Chapitre 34 :: 34

Publiée: 31-08-04 - Mise à jour: 31-08-04

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Kaori pressa le pas quand elle s’aperçut que les faciès des passants prenaient une autre forme. Elle avait pu remarquer, dans la journée, quelques enfants joyeux aux bras de leurs mères, ou deux trois vieillards, et rien ne prouvait réellement qu’en ces instants, elle se trouvait dans la ville des pirates.  

Mais faisant place aux mines joyeuses, apparaissaient maintenant des faces menaçantes, des hommes aux traits tirés et aux mains calleuses, des épées à la ceinture et des bouteilles en main.  

Son pas se raidit. Une légère angoisse l'enlaça sournoisement.  

Kaori remonta le col de sa veste et rentra la tête dans les épaules, se faire la plus discrète possible lui semblait évident.  

Malheureusement, les rues s’obscurcissaient crescendo. Kaori ne pouvait trouver Ryô dans ce dédale de poussières et d’ivrognes sans se faufiler un peu de partout.  

Une main brutale se posa sur son épaule.  

-« Hey là Petit ! Où tu penses aller là ? »  

Le cœur de Kaori manqua quelques battements. Déglutissant avec difficulté, elle leva les yeux et respira à fond.  

L’homme qui se tenait là, dégageait une forte odeur de poisson. Ses cheveux poisseux et blafards lui retombaient sur l’unique œil qui lui restait. Un bandeau lui barrait le visage, et une cicatrice lui déformait la joue.  

La première chose que pensa Kaori fut : hideux. La deuxième : il a une haleine de chien !  

-« Je t’ai posé une question ! » Rugit l’inconnu.  

-« Nulle part Monsieur. » bégaya Kaori, qui néanmoins, ne voulait pas concéder à montrer sa peur.  

-« Insubordination ! » Tonitrua-t-il !  

Puis il tangua sur le côté et trébucha.  

-« Oups ! Ma bouteille ! »  

Il serra son précieux bien sur son cœur, et en profita pour avaler quelques gorgées de rhum.  

La tête de Kaori pencha sur le côté, tandis qu’une libellule traversait le décor…  

Puis, elle profita de la situation pour s’éclipser. Elle fit quelques pas en arrière puis reprit sa route, laissant l’ivrogne à ses rêves de gloire.  

Mais aussi saoul qu’il était, l’homme n’en était pas moins dangereux. En trois foulées, il rattrapa Kaori et lui agrippa le poignet.  

-« Tu n’as pas répondu à ma question. » Persifla-t-il.  

La tête en arrière, Kaori se débattit vigoureusement, mais la poigne de son adversaire était bien trop puissante.  

-« Lâchez moi ! Grosse brutasse puante ! »  

La pression sur son bras s’accentua, arrachant un grognement à la jeune femme. Son cœur s’accéléra.  

Se penchant un peu plus, le pirate la scruta d’un regard mauvais. Il montra ses dents jaunâtres en une grimace qui se voulait sourire.  

-« Qu’est-ce qu’un petit avorton tel que toi fiche ici ? »  

-« Lâche là ! »  

La voix se fit impétueuse. Une ombre se profila dans la faible lueur que projetaient les lampes.  

D’un pas assuré, Falcon s’avança et posa sa main sur la nuque de l’agresseur. Un rictus de douleur déforma les traits de son visage, perdant illico de sa belle assurance.  

-« Insubordination ! C’est une mutinerie !! » Beugla le faux capitaine.  

Agitant les bras au ciel, comme pour demander à la Lune d’être témoin de son malheur, son œil se fixa un instant sur la bouteille qu’il brandissait, et il cessa immédiatement de s’agiter. Il regarda avec gourmandise le goulot, et s’en empara avec frénésie.  

Falcon et Kaori se regardèrent, éberlués. Une deuxième libellule vola rejoindre sa congénère.  

Umibozu agrippa le pochtron par le col de sa veste et le poussa vigoureusement, dégageant le passage.  

Celui-ci valdingua sur quelques mètres avant de heurter un badaud. Il se redressa et le prit par l’épaule.  

-« Hey là Petit ! Où tu penses aller là ? »  

…  

Falcon et Kaori se mirent en marche. La jeune femme se confondit en remerciements.  

-« Merci Falcon. Merci infiniment. »  

-« Oumpfff….. C’est…c’est rien. »  

Son teint avoisina le rouge carmin.  

Après de longues minutes silencieuses, Umibozu osa prendre la parole.  

-« Ryô va bien. »  

Kaori hocha la tête, plus préoccupée par ce sentiment de trahison que lui avait infligé Ryô, et sa décision de l’abandonner, que par l’incident passé.  

-« Vous devez lui faire confiance. »  

La voix calme et réfléchie de Falcon la tira de ses rêveries. Cette simple phrase provoqua sa colère et elle s’emporta :  

-« Lui faire confiance ? Alors qu’il ne m’accorde même pas la sienne ! … Il ne me considère pas comme sa partenaire.»  

Sa voix mourut en un murmure. Elle ravala ses larmes, tentant de rester digne et fière.  

-« C’est parce qu’il vous considère plus qu’une simple partenaire. »  

De la fumée entoura, d’un halo argenté, le crâne du géant. Ce genre d’aveu le gênait horriblement.  

Kaori le regarda avec de grands yeux effarés. Mais de quoi parlait-il donc ?  

Elle leva un doigt interrogateur quand Falcon lui désigna du menton, le bout de la ruelle.  

-« Il est là. »  

Elle tourna la tête promptement et des éclairs zébrèrent son aura. Affalé dans un tas de cartons, Ryô chantonnait, chope de bière à la main.  

-« Je vais le tuer. »  

Et d’un pas menaçant, tenant une massue « Remède contre les états d’ébriété sévère », elle s’approcha de lui.  

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