Chapitre 12 :: 12

Publiée: 18-04-04 - Mise à jour: 18-04-04

Commentaires: L'aventure continue ... ;) Merci à vous tou(te)s ^^

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Lorsque les blocs gigantesques de pierre commencèrent à immerger, Ryô sût immédiatement qu’il menait la chaloupe dans la direction voulue. Tortuga. Ville de pirates et de débauches. Chez lui quoi !  

Il avait hâte de pouvoir prendre un bon bain, de s’empiffrer et de boire jusqu’à plus soif. Et surtout en charmante compagnie. Un bon lit…avec une jolie donzelle à ses côtés. *soupir*  

L’imagination de Ryô vagabonda gaiement au fil de l’eau, seul moyen de ne pas sombrer dans les ténèbres encore plus effrayantes que cette nuit noire. Malgré cette obsession libidineuse à imaginer les formes alléchantes d’une belle brune, son esprit cartésien veillait à ne pas oublier le moindre détail de cette journée cauchemardesque.  

Tout en continuant à diriger le bateau à travers les rochers, Ryô recensait avec précision ses connaissances. Indya, Mélusine, Kairi, Rosi-Chan, NJ, Mikomi, Sophie, …… Ro, Ayumi, Kaiko, Leeloo, Sehkmet, Lifetree …… et encore tout autant de charmantes demoiselles. Des dizaines de visages défilaient devant ses yeux gourmands. A qui allait-il proposer une soirée inoubliable ?  

En tout cas, tant qu’aucune d’elles n’utilisaient de massues en tout genre !  

La frimousse de la Kaori qu’il avait vu la première fois se superposa à ses visions. Intérieurement, il sourit, il ne s’était pas trompé : elle était quand même bien mignonne ! Mais l’image se brouilla. Le sourire angélique de la candide jeune femme s’évanouit et fit place à une expression agressive.  

Un frisson lui parcourut l’échine. Par réflexe, Ryô émit un grognement. Son crâne portait sûrement encore les marques de la colère démesurée de cette mégère ! Le souvenir de la massue le conforta dans son idée première : jamais il n’avait connu telle furie.  

Curieux, et légèrement inquiet tout de même, il jeta un coup d’œil à Kaori.  

Celle-ci, assise en face de lui, gardait obstinément la tête baissée, les mains jointes sur son cœur. Tout aussi harassée, son chagrin n’avait aucune commune mesure avec sa fatigue, mais elle essayait tant bien que mal de rester impassible.  

Ryô soupira. Non habitué à s’épancher pour les malheurs d’autrui, il fit cependant un gros effort et décida d’engager la conversation. Sa mission était de la protéger et de prendre soin d’elle, et il serait digne du seul compagnon de route qui l’avait aidé à se reprendre en main.  

-« Je dois te remettre ça de la part de ton frère. »  

La jeune femme leva aussitôt la tête et sa respiration s’accéléra. Fébrilement, elle attrapa l’écrin que lui tendait Ryô. Ses épaules s’affaissèrent sous le poids démesuré de sa tristesse, une larme perla au coin de l’œil.  

Durant de longues secondes, Kaori fixa la bague. Elle ne pleurait pas. Elle ne dit rien.  

Ryô se frappa le front d’une main, maudissant son incapacité à gérer ce genre de situations. Puis, prenant conscience qu’il avait failli, dans un geste inconsidéré, perdre une des rames du bateau, il se pencha sur le côté pour la rattraper. Le bateau tangua quelque peu, sous le poids de celui-ci.  

La rame, emportée par les remous de l’embarcation, prit de l’inertie et frappa Ryô en plein front alors que celui-ci essayait de reprendre son équilibre. Grommelant et maudissant les cieux, il attrapa la rame d’un geste brusque et se remis en position assise.  

Agacé, il respira une bonne bouffée d’air afin de reprendre son calme. Kaori n’avait toujours pas bougé, ni émis le moindre son. Alors, affichant un sérieux déroutant, Ryô expliqua la situation avec gravité.  

-« Makimura s’est fait tué par une organisation de malfrats qui sont spécialisés dans le trafic en tout genre : drogue, esclaves,… Tu es en danger, tu es devenue une ennemie à abattre. Il faut t’enfuir. Je me chargerais personnellement de te mettre en sécurité, loin d’ici. »  

Ryô débita les mots de façon si naturelle, qu’elle resta stoïque. Lentement mais incontestablement, le sens profond de la phrase imprégnait sa chair et son âme. Son destin, sa vie était bouleversée et elle se trouvait à la croisée des chemins. Et cet homme, qui était-il vraiment? Pourquoi son frère lui avait accordé toute sa confiance ? Qu’allait-il devenir ?  

-« Et toi ? » s’exclama-t-elle soucieuse.  

La question dérouta totalement Ryô. Alors, qu’elle avait traversé tant d’épreuves, alors qu’elle se retrouvait seule au monde, obligée à fuir, changer de vie, elle pensait à lui !? A sa sécurité ? A sa vie… Se pouvait-il que tant de générosité soit possible ? Qui était-elle ?  

Amusé par tant de candeur et troublé par sa bonté d’âme, il lui répondit :  

-« Moi ? Je ne partirais pas d’ici. C’est chez moi. »  

Kaori le regardait, de ses grands yeux innocents. Aucun son ne pût sortir de sa gorge nouée.  

La sentence était tombée.  

Soit ! Elle resterait aussi digne et courageuse que son frère adoré. Non sans difficulté, elle ravala ses sanglots. Il lui semblait avoir avalé une braise incandescente tant sa gorge s’embrasait de secondes en secondes.  

-« Il était ma seule famille » réussit-elle à articuler.  

-« Oui, il parlait souvent de toi. »  

-« Vous le connaissiez bien ? »  

Les yeux de Kaori se mirent à pétiller. Nul doute qu’elle porterait le deuil très longtemps, mais l’évocation de son frère lui redonnait espoir et courage. En aucun cas, elle n’oublierait.  

-« On travaillait ensemble parfois. »  

-« Vous étiez partenaires ? »  

-« Oui, on peut dire ça. » répondit un Ryô énigmatique.  

Kaori releva la tête. La voix de la jeune femme se fit plus assurée, plus déterminée que jamais.  

-« Je ne veux pas partir non plus..»  

-« … »  

-« Car j’ai maintenant des comptes à régler. Et il te faut un nouveau partenaire ! »  

A aucun moment, l’idée d’avoir été si brutal dans la manière d’annoncer les faits ne lui avait traversé l’esprit. Ryô était dans son élément, et rien de tout cela ne le surprenait. Ce qui l'abasourdit le plus, ce fut avec quel spontanéité et quelle détermination, Kaori changea son existence à cet instant. Un petit bout de femme qui résistait et défiait la plus cruelle des organisations de pirates.  

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