Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated PG-13 - Prose

 

Author: Sophie

Status: Completed

Series: City Hunter

 

Total: 40 chapters

Published: 15-09-03

Last update: 11-02-04

 

Comments: 102 reviews

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GeneralRomance

 

Summary: Il s'agit de tenter de répondre au challenge de Kaori "Jamais sans toi"...

 

Disclaimer: Les personnages de "Jamais sans toi (ou une autre avancée)" sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo.

 

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   Fanfiction :: Jamais sans toi (ou une autre avancée)

 

Chapter 32 :: " L'ombre que j'ai dans le cœur"

Published: 11-12-03 - Last update: 11-12-03

Comments: Ça y est !!! enfin !!!! Prépares-toi Ryô à tomber dans le sentimentalisme….Ce chapitre ne sera sans doute pas à la hauteur des espérances (alors que c’est le chapitre capital), mais il attend depuis trop longtemps…Quand on a un truc à écrire, il faut le faire. Mes lectures des autres fics m’ont laissé entrevoir d’autres possibilités, mais je ne peux pas tout résoudre dans ma fic (ce serait franchement déplacé et orgueilleux)... "Faux semblants" me donne une autre façon de voir, "La déchirure" aussi…et plein d’autres....D’accord, je joue le coté romantisme à fond...et Ok, ma vision de l’amour est un peu faussé en ce moment... Il risque d’être long… Mais SVP, si un chapitre mérite des reviews…de toutes sortes c’est bien celui-ci…je ne plaisante pas quand je dis qu’il est le cœur de mon histoire…la raison de tout…Alors n’hésitez pas…Kaori, toi qui a lancé le challenge, si tu lis cette fic, donnes ton avis…et celles qui en laissent (à ma grande joie) d’habitude (Mélusine, Kairi, Ginie, Mélinda, Lucky, Trinity, Awax, Keuwa, Sylvie, Carla.. (j’en oublie, j’en suis sur))….et les autres….allez-y….profitez en aussi pour me dire s’il y a des zones d’ombres que vous voudriez voir éclaircies (des trucs que j’aurais oublié….car on arrive à la fin, (reste quatre cinq chapitres+ un de discussion entre Ryô et Kaori…)

 


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Tous ceux qui veillaient sur Kaori avaient les traits tirés. D’inquiétude, d’appréhension, d’incompréhension, d’impuissance, de manque de sommeil.  

 

De tous, c’était Sayuri qui restait le plus longtemps au chevet de Kaori. Assise sur une des deux chaises qui encadraient la tête de lit, elle restait là. Elle ne pleurait pas ou très rarement. En règle général, elle racontait à sa sœur sa vie à New York ou conversait avec les autres personnes présentes. Elle caressait souvent la main de Kaori comme pour vérifier si cette dernière avait toujours un pouls ou pour essayer de sentir une amélioration.  

 

Ryô, lui aussi était très souvent dans la chambre. Mais il ne s’asseyait pas. Il ne parlait pas beaucoup non plus. Il restait fréquemment à regarder par la fenêtre ou faisait les 100 pas devant le lit. Mais jamais il ne regardait directement la jeune femme étendue.  

Ce manège durait de longs moments, puis, soudainement Ryô s’arrêtait ou se détournait de la contemplation de la fenêtre.  

Son regard se rivait alors sur l’immobile et pâle visage de Kaori.  

Lentement, il s’approchait de la blessée. Chaque pas semblait être pour lui une victoire. Il arrivait à la frôler....presque...On s’attendait à ce qu’il lui prenne la main, qu’il la touche...  

Son bras s’avançait. Il ne restait plus que 5 cm entre leurs deux mains...  

Mais au dernier moment, il renonçait et le contact ne s’établissait jamais entre eux.  

 

Il se détournait alors de Kaori et quittait la chambre à grands pas.  

Il disparaissait pendant quelques heures. Miki et Kazue avait essayé de le suivre mais Falcon et Mick les en avaient dissuadées.  

Il y a des douleurs qu’on ne partage pas.  

 

Il revenait quelquefois sobres, quelquefois ivres, mais il revenait toujours. Dans le dernier cas, il devait affronter les regards méprisants des femmes, surtout de Sayuri mais personne ne lui faisait de reproches à haute voix.  

C’était cette attitude que Kazue réprouvait et dont elle parlait avec Mick. Elle ne comprenait pas pourquoi il fuyait encore, pourquoi il allait se sôuler dans les bars de nuit, pourquoi il ne luttait pas avec plus de force, pourquoi lui aussi semblait quelquefois ne plus y croire...  

Si l’amour entre Kaori et Ryô était aussi fort que tous semblaient le croire, que comprendre dans ce comportement ?  

 

Il n’entrait jamais dans la chambre de Kaori quand il était complètement ivre. Il attendait toujours d’être dégrisé.  

 

Alors, quand il revenait vers Kaori, tout le monde lui pardonnait ses excès. Son visage n’était pas livide, non il restait impassible, mais, dans ses yeux, il manquait une lueur, celle de la vie...  

 

 

 

Un jour, Ryô et Sayuri étaient seuls dans la pièce avec Kaori. Mick et Kazue se reposaient et Falcon et Miki avaient du aller faire un tour au Cat’s Eye. Un mois était presque passé... Un mois, c’est long quand on attend que quelqu’un se réveille. Un mois, 27 jours pour être précis, 648 heures, 38 880 minutes....bref, vous avez compris.  

Chaque seconde vécue dans l’angoisse, entre l’espoir et le renoncement.  

 

On entend de parler de coma qui dure des mois...voire, quelquefois des années. Mais on sait que plus le temps passe plus le réveil devient hypothétique, que le cerveau subit des lésions irréparables. Et pour les proches, malgré l’amour, l’amitié et tout ce qui nous relie à ces êtres chers, la lutte, l’espoir disparaît peu à peu, malgré la volonté, parce qu’on est encore là, dans la vie et eux n’y sont plus tout à fait. On se dégoûte de ressentir de telles choses...de s’entendre rire quelquefois, alors qu’on devrait pleurer...  

Un mois c’est affreux...on veut encore se battre mais on commence à sentir au plus profond de nous que tout devient extrêmement difficile. On a l’impression d’abandonner. Avant, on connaissait son impuissance et sa douleur, maintenant on en prend conscience dans tout son être. Avant ce n’était que des mots. On en connaissait la définition...On sentait que ce serait difficile, mais on ne savait pas.  

On ne pouvait pas savoir...  

Un mois, c’est un tournant...autant pour le malade que pour les proches.  

 

Ryô était dans sa position fétiche. Ses blessures étaient soignées. Les mains dans les poches, il contemplait cette journée de fin février. Rien ne semblait pouvoir interrompre son observation.  

Sayuri était silencieuse. Elle aussi fixait un point. Ce point c’était le dos de Ryô. Dans ces yeux, la colère alternait avec la tristesse.  

Le silence n’était troublé que par leur respiration et les lointaines motos qui passaient à l’extérieur. Le calme n’était qu’apparent.  

Les minutes s’égrenèrent et aucune des personnes présentes ne bougeait.  

 

Soudainement, la voix rauque d’être restée si longtemps muette, de l’homme s’éleva.  

« - Tu as quelque chose à dire ? ».  

Il n’avait pas changé de position. Il avait seulement senti le regard de Sayuri sur lui.  

 

Cette dernière ne bougea pas. Elle resta un moment sans parler, se demandant si ça valait le coup. Et puis, elle décida que oui. Elle le faisait pour Kaori.  

« - Je t’en veux. »  

« - Je m’en veux aussi. »  

 

Même voix monocorde. Aucun des deux ne bougeait. Cette conversation pouvait bouleverser leur vie, cela se sentait dans l’air, mais ils ne semblaient pas y prendre garde.  

Ils ne s’en rendaient pas encore compte mais il y avait un enjeu. Et la mise était ce qu’ils avaient de plus précieux : Kaori.  

 

Sayuri crut comprendre à quoi il faisait allusion et répondit :  

« - Non, je n’en t’en veux pas de ne pas avoir su la protéger. Kaori a toujours accepté les risques qu’elle prenait en restant avec toi. C’était sa décision. Je t’en veux de ne pas avoir su la rendre heureuse. »  

Ryô ne releva pas la dernière remarque.  

« - Tu ne m’en veux pas alors qu’elle est là par ma faute. Le ppcp, c’est ma drogue. Ce monde de tueurs, c’est le mien. Le professionnel, c’est moi...Si elle est là, c’est par ma faute. »  

« - Non, c’est la mienne...Je m’en veux pour ça. J’aurais du la ramener avec moi, la première fois qu’on s’est rencontré. J’ai été stupide, j’ai cru en toi, parce qu’elle croyait en toi. J’ai été lâche, je n’ai pas vu la vérité. Je m’en veux. »  

Ryô partit d’un léger rire sardonique.  

« - En fait, on s’en veut tout les deux...mais ça ne l’aide pas beaucoup, non ? »  

« - Toujours à rire Ryô...Rien de te touche vraiment. J’ai vraiment été idiote de me fier aux sentiments amoureux de ma soeur. Tu ne seras jamais capable de l’aimer comme elle le mérite. Tu ne lui apporteras que la mort et la souffrance. Si elle se réveille, ce ne sera que parti remise...soit pour elle, soit pour toi...un jour, elle ne se relèvera pas...que ce soit physiquement ou psychologiquement. »  

« - Pas si mais quand elle se réveillera. » Ryô y croyait toujours.  

« -...... »  

« - Que souhaites-tu entendre Sayuri ? Que je regrette qu’elle soit dans cette position. ? Que je regrette de l’avoir liée à moi ? Que je ne souhaite pas pour elle cette vie pleine de dangers ? »  

« - Je ne souhaite rien entendre de ta part, Ryô. Je ne veux que t’informer d’un fait : une fois Kaori réveillée, je l’emmène avec moi à New York... »  

 

Sayuri avait utilisé son ton le plus implacable, le plus froid, celui qui n’entraînait aucune réplique possible. Mais, elle s’attendait tout de même à une réaction de la part de Ryô. Peut-être pas une phrase, mais un tressaillement, un frémissement...quelque chose...elle venait quand même de lui dire qu’elle allait le séparer définitivement de Kaori.  

 

Mais non, rien. Il restait là à regarder stupidement à travers cette affreuse fenêtre.  

 

Un long silence s’installa entre eux. Sayuri en vint même à se demander s’il avait entendu ce qu’elle lui avait annoncé. Devait-elle le répéter ? Et puis quoi encore ? S’il n’entendait pas la seule déclaration importante, celle qui allait tout changer pour lui, s’il ne réagissait pas, tant mieux, après tout. Elle n’avait pas envie de se battre.  

Ou bien, au contraire, ne souhaitait-elle pas l’affrontement, lui dire ce qu’elle avait sur le cœur et découvrir véritablement le sien ?  

 

Elle en était là dans ses pensées, prête à redire la sentence, quand la voix sans timbre et blanche de Ryô s’éleva dans la pièce. Il n’avait pas changé de position, il regardait toujours par la fenêtre.  

« - Tu t’attendais à quoi Sayuri ? Que je te supplie de ne pas me l’enlever ? Que j’ai trop besoin d’elle ? Qu’elle m’est indispensable ? Je vais te dire un secret Sayuri. Cette décision de nous séparer, de me l’enlever, c’est une très bonne décision, elle me permet de résoudre mon plus grand dilemme… »  

Sayuri restait interdite. Elle s’attendait à une autre réaction de la part de l’homme. Tout le monde s’était-il trompé sur les liens qui l’unissaient à Kaori ?  

« - Je n’ai jamais su ce qui était le mieux pour elle : rester avec moi pour tenir la promesse faite à son frère ou la renvoyer à un monde normal ? J’ai toujours tout fait pour que le choix reste possible, marchant sur la corde raide, réagissant avec elle de façon étrange quelquefois, allant même jusqu’à la blesser pour ne pas tomber dans un sens ou dans l’autre. Je ne lui ai jamais laissé la possibilité de choisir véritablement son destin. Mais, même aujourd’hui, elle peut se retirer et rechercher le bonheur ailleurs. Elle n’a pas de sang sur les mains et, jusqu’à maintenant, sa seule faute c’est d’être ma partenaire.  

Je n’ai jamais réussi à choisir. En fait, je n’ai jamais accepté de faire le bon choix. Je sais bien qu’elle mérite mieux que la vie que je lui offre. Dés le début je n’aurais pas du l’accepter près de moi. J’aurai du la renvoyer dans la lumière depuis très longtemps. Chaque jour, j’y pense et je me dis que c’est ce que je dois faire….mais je n’y arrive pas. Quelque chose m’empêche de le faire.  

Je devrais dire que je préfère la savoir loin de moi en sécurité, mais je suis bloqué. J’ai besoin de sa présence, de son contact. Est-ce ça l’amour ? Mettre en péril la vie de l’autre par son propre égoïsme ? Elle est attachée à un pervers, un tueur, un homme sans passé, sans vie… Que puis-je donc lui apporter ? »  

 

Sayuri compris qu’il ne lui parlait pas à elle. Il laissait échapper des émotions qui étaient en lui depuis très longtemps. Il les laissait s’écouler parce que, lui aussi était terriblement inquiet de ne pas voir Kaori se réveiller, parce que, même si cette dernière ne l’entendait pas ce qu’il avait dire était trop important pour rester enfermé. Le coma de sa partenaire lui faisait prendre conscience de l’inéluctabilité du temps. Tout ce que nous ne disons pas aujourd’hui, si nous y tenons vraiment, reste en nous et s’amplifie. Et un jour nous regrettons de ne pas avoir oser, de ne pas avoir parler mais c’est trop tard.  

On ne sait même pas si on a bien fait de se taire.  

En le mettant devant une séparation prochaine inévitable, et pas de son fait à lui, Sayuri avait réussi à ouvrir la porte de son cœur.  

Tous ces événements faisaient que Ryô était en train de se confier. A elle, à lui-même et surtout à Kaori.  

 

Sayuri décida de ne pas l’interrompre, pas encore. Sa résolution d’emmener Kaori avec elle semblait inébranlable, mais, à cause de l’amour que sa sœur avait pour cet homme, elle devait l’écouter jusqu’au bout.  

Ryô ne semblait même pas s’apercevoir que Sayuri était toujours présente. Il continuait de parler.  

« - Alors décider de l’emmener loin de moi, c’est très bien. Je ne comprends pas que personne n’ait pris cette décision il y a bien longtemps. Je vais même te dire, ce sera parfait pour moi. Je vais pouvoir enfin reprendre mes habitudes. Me lever à midi, manger n’importe quoi, regarder les films pornos à la télé sans me cacher. Sortir tous les soirs sans risque d’être crié quand je rentrerais. Je vais même pouvoir ramener des filles chez moi. Tout ce que je me refuse de faire vraiment tant qu’elle m’accompagne. (ah bon, il n’essaye pas de le faire quand elle là ?) Enfin reprendre cette vie que j’avais avant que Kaori ne déboule et ne bouleverse mon existence. »  

Sayuri ne pouvait plus tenir. Il était en train de dire que Kaori était un boulet qui l’empêchait de vivre comme il l’entendait. Il lui donnait sa bénédiction pour qu’elle l’emmène. Mais qu’est ce qu’il voulait vraiment ? On croyait qu’il l’aimait et là, il était prêt à faire sa valise pour qu’elle parte à New York, sur un autre continent. A l’entendre s’exprimer, on avait même l’impression que c’était ce qu’il attendait depuis longtemps.  

 

Confession ou pas, Sayuri dut intervenir. Pleine de rancœur, elle lui lança :  

« - Tu ne l’aimes donc pas ? Tu attends donc que ça, qu’elle parte ? Mais quel genre de monstre es-tu Ryô ? »  

Il haussa les épaules. Premier geste qu’il faisait depuis le début de la conversation, mais ce fut tout.  

« - Aimer ? ? ? Vous êtes des femmes modernes, indépendantes et vous n’avez que ce mot à la bouche… Amour, la femme que j’aime, l’homme que j’aime, amour éternel…. Que des mots, sans aucune signification. Comme pourrais-je aimer Kaori, dis-moi ? »  

Sayuri en resta interdite. Comme pouvait-il aimer Kaori ? C’était lui qui demandait ça. Des larmes de dégoût commencèrent à poindre de ces yeux. Cet homme la révulsait.  

Ryô, toujours à la contemplation du paysage extérieur, ne vit pas le visage de son interlocutrice. Il continua.  

« - Me demander à moi d’aimer quelqu’un…Moi qui a commencé ma vie en apprenant à tuer et à détruire… Moi qui n’ai connu que la mort, qui n’a jamais eu de mère pour me prendre dans ses bras, pour me consoler de mes peines, qui n’a jamais pu parler avec mon père de jeux et de sports…La seule personne qui comptait, Kaibara, j’ai du finir par le tuer parce qu’il nous avait pris pour cible, parce qu’il avait tué Hideyuki, parce qu’il était devenu rempli de haine et fou. Et tu oses me demander si j’aime Kaori ? »  

 

Tout d’un coup, Sayuri prit conscience qu’elle ne connaissait pas Ryô. Elle ne savait rien de lui. Elle n’arrivait pas à le cerner parce qu’il n’était pas de son monde. La seule personne qui réussissait à avoir assez d’empathie pour lui c’était Kaori. Malgré les phrases blessantes qu’il était en train de prononcer, elle pu ressentir toute la solitude de cet homme, toute la noirceur qui l’habitait et toute la lumière à laquelle il aspirait. Elle commençait à le percevoir comme Kaori le voyait, à comprendre sa détresse.  

« - Je suis un tueur. Je vis dans la fange. Je fais ce que les autres ne veulent pas faire. Je n’ai pas de nom, pas de vie. Je suis une ombre parmi les déchets. Et tu crois que j’ai le droit d’aimer Kaori ? De lui imposer tout ça en me persuadant que je pourrais toujours la protéger ? » Il partit d’un léger rire nerveux qui s’arrêta soudainement. « Désolée ma belle, je ne crois pas aux contes de fée. Je connais trop la réalité. Emmènes là donc, c’est ce que tu peux faire de mieux pour elle. »  

 

Sayuri ne comprenait pas. Il venait d’accepter le fait de libérer Kaori. Elle aurait du être heureuse, elle avait gagné la bataille. Et pourtant…Ryô avait ébranlé sa certitude. Il avait parlé du droit d’aimer Kaori. Malgré le ton éteint de l’homme, elle avait ressenti sa peine. Une peine qu’elle entendait à chaque fois que sa sœur parlait de son partenaire. Sayuri souhaitait reprendre Kaori avec elle, mais elle était aussi honnête que cette dernière et elle sentait que tout n’était pas encore sortit. La conversation entre elle et Ryô n’était pas encore close.  

Elle revint donc à la charge, en attaquant autrement.  

« - Pourquoi ne lui as-tu jamais fait part de tes sentiments, quelqu’ils soient ? Pourquoi n’as-tu jamais été honnête avec elle ? »  

« - Que veux-tu encore que je te répondre ? Cette gamine a déboulé dans ma vie comme un météore. Je l’ai recueillie alors qu’elle venait de perdre son frère, mon meilleur ami. Nous avions une perte immense en commun. Je me suis peut-être dit que je pourrais remplacer son frère, qu’enfin j’allais pouvoir avoir quelqu’un à coté de moi. J’ai été égoïste, dès le début. Je savais que ce que je faisais était mal, mais j’avais besoin d’une présence. Quand je me suis rendue compte de la façon dont je m’étais comporté, il était trop tard. Je croyais que je pourrais toujours la voir comme une sœur ou une simple partenaire et elle était beaucoup plus que ça. Sa joie de vivre, son courage, sa simplicité, sa confiance, son désir, sa beauté était une drogue, un poison insidieux et doux. Tout ce temps passé avec moi, à me supporter, à me soutenir, à m’aider….à m’aimer… »  

Sa voix s’était cassée, comme si cet aveu lui coûtait énormément. Reconnaître que quelqu’un l’aimait, lui, pour ce qu’il était, pour ces qualités et malgré ses défauts, comme s’il n’y avait pas droit et que l’avouer c’était risquer de le perdre.  

« - Je connais ses sentiments pour moi. Je croyais pouvoir tout contrôler. J’ai honte de le dire mais j’ai même joué avec elle. C’était si inhabituel pour moi, si plaisant de sentir cette chaleur humaine et de ne pas rien avoir à donner en retour. J’avais honte mais c’était si grisant. Elle m’aime de façon si inconditionnelle. Toucher son amour, ce serait comme se brûler, ce serait risquer de le détruire…Je la faisais souffrir un peu consciemment, beaucoup inconsciemment…Mais que pouvais-je vraiment faire d’autre ? Aurais-je du être assez inconscient pour lui dire « Kaori, j’ai besoin de ta présence pour me sentir en vie. Je t’aime…mais, au fait, si quelqu’un l’apprend je ne donne pas cher de ta peau et donc de la mienne? » Elle est forte, mais pas à ce point ! Je tiens trop à elle pour la laisser se sacrifier pour moi…ce qu’elle ferrait sans hésiter, cette idiote, même maintenant, alors si elle savait qu’elle m’est infiniment précieuse, qu’elle est ma raison d’être là! ! »  

 

Il l’avait dit. Sayuri en était bouleversée. Il venait d’avouer pourquoi il se retenait de parler à Kaori. Il était prêt à sacrifier son unique possibilité de rédemption, l’unique chose qui le maintenait encore en vie, qui lui donnait une âme, qui le faisait être humain simplement pour s’assurer de la tranquillité de la femme qu’il aimait, pour lui éviter de souffrir.  

« - Tueur je suis, tueur je resterai. S’il faut renoncer à sa douce et chaleureuse présence à coté de moi, à sa confiance déplacée en moi pour lui laisser une chance d’être heureuse, alors je le fais avec plaisir…de toute façon, je ne regretterais pas d’être réveillé chaque matin par une massue et puis, avec un peu de chance, Saeko voudra peut-être abandonner Toshio quelques soirs…. »  

Un silence, puis il reprit, comme s’il venait de se rendre compte de ce qu’il avait dit…de tout ce qu’impliquait sa déclaration.  

« - Ce n’est pas un sacrifice de ma part, je tiens à le préciser. Avoir des sentiments pour une femme dans mon milieu, c’est se mettre en danger… »  

« - Elle est donc vraiment une faiblesse pour toi… » Le ton de Sayuri était songeur. Tout ce qu’avait dit Ryô lui avait donné une nouvelle perspective. Tout avait été si sincère : sa solitude, ses peurs, ses interrogations. Et au dessus de tout ça, la jeune femme avait surtout senti l’amour qu’il désavouait de toutes ses forces, un amour étrangement pur, un amour qui ne méritait pas d’être caché. C’était si stupide. Il avait à porter de main ce que tout le monde recherche plus ou moins, et il s’en détournait. Il avait de bonnes raisons et d’autres mauvaises. Sayuri sentait surtout la peur, pas celle de mourir, mais celle d’aimer. Mais là, elle ne pouvait rien faire. Seule Kaori avait assez d’ascendant sur Ryô pour lui ouvrir les yeux, mais fallait-il encore que cette dernière sorte de son coma pour avoir une discussion sérieuse avec son partenaire.  

Ryô crut que cette pensée lui était destinée. Hiroshi lui avait dit la même chose. Il n’avait pas trop compris sur le moment, il pensait alors surtout à la façon de sauver Kaori. Mais maintenant qu’il était là, que son cœur avait parlé malgré lui, tout devenait limpide.  

« - Non, elle n’est pas ma faiblesse. Elle est ma force. Elle est la seule chose qui me laisse croire qu’il y a encore de l’espoir en moi, que je suis un être humain. Elle est la seule qui me donne envie de lutter…Je ne suis pas romantique. Si tu l’emmènes loin de moi, je continuerais à vivre...l’existence sera même peut-être plus facile pour moi…mais il me manquera une raison, mon âme… »  

 

Sur ces mots le silence s’installa dans la chambre. Sayuri ne savait plus quoi dire. Elle avait entendu la plus belle déclaration de sa vie. Simplement parce que ce n’était pas un serment d’amour éternel, ce n’était pas des mots cent fois rabâchés, c’était les mots du cœur de Ryô avec ces vices et ces vertus. Elle avait les larmes aux yeux, mais ce n’était plus de la colère maintenant, c’était la peine de savoir que Ryô et Kaori n’arrivaient jamais à se rencontrer, qu’ils gardaient leurs distances et qu’ils souffraient chacun en silence alors qu’ils avaient tant à partager ensemble.  

 

Ryô, quant à lui, se demandait ce qui avait bien pu lui prendre. Pourquoi donc avait-il dit tout ça ? Il avait réussi à résister pendant presque 10 ans et là, il avait dit à Sayuri tout ce qu’il avait sur le cœur.  

Pourquoi avait-il eu si mal quand Sayuri lui avait dit qu’elle allait emmener Kaori avec elle. Après tout, n’était-ce pas ce qu’il voulait ? Qu’elle s’éloigne de lui ? Ne lui avait-il pas signifié la fin de City Hunter, juste avant l’incident ?  

 

Pourquoi n’avait-il pas pu garder ses pensées pour lui ?  

Sa douleur augmentait de jour en jour. Il pensait à Kaori tout le temps, à ce qu’il lui avait fait subir, à sa place dans son être, à leur vie. Il ne savait plus quoi faire pour qu’elle se réveille. Il avait toujours confiance en elle, indéfectiblement, mais la petite voix insidieuse était revenue, lui assurant qu’il ne pouvait rien faire pour elle, qu’il ne la méritait pas, qu’il ne savait ni la protéger, ni l’aimer.  

Quand Sayuri lui avait donné la possibilité de parler, il n’avait pas réfléchi, tout était sorti, comme quelque fois la fatigue et l’inquiétude ouvrent un passage sur les pensées les plus secrètes. Mais il savait qu’il n’aurait pas du.  

Il était toujours devant sa fenêtre mais cela faisait bien longtemps que le jardin d’hiver avait été remplacé par le visage souriant de Kaori.  

Comment aimer quand on a peur de ses propres sentiments ?  

 

« Ryô… »  

Il rêvait.  

Cette voix.  

Ce n’était pas possible.  

 

 


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