introspection, à réfléchir à ce qu’il pouvait faire, changer. Il avait enfin essayé de lui parler, de lui expliquer ce qui le bloquait. Comme toujours, ça avait été pénible pour lui. Il butait sur les mots, luttait pour ne pas se réfugier derrière une boutade ou un faux-fuyant. Il ne savait pas où il avait trouvé le courage de laisser échapper les premiers mots. Il la soignait, venait de rebander ses mains et observait les cicatrices sur ses jambes, le cœur lourd. C’était son œuvre, l’avoir poussée à bout jusqu’à la crise de nerfs, c’était son œuvre et elle pesait sur sa conscience encore plus que ce qu’il avait fait le même soir.  

 

- Je ne sais pas comment faire, Kaori.  

 

Il ne savait même pas de quoi il parlait exactement : pour l’aimer, pour avancer, pour cesser d’avoir peur, pour la reconquérir, pour s’excuser, pour apaiser ses blessures, pour vivre… Il ne savait pas. Elle n’avait pas répondu, ni en criant, ni en pleurant, ni en le repoussant mais il avait vu que ses mots l’avaient touchée au tremblement de ses doigts. Il avait eu envie de les prendre et de les embrasser pour être là mais n’avait pas osé et avait repris les soins. La tension avait un peu baissé au cours de la journée comme si chacun d’eux avait anxieusement attendu une ouverture pour savoir sur quel pied danser.  

 

Il avait dû attendre jusqu’au soir pour avoir une réponse encore une fois en la soignant.  

 

- Je ne peux pas t’aider si tu ne le veux pas., avait-elle dit.  

 

Là, c’était lui qui était resté silencieux, ne sachant quoi répondre. Dès qu’il avait eu fini, elle s’était levée pour sortir de la pièce et s’était arrêtée sur le seuil de la porte.  

 

- Je sais que tu m’aimes, je n’en ai jamais douté, mais veux-tu vraiment que ça devienne réel ?, l’avait-elle interrogé.  

- Es-tu prêt à admettre que tu mérites d’être aimé ?, avait-elle ajouté, posant un regard douloureux mais où régnait encore une lueur d’espoir sur lui.  

 

Soothing  

Apaisant  

I'll make you feel pure  

Je te ferai te sentir pur  

Trust me  

Aie confiance en moi  

You can be sure  

Tu peux être sûr  

 

Ce regard l’avait remué au plus profond parce qu’il lui disait tous ces mots qu’elle ne pouvait formuler à voix haute à ce moment-là… parce qu’il n’était pas prêt. Admettre qu’il méritait d’être aimé, réellement et pas seulement dans ses rêves, c’était admettre qu’il pouvait espérer une forme de pardon pour tout ce qu’il avait, qu’il avait changé, que l’homme froid et sanguinaire était devenu un homme qui s’était laissé approcher et qui compatissait, que l’homme sans attache, libre comme l’air et dont le seul but dans la vie était de vivre au jour le jour pouvait se lier à quelqu’un et, qui disait se lier, disait forcément projets d’avenir, ne serait-ce que vivre et vieillir avec elle…  

 

Kaori avait déjà allégé son fardeau par sa simple présence, son sourire. Elle lui avait accordé sa confiance sans limite, sans hésitation, dès le premier jour. Elle n’avait pas eu besoin de son sourire charmeur, de son regard de braise. Elle avait déjà eu le droit à sa face de pervers et à un aperçu de son monde sombre et violent. Pourtant, en donnant sa bénédiction à Hide, c’était comme si elle la lui avait donnée à lui aussi. Il lui avait déjà confié sa vie physique, arriverait-il à avoir suffisamment confiance en elle pour lui confier son cœur et ses errances psychiques ? Avait-il suffisamment confiance en elle pour lui faire porter une partie de ce poids ? Avait-il suffisamment confiance en elle pour penser qu’elle ne fuirait pas ?  

 

I want to reconcile the violence in your heart  

Je veux annihiler la violence de ton coeur  

I want to recognize your beauty is not just a mask  

Je veux reconnaître que ta beauté n’est pas qu’un masque  

I want to exorcise the demons from your past  

Je veux exorciser les démons de ton passé  

I want to satisfy the undisclosed desires in your heart  

Je veux satisfaire les désirs cachés de ton coeur  

 

Elle l’avait écouté ces derniers jours. Il n’avait fait qu’effleurer la surface de ce qu’il avait vécu, il n’avait fait que tremper le petit doigt de pied dans l’eau pour voir si elle était à température. Pourtant, elle en avait appris tellement sur lui, même à travers les non-dits. Son cœur était passé par tous les stades.  

 

- Je veux que ce soit réel, Kaori. Je le veux vraiment mais je ne peux pas te salir de ce que je suis. Je suis la mort, je suis le sang, je suis la violence., lui avait-il énoncé le lendemain matin.  

- Tu sauves des vies, tu redonnes le sourire et tu apportes la paix., lui avait-elle opposé, lui citant tout un tas d’exemple de personnes de tous milieux, de tous âges, de tous sexes qu’il avait aidées.  

 

Devait-il avouer qu’il avait été surpris quand elle lui avait retracé tout leur parcours, chaque personne qu’ils avaient côtoyée, les maux dont ils l’avaient sauvée, la vie qu’elle avait menée après la fin de l’aventure pour ceux dont ils avaient eu des nouvelles.  

 

- Et il y a moi aussi., avait-elle conclu.  

- Tu m’as aidée à relever la tête après la mort de mon frère, tu m’as permise de voir ce que je pouvais être…  

- Je t’ai maltraitée, Kaori. Comment peux-tu dire que je t’ai aidée ?, avait-il pipé, amer.  

- Tu as l’amitié un peu vache mais on s’y fait. Au moins, la vie n’a rien d’ennuyeuse à tes côtés., avait-elle plaisanté.  

 

Elle avait été obligée d’être celle qui allégeait la tension. Ils parlaient pour la première fois depuis trop longtemps, comme ils auraient dû le faire avant de se laisser prendre par le débordement hormonal qui les avait conduits à faire n’importe quoi. Le mal-être dont souffrait Ryo était si profond et il le cachait si bien que, même le connaissant, elle était passée à côté.  

 

- Ryo, tu t’es souvent caché mais, quand j’en avais besoin, tu étais là et, sans toi, il y a beaucoup de choses que je n’aurais pas faite comme laisser un fantôme prendre possession de mon corps. Tu m’as aidée à me dépasser, tu m’as apaisée dans les moments de tension. Tu étais là et je savais que tu le serais quoiqu’il arrive., lui avait-elle dit.  

- J’espère que tu le seras encore à l’avenir mais toi seul peux le décider., avait-elle fini par murmurer plus sombrement avant de le laisser.  

 

You trick your lovers  

Tu trompes tes amours  

That you're wicked and divine  

en leur faisant croire que tu es pervers et divin  

You may be a sinner  

Tu es peut-être un pécheur  

But your innocence is mine  

Mais ton innocence est mienne  

 

- Tu as bien choisi ta chanson, Sugar., murmura-t-il, portant le verre à ses lèvres.  

 

Sauf que son seul amour, c’était elle et il ne pouvait pas la tromper. Elle le connaissait mieux que personne. Les autres… c’était les autres. Il respectait les femmes de son entourage malgré les apparences mais, les autres, il s’en fichait comme de l’an quarante. Elles n’étaient qu’un passe-temps agréable, divertissant, trompeur. Mais qui était trompé dans l’histoire ? Lui ? Elles ? Un peu des deux certainement. Il avait bien roulé sa bosse dans le monde de la luxure, charmant sans honte tout ce qu’il pouvait, prenant tout ce qu’il pouvait sans considération autre qu’avoir le consentement de la jeune femme.  

 

Souriant cyniquement, il se dit qu’il ne devait pas être loin du podium du meilleur pécheur. Qu’avait-il à son actif ? La luxure, le plus évident, la gloutonnerie dans sa frénésie de profiter des belles choses de la vie, les filles et l’alcool, la paresse, à en juger par le nombre de fois où elle l’avait tanné pour aller chercher le boulot et ne pas attendre qu’il arrive, l’avarice à montrer ce qu’il ressentait, la colère, qu’il domptait tellement bien depuis quelques années… Jusqu’à présent, il s’était cru exempt du péché d’orgueil et d’envie mais, à bien y réfléchir, il venait de cocher les deux cases et était bon pour le grand chelem. Il avait eu envie de cette vie à deux depuis bien longtemps, prenant leur colocation comme le mieux qu’il pourrait avoir, et, pendant sept jours, il avait eu l’orgueil de penser que c’était possible. Bravo Ryo, bienvenue aux clubs des pécheurs capitaux, se félicita-t-il, levant son verre à son reflet dans le miroir. Pourtant…  

 

Pourtant, dans ses bras, dans son regard, pendant ces sept jours, il s’était senti… différent. C’était comme si l’homme en lui pouvait enfin se déployer et se montrer au grand jour, comme si le passé s’effaçait pour faire place à autre chose. Dans ses yeux, il s’était vu vivre vieux… et heureux. Pourquoi ? Il ne chercha pas loin. Kaori était encore une innocente dans son monde. Il l’avait protégée de tout ce mal qui les entourait. Il avait été le gardien du temple et, si elle le laissait entrer, c’était qu’il n’était pas si sale que cela, pas si mauvais. En le laissant entrer, elle l’avait recouvert de ce voile de pureté, comme s’il faisait peau neuve.  

 

Please me  

Fais-moi plaisir  

Show me how it's done  

Montre-moi comment c’est fait  

Tease me  

Attise-moi  

You are the one  

Tu es l’élu  

 

Comme il avait envie de se laisser aller, de lui donner les clefs et de voir ce que ça donnerait en prenant les dispositions nécessaires. Plus question de perdre la tête dans la rue, plus de soirée dansante seuls mais des têtes à têtes en toute intimité. S’il y avait une personne avec qui il envisagerait de le faire, c’était elle et uniquement elle parce qu’elle saurait lui montrer le chemin, l’accepter avec ses défauts, se montrer patiente avec lui.  

 

I want to reconcile the violence in your heart  

Je veux annihiler la violence de ton coeur  

I want to recognize your beauty is not just a mask  

Je veux reconnaître que ta beauté n’est pas qu’un masque  

I want to exorcise the demons from your past  

Je veux exorciser les démons de ton passé  

I want to satisfy the undisclosed desires in your heart  

Je veux satisfaire les désirs cachés de ton cœur  

 

- Je ne sais pas ce qu’est aimer. On m’a toujours dit que c’était une faiblesse.  

 

C’était ce qu’il lui avait dit le matin même. Elle l’avait observé un long moment et avait vu non pas le nettoyeur mais l’enfant orphelin, l’enfant se retrouvant seul dans la jungle, errant pendant des jours, tiraillé par la peur, la faim, la tristesse. Il avait trouvé refuge dans un village de guérilleros… De tous les villages sur lesquels il aurait pu tomber, il avait fallu que ce soit un village de guérilleros, avait-elle pensé avec colère et tristesse. Il ne pouvait que les croire. Il devait souffrir de l’absence de ses parents, s’endurcir dans ce contexte de guerre, plaire à ce nouveau père qui avait dû l’aimer à sa façon, dure, sèche, gagner son respect, sa confiance…  

 

Elle s’était approchée de lui alors qu’il regardait par la fenêtre sombrement et avait posé une main sur son épaule, l’amenant à se tourner vers elle.  

 

- Tu sais aimer, Ryo. Tu l’as très bien fait depuis toutes ces années, encore mieux les sept jours qu’on a eus., lui avait-elle assuré.  

- Une femme comme toi mérite un homme comme toi., lui avait-il opposé.  

- J’ai un homme comme moi, un homme qui sait laisser parler son cœur, qui tient à moi, qui me montre à quel point la vie est belle, avec qui j’ai envie de vieillir. Il n’y a qu’une personne ici qui pense que tout ce qui te définit, c’est la violence, la mort et la perversité., avait-elle répliqué.  

- Je pourrais te hurler que tu es un homme bien, qui mérites d’être heureux. Je pourrais te le dire sans relâche mais, tant que tu ne fais qu’écouter, ça ne sert à rien. Il serait temps que tu m’entendes., avait-elle ajouté.  

 

Elle l’avait laissé seul face à ses réflexions. Elle ne pouvait faire plus. Le faire réfléchir, être là s’il avait besoin de lui, servir d’avocat pour leur cause, elle pouvait le faire. En revanche, elle ne se jetterait plus à ses pieds. Elle avait regagné sa chambre depuis le samedi soir même si elle s’y sentait horriblement seule. Il ne l’avait pas non plus cherchée même si elle l’avait entendu rentrer dans sa chambre en pleine nuit. Il était resté à quelques mètres de son lit pendant plusieurs minutes avant de ressortir. Elle ne lui en avait pas parlé. S’il le désirait, il le ferait.  

 

Please me  

Fais-moi plaisir  

Show me how it's done  

Montre-moi comment c’est fait  

Trust me  

Fais-moi confiance  

You are the one  

Tu es l’élu.  

 

Oserait-il ? Pouvait-il accepter de céder ? Il ne lui avait pas dit le plus dur. Il ne lui avait pas parlé de la peur viscérale qu’il avait de la perdre pour toujours, de la voir tuée emportée par une balle, un coup de couteau qui lui serait destiné… Il ne voulait pas voir la peur dans son regard. Il ne voulait pas vivre leur amour comme une urgence, comme une course contre la montre avant que la mort ne les sépare. Il voulait l’aimer sereinement, savoir qu’il mourrait vieux, à vingt-cinq ans, se dit-il en lâchant un sourire à moitié amusé, dans son lit en tenant sa main.  

 

Pouvait-elle lui faire surmonter cela ? S’il le lui disait, l’aiderait-elle à être plus fort, à ne plus avoir peur ? Comment pouvait-il être sûr qu’il tiendrait toujours face à cet ennemi invisible, qu’il ne la blesserait pas à nouveau comme il l’avait fait ? Parce qu’après tout, c’était de ça dont il s’était agi une semaine auparavant. La perte de contrôle, les sentiments qui le dépassaient, tout cela n’avait été que le dessus de l’iceberg. Le fond de l’histoire, c’était qu’il avait bien cru la perdre et que la douleur avait été insupportable. Le sevrage à côté avait été une partie de plaisir.  

 

I want to reconcile the violence in your heart  

Je veux annihiler la violence de ton coeur  

I want to recognize your beauty is not just a mask  

Je veux reconnaître que ta beauté n’est pas qu’un masque  

I want to exorcise the demons from your past  

Je veux exorciser les démons de ton passé  

I want to satisfy the undisclosed desires in your heart  

Je veux satisfaire les désirs cachés de ton cœur  

 

C’était un pari ambitieux mais, s’il décidait de leur laisser leur chance, ils pouvaient le faire. Ils pouvaient s’apaiser mutuellement, gommer les douleurs du passé et se créer un futur agréable. Il arriverait peut-être aussi un jour à accepter qu’il était bien meilleur qu’il le pensait, et ce, depuis un moment déjà. Elle ne pouvait effacer son passé mais, s’il l’acceptait, elle pourrait être son oreille attentive et bienveillante, sa confidente, celle qui recueillerait ses errances, ses douleurs, ses doutes, ses espoirs et les couverait pour lui. C’était un moyen comme un autre de passer à autre chose. Par dessus tout, elle voulait être celle qui l’aiderait à réaliser ses rêves, même inavoués. Ils étaient forts à deux, bien plus forts que la simple somme de leurs potentialités.  

 

- Vous êtes sur Super Tokyo Radio. C’était Muse avec Undisclosed desires. J’espère que cela vous a inspirés. Je dédie cette chanson à tous les coeurs en errance. Tous les rêves sont réalisables. Nous accueillons de suite Sayaka., enchaîna-t-elle.  

 

Ryo termina son verre d’un trait, paya et s’en alla. Il avait moins d’une heure devant lui et il fonça à travers les rues de la ville. Arrivé aux abords du cimetière, il s’arrêta néanmoins doucement, sans aucun bruit et sortit de la voiture avant d’escalader l’enceinte. Il n’eut pas loin à aller avant de trouver la stèle cherchée.  

 

- Salut Maki. Ca faisait un bail, vieux frère., dit-il, enfonçant les mains dans ses poches.  

 

Il resta un moment en silence devant le granit à peine éclairé par le clair de lune.  

 

- Arrête de râler. Je sais, je reste là comme un con sans rien dire mais c’est ce que je fais de mieux, non ? Après tout, en général, lorsque je l’ouvre, c’est pour débiter un tas de connerie… surtout avec une personne de notre connaissance, alors, vaut peut-être mieux que je la ferme… ou pas., soupira-t-il.  

- Elle va partir, n’est-ce pas ? Si je ne fais rien cette fois-ci, elle va partir, j’en suis sûr. Ce serait normal après tout. Elle doit souffrir autant que moi. Je l’aime vraiment, Maki, mais comment faire ?, se demanda-t-il.  

- Finalement, c’est elle la partie la plus raisonnable et aussi la plus folle de notre duo. Moi, j’agis par habitude, la froideur c’est mon truc, faire le guignol aussi. Elle… elle réfléchit. Elle sait prendre les bonnes décisions et ose me bousculer quand il faut. Elle a aussi eu la drôle d’idée de me pardonner et de me donner deux dernières chances. Avec celle-ci, ça fera trois, c’est deux de trop, non ? J’aurais peut-être dû la laisser partir il y a quelques semaines. Tout aurait été plus simple, moins douloureux. Pourquoi tu te marres ?, gronda-t-il.  

 

Nerveux, Ryo regarda autour de lui pour être sûr que personne ne le voyait.  

 

- Ouais, je sais, je suis un crétin. On est dans un cimetière à passées vingt-et-une heures et je parle avec un mort qui ne me répondra pas. Et tu me dirais aussi que c’est à elle que je dois parler et pas à un tas de pierre, que je devrais lui faire confiance et me servir de ce que j’ai entre les cuisses pour… euh quoique non, tu ne me dirais peut-être pas ça…, se reprit-il avant de sourire en imaginant le regard désapprobateur puis résigné de son ami.  

- Il me reste vingt-quatre heures pour faire le bon choix. Aide-moi, Hide., l’implora-t-il.  

 

Il garda le silence encore un moment avant de rebrousser chemin et de repartir vers le centre de Tokyo pour aller chercher la femme de sa vie et la reconduire chez eux… pour le dernier soir peut-être…  

 

- L’émission s’est bien passée ?, lui demanda-t-il.  

- Oui, merci. On a eu des discussions très intéressantes., répondit-elle avec un léger sourire.  

 

Elle se mordit la lèvre et hésita à lui demander s’il avait entendu la chanson. Réprimant un soupir de frustration, elle se tourna de l’autre côté et regarda les immeubles défiler. Arrivés dans le garage de l’immeuble, elle fut surprise de voir Ryo rester immobile derrière le volant, le regard perdu dans le vide.  

 

- Ca va ?, l’interrogea-t-elle doucement.  

 

Il tourna un regard intense sur elle et elle se sentit frissonner tant elle le sentait submergé. Il resta ainsi à la fixer pendant plus d’une minute avant de baisser la tête, visiblement contrarié. Pensant qu’il avait besoin de rester seul, elle ouvrit la porte et se tourna pour sortir.  

 

- J’ai… J’ai une peur bleue de te perdre. Si on fait notre vie ensemble et que je te perds… je crois que je deviendrais fou de douleur. L’idée m’est déjà insupportable aujourd’hui mais… ce serait pire encore., murmura-t-il.  

 

En un éclair, il se retrouva enlacé, son corps pressé contre le sien, la tête nichée dans son cou, ses doigts caressant ses cheveux.  

 

- Moi aussi, j’ai peur de te perdre, Ryo. Je connais les risques et je les assume mais je sais aussi qu’on aura des regrets si on ne tente pas notre chance. Je ne peux pas te promettre d’échapper au danger mais je peux te promettre de t’aimer chaque jour qui passera. On ne sait pas de quoi sera fait notre avenir mais on pourrait avoir des projets à deux, s’aimer et être heureux le temps que ça durera. Est-ce que tu pourrais surmonter tes peurs grâce à cela ?, lui demanda-t-elle.  

- Je ne sais pas., murmura-t-il, s’apaisant à son contact qui lui avait tant manqué.  

- Réfléchis-y. Même si on ne doit avoir qu’un jour, ça pourrait valoir le coup, non ?, lui suggéra-t-elle.  

 

Face à l’absence de réponse ou de réaction, elle se retint de soupirer.  

 

- Tu es le seul à pouvoir décider. A toi de voir., conclut-elle.  

 

Elle s’écarta doucement de lui, lutta contre l’envie de l’embrasser et sortit de la voiture avant de regagner l’appartement, le laissant seul avec ses pensées. 

 


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