Hojo Fan City

 

 

 

Data File

Rated R - Prose

 

Author: Mercury80

Status: Completed

Series: City Hunter

 

Total: 49 chapters

Published: 02-10-20

Last update: 22-11-20

 

Comments: 32 reviews

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DrameRomance

 

Summary: "Un seul être vous manque et tout est dépeuplé..." Un an après la disparition de la lumière de sa vie, comment Ryo, et la bande, a-t-il repris le cours de sa vie ?

 

Disclaimer: Les personnages de "Message in a bottle" sont la propriété exclusive de Tsukasa Hojo.

 

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   Fanfiction :: Message in a bottle

 

Chapter 18 :: Chapitre 18

Published: 19-10-20 - Last update: 19-10-20

Comments: Bonjour, voici la suite de l'histoire. Merci Patatra pour ton commentaire d'hier. Je qualifie Sam de dur dans le sens où elle se laisse moins porter par son cœur et beaucoup plus par la raison. elle n'a pas non plus hésité à recadrer verbalement notre nettoyeur ou Miki quand c'était nécessaire à leurs débuts. Elle ne se bat pas assez pour l'homme qu'elle aime mais elle est empêtrée dans une mémoire sans passé avec la peur de ce qui peut en surgir et le besoin de protéger sa fille. J'ai essayé de me mettre à sa place en écrivant cette histoire, à celle de Ryo aussi et de tous les autres personnages (c'est dur d'être à la fois amnésique et veuf, d'alterner entre les deux pour trouver les réactions réalistes). Donnant plutôt dans le réalisme, les choses ne se feront pas en un claquement de doigts). Quant aux rebondissements éventuels, ah ah motus et bouche cousue ;). Il reste trente chapitres à venir c'est le seul spoiler que je donnerai. Pour moi, les fics sont comme les romans, j'aime laisser l'histoire se construire et voir où on nous emmène. Je comprends en revanche que dans des fics comme celle-ci ce soit déroutant pour le lecteur mais les choses ont besoin d'être mises en place. Bonne lecture et merci pour vos commentaires à tous^^

 


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Chapitre 18  

 

Décontenancé, Ryo regarda tout autour de lui. Il était entré dans la chambre de Kaori sans même le réaliser. Alors qu’il avait tourné autour pendant des mois, que le plus loin qu’il avait été avait été de toucher la poignée sans pouvoir la tourner, ce soir-là, il était rentré dans sa chambre.  

 

Nostalgique, il ferma les yeux et prit une profonde inspiration. Son cœur sombra. Alors ici aussi, il ne restait plus rien de son odeur… Il ne lui restait que les meubles bien en place, son lit encore fait du jour où ils avaient fui l’appartement, la couette simplement froissée à l’endroit où il s’était assis ce premier avril, la dernière fois qu’il avait pénétré dans cette pièce, sortant de là avec le cadre photo. Il avança et trouva sur l’étagère l’écrin qui contenait la bague de Kaori. Il l’observa un long moment avant de s’en saisir et de l’ouvrir. Elle n’avait pas bougé, pas un gramme de poussière pour celle qui avait été conservée bien à l’abri de la lumière et de l’extérieur. Elle était toujours aussi belle et aussi porteuse de souvenirs.  

 

Il repensa au jour où Maki lui avait montré cette bague. C’était juste avant sa mort. Il lui avait alors raconté comment Kaori était entrée dans sa vie, petite fille orpheline que son père avait recueillie et adoptée alors qu’il avait tué son père biologique… avant de mourir à son tour quelques années plus tard puis Hide. La mort l’avait toujours poursuivie, entourée et il avait pensé, naïvement, qu’il saurait toujours l’en protéger puisque la Faucheuse ne voulait pas de lui, semblait même le fuir… Il s’était trompé et Kaori avait été emportée à son tour.  

 

Il réprima un frisson et s’assit sur son lit, au même endroit qu’un an auparavant. Il pouvait se revoir, lettre en main découvrant les derniers mots que la femme qu’il aimait avait jetés sur papier pour lui, pour qu’elle puisse lui laisser, par delà la mort, un message d’amour, un message de vie, un message d’espoir… Vis, aime, ris, espère, quatre mots qui résumaient bien sa philosophie, quatre mots qui avaient pénétré dans sa vie en même temps que la tornade rousse, s’imposant à lui progressivement. La vie avant Kaori n’avait rien à voir avec la vie avec Kaori. Le mot vivre avait pris tout son sens avec elle, encore plus les derniers mois où il avait accepté ce qu’il avait toujours voulu occulter : qu’elle l’aimait, qu’il l’aimait, qu’ils pouvaient devenir quelque chose et être heureux malgré le danger.  

 

Il avait mis sept ans pour accepter l’évidence, sept ans pour accepter qu’aimer n’était pas s’affaiblir, que tenir à quelqu’un n’était pas un handicap mais une force, que croire en l’avenir n’était pas une lubie. Il avait voulu mettre toutes les chances de leur côté en gardant la tête froide, se disant que l’attente ne rendrait le passage à l’acte que meilleur mais voilà, il s’était retrouvé au pied de la scène, seul comme un con, le cœur brisé, l’âme amputée de sa moitié, à voir le mirage de sa vie, de leur vie se dérouler juste là devant lui sachant que ce ne serait que cela, un mirage.  

 

- Je n’aurais pas dû oublier que la vie était courte, Kaori. J’ai l’impression d’être comme Icare, d’avoir voulu toucher le soleil mais, au final, c’est toi qui en a payé le prix, ce sont tes ailes qui ont été brûlées et toi qui t’aies noyée…, soupira-t-il.  

- Je m’en veux tellement…  

 

Sentant la douleur remonter, il posa les coudes sur ses genoux, la tête dans ses mains et ferma les yeux pour la maîtriser. Au bout d’un très long moment, il se redressa et fixa son image dans le miroir. Il voyait un homme devant lui, un homme seul et abattu, un homme que la vie n’avait pas épargné mais qui s’était toujours relevé, un homme qui avait joué les crétins finis et les chevaliers au grand cœur, un homme qui avait séduit des centaines de femmes sans importance et repoussé la seule qui comptait. Il voyait l’homme que Kaori avait aimé, celui en qui elle avait cru, lui confiant sa vie, les yeux fermés dès leur première rencontre. Elle avait vu en lui au-delà des miroirs déformants qu’il avait mis en place et qui en avaient leurré plus d’une. Elle les avait même retournés contre lui et l’avait obligé à se regarder en face, sans fard, sans masque, juste lui, Ryo Saeba, l’homme.  

 

Elle l’avait sondé, déblayé, dépoussiéré, consolidé, morceau par morceau comme on traite une découverte archéologique. Elle ne s’était pas laissée avoir par la surface, elle n’avait pas eu peur de l’obscurité ni craint ses attaques pour rester caché au reste du monde. Elle l’avait entouré, rassuré, aimé. Elle l’avait réchauffé, étayé, écouté. Elle avait été son soutènement, ses murs, son toit. Elle avait été ses racines, son terreau et son tuteur. Il se mit à rire à l’évocation de toutes ces images. Elle l’avait simplement aidé à évoluer, à grandir pour devenir un être humain dans toute son essence.  

 

C’était ce qui rendait les choses si difficiles aujourd’hui. Il avait pleuré sa disparition, avait maudit sa décision d’aller rechercher un enfant fictif, avait même envisagé pendant quelques minutes de la rejoindre avant de lire sa lettre et de faire ce qu’elle lui demandait. Vivre sans elle était compliqué, douloureux mais il avait vu le regard de ses amis et avait réussi à masquer tout cela pour eux, pour le bébé qui allait arriver, pour Miki qui faisait le deuil de son amie et de son enfant, pour Mick qui culpabilisait de ne pas l’avoir forcée à monter avec eux… il avait feint pour eux d’aller mieux, d’avoir repris le cours de sa vie et, finalement, s’était laissé prendre à son propre jeu. Il avait fallu l’arrivée d’une deuxième femme dans sa vie pour tout chambouler.  

 

Drapé de sa cape d’invincibilité, il avait bien caché à tous à quel point il souffrait, même à lui-même. Pris dans ses rituels, il avait réussi à garder la présence de Kaori tout autour de lui, dès le matin au réveil jusque dans ses rêves ou l’assouvissement de ses pulsions sexuelles. Il n’avait touché que son corps à elle au travers d’images qui lui semblaient bien réelles, n’avait joui qu’avec elle en tête. Les quelques corps féminins qu’il avait tripotés pour jouer le jeu dans les cabarets n’avaient eu aucun intérêt pour lui, quelques caresses, baisers dans le cou mais rien de plus malgré des propositions alléchantes. Monsieur Mokkori ne s’était perdu dans aucune antre chaude et humide.  

 

- Tu saurais me dire, toi, pourquoi elle ?, demanda-t-il dans le vide comme si sa rouquine était là avec lui.  

- J’ai l’impression que tu es là, Kaori, que tu m’encourages à avancer. Est-ce le cas ?  

 

Il prit la chaise à son bureau et la retourna, s’asseyant dessus à califourchon, le menton posé sur ses mains appuyées sur le dossier, le regard perdu dans le vague. Sam… Il y avait eu ce quelque chose de particulier entre eux dès leur premier rencontre. Il s’était senti à l’aise avec elle, avait eu envie de rire, plaisanter, échanger sans se forcer. Il n’avait pas prêté attention sur le coup mais il avait aimé la tenir contre lui les quelques instants qui avaient suivi leur atterrissage sur le trottoir. Il avait ressenti une sorte de chaleur réconfortante. Ca avait été plaisant, si plaisant qu’il avait brièvement repensé à elle les jours qui avaient suivi avant de la revoir.  

 

L’entrée dans sa vie avait bouleversé l’ordre établi des choses parce qu’elle ne l’avait pas laissé insensible alors qu’elle n’avait rien fait de particulier si ce n’était se défendre. Avait-il ressenti sa détresse ? Avait-il inconsciemment reconnu une âme esseulée comme lui ? Etait-ce tout ce qui la rapprochait de Kaori qui l’avait ému, rendue proche, accessible ? Elles avaient des points en commun certes mais beaucoup de différences aussi. Non, il ne cherchait pas Kaori à travers elle. Elle avait peut-être juste les mêmes capacités à voir en lui et à déverrouiller les cadenas de son cœur et lui, un peu moins de résistance à les tenir fermés… parce que Kaori était passée par là avant et qu’il devait vivre pour elle.  

 

- Il m’a fallu des années pour reconnaître ce qui existait entre nous, Kaori, des années et on n’a même pas pu en profiter. Aujourd’hui, j’ai l’impression d’être prêt à faire un pas vers elle, à essayer d’engager quelque chose pour voir où ça peut nous mener et la seule chose qui me retient, c’est la culpabilité de ne pas t’avoir donné la même chance.  

 

Sa seule réponse fut le silence. Il ricana légèrement. En fait, il n’avait pas de réponse à attendre car il l’avait déjà eue un an plus tôt… Vis, aime, ris, espère, voilà sa réponse. S’il en doutait, il suffisait de se souvenir de qui était Kaori. Partant de là, il pouvait la formuler de lui-même : cesser de culpabiliser, vivre chaque jour qui lui était donné, accepter tous les bonheurs qui se présentaient à lui, petit ou grand, se pardonner.  

 

- J’ai compris… Je t’aime, Kaori. Je t’ai toujours aimée. J’ai beaucoup feint mais mes sentiments étaient réels. C’est peut-être tôt, ça peut paraître insensé mais je crois que je ressens quelque chose pour Sam, quelque chose qui pourrait être profond si on a du temps., lui avoua-t-il.  

- Ca me fait peur. Je ne veux pas t’oublier parce que ce qu’il y avait entre nous était unique mais j’ai peur d’oublier en lui laissant la place. D’un autre côté, renier ce qui se passe, c’est te renier aussi alors je me sens coincé. Enfin, j’étais coincé avant de comprendre…, soupira-t-il.  

- Elle me permet de respirer, Kao, comme tu le faisais et, si elle ne manie pas la massue, elle n’a pas peur de me rentrer dedans. Elle sait aussi me laisser de l’espace comme tu le faisais. Je ne sais pas si elle serait prête à faire les mêmes sacrifices que toi mais si je ne lui demande pas…, lâcha-t-il, faisant claquer la boîte de la bague.  

 

Il se releva et reposa l’écrin fermé sur l’étagère. Il observa toute la pièce comme pour la photographier, se souvenant de petits moments passés ici. Il n’y était que peu venu quand elle était éveillée et principalement dans des moments douloureux comme lorsque Hide avait été soupçonné d’avoir dealé de la drogue. Le reste du temps, c’était la nuit quand elle dormait. Il la regardait endormie, les seuls moments où il n’avait pas à feindre, où il pouvait laisser l’amour qu’il éprouvait pour elle transparaître sur ses traits, sourire tendrement, la toucher à de rares occasions.  

 

La prochaine fois qu’il viendrait, ce serait certainement douloureux mais ce serait également une étape nécessaire dans le processus de deuil. Cette fois, il n’y aurait pas de retour en arrière comme la fois où elle avait été amnésique. Il devrait ranger la pièce, défaire le lit, vider son armoire, son étagère, donner ses affaires. S’il devait commencer une nouvelle étape de sa vie avec Sam, il devait la mettre en confiance sur le fait qu’il était avec elle complètement, non pas dans l’attente d’autre chose, du moment où Kaori et lui se retrouveraient. La question se poserait peut-être un jour, certainement même si elle lui demandait auprès de qui il voudrait vivre son éternité et il était incapable de formuler la réponse à voix haute pour le moment. Ce serait trop blessant pour la potentielle nouvelle femme dans sa vie.  

 

- Je dois te laisser partir, Kaori., murmura-t-il, le cœur lourd.  

- Ce n’est pas quelque chose pour laquelle je suis prêt… Je ne suis même pas sûr d’être un jour prêt à le faire d’ailleurs…, ricana-t-il, sentant une boule se former dans sa gorge.  

- Mais je dois te laisser partir. Tu as été, es et resteras la lumière qui guide ma vie. Tu es la raison qui fais que je dois avancer en te laissant t’en aller. Tu m’as aidé à me lever chaque matin depuis que tu es avec moi mais aujourd’hui…  

 

L’émotion le submergeant, il baissa les yeux et fixa ses pieds un moment comme s’il y trouverait le courage de continuer.  

 

- Tu as tout fait pour moi, tu as tout supporté de moi et j’aurais dû accepter bien avant ce qui était. Je te garde au chaud dans mon cœur mais je dois te laisser, Sugar. On se retrouvera un de ces jours. Je ne ferai rien pour abréger ma vie, je ne ferai rien pour te décevoir. Je vais essayer d’appliquer ce que tu m’as ordonné, d’être l’homme que tu as façonné patiemment par ton amour et ta chaleur., énonça-t-il d’une voix fébrile.  

- J’aurais juste aimé avoir le temps de te le dire, Kaori. Je… Je t’aime., balbutia-t-il.  

 

Il sentit la douleur le reprendre et le submerger et ses jambes cédèrent. Il se retrouva assis sur son lit à pleurer la femme qu’il avait aimée comme un fou, qu’il avait rêvé d’étreindre, auprès de laquelle il avait souhaité se réveiller tous les matins. Il pleura la relation qu’ils n’avaient pas eue, cet enfant qu’il aurait voulu d’elle sans même le savoir, les jours et nuits qu’ils auraient dû passer ensemble, cette vieillesse qu’ils auraient peut-être réussi à atteindre ensemble. Les larmes coulèrent un long moment avant de se tarir sur les derniers hoquets de sa respiration hachée, son cœur se serrant douloureusement. Il se sentait vaseux, vidé de toute émotion, de toute énergie. Il devait sortir de là maintenant. Cela ne servait plus à rien de prolonger ce moment. Il lui avait tout dit et ce qu’il n’avait pas dit, elle le savait déjà.  

 

Essuyant ses joues du revers de la main, il se leva, sentant ses jambes trembler, et regarda tout autour de lui avant d’avancer vers la porte. Juste avant de l’ouvrir, il se retourna une dernière fois. Jamais il n’avait mis autant de temps pour quitter un lieu mais ce lieu était quelque part l’une des dernières choses qui le rattachaient à elle…  

 

- Au revoir, Kaori. J’espère que je ne me trompe pas sur ce que tu voulais. Je ne veux plus te faire de mal., murmura-t-il.  

 

Prenant une profonde inspiration pour trouver le courage de sortir et refermer la porte du passé, il tourna la poignée et sortit de là, le cœur lourd. Arrivé sur le seuil de la porte, ses pieds refusèrent toutefois d’avancer et, bien qu’il lui tournait le dos, il était incapable de tirer la porte vers lui pour la refermer.  

 

- Ryo…, entendit-il murmurer non loin.  

 

Il ouvrit les yeux et croisa le regard de Sam. Il aurait pourtant juré qu’elle était profondément endormie il y a quelques minutes encore… Lorsqu’il la vit approcher, il trouva le courage ou la pudeur, il ne savait pas trop, de fermer l’antre de Kaori.  

 

- Tu vas bien ? Tu es livide., s’inquiéta-t-elle, approchant de lui.  

 

Elle posa une main sur sa joue et le força à la regarder dans les yeux. Il vit son regard se brouiller et la sentit l’attirer contre elle. Il se laissa faire. Il avait besoin de ce moment, de cette chaleur. Ce qu’il venait de faire, laisser partir l’amour de sa vie trop tôt disparue, c’était aussi pour elle qu’il l’avait fait et accepter son réconfort, son soutien, c’était accepter aussi les raisons qui l’avaient poussé à l’acte. Il espérait juste qu’il ne l’avait pas fait en vain. Sinon il serait fort capable de revenir en arrière.  

 

- Qu’est-ce que tu fais encore debout à trois heures du matin, Ryo ?, lui demanda-t-elle.  

 

Trois heures du matin… Combien de temps avait-il donc passé dans cette chambre ?  

 

- On dirait que tu ne t’es même pas couché., fit-elle remarquer d’une voix inquiète au bout d’un moment.  

 

La caresse de sa main à la base de son cou l’avait apaisé et la chaleur de son corps contre le sien avait éloigné le froid qui l’avait gagné en sortant de la chambre. Ce moment passé dans ses bras lui avait permis de reprendre son souffle, le dessus sur ses émotions. Il s’écarta alors de Sam et l’observa intensément.  

 

- J’ai tourné la page., lui apprit-il dans un chuchotement.  

 

Il ne savait même pas pourquoi il parlait si bas. Craignait-il d’affronter la réalité, de fâcher un fantôme, d’être entendu ? Il n’en avait aucune idée.  

 

- Oh…, souffla-t-elle, surprise.  

 

Elle comprenait sa douleur mais ne savait pas quoi répondre. « C’est bien » lui semblait déplacé, « c’est douloureux » ou « courage » donnaient l’impression qu’il avait fait le mauvais choix… Elle ne savait pas quoi dire alors elle se tut et acquiesça simplement, posant une main sur son épaule et la pressant en signe de soutien.  

 

- Je… Je l’ai fait pour toi, Sam., lui expliqua-t-il.  

- Pour moi ?, murmura-t-elle, abasourdie.  

- Oui. Il faut qu’on parle., lui dit-il.  

 

Sans attendre son accord, il se dégagea, lui prit la main et l’emmena dans le salon, la faisant asseoir juste à côté de lui. Ryo resta silencieux un moment avant de se lancer. Il était nerveux, n’était pas sûr non plus que c’était vraiment le bon moment mais il devait profiter de sa lancée pour le faire. Il avait fait le plus dur en laissant partir Kaori. Maintenant, il devait convaincre Sam pour ne pas avoir fait ce douloureux chemin en vain.  

 

- Je ne veux pas que tu quittes ma vie, Sam. Je ne sais pas si nous ne pouvons être qu’amis ou plus mais je ne veux pas que tu t’en ailles., commença-t-il.  

- Tu es encore fou de ta femme, Ryo., murmura-t-elle, le cœur lourd.  

- Je ne vais pas te mentir et te dire le contraire. Oui, je l’aime. Ca a été mon premier et seul amour jusqu’à présent. Elle a fait beaucoup pour moi… mais elle n’est plus là., avoua-t-il, tentant de maîtriser sa voix qui s’enrouait.  

- Mais toi oui et… je ressens quelque chose pour toi. Je veux juste une chance de savoir ce que ça pourrait donner., lui dit-il.  

 

Il avait toujours cru que parler serait beaucoup plus difficile que cela. Il aurait dû vaincre ses peurs et le faire avec Kaori bien plus tôt ou peut-être… peut-être qu’il n’en aurait pas été capable car le moment n’était pas venu. Peut-être qu’il lui avait fallu toutes ces épreuves pour pouvoir grandir suffisamment.  

 

- Ryo, je te l’ai déjà dit. Je ne peux pas, pas tant que je n’aurais pas retrouvé la mémoire., lui opposa-t-elle, baissant les yeux.  

 

Il posa un doigt sous son menton et releva son visage.  

 

- Et si tu ne la retrouvais jamais ? Tu passeras toute ta vie à attendre que ça revienne ? Tu passeras à côté de toute ta vie ?, lui demanda-t-il.  

- Je ne veux pas te faire souffrir., lui répéta-t-elle.  

- Avec un corps comme le tien, tu n’as pas pu avoir dix enfants, Sam. Et pourquoi tu n’aurais que Layla avec toi et pas les autres ? Le plus probable, c’est que tu es mère célibataire ou que tu fuyais un conjoint dont tu ne voulais plus, sinon pourquoi avoir une voiture volée ?, lui expliqua-t-il.  

 

Elle détourna les yeux, se mordant la lèvre, en proie visiblement au doute.  

 

- Tu n’en sais rien., murmura-t-elle.  

- Ce que je sais, c’est le sacrifice que tu devras peut-être faire si les choses deviennent sérieuses entre nous. Mon monde est dur et sombre. Si vous restez, Layla et toi, vous courrez des risques et pas seulement d’être blessées. Je sais que ce que je te propose est complètement dingue pour l’avoir brandi comme étendard pour ne pas céder pendant longtemps mais j’ai fini par comprendre que la vie est trop courte pour ne pas être vécue., lui dit-il.  

- Je… ce que tu me demandes… ça implique tellement de choses… Je ne sais pas… Ca va trop vite., répondit-elle, se levant et s’éloignant de lui.  

 

Sa vie si parfaitement tracée et maîtrisée prenait une tournure incontrôlée. Tous ses projets s’effaçaient au profit d’un autre beaucoup plus risqué pas seulement en terme de danger physique. Quelque part, c’était cette partie qui lui faisait le moins peur, pensa-t-elle ironiquement. Elle était folle.  

 

- Ecoute, je ne te demande pas une réponse immédiate. Si tu gagnes le concours, tu seras à Kyoto, à trois heures d’ici. On aura du temps., lui proposa-t-il.  

- Si je perds, je rentre en Californie., lui rappela-t-elle.  

- Reste…  

 

Elle tressaillit autant par le ton implorant de sa voix contre son oreille que par le contact de ses mains sur ses épaules. Elle sentit ses doigts glisser sur ses clavicules et se retrouva prise dans l’étau de ses bras, plaquée contre son corps, ses lèvres touchant sa tempe.  

 

- Reste… Donne-nous du temps pour nous découvrir., répéta-t-il.  

- S’il te plaît…, insista-t-il, sentant la nervosité monter.  

 

Il ne pouvait pas avoir fait tout cela, traversé toute cette épreuve pour rien. Il ne voulait pas se retrouver à nouveau seul alors qu’il sentait qu’elle lui était indispensable comme Kaori l’avait été.  

 

- S’il te plaît…, murmura-t-il, la retournant et prenant son visage entre ses mains.  

- Arrête… Je t’en prie… Ne me fais pas cela, Ryo…, l’implora-t-elle d’une voix mourante.  

 

Elle avait pris des décisions pour son avenir et surtout celui de Layla, des décisions mûrement réfléchies et soupesées. Elle s’était contenue, avait muselé ses sentiments et fait une croix sur toute possibilité d’avenir entre lui et elle pour lui et pour Layla au prix de beaucoup de douleur, acceptant d’être juste l’amie, celle qui ferait son possible pour l’aider à sortir de son emprisonnement avant de partir. Elle avait compté sur son côté raisonnable pour pouvoir le faire mais voilà qu’il se jouait d’elle, qu’il la trahissait quelque part en lui demandant de changer ses plans, de sortir de sa réserve, de se mettre à nu.  

 

- Reste…, murmura-t-il.  

 

Il se pencha et posa les lèvres sur les siennes. N’étant pas prêt, il n’irait pas plus loin, il le savait, mais il voulait, avait besoin même, de lui prouver qu’il était sérieux, qu’il tenait à elle. Il ne chercha pas à rendre ce baiser passionné ou fougueux. Il ne voulait pas enflammer les choses, juste lui montrer ce qu’il ressentait, de la tendresse, de l’affection, la naissance d’un sentiment amoureux, le retour à la vie… Et il se sentait revivre depuis qu’elle était là.  

 

- Je ne sais pas… Je ne sais plus…, gémit-elle, posant la tête contre son épaule après qu’ils se furent séparés.  

- Tout va si vite., ajouta-t-elle.  

- Sam… je… Promets-moi juste d’y réfléchir alors., soupira-t-il.  

 

Il pouvait comprendre. Il y a quelques heures, il n’était pas encore décidé à tourner la page. Il hésitait, tergiversait, culpabilisait à chaque geste. Maintenant, il savait qu’il prenait la bonne décision… ou peut-être qu’il voulait s’en persuader mais il savait que la vie était courte. Il pouvait cependant comprendre que, pour elle, ce n’était pas pareil, qu’elle avait une fille et une vie à tracer. Elle ne connaissait pas les urgences d’une vie passée sous la menace permanente, sans savoir si le lendemain, elle serait toujours en vie. Elle ne prendrait pas une décision si rapide.  

 

- Réfléchis-y. C’est tout ce que je te demande, Sam., lui redemanda-t-il.  

 

Elle l’observa un instant et acquiesça. Elle aurait dû dire non, s’en tenir à sa décision de partir sans un regard en arrière… ou presque mais, face à son regard empli d’espoir, elle n’avait pas pu résister.  

 

- Merci., souffla-t-il, effleurant ses lèvres à nouveau.  

- Tu… Tu veux peut-être te coucher. Tu as ton service tout à l’heure., murmura-t-il.  

 

Il avait senti son malaise et lui offrait une porte de sortie. Il connaissait ses sentiments et n’en doutait pas mais il venait de déstabiliser ses projets d’avenir, de contrevenir en toute connaissance de cause à la ligne de conduite qu’elle avait fixée et il comprenait.  

 

- Oui, bonne nuit, Ryo., souffla-t-elle avant de s’en aller.  

 

Elle grimpa les escaliers et s’enferma dans sa chambre. Elle ne savait plus où elle en était. Devait-elle suivre son cœur ou sa raison ? Elle devait admettre qu’il avait raison, qu’elle devait vivre sa vie parce qu’il était effectivement possible qu’elle soit à jamais amnésique. Par dessus tout, il venait de faire quelque chose d’important et il l’avait fait pour elle. Elle sentit les larmes lui monter aux yeux et se glissa dans son lit, pleurant silencieusement. La douleur de ce qu’il venait de traverser, l’espoir qui s’ouvrait à elle, la peur de prendre la mauvaise décision, la fatigue accumulée, la tension, tout cela se mélangeait et, pour ne rien arranger, la question ultime : comment se construire un avenir solide sans un passé sur lequel s’appuyer ? 

 


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